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L'èthos du littéraire. Figurations de l'attitude lettrée dans la littérature contemporaine (1980-2010)

L'èthos du littéraire. Figurations de l'attitude lettrée dans la littérature contemporaine (1980-2010)

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Mathieu Messager et Anne Sennhauser)

 

Sorbonne Nouvelle – Paris 3

Journée des jeunes chercheurs organisée par Mathieu Messager et Anne Sennhauser dans le cadre des activités de l'École Doctorale 120

Le samedi 8 décembre 2012 de 9h à 18h, 17 rue de la Sorbonne, 75005 Paris, salle Max Milner en Sorbonne (escalier C, 2ème étage)

ARGUMENT

 

« Et c’est bien cela l’inter-texte : l’impossibilité de vivre hors du texte infini – que ce texte soit Proust, ou le journal quotidien, ou l’écran télévisuel : le livre fait le sens, le sens fait la vie. »

 

Roland Barthes, Le Plaisir du texte

 

Après plusieurs décennies de mise en doute des pouvoirs de la littérature, celle-ci est-elle en train de redevenir une « alliée substantielle » ? Si depuis les années 1980 le discours déclinologue ne s'essouffle pas1, tout un travail critique et universitaire d'analyse de la production littéraire contemporaine – des premiers panoramas2 aux cartographies plus récentes3 – a placé au centre de ses préoccupations la question de la vitalité et de la diversité de la littérature. Ce mouvement de fond a accompagné l'émergence d'un questionnement fondamental cherchant à réhabiliter l'une des fonctions premières de la littérature : sa capacité à dire notre rapport au monde. En témoignent les récentes interrogations sur ses finalités pragmatiques : Lire, interpréter, actualiser : pourquoi les études littéraires ? ; La littérature, pour quoi faire ? ; Comment écouter la littérature ?4 L'expérience littéraire et la culture livresque se revendiquent comme des valeurs irréductibles alors même que la littérature se trouve concurrencée par d'autres modalités discursives. La « vie du lettré » fascine car l'on se met à redécouvrir les possibilités de refiguration mémorielle et existentielle qu'induit une pratique littéraire du monde5. Autant que la valeur symbolique des lettres, c’est leur place dans la société et l’expérience singulière que permet la littérature qui sont questionnées.

 

Notre journée d'étude s'inscrit dans le sillon de cette actualité théorique. Elle souhaite engager la réflexion depuis la bibliothèque contemporaine afin de voir ce qu'il en est aujourd’hui de l’« attitude lettrée » dans la construction de l’identité narrative. Que nous dit l'écrivain – en son nom propre ou à travers ses masques – de son rapport aux Lettres ? Quelles visions de soi l’être littéraire cherche-t-il à faire passer ? Nombre d’auteurs construisent en effet leurs oeuvres en interaction avec une mémoire de la littérature, soit qu’ils entreprennent une réévaluation des codes et des modèles d’écriture dans une perspective ludique (Jean Echenoz, Éric Chevillard, Pierre Senges,…), soit qu’ils privilégient une exploration de la bibliothèque dans des fictions érudites (Philippe Sollers, Pierre Michon, Patrick Deville…), soit qu’ils souscrivent à l’utopie barthésienne d’une « vie en forme de phrase »6 où la littérature serait une expérience existentielle à part entière (Pascal Quignard, Richard Millet, Jean-Bertrand Pontalis7…). Que ce soit pour exhiber une mémoire intertextuelle fondatrice de l’écriture, ou pour se référer à un absolu littéraire ébranlé – de celui, romantique, qui exalte la puissance des lettres à celui mallarméen, du tout-littérature – l’écriture vient alors s’ancrer dans la figuration, voire l’exhibition, d’une mémoire des lettres et de la langue. C’est ainsi tant une vision de la Littérature « majuscule »8 – valorisée, tournée en dérision ? – qu’une conception de l’acte d’écriture – possibilités de la table rase, mélancolie ou jubilation de la réécriture ? – qui se dessinent alors.

