éditoriaux

Le fond de l'air est sauvage

Le fond de l'air est sauvage

Il y a tout juste un an se tenait le colloque inaugural de l’Observatoire des Littératures Sauvages (OLSa), Les écrits sauvages de la contestation, organisé par Denis Saint-Amand les 2 et 3 juin 2022, au centre culturel le Delta de Namur. Les crises sociales et politiques sont souvent accompagnées d’écrits spontanés et éphémères accueillis sur des supports de fortune : collages contre les féminicides, revues artisanales, tags, banderoles du confinement et pancartes brandies lors des marches pour le climat reposent de la sorte sur une dynamique collective et anonyme, font rayonner des revendications et nous interpellent. Comment ces écrits émergent-ils ? Quelles sont leurs formes, leurs logiques et leurs enjeux ? Quelles argumentations et quels récits esquissent-ils ? Comment tirent-ils parti du support qui les accueille ? Comment un slogan devient-il viral ? Comment ces écritures sauvages survivent-elles ? C’est à ces écrits sauvages contestataires qu’est consacré le premier sommaire de la nouvelle collection des Colloques en ligne de Fabula : "Le fond de l’air". Emmenée par une équipe également nouvelle, elle est destinée à accueillir des actes de colloques qui envisagent la littérature dans sa dimension politique et ses effets sociaux.

Le théâtre selon Grotowski

Le théâtre selon Grotowski

Les éditions de l'Arche s'engagent dans la publication des écrits complets d'un homme de théâtre majeur de la deuxième moitié du XXe siècle : Jerzy Grotowski. Le premier volume est consacré à la période des années 1954 à 1969 ; il rassemble articles, essais, reportages, transcriptions de conférences et d’entretiens – pour l’essentiel inédits en français –, et propose une nouvelle traduction des textes de Grotowski qui composent le livre Vers un théâtre pauvre. De ses écrits politiques de jeunesse, en faveur d’une réforme du socialisme en Pologne, en passant par la fondation, à l’âge de vingt-six ans, du Théâtre Laboratoire à Opole, et ensuite à Wrocław, jusqu’à sa dernière mise en scène en 1969, Apocalypsis cum figuris, ces textes témoignent d’une pensée en perpétuel mouvement – une pensée toujours liée à la pratique, la création et la recherche sur l’art de l’acteur et de la mise en scène. Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage sur le site de l'éditeur… Dans le même temps, l’Institut mémoires de l’édition contemporaine (IMEC) annonce la mise en ligne d’une grande partie du Fonds Jerzy Grotowski, constitué de documents (dont une partie en polonais) qui étaient conservés au Workcenter of Jerzy Grotowski and Thomas Richards à Pontedera (Italie).

La vie entière de René Guy Cadou

La vie entière de René Guy Cadou

René Guy Cadou a 100 ans. À cette occasion, Seghers réédite deux de ses plus beaux livres, et notamment l’imposant volume de Poésie la vie entière rassembla,t les grands recueils de René Guy Cadou, dont La Vie rêvée, Pleine Poitrine, Le Cœur définitif, Hélène ou le règne végétal et Les Amis d’enfance, publié pour la première fois chez Seghers en 1975. Tous font jaillir une poésie proche de la nature et nourrie d’un lyrisme singulier, reflétant les émotions suscitées par les manifestations de la vie quotidienne. Lumineuse, son œuvre reste marquée par la mort, celle qui rôde et fauche les résistants sous l’Occupation, celle qui menace un bonheur fragile et viendra le cueillir dans sa trente et unième année. Hélène ou le règne végétal fait également l'objet d'une réédition séparée, l’un des plus beaux chants d’amour de la poésie française. Rappelons la parution l'an passé d'une quarantaine de poèmes inédits recueillis par Bruno Doucey sous le titre Et le ciel m’est rendu ; tous disent l’amour, la tombée du soir, la fragile beauté de la vie, la présence souveraine de la nature, la force du rapport au monde, "la semence inespérée de l’avenir". Et signalons au passage le cahier consacré au poète par la revue Phoenix en 2021.

(Illustr.: R.-G. Cadou, Autoportrait, 1948)

Besoin de Renaissance ?

Besoin de Renaissance ?

