De son vivant et par-delà la mort, l’Église et le nationalisme ont fait mainmise sur Jeanne d’Arc : devenue symbole, réduite aux causes qu’elle a servies, son existence historique a été neutralisée, sa redoutable exemplarité évacuée. À partir des paroles prononcées par Jeanne lors de son procès dont les minutes nous ont été conservées, Monique Wittig avait d'entrepris d’exhumer sa radicalité dans un scénario resté inédit, que nous offre les éditions de Minuit : Jeanne d’Arc, ou plutôt Jeanne Rommée, car dans mon pays les filles prennent le nom de leur mère. Le scénario imagine sa formation dans le compagnonnage de deux "beaux anges en chair et en os", l’intrasigeance de la passion venant s’inscrire au cœur de la lutte séculaire engagée par l’héroïne.
(Illustr. : La Passion de Jeanne d'Arc, Carl Theodor Dreyer, 1927)