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Appels à contributions
Penser la revie littéraire

Penser la revie littéraire

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Pascal Lécroart)

Appel à contributions pour la journée d'études du 8 avril 2022, Besançon

En juin 1987, dans la revue Roman 20-50, Paul Renard a été le premier à utiliser la notion de « revie littéraire », pour une rubrique qui est toujours active, afin d’attirer l’attention sur des auteurs et des œuvres romanesques de la première moitié du XXe siècle jugés injustement oubliés. Avec le soutien d’universitaires comme Bruno Curatolo et François Ouellet, la « revie littéraire » est devenue l’objet toujours actif de plusieurs journées d’études, colloques, publications et programmes de recherche cherchant à corriger l’histoire littéraire telle qu’elle a été écrite et à créer de nouvelles dynamiques de lecture et d’étude. À travers des textes critiques, mais aussi des travaux de publications ou rééditions, elle s’est efforcée de rendre plus familiers les noms d’André Beucler, Jean-Richard Bloch, Pierre Bost, Emmanuel Bove, Marc Chadourne, Raymond Guérin, Pierre Herbart, Georges Hyvernaud, Jean Malaquais ou Léon Werth, parmi bien d’autres. Rares sont pourtant les cas où cette pratique semble véritablement rencontrer le grand public, même si la remise en valeur d’auteures comme Irène Némirovky a su coïncider avec un mouvement général de revalorisation de la place faite aux femmes dans la littérature. Est-ce à dire que le travail de réparation des injustices de l’Histoire n’a de sens qu’en étant directement en phase avec les attentes de l’époque actuelle ? Malgré des cas célèbres de réhabilitations littéraires, comme ceux de Louise Labé et de Maurice Scève ou des poètes de l’époque baroque, la « revie » n’est-elle qu’une pratique aléatoire, d’abord soumise aux caprices d’universitaires et au hasard de leur goût ou, à l’inverse, une pratique résolument scientifique, échappant aux effets de mode et fondée sur une axiologie rigoureuse ?

L’enjeu de cette journée d’études sera précisément d’interroger la pratique de la revie, telle qu’elle a été conduite sur des romanciers des années 1900-1960, afin de cerner ce qui la fonde. Au lieu de chercher à valoriser telle ou telle figure oubliée, il s’agira donc de faire de la « revie » et des auteurs qu’elle a cherché à tirer de l’oubli l’objet d’un questionnement d’ordre théorique :
   - Que veut dire la métaphore de la « revie », envisageant de manière binaire (mort vs vie) une problématique de la réception infiniment plus complexe et subtile, convoquant de multiples échelles de succès ou d’échec (quantitatives) et de valeurs (qualitatives) au sein d’une approche nécessairement diachronique soumise aux aléas de l’Histoire ?
  - Quelle géographie dessine-t-elle dans un paysage défini à la fois par la place de l’auteur, celle de ses œuvres dans leur genre et dans leur contexte, celle des publics.
  - En quoi cette problématique oblige-t-elle à penser la manière dont se construit l’histoire littéraire, toujours soumise aux aléas du présent dans lequel elle s’écrit, quand bien même elle tente d’affirmer un positionnement surplombant voire transcendant ?
   - Quelles stratégies d’une « revie » réussie serait-il possible de conseiller, sachant qu’elle croise des problématiques diverses :
        o   éditoriales (choix des (ré)éditeurs,  modalités des (ré)éditions, mais aussi dynamiques éditoriales créées à partir de la publication d’inédits ou sous forme d’études critiques ou biographiques) ;
        o   sociales et sociologiques (quels publics, mais aussi quelle part prise par les descendants ou les proches pour constituer une association, un musée, un prix, un bulletin, etc.) ;
        o   littéraires et artistiques (quelle résonance l’œuvre est-elle capable de produire avec les autres réalisations de son époque, mais aussi à travers des adaptations, des produits dérivés, de nouvelles créations).
Définissant étroitement la « revie » à travers la pratique initialement développée par ses pionniers (Paul Renard, Bruno Curatolo, François Ouellet), la réflexion pourra donc prendre pour point de comparaison des cas célèbres de réévaluation empruntés à l’histoire littéraire, mais aussi à d’autres arts (peinture, sculpture, musique, cinéma) afin d’interroger la spécificité éventuelle  de la « revie littéraire » pour des œuvres situées à une époque souvent dépeinte comme un âge d’or de la littérature et pourtant en partie délaissée aujourd’hui dans le cadre général des études universitaires.
 
Les propositions de communication (15 à 30 lignes), accompagnées d’une courte biobibliographie, devront être envoyées avant le 15 décembre 2021 simultanément à Yvon Houssais (yvon.houssais@univ-fcomte.fr) et à Pascal Lécroart (pascal.lecroart@univ-fcomte.fr).

Cette journée d’étude, qui se tiendra le vendredi 8 avril 2022 à Besançon, initiera une réflexion sur.la revie littéraire susceptible de devenir un projet de plus vaste ampleur.

 

 Quelques références bibliographiques : 
Alluin, Bernard et Bruno Curatolo (dir.), La revie littéraire. Du succès oublié à la reconnaissance posthume : quinze romanciers contemporains réédités, Le texte et l’édition, 2000.
Bergeron, Patrick (dir.), Passées sous silence. Onze femmes écrivains à relire, avant-propos de Béatrice Didier, Presses universitaires de Valenciennes, 2015.
Curatolo, Bruno et Renard, Paul (dir.), Mémoires du roman, « La revie littéraire des romanciers oubliés. Domaine français - XXe siècle », Presses Universitaires de Franche-Comté, « Annales Littéraires », 2010.
Curatolo, Bruno, François, Ouellet (dir.), et Renard, Paul, Romans exhumés. 1910-1960. Contribution à l'histoire littéraire du XXe siècle, Dijon, EUD, 2014.
Dussert, Éric, Une forêt cachée. 156 portraits d’écrivains oubliés, La Table ronde, 2013.
Dussert, Éric, Cachées par la forêt. 138 femmes de lettres oubliées, La Table ronde, 2018.
Ouellet, François (dir.), D’un écrivain l’autre. Quelques méconnus du XXe siècle et leurs références, Études littéraires, vol. 36, n° 3, printemps 2005, p. 7-136.
Ouellet, François (dir.), En marge. Relire vingt-cinq romanciers méconnus du XXe siècle, Nota bene, 2010.
Ouellet, François (dir.), Contre l’oubli. Vingt écrivains français du XXe siècle à redécouvrir, Nota bene, 2015.
Ouellet, François, La littérature précaire. De Pierre Bost à Pierre Herbart, Éditions Universitaires de Dijon, 2016.