éditoriaux

Un couple littéraire

Un couple littéraire

Que reste-t-il encore à dire sur le couple formé par Sartre et Beauvoir ? Après les mémoires de Beauvoir, après les nombreuses biographies qui leur ont été consacrées, on pourrait douter qu’un propos neuve puisse émerger. C’est pourtant l’ambition du récent essai d'Esther Demoulin, Beauvoir et Sartre. Écrire côte à côte, qui fait l'hypothèse qu'il existe une spécificité du couple d’écrivains qui distingue cette relation d’une amitié ou d’une fratrie littéraire. Les habitudes communes du couple Sartre/Beauvoir ont entraîné des relectures assidues, la constitution d’une bibliothèque partagée, la mise en mots d’expériences existentielles vécues à deux. Et pourtant, Beauvoir et Sartre n’ont jamais souhaité écrire de livres à quatre mains et ont toujours insisté dans leurs interviews sur la singularité de leurs œuvres respectives. Ce sont ces tensions que l’ouvrage d’Esther Demoulin explore, afin de proposer une lecture inédite de l’un des plus célèbres couples d’écrivains du XXe siècle. Fabula vous invite à en lire l'introduction…

Esther Demoulin et Claire Ducournau viennent de lancer un appel à communications pour un colloque intitulé "Faire couple en littérature, de 1880 à nos jours. Sociohistoire, pratiques et représentations d’une institution littéraire". L'initiative entend pallier le manque de travaux sociohistoriques, théoriques et méthodologiques consacré à la notion de couple littéraire, ici entendue comme une institution sociale caractérisée par une socialisation conjugale aux implications proprement littéraires.

Nouvelles recherches sur la littérature

Nouvelles recherches sur la littérature

À l'automne 2017, Antoine Compagnon fêtait sa dixième année au Collège de France en invitant dix chercheurs à présenter leurs travaux publiés durant la même décennie. Les actes de cette journée étaient venus former en janvier 2018 un dossier critique d'Acta fabula sous le titre "Dix ans de théorie". Titulaire de la Chaire de littératures comparées au Collège, William Marx fait preuve de la même générosité en donnant régulièrement la parole au sein de son séminaire aux enseignants et chercheurs qui conduisent les "nouvelles recherches sur la littérature". Acta fabula accueille au sein d'un nouveau dossier critique les actes du séminaire tenu au printemps 2023.

Politique de la littérature

Politique de la littérature

Sous le titre Au loin la liberté, Jacques Rancière, que l'on n'attendait pas dans l'aile est de la biblibliothèque, publie un Essai sur Tchekhov nouvelliste. Il y part du constat que les brefs récits de Tchekhov présentent les multiples versions d’un simple scénario : quelque chose pourrait arriver. "Un jour, au hasard, n’importe où, l’ordinaire du temps de la servitude a été troué par une apparition : la liberté est là, au loin, qui fait signe et indique qu’une autre vie est possible, où l’on sache pourquoi l’on vit. La plupart pourtant se dérobent à l’appel. Ils préfèrent que rien n’arrive. Mais Tchekhov, lui, ne renonce pas. Il s’entête à accompagner ses personnages sur ces bords où leur vie pourrait basculer. De récit en récit, il tisse ce temps mû par la machine implacable de la reproduction, mais qui, de pause en pause et d’accroc en accroc, se déchire et se dédouble en temps d’une liberté pressentie qui se refuse au point final mais reste une possibilité en suspens. On peut appeler cela une politique de la littérature". Fabula vous propre de lire un extrait de l'essai et à en parcourir le sommaire…

Rappelons la parution l'an passé des Voyages de l'art, qui montrait que le moment où l’art a été identifié comme une sphère d’expérience autonome et installé dans les musées et les salles de concert est aussi celui où s’est imposée à lui la nécessité de sortir de lui-même, de devenir autre chose que de l’art, mais aussi la réédition des entretiens du philosophe avec Aliocha Wald Lasowski, Penser l'émancipation, et la parution de l'essai de Dork Zabunyan, Jacques Rancière et le monde des images. Rappelons au passage l'article de Carola Borys, "Le corpus infini. À propos de l’esthétique de Jacques Rancière", accueilli dans un récent sommaire des Colloques en ligne de Fabula, Le Corpus, corps à corps, ainsi que le dossier critique qu'Acta fabula avait consacré au philosophe dès 2010 : "S'émanciper. Avec Jacques Rancière".

