Appel à contributions pour le deuxième numéro thématique d'Écriture de soi-R
Description du projet
Écriture de soi-R est née de l'envie de produire un contenu pluriel autour des écritures à la première personne. Cette revue en ligne s'intéresse à la fois à celles et ceux qui la produisent et à celles et ceux qui les étudient.
Écriture de soi-R propose ainsi des articles scientifiques autour des écritures artistiques du Je - autobiographies, autofictions et récits hybrides - envisagées du point de vue de la recherche en littérature.
La revue propose également des récits à la première personne de chercheurs et chercheuses en littérature à travers le monde et des journaux, compte rendus, témoignages de lecture d'œuvres artistiques interrogeant le moi, le réel, l’acte de création.
Elle propose des contenus réguliers au sein de sa rubrique Varia, alimentée tout au long de l’année de textes de différentes formes, envoyés de manière spontanée, s’articulant autour des écritures à la première personne.
Chaque année, son objectif est de proposer un numéro spécial consacré aux écritures à la première personne autour d’un thème particulier.
Écriture de soi-R - Numéro 2 – « PERFORMANCE »
Le prochain numéro spécial de la revue consacrée aux écritures à la première personne interrogera les différentes acceptions du terme PERFORMANCE. De nombreux colloques ou journées d’études ont interrogé les liens entre art(s) et performance à travers les concepts d’art-action, d’immédiateté permettant la création de genres hybrides nouveaux. Ces thématiques, articulées autour des écritures autobiographiques, autofictionnelles, nous intéressent également mais pas exclusivement. Nous proposons ainsi un numéro pluriel, articulé autour de plusieurs axes d’étude, avec la volonté, à travers le questionnement de la mise en scène du “Je” dans une œuvre artistique, d’aller au-delà de la notion d’événement.
1. Performance et production de soi
De l’anglais to perform dont la traduction littérale signifie “interpréter”, le terme « performance » s’applique désormais aussi bien au domaine des arts que de l’entreprise ou encore du sport. À la fois mise en scène de soi, réalisation personnelle ou dépassement individuel, c’est l’idée d’une production à un moment donné qui subsiste. Ainsi, ce numéro se propose d’étudier la performance en tout ce qu’elle peut être en lien avec le fait d’écrire son Je.
2. Performance - oeuvre artistique de l’événement
En arts, Roselee Goldberg souligne la difficulté d’enfermer la performance dans une définition unique « au-delà de celle élémentaire qu’il s’agit d’un art vivant mis en œuvre par des artistes » (Goldberg, 9). Depuis le XXème siècle, une performance désigne une action en cours, un événement unique et inédit qui s’inscrit dans l’immédiateté du temps de la représentation et a souvent une influence directe sur son public grâce à un dispositif précis. Christian Biet considère l’apparition des performance studies aux États-Unis comme le « déport de l’attention critique sur la scène, sur l’événement, et non plus sur le texte conçu comme premier et essentiel » (Biet, 22), faisant ainsi écho au concept de théâtralité que Barthes définissait comme « le théâtre, moins le texte, [comme] une épaisseur de signes et de sensations qui s’édifie sur le texte » (Barthes, 41). Ces considérations scéniques questionnent les rapports entre littérature et performance et soulèvent de nouveaux enjeux dans les écritures de soi. Comment le Je peut-il rendre compte d’un événement immédiat et inédit ? Comment le langage écrit peut-il performer tout en se dégageant de « l’emprise exclusive du texte » (Biet, 22) ?
3. Quand dire « je », c’est performer
À partir des années 1960, la notion de performance - et plus spécifiquement de performativité - est venue nourrir le champ des sciences humaines. D’abord, en linguistique, l’ouvrage posthume de J.L Austin a mis en lumière ce qu’il nomme des « phrases performatives », c’est-à-dire des énoncés qui, en eux-mêmes, permettent d’ « exécuter une action » (Austin, 42). Plus récemment, les gender et women's studies ont apporté une nouvelle acception au terme "performance", s'opposant ainsi à l'idée que les genres et les sexualités seraient le fruit d'une essence. Figure majeure dans ce domaine, la philosophe Judith Butler indique que “la réalité du genre est créée par des performances sociales ininterrompues” (Butler, 266). Les nouvelles définitions de la performance sont ainsi venues éclairer les récentes représentations littéraires du genre. L’ouvrage de Paul B. Preciado, Je suis un monstre qui vous parle, dans lequel il raconte son parcours d’homme transgenre et non binaire, est ainsi dédié à Judith Butler. Dans King Kong théorie, c’est une place et un conditionnement qu’interroge et qu’affirme Virigine Despentes et qu’elle est une des premières à exposer dans l’espace littéraire français de manière aussi radicale : « J’écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, les hystériques, les tarées, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf. Et je commence par là pour que les choses soient claires : je ne m’excuse de rien, je ne viens pas me plaindre » (Despentes, 9).
