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Jeanne d’Arc, une figure du divin et du sacré ?Images et représentations. XIXe-XXIe s. (Toulouse)

Jeanne d’Arc, une figure du divin et du sacré ?Images et représentations. XIXe-XXIe s. (Toulouse)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Christophe Balagna)

Jeanne d’Arc, une figure du divin et du sacré ?Images et représentations (XIXe-XXIe siècle)

Institut catholique de Toulouse, 1er-3 mars 2022

 

Jeanne d’Arc, personnage majeur de l’histoire de France, suscita de nombreux élans religieux, politiques et artistiques. Tour à tour chef de guerre, martyre de la guerre de Cent Ans, modèle de piété féminine, sainte de l’Église catholique, elle devint au XIXe siècle, sous la plume de Jules Michelet, l’héroïne populaire qui contribua à faire naître le sentiment national français et, au XXe siècle, une figure mythique de la résistance à la barbarie nazie. C’est à cette même période que son image christique apparut : béatifiée en 1909, l’année 1920 fut celle de sa canonisation officielle. Enfin, elle fut élue patronne secondaire de la France le 2 mars 1922 par le pape Pie XI, et, dès lors, vénérée, le 30 mai, comme vierge après Marie, mère de Dieu.

C’est ainsi que cette jeune femme, bergère guerrière, déclarée hérétique, relapse, brûlée vive mais pour certains, toujours en vie, comme en témoignent certaines usurpatrices mystiques, devint non seulement une sainte, mais aussi une héroïne féminine, un symbole de résistance, une figure patriotique, commuant en elle deux caractères presque intangibles : peut-on dire alors que le divin la traverse et qu’elle incarne le sacré ? Jeanne la Pucelle autorise d’ailleurs, comme l’écrit Olivier Hanne dans sa Jeanne d’Arc[1], « toutes les filiations, réunit tous les paradoxes, se prête à toutes les personnifications ». C’est ainsi qu’elle devint, dès le XVe siècle, une sorte de Judith ou d’Esther modernes et comme ces grandes figures héroïques de l’histoire biblique, elle  aida son peuple et sauva sa foi.

Travailler sur ses représentations dans le cadre du sacré et du divin ne semble donc pas dénué d’intérêt tant le personnage est un emblème, représente une nation, exprime une ou plusieurs perceptions de notre rapport à l’Histoire et à la société, focalise les sentiments les plus contradictoires. C’est pour cette raison que la Thématique de Recherche « Cultures, Herméneutique et Transmission » de l’UR CERES de l’Institut catholique de Toulouse[2] a décidé de s’emparer de la question de la représentation de Jeanne d’Arc du XIXe siècle à aujourd’hui.

Deux arguments expliquent ce choix : d’une part, la Thématique de Recherche explore, depuis 2018, les « voies du sacré  et du divin » et, d’autre part, l’année 2022 marquera le centenaire de l’élection de Jeanne d’Arc en tant que patronne secondaire de la France. Enfin, dix ans après la parution de Jeanne d’Arc : histoire et dictionnaire[3], cinq ans après la publication du volumineux Dictionnaire encyclopédique de Jeanne d’Arc[4], et cinq ans après la nouvelle édition de l’important ouvrage de Gerd Krumeich[5], entres autres, il nous est apparu primordial de questionner les représentations de Jeanne d’Arc  au travers d’un cadre chronologique cohérent, c’est-à-dire des conséquences de la Révolution française aux vingt premières années de ce siècle et de dresser, si possible, un panorama le plus fiable possible des représentations de Jeanne d’Arc qui font intervenir le divin et le sacré.

Le colloque devrait intéresser historiens, historiens de l’art, théologiens, spécialistes de littérature et de musique, sociologues, psychologues, à la fois français et étrangers, puisque l’épopée de Jeanne d’Arc est connue dans le monde entier. Bien entendu, il ne s’agit là que de quelques pistes de réflexion car de nombreux autres thèmes pourraient être abordés : comment approcher la figure de Jeanne d’Arc aujourd’hui ? Perçoit-on sa dimension sacrée plutôt que divine ou inversement ? Existe-t-il à l’heure actuelle, en France et dans le monde, de « nouvelles » Jeanne d’Arc[6] ?

Est-elle devenue un symbole assumé du féminisme actuel, particulièrement présent dans la sphère médiatique et très actif dans la société civile ? Comment Jeanne d’Arc est-elle perçue, en 2021-2022, en Europe et dans le monde ? Que nous apprennent les différentes représentations dont elle bénéficie ? D’ailleurs, l’impact de sa légende est-il toujours d’actualité ou est-elle devenue une simple icône d’un passé révolu, une image tellement connue qu’elle en est devenue inconnaissable ?

Plusieurs axes méritent notre attention, le but n’étant pas d’écrire une énième histoire johannique, mais de proposer une nouvelle réflexion, riche et stimulante, sur la ou les façons dont Jeanne d’Arc a été représentée depuis le début du XIXe siècle dans les domaines qui font d’elle un personnage à la fois historique et légendaire, un symbole mythique et héroïque, mais aussi une figure victime de diabolisation et de récupération.

Nous pouvons retenir trois thématiques principales :

- Jeanne d’Arc, une représentation en images (des Beaux-Arts aux arts dits mineurs (vitrail, enluminure, orfèvrerie…), en passant par le cinéma, la télévision, et d’autres formes artistiques, comme la bande dessinée par exemple).

- Jeanne d’Arc à travers les mots et les sons (la littérature, la musique, le théâtre, la poésie, entre autres, ont, très tôt, accordé une large place à la dimension romanesque, tragique de Jeanne d’Arc).

