éditoriaux

La littérature avant la lettre : l’album pour enfants devant la théorie littéraire

La littérature avant la lettre : l’album pour enfants devant la théorie littéraire

Pour conjurer nos 25 ans d'existence, les deux revues de Fabula proposent d'aller jeter un coup d'œil du côté des albums pour enfants qui placent les plus jeunes en position de lecteurs et lectrices. Dans Fabula-LhT, les chercheurs et chercheuses réunis par Cécile Boulaire et Dominique Perrin confrontent les outils et questionnements de la théorie littéraire aux spécificités de l’album pour enfants, et réciproquement. Quels fonctionnements pratiques et poétiques caractérisent l’objet nommé « album » en français, « Bilderbuch » en allemand et « picturebook » en anglais ? Que peut-on restituer des conditions historiques de son avènement ? Dans quelle mesure peut-on penser la littérature en albums et l’activité de très jeunes lecteurs avec les outils de la théorie générale ? Pour Acta fabula, Cécile Boulaire et Dominique Perrin offrent un dossier mettant en lumière la complémentarité de la recherche anglophone et francophone pour penser l'album. C'est finalement tout un champ qui s'ouvre à vous, et qui vous mènera à réfléchir sur la littérature, sur l'enfance et sur le politique.

Démografictions

Démografictions

Soleil vert : New York confrontée à la surpopulation. La Servante écarlate : la dégradation de l'environnement réduisant dramatiquement la fertilité des femmes. Eternity Express : une solution pour le moins radicale pour gérer le vieillissement démographique. Trois récits parmi d'autres dont la population est en quelque sorte l'héroïne. Nombre d'œuvres littéraires, bien au-delà de la science-fiction, ont abordé des questions démographiques telles que la croissance de la population mondiale, l'urbanisation, la dénatalité, le vieillissement, les migrations... en poussant leurs évolutions à l'extrême pour en imaginer de redoutables conséquences. Les mondes dystopiques et les "enfers démographiques" que leurs auteurs projettent sont-ils dénués de réalisme ? Dans La démographie de l'extrême. Quand la fiction anticipe l'avenir des sociétés (La Découverte), Jacques Véron, Jean-Marc Rohrbasser s'essaient à prolonger des évolutions, comme peuvent le faire des démographes et des écrivains, avec l'hypothèse que demain sera à aujourd'hui ce qu'aujourd'hui est à hier : qu'adviendrait-il de sociétés où les couples renonceraient durablement à avoir des enfants ? Que deviendraient les relations entre les générations si le vieillissement des populations se poursuivait indéfiniment ? Comment agirions-nous confrontés à une accélération des migrations climatiques ou face à une nouvelle pandémie ? Fabula donne à lire un extrait de l'ouvrage… et vous invite à vous plonger dans le sommaire directement accessible en ligne via Cairn…

La lettre tue

La lettre tue

L'école des femmes

L'école des femmes

Karin Ueltschi-Courchinoux se penchait il y a quelques mois sur les Savoir des hommes, sagesse des femmes. Savants ou magiciens, matrones ou sorcières (Imago), un essai sur l’articulation entre culture savante et "populaire" au Moyen Âge. Elle se demande aujourd'hui comment Vivre en Bourgeoise au Moyen Âge. Les leçons du Mesnagier de Paris (Les Belles Lettres), en ouvrant pour nous (et après Molière) un manuel d’instruction ménagère, véritable bible domestique, nous transmet de précieuses informations sur cette période d’essor urbain : un Bourgeois vieillissant enseigne à sa jeune femme de quinze ans les devoirs de la parfaite épouse. Outre les conseils de pratique religieuse attendus, on y trouve des développements sur la gestion de la maison et des domestiques, le jardinage, les chevaux et un traité d’autourserie, ainsi qu’une foule de recettes de cuisine et autres savoureuses astuces comme chasser les puces des fourrures… Mais c'est l’apprentissage des bienséances sociales est au cœur de l’enseignement : elles semblent même l’emporter sur les impératifs spirituels, infléchissement remarquable dans un univers qui se laïcise, où culture populaire et savoir-faire technique se frottent aux traditions savantes et aux lettrés, et où les vertus humaines doivent trouver à s’épanouir au plus épais du quotidien, la bonne réputation faisant figure de bien absolu. Fabula donne à lire un extrait de l'ouvrage… et vous propose d'écouter sa présentation audio…

Être éditeur

Être éditeur

Parce qu’il a pour fonction principale d’amener un texte vers un lectorat, l’éditeur se tient dans un constant mais instable équilibre entre politique de l’offre et politique de la demande, entre audace et opportunisme, entre la création et son commerce. Dans quelle histoire s’inscrit l’activité de l’éditeur ? Quels types de discours tient-il sur son métier ? Comment cette figure nourrit-elle l’imaginaire social ? Autant de questions qui trouvent des réponses dans le nouvel essai d'Anthony Glinoer, Être éditeur. Histoire, discours, imaginaires (L'Échappée), qui mobilise un vaste corpus de mémoires, de romans, d’ouvrages savants, de films et d’entretiens pour faire émerger, l’être éditeur, tant dans ses pratiques que dans ses discours et dans les représentations qui les entourent, entre diabolisation et célébration.