4. Se performer : entre mise en scène de soi et rendement
Les vastes acceptions du terme « performance » et de ses dérivés interrogent ainsi leurs finalités. La production d’un discours, d’un énoncé permettrait de se réinventer, de faire advenir un nouveau Je. Cependant, s’écrire, c’est interroger une forme de mise en scène de soi mais également peut-être attendre des résultats de cette création. Zineb Issor souligne ainsi les liens étroits existants entre rendement et performance, la définissant comme « un résultat chiffré dans une perspective de classement » (Issor, 95). C’est donc aussi, dans une logique utilitaire, qu’il convient d’interroger les potentiels objectifs de la performance.
5. Les propositions
Les articles et compte-rendus viendront interroger les liens étroits entre Je et performance dans le domaine de la littérature, des arts, et des sciences humaines au sens large.
Enfin, si la performance peut être étudiée dans des articles de fond, nous acceptons également des propositions relevant du témoignage de jeunes chercheur.euse.s qui sauront faire écho, par la restitution de leur expérience, à ces analyses théoriques que nous souhaitons proposer.
Envoi des propositions
Les propositions de contribution devront s’inscrire dans une des catégories suivantes :
- Articles scientifiques de fond consacrés aux sujets et aux interrogations proposées par ce numéro spécial ;
- Compte-rendus, chronique ou journaux de lecture d'œuvres littéraires ou recensions théoriques en lien avec les écritures/expression à la première personne et la performance, la performativité ;
- Témoignages de chercheur.euse.s articulés autour de la dimension performative de leur travail, de la mise en œuvre de performances scéniques ou textuelles, ou de leur rapport à la notion de performance ;
Toutes les propositions de contributions (en français ou en anglais) doivent être envoyées au format .docx (word ou google doc) avant le 20 décembre 2021 à l’adresse ecrituredesoi.revue@gmail.com.
Elles devront comporter un titre, un résumé de votre proposition (environ 300 mots) ainsi qu’une biobibliographie.
Elles seront étudiées par le Comité éditorial avant le 1er janvier 2022.
Les articles ou textes dans leur version définitive devront nous parvenir avant le 1er mars 2021 et respecter les normes de rédaction de la revue : https://www.ecrituredesoi-revue.com/normes-de-redaction
Ils seront ensuite transmis au comité scientifique pour une double relecture aveugle.
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Références
Austin, John Langshaw. Quand dire c’est faire. Paris : Seuil, 1991.
Barthes, Roland. Essais critiques. Paris : Seuil, 1981 [1954].
Biet, Christian. « Pour une extension du domaine de la performance (XVIIe-XXIe siècle). Événement théâtral, séance, comparution des instances », Communications, vol. 92, no. 1, 2013, pp. 21-35.
Butler, Judith. Trouble dans le genre. Pour un féminisme de la subversion. Traduit de l’anglais par C. Kraus. Paris : Éditions La Découverte, 2005 [1990].
Despentes, Virginie. King Kong Théorie. Paris : Grasset, 2006.
Goldberg, Roselee. La Performance, du futurisme à nos jours. Paris : Thames & Hudson, 2001.
Issor, Zineb. « « La performance de l’entreprise : un concept complexe aux multiples dimensions » », Projectics / Proyéctica / Projectique, vol. 17, no. 2, 2017, pp. 93-103.
Preciado, Paul B. Je suis un monstre qui vous parle. Paris : Grasset, 2020.
Actualité
Appels à contributions
Publié le par Perrine Coudurier (Source : Emilie Ollivier)