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Les USA et l'expérience de la science-fiction

Les USA et l'expérience de la science-fiction

Publié le par Matthieu Vernet (Source : Florian Forestier)

Les USA et l'expérience de la Science-Fiction

Présentation générale d'un projet d'une série de rencontres consacrées à la SF aux USA à la Bibliothèque nationale de France

Argument

Il est fréquent de dire qu'aux Etats-Unis les mythes de l'espace et de la Limite remplacent celui de l'histoire. La spécificité du roman américain est liée à cet inconscient particulier. Les oeuvres qui donnent à la littérature américaine son épine dorsale sont autant de préalables à l'invention d'un monde fantasmé en même temps que colonisé. Elles sont sauvages et minutieuses autant que parodiques. Dans les Histoires extraordinaires d'Edgard Poe, dans Moby Dick, de Melville le regard est modelé par la science positive, hanté par un fantasme d'encyclopédisme, habité du pressentiment de l'irréel, de la folie, de l'abîme. Ces ingrédients, exacerbés plus tard dans l'oeuvre d'un Lovecraft, modèlent l'imaginaire américain.

1. Contre-culture

Pour Norman Spinrad, la Science-Fiction assume depuis les années 60-70 l'héritage du transcendantalisme d'Emerson et de Thoreau et perpétue une forme de contestation sociale et métaphysique. Comme le mouvement Beat, la SF relate l'épopée de solitaires ou de marginaux dans les fissures d'un univers carcéral ; à son tour elle pousse les portes de la perception et se tourne vers de plus anciennes cultures. Parfois contre leur propre gré, des auteurs comme Philip K Dick ou Kurt Vonnegut deviennent, dans les années 70, des étendards de la contre-culture. Dans les années 80, William Gibson, père, avec le roman Neuromancien du genre « cyberpunk » se réclame de Kerouac, Ginsberg, et Burroughs.

La science fiction américaine a également nourri la contre-culture française des mêmes années. La traduction des auteurs phares de la SF américaine fournit ainsi des références que partagent de nombreux acteurs culturels (artistes, auteurs, critiques, etc.) de notre époque en France. Ainsi, Richard Pinhas, pionnier de la musique électronique est aussi un théoricien de la science-fiction. Son essai : Les larmes de Nietzsche. Essai sur Deleuze et la musique a d'ailleurs été préfacé par Maurice Dantec.

2. Post-modernisme

Le roman post-moderne américain n'a pas, comme le Nouveau Roman français, restreint le domaine de la narration, ni d'abord fait porter d'abord à la syntaxe de la phrase le poids de sa suspicion. La méfiance s'est exprimée par une prolifération. Au lieu d'abandonner l'artefact, on l'a multiplié, au lieu de se draper dans le langage, on a mis au carré son pouvoir d'illusion.

La Science-Fiction, de cette façon, occupe une place de choix dans le roman post-moderne américain. Elle dispose à sa guise de ce que la critique littéraire veut périmer : elle écrit ce qu'elle veut, comme elle veut du moment qu'elle est cohérente avec l'univers qu'elle installe, parle sans complexes du chaos, de la désorientation, du vide, de l'horreur… Aussi la métaphysique romanesque américaine en est-elle imbibée : Vonnegut en est un maître, Pynchon en utilise les outils, et pour conduire sa méditation sur le mal, Cormac MacCarthy choisit dans La route le décor d'un désert post-apocalyptique. Dans le roman de SF, « tout est signe » (Sylvie Denis) : l'auteur peut jouer avec les univers qu'il invente comme s'ils étaient des mots, déconstruire la fiction tout en demeurant fiction.

3. La singularité ?

La science-fiction manifeste enfin une propension très ancrée dans l'esprit américain à fantasmer et modeler librement de grands espaces vides. Pour Spinrad, « (…) l'Amérique (…) a depuis sa naissance été pour les peuples de la Terre un rêve d'avenir, une sorte de spéculation science-fictionnesque concrétisée ». La SF exprime quelque chose de l'optimiste technologique américain, de la confiance parfois effrayante dans le progrès. L'imaginaire des principaux acteurs de la Silicon Valley est pour une large part un imaginaire de Science-Fiction.

On s'intéressera particulièrement au transhumanisme que prône Raymond C. Kurzweil, dont les romans de Spinrad et surtout de William Gibson donnent un avant goût, et au thème de la Singularité, ce point de rupture de l'évolution popularisé par Vernor Vinge, consacrant l'avènement d'une intelligence collective en croissance exponentielle (on notera que Larry Page, co-fondateur de Google, est un des plus puissants soutiens de la Singularity University).

Rencontres prévues

Les portes de la perception (30 avril) :

Norman Spinrad, Jacques Baudou. Modérateur : François Angelier

http://www.bnf.fr/fr/evenements_et_culture/auditoriums/f.samedis_savoirs_amerique.html?seance=1223905094458

Les auteurs de SF américains et la contre-culture en France (14 mai) :

Par Gérard Klein, écrivain et éditeur français de science-fiction, et Stanislas Barets, traducteur, écrivain, critique littéraire, spécialiste français de science-fiction (sous réserve).

http://www.bnf.fr/fr/evenements_et_culture/auditoriums/f.samedis_savoirs_amerique.html?seance=1223905194045

Rencontres projetées

SF et Post-Modernisme

Pour tout renseignement, écrire à florian.forestier@bnf.fr ou à françois.nida@bnf.fr