éditoriaux

La possibilité du possible

La possibilité du possible

Nous sommes tellement habitués à distinguer le possible et le réel, l’existence et l’essence, que nous ne comprenons plus que ces distinctions sont le résultat d’un long et difficile processus qui a conduit à scinder l’être, la "chose", de la pensée, en deux fragments tout à la fois opposés et étroitement imbriqués. Dans son nouvel essai, qui paraît aux éditions du Seuil sous le titre L'Irréalisable dans la traduction de Martin Rueff, Giorgio Agamben défend l'hypothèse que "la machine ontologico-politique de l’Occident se fonde précisément sur cette scission de la "chose", sans laquelle ni la science ni la politique ne seraient possibles. Si nous n’étions pas capables de cesser de nous concentrer exclusivement sur ce qui existe immédiatement (comme semblent le faire les animaux), pour penser et définir l’essence, la science et la technologie occidentales n’auraient certainement pas connu le développement qui les caractérise. Et si la dimension de la possibilité venait à disparaître entièrement, on ne saurait plus faire ni plans ni projets". La puissance incomparable de l’Occident trouve dans cette machine ontologique un de ses présupposés essentiels. Fabula vous invite à parcourir la Table des matières et à lire quelques pages…

Paraît dans le même temps un autre essai du philosophe italien L'esprit et la lettre, traduit aux éditions Rivages par Léo Texier. La distinction entre sens littéral et sens spirituel, entre figure et accomplissement, ne s'applique pas seulement à l'Écriture, mais aussi à la vie. Il est ainsi possible de considérer la vie comme une écriture dont les faits et les événements en lesquels elle semble se résoudre constituent le sens littéral, mais dont le sens véritable n'apparaît qu'à celui qui sait les percevoir comme les figures d'un sens spirituel qu'il convient de déchiffrer.

Il faudra patienter jusqu'à la fin du mois de janvier pour découvrir la réflexion d'Agamben sur le langage, dans un essai à paraître aux éditions Nous sous le titre La voix humaine, traduit et présenté par Martin Rueff encore.

Chambres closes

Chambres closes

Si le motif de la chambre close s’est imposé peu à peu comme le fondement d’un sous-genre à part entière du roman policier de détection, il se présente, rétrospectivement, comme consubstantiel au genre lui-même, comme une version superlative de l’énigme soumise au détective – et, au-delà, au lecteur ou à la lectrice. Pour ce colloque organisé par Maxime Decout et Caroline Julliot célébrant le premier lustre d’investigations de l’Intercripol, qui s’est tenu à l’Université Jean Moulin-Lyon 3 les 21 et 22 Novembre 2024 avec le soutien de l’Université Paris-Sorbonne et de l’IUF, les intervenantes sont parti.es du postulat que la chambre close présente en réalité bien plus d’ouvertures qu’on ne pourrait le croire et avons fait le pari, non seulement d’en explorer tous les recoins, mais aussi de l’approcher de l’extérieur, jusqu’à sortir de l’espace du roman policier pour nous aventurer du côté de l’imaginaire gothique, du conte de fées, du théâtre grec, de la science-fiction, etc… afin d’en multiplier les clés de compréhension – et d’en libérer les potentialités herméneutiques et réflexives. Car étudier la chambre close, c’est, in fine, étudier comment, dans le roman policier comme dans la recherche, l’esprit tente de sonder un mystère qui lui échappe, et dont, par la force de ses petites cellules grises, il parviendra à briser l’hermétisme. Fabula en accueille les actes, réunis par Caroline Julliot et Maxime Decout.

L'intrus

L'intrus

Marivaux au cœur

Marivaux au cœur

Née de parents inconnus, Marianne, à quinze ans, est jetée dans Paris et livrée à l’ordre inégalitaire d’Ancien Régime. Pour qui "n’a rien" et "n’est rien", comment prétendre à la reconnaissance sociale et à l’amour des privilégiés de naissance ? Avec La Vie de Marianne, Marivaux dessinait une conception moderne de l’identité, portée par la lucidité réflexive du roman-mémoires et le pari audacieux d’une alliance féminine contre toutes les violences, en même temps qu'il mettait au point la formule de la fiction à la première personne. Érik Leborgne et Florence Lotterie en donnent une nouvelle édition pour la GF-Flammarion, éclairée par un complet appareil critique. Fabula vous invite à feuilleter le volume…

En attendant le sommaire de la revue Études littéraires à paraître en 2026 sur "L'Histoire de Tervire", qui forme la dernière partie du roman, mais aussi l'ouvrage longuement mûri de Jean Dagen à paraître aux éditions Georg, on se plongera dans le nouvel essai signé par Nicolas Fréry, Marivaux penseur. Les raisons du cœur (CNRS éd.), qui s'attache à la conception que le romancier, dramaturge et "journaliste" se faisait de la philosophie : "celle de l’esprit fin qui décompose les fausses évidences au profit d’une compréhension renouvelée de la vie intérieure" — une pensée singulière, qui refuse le dogmatisme, se déploie à partir de ressources proprement littéraires : dispositifs expérimentaux, ouverture des possibles fictionnels, inventivité stylistique. Fabila vous propose de lire l'introduction et parcourir la Table des matières de l'ouvrage…

Le moment autothéorique

Le moment autothéorique

L'art est une quête

L'art est une quête

Tous les discours de réception

Tous les discours de réception

Flammarion donne une nouvelle édition du recueil de Tous les discours de réception des prix Nobel de littérature depuis 1901, compilé par Errera Egal. Autant de célébrations et méditations uniques autour de l’acte d'écrire. Une occasion de découvrir aussi douze nouveaux discours, avec des traductions inédites de Bob Dylan, Han Kang, Jon Fosse... Il y manque celui que László Krasznahorkai doit prononcer à Oslo le 10 décembre prochain.

(Illustr. Han Kang devant l'Académie suédoise, 2024)

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Voir aussi les éditos de la rubrique Web littéraire…

Ou feuilleter l'album de l'automne…

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