Au bord des images

Au bord des images

À la fois limite nécessaire et accessoire superflu, le cadre entretient deux rapports à l’image apparemment inconciliables. Dans Au bord des images. Pour une philosophie du cadre (Mimèsis), Natacha Pfeiffer s'attache à ce paradoxe et explore les tensions propres aux frontières des images. Elle invite à repenser celles-ci en tenant ensemble l’ornement et la condition de possibilité, l’opération et le produit, le quadro et la cornice. Débordant les paramètres du dispositif pictural classique et opérant un décalage de la peinture au cinéma muet hollywoodien, cette réflexion réexamine les concepts d’origine et de répétition – deux concepts que le cadre est précisément censé incarner – afin de réinterroger l’image et sa création.

Christian Michel fait paraître dans le même temps Ceci n'est pas un titre (Mare & Martin), où il étudie la naissance et le développement du titre, grâce notamment aux inscriptions qui figurent sur les estampes et la progressive apparition des cartels. Il montre comment l’association de mots explicatifs aux tableaux a permis un renouvellement des sujets représentés. Il s'intéresse notamment l’usage qu’en font les inventeurs de l’abstraction et les proches d’Apollinaire: De Chirico, Picabia et Duchamp.

L’acte de lecture entre réception et création

L’acte de lecture entre réception et création

Élève de Husserl, Roman Ingarden (1893-1970) est considéré comme l’un des fondateurs de l’esthétique phénoménologique. Son œuvre se confond avec l'ambition de penser la possibilité d’une théorie unifiée des arts. Et il n'est pas indifférent que sa démarche se soit inaugurée sur le terrain littéraire avec la publication de L’Œuvre d’art littéraire en 1931. Ce projet, fondamentalement ontologique, a trouvé son prolongement phénoménologique en 1937 avec La Connaissance de l’œuvre d’art littéraire qui, pour la première fois, donne une place centrale au lecteur et au spectateur, autrement dit, inaugure ce que l’on appelle désormais l’esthétique de la réception. En attendant la publication imminente de la traduction de ce texte majeur en français par les soins de Patricia Limido aux P.U. de Rennes, un colloque se tiendra à Paris les 8 & 9 juin prochain sous le titre "Roman Ingarden : l’acte de lecture entre réception et création", pour favoriser la rencontre entre les points de vue philosophique et littéraire autour du statut des actes de lecture, d’une part, et des différentes dimensions de la création et de la réception esthétique, d’autre part.

Saluons aussi la récente édition par P. Limido de l'essai Ce que nous ne savons pas des valeurs (Mimèsis), l'un des derniers grands textes de Roman Ingarden, écrits dans les années soixante lorsqu'il se consacre à l'élaboration d'une ontologie des œuvres d'art et des valeurs tant artistiques qu'esthétiques. Le statut des valeurs morales y occupe également une place prédominante car il engage la réalité humaine dans ses dimensions culturelles, sociales et politiques.

Et rappelons la présentation donnée par Jean-Baptiste Mathieu dans l'Atelier de théorie littéraire de l'essai L'Œuvre d'art littéraire :  "Un néant – et tout de même un monde à part".

Tout doit disparaître

Tout doit disparaître

Depuis janvier 2022, les lectrices et lecteurs abonnés à La Disparition, "nouveau média épistolaire", reçoivent deux fois par mois dans leur vraie boîte aux lettres, sous enveloppe kraft dûment timbrée, un grand reportage, un récit, une enquête écrits par une ou un journaliste, une écrivaine, un écrivain, partis sur les traces d’une disparition, d’un souvenir évanoui, d’un monde finissant et de ce qu’il en reste, pour ouvrir les voies d’autres possibles écologiques, sociaux, économiques, techniques. Neuf de ces "Lettres de la Disparition" paraissent aujourd'hui aux éditions du Seuil dans un recueil intitulé Tout doit disparaître, accompagnées d'une lettre inédite de l'auteur de La plus secrète mémoire des hommes et Prix Goncourt 2021, Mohamed Mbougar Sarr. Fabula vous invite à feuilleter l'ouvrage…

Lire aussi les éditoriaux de la rubrique Questions de société…

Ainsi que ceux de la rubrique Web littéraire…

Suite