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Les imaginaires en osmose : presse et littérature au XIXe siècle. Avec A. Vaillant, É. Reverzy, A. Wrona (Séminaire des doctorants du CRP19, Sorbonne nouvelle, en ligne)

Les imaginaires en osmose : presse et littérature au XIXe siècle. Avec A. Vaillant, É. Reverzy, A. Wrona (Séminaire des doctorants du CRP19, Sorbonne nouvelle, en ligne)

Publié le par Université de Lausanne (Source : CRP19)

CRP19 - Séminaire des doctorants du 2 juin 2021: 

Les imaginaires en osmose : presse et littérature au XIXe siècle

17h30-19h30

via Google Meet : https://meet.google.com/vuo-odrs-jgb

 

Invités : Alain Vaillant, Eléonore Reverzy, Adeline Wrona

 

 

Lou Legros-Lefeuvre, doctorante à l’Université Paris Nanterre) :

Le critique de roman dans la presse du XIXe siècle : un personnage littéraire
A partir des années 1830, le développement spectaculaire de la presse a fait entrer les journaux dans le quotidien des Français, répandant ainsi l’habitude de lire les fictions qui étaient fréquemment proposées dans ces pages. Cela marque l’essor d’une économie de l’attention spécifique à la presse écrite. Ainsi des critiques littéraires parues dans ces périodiques, lesquelles ont été à la fois témoins et actrices de l’acquisition par le roman, considéré au début du siècle comme un genre mineur, de ses lettres de noblesse. On distingue une évolution de la poétique de ces critiques littéraires de roman marquées tout au long du XIXe siècle par une forme de fictionnalisation : mise en scène des articles, descriptions romanesques, « starification » progressive des critiques… À travers trois articles issus du Globe, de L’Artiste et de La Revue des deux mondes, nous étudierons la progression des atours de la fictionnalisation revêtus par les critiques littéraires au fil du siècle. Il sera ainsi question de la réhabilitation de la fonction-même du critique et des différents codes de narrations qui vont jusqu’à le façonner comme un véritable personnage littéraire. 
 

 

Cécile Besnard, doctorante à l’université Sorbonne Nouvelle :

La femme reporter, ce « héros » !
Le terme de reporter fait son apparition dès les années 1880, alors même que le métier de journaliste se professionnalise en France et outre-Atlantique. En France, un nom se distingue tout particulièrement : Séverine. Héritière de Jules Vallès, elle prône un journalisme de terrain. Issue de la tradition littéraire française, ses articles sont des histoires narrées, où la journaliste se met en scène dans des situations parfois périlleuses. La scénarisation du reporter est un outil qui prend toute son ampleur dans le cas de Séverine et d’autres femmes journalistes, telle que Nellie Bly aux Etats-Unis. En France, la tradition littéraire dans les articles, contribue à la mise en scène du reporter, qui dans le cas de Séverine, revendique sa féminité, jusqu’à en faire un atout. La féminité, n’est plus alors vue comme une faiblesse, que ce soit par les journalistes ou par les journaux qui les emploient. En effet, dans un contexte où la concurrence entre les journaux est à son paroxysme, la starification de ces femmes journalistes est en cours, et devient même un argument de vente. Ainsi, Séverine met en péril sa vie en descendant dans les mines de Montceau-les-mines, et Nelly Blie prend des risques en intégrant un asile pour femmes, ou encore en effectuant le tour du monde en un temps record. 

Il semble de ce fait, intéressant d’étudier plus particulièrement ces deux exemples du journalisme du tournant du XXe siècle, jouant de leur féminité dans une scénarisation commune, et complice de l’utilisation de leur image par les journaux de l’époque qui y voient une opportunité d’augmenter leurs ventes. Ainsi, nous nous arrêterons sur la tradition littéraire présente dans les articles français, et plus particulièrement dans l’écriture des articles de Séverine. Nous étudierons alors les modalités de la scénarisation du reporter, allant parfois jusqu’à l’extrême, comme dans le journalisme d’identification, où le reporter peut mettre en danger son corps même. De ce fait, par le biais de l’observation croisée des expériences des deux journalistes évoquées et de leurs écrits, nous constaterons l’utilisation de l’image de la femme journaliste par les journaux, à l’époque du « yellow journalism », soit de la presse à scandale, dans un procédé évident de starification utilisé pour la vente. 

 

 

Sookjin Hwang, doctorante à l’Université Paris Nanterre :

Imaginaire chronique de Maupassant à la lumière des journaux
Nous constatons (trop) souvent que Maupassant revient sur les mêmes idées avec des expressions presque identiques : il recycle ses textes en profitant d’une publication multiple par le biais des journaux. Il en résulte ironiquement un imaginaire répétitif, invariable, donc chronique dans l’œuvre du fils spirituel de Flaubert, qui abhorrait la bêtise humaine, répétitive, sempiternelle. Les chercheurs bienveillants l’ont bien remarqué et ont incriminé le « poids du quotidien », consécutif à une énorme production journalistique. Il ne faut pourtant pas oublier qu’écrire pour les journaux ne signifie pas simplement recourir à un support de publication, mais relève d’un engagement dans l’univers journalistique, ce qui suppose une appropriation de son économie, de son régime et de son imaginaire. Nous formulerons ainsi l’hypothèse selon laquelle le retour périodique unanimement constaté chez Maupassant n’est autre que la réflexion de la périodicité des journaux, et nous nous demanderons si le métier de chroniqueur joue un rôle important dans la formation de l’imaginaire chronique de l’écrivain, en s’appropriant la chronicité comme dynamique de création.