Un monde à collectionner

Un monde à collectionner

Alexandre Vialatte écrivait en substance qu’aussitôt que l’industrie humaine invente un objet, il se trouve quelqu’un pour en entreprendre la collection. Dans Un monde à collectionner (éd. L'herbe qui tremble), Jan Baetens s’intéresse précisément à la manière dont des écrivains, des bédéistes, des artistes, des cinéastes, des éditeurs ont fait de la collection un objet de représentation, de mise en ordre et de compréhension du monde : tantôt thème narratif (telle BD de Blutch mettant en scène un collectionneur dépassé par l’ampleur de sa collection), tantôt principe organisateur d’une œuvre, ainsi les "tentatives d’épuisement" d’un lieu de Georges Perec ou Thomas Clerc, les inventaires d’une ville (Saint-Marcellin filmé rue après rue par Gérard Courant), d’un pays tout entier (les États-Unis vus par Michel Butor), les collections de citations hôtelières de Nathalie de Saint Phalle ou encore la prolifération d’exemples qui, chez Maurice Grevisse, finissent par dévorer sa célèbre grammaire Le Bon Usage. Et quand inventorier un fragment du monde ne suffit plus, on peut entreprendre de le dupliquer purement et simplement, à l’instar de Kenneth Goldsmith. En s’interrogeant sur le devenir-collection du monde, cet essai suggère que le plaisir de la collection est celui d’inventer des rapports qui sans elle n’existeraient pas ; et que "le vrai collectionneur est celui qui s’autorise le droit à l’erreur, sans craindre les faux pas. Sans ratés de collectionneur, une collection n’est rien d’autre qu’une forme d’héritage".

Terra incognita

Terra incognita

À l'initiative de Frédérique Aït-Touati et Arnaud Esquerre, les éditions Flammarion inaugurent une nouvelle collection baptisée Terra incognita dont chaque titre voudrait inviter à voir le monde autrement. Premier titre paru : La mer intérieureEn quête d’un paysage effacé, signé par Lucie Taïeb, qui nous entraîne au cœur d’une région minière en transition, marquée par près d’un siècle d’extraction. Accompagnée de ses propres fantômes et de la figure tutélaire de Michael Kohlhaas, Lucie Taïeb parcourt une région allemande à l’avenir incertain et décrit des espaces inédits où se côtoient ce qui n’est plus et ce qui n’est pas encore. Elle raconte également la lutte acharnée des habitants pour sauver leurs lieux de vie et leurs environnements. Fabula vous offre de feuilleter l'ouvrage…  Paraîtront en octobre La ville d’après. Détroit, une enquête narrative de Raphaëlle Guidée, et, en janvier prochain, Zones, l’espace à l’ère planétaire de Jeanne Etelain.

Nos nouvelles villes invisibles

Nos nouvelles villes invisibles

L'Oulipo fait paraître aux éditions Nous Les villes indivisibles qui reprennent la structure des Villes invisibles d’Italo Calvino (1972), un recueil de 55 vignettes urbaines divisées en 11 familles, pour mettre à jour ses catégories thématiques, afin d’interroger ce qui constitue la ville contemporaine et future : les ressources, l’aménagement, le travail, la maladie, la diversité, la coexistence délicate du monde naturel avec son homologue virtuel. Les membres de l’Oulipo ont dressé un tableau de 55 sujets actuels de recherche et de débat, en collaboration avec une équipe d’urbanistes et de climatologues sous l’égide du GIEC. Pour chacun, ils ont conçu et développé le portrait d’une ville dont ce sujet sert de moteur narratif. De cette démarche collective résulte une littérature de l’imaginaire documentée, un récit à facettes multiples, entre fiction et travelogue, entre spéculation et rêverie, entre utopie et dystopie. Les villes indivisibles présente une mosaïque de villes imaginaires — pour ne pas dire impossibles. Fabula donne à lire un extrait du recueil…

(Illustr. : projet personnel  de l'architecte Karina Puente : illustrer chaque ville "invisible" des Villes invisible d'Italo Calvino).

Leçon de ténèbres

Leçon de ténèbres
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