Paraît dans le même temps le récit de Sandro Ferri, L'éditeur présomptueux (Gallimard). Octobre 1979, Sandro Ferri et Sandra Ozzola montent un par un, dans leur studio du quartier romain de Montesacro, les paquets contenant les deux premiers titres publiés par leur maison d’édition E/O. Les années passent et l’entreprise se développe, non sans grandes difficultés, jusqu’à devenir l’une des plus lucratives du marché italien après les succès de Muriel Barbery, Elena Ferrante et bien d’autres. Au récit des temps forts de cette maison indépendante, qui a évolué en véritable success story, se mêle une réflexion personnelle sur le métier d’éditeur. Fabula vous propose de découvrir un extrait…

Ce n'est pas ou plus le même métier (car les imprimeurs ont longtemps été éditeurs sous le nom de… "libraires") : Olivier Deloignon publie Une histoire de l'imprimerie, et de la chose imprimée (La Fabrique). Antithèse de l’artillerie pour Rabelais, l'imprimerie a été de longue date accusée de pervertir les âmes et de propager les idées séditieuses… Et, entre les "gens du livre" qui maîtrisent la technique et les lecteurs toujours plus nombreux, se dressent les pouvoirs religieux et politiques, soucieux de ce qui s’imprime et surtout de ce qu’ils ne souhaitent pas voir imprimé. Fabula vous invite à parcourir la table des matières de l'ouvrage et à lire les premières pages…

Harems et sultans

Harems et sultans

Sitôt prononcé le mot "harem", surgissent des images de femmes lascives, cloîtrées dans la pénombre en attente du bon vouloir du prince. C’est aussi l’expression exemplaire du gouvernement de sultans réputés exercer leur pouvoir sous l’emprise de pulsions quasi pathologiques. Ces poncifs, que l’on pourrait croire éculés, entrent aujourd’hui encore en résonance avec la conception d’un monde islamique figé et politiquement inepte, fatalement voué au despotisme et à l’oppression des femmes. Dans Harems et Sultans. Genre et despotisme au Maroc et ailluers, XIVe-XXe s. (Anacharsis), Jocelyne Dakhlia entreprend une archéologie de ces motifs à partir de l’histoire du Maroc, de la fin du Moyen Âge au XXe siècle. Il s’agit ici de mobiliser à nouveaux frais l’ensemble de la documentation disponible, tant picturale que textuelle, afin de procéder à une histoire fine du genre et du politique en Islam, de remettre en mouvement des logiques historiques là où l’historiographie se faisait plus sommairement culturaliste. Fabula donne à lire un extrait de l'ouvrage…

(Illustr. : Dance au harem de Giulio Rosati, fin XIXe s.)

Vigny politique

Vigny politique

Alfred de Vigny est au programme de l'Agrégation de lettres 2025 pour ses Poèmes antiques et modernes et ses Poèmes philosophiques, réunis par Jacques-Philippe Saint-Gérand dans un volume d'Œuvres poétiques (GF-Flammarion). Esther Pinona a supervisé un recueil de Lectures des poésies d’Alfred de Vigny (P.U. Rennes), qui invite à redécouvrir dans leur originalité ces deux recueils d'une poésie bruissante et mouvante. Fabula vous invite à lire l'introduction du volume… 

Sophie Vanden Abeele-Marchal fait paraître ces jours-ci Les jeux de la haine et du hasard. Vigny et le politique (Sorbonne Université Presses), qui rappelle que le poète il a voulu se faire, aux côtés de Hugo, l’un de ces " prophètes" chargés de veiller à la réforme de la société sortie des décombres de la Révolution. Si l’on ne peut faire de lui un homme politique, son œuvre, conçue comme une œuvre totalisante, a été consacrée à l’analyse du fait politique. Attentif toute sa vie aux interrogations contemporaines, grand lecteur de la presse, de plus en plus déçu par les jeux du système parlementaire, Vigny a suivi les méandres dans lesquels démocratie et liberté ont été plongées, de la Restauration au Second Empire, en passant par la trop bourgeoise monarchie de Juillet. Jamais théorique, toujours réfractaire aux systèmes dogmatiques, sa pensée, profondément libérale, s’est développée à travers des formulations poétiques qui ont déconcerté une critique incapable d’en saisir la continuité idéologique.

Paraît dans le même temps et chez le même éditeur, l'essai de Amélie Calderone, Des spectacles dans un fauteuil. Lire le théâtre romantique dans la presse, qui rappelle que le "théâtre dans un fauteuil" n'est pas l'apanage du seul Musset. Entre 1829 et 1851, en plein bouleversement de la sphère médiatique et du monde dramatique, la presse devient pour les dramaturges une voie d’accès au public, à côté de la scène, à défaut d’un théâtre pour les accueillir. Pièces à lire intégralement en feuilletons ou simples extraits, saynètes, articles dialogués, c’est un pan entier de l’écriture dramatique romantique qui a été "médiatique" et que le travail d’Amélie Calderone permet de redécouvrir. 

Saluons encore la réédition du Théâtre complet de Vignyé, édités par Sylvain Ledda et Lise Sabourin (Classiques Garnier).

Lire aussi les éditos de la rubrique Questions de société…

Et les éditos de la rubrique Web littéraire…

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