 

PROGRAMME

 

9h - Ouverture de la journée par Mathieu Messager et Anne Sennhauser (Doctorants CERACC, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3)

 

- L’auteur et son double -

 

9h15 - Claire Maussion (Doctorante, Université Paris Ouest – Nanterre La Défense)

« Auteur et critique : deux figures opposées de lettrés dans le roman contemporain ? »

 

9h45 - Charline Pluvinet (Docteur, Université Rennes 2)

« "Voyages dans le scriptorium" : fictions d’auteur et dynamiques spéculaires ».

 

10h15 Discussion

10h45 Pause

 

- Devenirs de l’homme de lettres -

 

11h00 - Charles Coustille (Doctorant, EHESS / Northwestern University)

« Le double jeu de l’écrivain-professeur, nouvelle figure de la littérature contemporaine »

 

11h30 - Entretien avec William Marx (Professeur des Universités, Université Paris Ouest – Nanterre La Défense)

« L’èthos lettré, au-delà ou en-deçà de la littérature ? »

 

12h15 Discussion

12h45 Pause déjeuner

 

- Écrire la bibliothèque -

 

14h30 - Laurent Demanze (Maître de Conférences, ENS de Lyon)

« Le cabinet de Patrick Mauriès : la passion du disparate »

 

15h00 - Claire Colin (Doctorante, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3)

« Portrait de l’écrivain contemporain en "être singulier pluriel" »

 

15h30 Discussion

16h00 Pause

 

- Incarner la bibliothèque -

 

16h15 - Jean-François Frackowiak (Doctorant, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3)

« L’écriture ET la vie : la Bibliothèque incarnée, ou la littérature comme initiation et compagnonnage chez Philippe Le Guillou »

 

16h45 - Noémie Christen (Doctorante, Université Saint-Gal)

« Posture d’un imposteur : la bibliothèque d’Hervé Guibert »

17h15 - Discussion

17h45 - Clôture de la journée

 

Comité scientifique : Bruno Blanckeman et Marc Dambre

Avec le soutien de l'ED 120, de l'EA 4400 et du CERACC (Centre

1Dominique MAINGUENEAU, Contre Saint Proust ou la fin de la littérature, Paris, Belin, 2006 – Richard MILLET, Désenchantement de la littérature, Paris, Gallimard, 2007 – Tzvetan TODOROV, La Littérature en péril, Paris, Flammarion, 2007 – Alexandre GEFEN (dir.), LHT, n°6, « Tombeaux pour la littérature », 10 juin 2009 [En ligne], URL : http://www.fabula.org/lht/6. – Laurent DEMANZE & Dominique VIART (dir.), Fins de la littérature, esthétiques et discours de la fin, tome I, Paris, Armand Colin, coll. « Recherches », 2012.

2Jean LEBRUN & Claude PRÉVOST, Nouveaux territoires romanesques, Paris, Messidor, 1990.

3Dominique VIART, Écritures contemporaines I et II, Paris, Lettres Modernes, Minard, 1998 et 1999 – Bruno BLANCKEMAN, Marc DAMBRE & Aline MURA-BRUNEL, Le roman français au tournant du XXIe siècle, Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2004 – Dominique VIART & Bruno VERCIER, La Littérature française au présent : héritage, modernité, mutations, Paris, Bordas coll. « La bibliothèque », 2005.

4On aura reconnu, dans l'ordre, le titre des ouvrages d'Yves CITTON, d'Antoine COMPAGNON et de Thomas PAVEL, auxquels nous pouvons ajouter celui de Jean-Marie SCHAEFFER, Petite écologie des études littéraires : pourquoi et comment étudier la littérature ?, Vincennes, Éditions Thierry Marchaisse, 2011.

5William MARX, Vie du lettré, Paris, Minuit, coll. « Paradoxe », 2009 ou, plus récemment, le livre de Marielle MACÉ sur les pratiques de construction de soi par la lecture (Façons de lire, manières d'être, Paris, Gallimard, coll. « NRf Essais », 2011).

6Roland BARTHES, La Préparation du roman I et II. Cours et séminaires au Collège de France, (1978-1979 et 1979-1980), Seuil IMEC, 2003, p. 147.

7Auteur, mais aussi créateur de la collection « l'Un et l'autre » chez Gallimard, J.-B. PONTALIS est particulièrement sensible aux tressages de l'inconscient et de la mémoire littéraire dans la création des écrivains.

8D. MAINGUENEAU, Contre Saint-Proust ou la fin de la littérature, Belin, 2006, p. 7.