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Les traductions et l’original (séminaire Anachronies)

Les traductions et l’original (séminaire Anachronies)

Publié le par Frédérique Fleck

Séminaire « Anachronies : textes anciens et théories modernes »

Séminaire transversal DSA - LILA (ENS), en collaboration avec l’Atelier de théorie littéraire de Fabula

 

Lire les actes du séminaire dans l'Atelier de Fabula: Anachronies.

 

 

 

Séance 5 : Les traductions et l’original

 

Vendredi 22 février 2013, 14h-16h

ENS, 45 rue d’Ulm, 75005 Paris

salle Cavaillès

 

Coordination : Peggy Lecaudé, Claire Paulian.

Intervenants : Peggy Lecaudé, Claire Paulian.

 

À propos de la nouvelle traduction des Confessions de saint Augustin par Fr. Boyer, Les Aveux, voici ce qu’écrit la linguiste M.-Ch. Hazaël-Massieux :

« il s’agit de doter une grande œuvre d’une toute nouvelle traduction, qui sans cesser d’être fidèle à l’original, essaye de retrouver cette fidélité à travers une fidélité plus grande à la langue d’aujourd’hui. »

Il va de soi, ici, que la finalité d’une traduction est toujours la « fidélité à l’original ». Dans la suite de son texte, tout en faisant l’éloge de l’entreprise de Boyer, Hazaël-Massieux conteste certains de ses choix :

« Par ailleurs, et c’est sans doute le point principal de désaccord entre F. Boyer et moi-même : F. Boyer s’intéresse à Augustin, mais pas à Dieu et, de ce fait, donne une interprétation de la visée d’Augustin qui est faussée par rapport à ce qu’Augustin lui-même dit de l’objet des Confessions. »

Même les esprits les plus ouverts à la nouveauté et au dépoussiérage de textes anciens par des traductions modernes, « fidèles à la langue d’aujourd’hui », ne dépassent donc pas cette conception de la traduction comme texte second, chronologiquement et hiérarchiquement, comme texte subordonné à un texte original qui est tenu pour seul véritable discours créateur, pour seul texte faisant autorité. Se manifeste ainsi la croyance en l’existence d’un texte premier, univoque, singulier, fini, contenant en lui-même sa propre vérité, par rapport auquel la traduction serait toujours sujette à caution.

Pourtant, c’est bien parce qu’il y a traduction qu’il y a original, c’est bien la traduction qui construit le texte original, qui en fait un texte « à l’origine de ». Dans cette perspective, ne pourrions-nous pas considérer le texte original ainsi constitué non plus comme un mètre-étalon, un texte « autoritaire », mais comme un texte-puissance de, un texte « autorisant » ? Ne pourrions-nous pas interpréter la multiplicité des traductions non plus comme autant de tentatives malheureuses pour transmettre fidèlement la vérité préétablie d’un texte, mais comme des actualisations des possibles de ce texte, qui viendraient le détacher de son contexte de production initial et l’enrichir de nouveaux possibles ? Ne peut-on, enfin, penser une autonomisation des traductions qui se passerait de leur confrontation à l’original ? Plutôt que de penser les traductions à partir de l’original, nous proposons donc de penser la notion d’original à partir des traductions, ce qui passera par une historicisation de la notion de fidélité en traduction et par l’étude comparée de plusieurs traductions mettant en jeu la question de la « visée » du traducteur, et par une interrogation sur la mémoire des œuvres.

 

Bibliographie :

- Berman, Antoine, La traduction et la lettre ou l’auberge du lointain. Paris : Seuil, 1999 ; voir le chap. « l'Éneide de Klossowski », p. 115-142.

- Berman, Antoine, L'épreuve de l'étranger. Culture et traduction dans l'Allemagne romantique: Herder, Goethe, Schlegel, Novalis, Humboldt, Schleiermacher, Hölderlin. Paris : Gallimard, 1995 (1ère éd. 1984), p. 61-63.

- Casanova, Pascale, La république mondiale des lettres. Paris : Seuil, 2008 (1ère éd. 1999) ; voir le chap. « Le méridien de Greenwich ou le temps littéraire », p. 127-131.

- Svenbro, Anna, « Théoriser la traduction à la fin de l’Antiquité et au début du Moyen Âge : quelques glissements sémantiques », Traduire, Transposer, Transmettre dans l’Antiquité gréco-romaine. B. Bortolussi, M. Keller, S. Minon, L. Sznajder, (éds.), Paris : Picard, 2009, p. 9-16. Version téléchargeable en ligne : http://anna.svenbro.free.fr/index.php?id=trad



NB : La bibliographie est restreinte à dessein pour que les participants puissent prendre connaissance de l’ensemble de ces textes, qui serviront de base commune à la discussion.

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Le séminaire « Théorie littéraire et littérature antique », organisé à Paris 3 par Sophie Rabau, parallèlement au séminaire « Anachronies », offrira à ceux qui le souhaitent l’occasion de préparer cette séance à travers une discussion préalable sur les questions qui y seront abordées. Cette séance préparatoire aura lieu mardi 18 décembre, de 17h à 19h, à l’Université de Paris3-Sorbonne Nouvelle, Centre Censier, 13 rue Santeuil, 75005 Paris, Salle 414 (4ème étage).

Également au programme du séminaire Théorie littéraire et littérature antique organisé parallèlement au séminaire Anachronies: 26 février 2013, Lecture des Considérations intempestives (4).