- Jeanne d’Arc, une figure politique et sociale moderne « en représentation » ? (au XIXe et au XXe siècle, Jeanne a incarné une féminité, le plus souvent héroïque, a fait l’objet de nombreuses récupérations politiques, est devenue un modèle patriotique, un symbole de courage et de résistance… Cela est-il toujours vrai au début du IIIe millénaire ? Que disent ces nombreuses incarnations de notre société ? De notre rapport au divin et au sacré ? Est-elle seulement une incarnation de la foi chrétienne, voire catholique ? Comment-est-elle perçue dans la sphère laïque ? Jeanne d’Arc est-elle devenue une sainte de la laïcité française ?)

On pourra également envisager d’interroger les points suivants :

- la représentation et la perception de Jeanne d’Arc dans le monde de l’école et de l’enseignement en général : comment l’aborder dans la société multiculturelle française actuelle ? Jeanne peut-elle symboliser le démantèlement d’un enseignement cohérent de l’histoire de France à l’école et l’effondrement de la culture historique ?

- Jeanne d’Arc, une prophétesse médiévale : Jeanne d’Arc peut être considérée comme une figure divine car elle est une prophétesse, notamment du lien entre pouvoir royal et pouvoir ecclésial[7]. Elle revêt alors trois aspects : mystique, politique, ecclésial.

- Jeanne d’Arc : origine d’un nationalisme sacré ? Image d’une fierté nationale sacrée : Norman Housley, professeur d’histoire à l’université de Leicester, spécialiste du phénomène de la Croisade, s’est notamment intéressé à ces questions dans le cadre de publications et colloques récents[8]. En effet, il semble bien que pour Jeanne, la lutte contre les anglais ait pu revêtir une forme de croisade visant à expulser les envahisseurs d’un territoire sacré, le royaume de France. Enfin, le fait que Jeanne d’Arc ait été déclarée vénérable en 1894, constitue-t-il une irruption brutale de la bergère de Domrémy dans l’espace sacré ? Cet événement, point de départ, pour l’Église, du processus de sa canonisation, a-t-il exacerbé la dimension sacrée de la Pucelle ?

Au travers de ces nombreux thèmes de réflexion, nous espérons pouvoir mieux cerner la figure de Jeanne d’Arc et faire émerger, par l’intermédiaire des représentations dont elle a pu faire l’objet, les caractères divin et sacré qu’elle personnifie plus que toute autre figure de l’Histoire.

*

Calendrier :

30 septembre 2021 date limite pour l’envoi des propositions

Merci d’adresser conjointement votre proposition de communication de 5000 signes maximum ainsi qu’une brève notice biobibliographique (en fichier séparé) avant le 15 septembre 2021 à l’adresse suivante : colloquejeannedarc22@ict-toulouse.fr

Fin octobre 2021

Résultats de l’évaluation scientifique des propositions et notification aux participants.

01-03 mars 2022

Colloque au sein de l’Institut catholique de Toulouse.

Les articles retenus par le comité scientifique feront l’objet d’une publication aux Presses universitaires de l’ICT, collection « Humanités ».

Frais de participation au colloque : 30 euros.

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 Coordinateur et informations :

Christophe Balagna (TR1, UR CERES, Institut catholique de Toulouse)

christophe.balagna@bbox.fr

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Comité scientifique

Christian Amalvi (Université Paul-Valéry, Montpellier)

Christophe Balagna (ICT)

Caroline Brousse (ICT)

Sophie Cassagnes-Brouquet (UT2J, Toulouse)

Gérard Dastugue (ICT)

Philippe Dazet-Brun (ICT)

Philippe-Marie Margelidon (ICT)

Georges Passerat (ICT)

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Responsable

Thématique de Recherche « Cultures, Herméneutique et Transmission »,

CERES, Institut catholique de Toulouse 31, rue de la Fonderie, 31000 Toulouse

https://www.ict-toulouse.fr/presentation/

 

 

[1] Olivier Hanne, Jeanne d’Arc : biographie historique, Paris, 2012.

[2] https://www.ict-toulouse.fr/presentation/

https://hal.archives-ouvertes.fr/ICTRECHERCHE-TR1

[3] Philippe Contamine, Olivier Bouzy et Xavier HÉlary, Jeanne d’Arc : histoire et dictionnaire, coll. Bouquins, Paris, 2012.

[4] Pascal-Raphaël Ambrogi et Dominique Le Tourneau, Dictionnaire encyclopédique de Jeanne d’Arc, Paris-Perpignan, 2017.

[5] Gerd Krumeich, Jeanne d’Arc à travers l’histoire, Paris, 1993, 2017 pour la nouvelle édition.

[6] On peut aussi évoquer la récupération politique dont Jeanne d’Arc a été l’objet, notamment dans le monde communiste, autour de la figure de Rosa Luxemburg, considérée comme la « Jeanne d’Arc » est-allemande. Paul Maurice, « Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, un mythe paradoxal en RDA » dans Sens public, 2006, http://sens-public.org/articles/368/ Dernière consultation le 17 mars 2021.

[7] Ce thème est justement traité par le père Jacques Olivier dans sa thèse, Pouvoir royal et Pouvoir ecclésial - Le prophétisme de sainte Jeanne d’Arc au service de la Chrétienté, soutenue le 18 septembre 2020 à l’Institut catholique de Toulouse, à paraître aux éditions du Cerf.

[8]  http://grhis.univ-rouen.fr/grhis/wp-content/uploads/2015/05/Programme-A5-Colloque-JDA.pdf Dernière consultation le 28 février 2021.