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Le dialogue et la conversation à la croisée des approches (Tunis)

Le dialogue et la conversation à la croisée des approches (Tunis)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Lassâad Oueslati)

Le dialogue et la conversation à la croisée des approches

Colloque international organisé par le Laboratoire Intersignes de la Faculté des sciences humaines et sociales (UNIVERSITE DE TUNIS)

 16, 17 et 18 novembre 2017

PROLONGATION DE LA DATE-LIMITE D’ENVOI DES PROPOSITIONS DE COMMUNICATION JUSQU’AU

15 août 2017

 

Les œuvres littéraires foisonnent de dialogues et de conversations. Ces derniers comportent une dimension dramatique certaine dans le sens où ils confèrent au texte, narratif ou descriptif, une dynamique de nature à donner aux personnages une certaine présence. Définies, selon Le Petit Robert (2015), comme « échange de propos (naturel, spontané); ce qui se dit dans un tel échange », ou comme « entretien entre deux personnes », ou encore comme « ensemble des paroles qu'échangent les personnages d'une pièce de théâtre, d'un film, d'un récit; manière dont l'auteur fait parler ses personnages», la conversation et le dialogue ont suscité l’intérêt des linguistes, toutes disciplines confondues. La littérature linguistique est riche de termes faisant référence à ces deux notions tant elles se recoupent, entre elles et avec d’autres notions.

L’analyse de la conversation relève d’abord de l’analyse de discours en tant que champ linguistique dont l’intérêt porte sur les mécanismes discursifs qui modulent le langage. Ceci étant, l'approche de la conversation et du dialogue gagnerait à être pluridisciplinaire, mettant à contribution les apports de la psychologie, la sociologie, l’ethnologie, la praxématique, pour ne citer que quelques-uns des champs de spécialité concernés.

On souhaiterait lors de cette rencontre revisiter ces deux concepts, pris comme synonymes et interroger les travaux linguistiques s’y référant, revoir la terminologie et les champs notionnels que couvrent le dialogue et la conversation. On essayera de croiser les approches linguistiques et les différentes disciplines afin de déterminer ce qui distingue une approche d’une autre, l’objectif étant d’étudier ces deux notions à l’aune de la diversité disciplinaire.

Cinq axes, parmi tant d’autres, peuvent être retenus :

  • Syntaxe :
  • l’ordre des mots dans un dialogue ou une conversation obéit aux mêmes règles appliquées aux textes écrits. Autrement dit, comment gérer les pauses et les silences? Comment traiter les interruptions et les reprises dans les dialogues ? Le découpage traditionnel en types et formes de phrases garde-t-il sa pertinence lorsqu’on l’applique au discours ?
  • la linguistique a toujours essayé de catégoriser les parties du discours, en fixant des règles relativement rigides permettant d’identifier chaque catégorie syntaxique. Ces règles sont-elles applicables aux mots employés dans une conversation? Le dialogue, étant la liberté dont jouissent les mots, préserve-t-il l’appartenance catégorielle de telle ou telle unité lexicale ou facilite-t-il, au dire de Tesnière, leur translation catégorielle?   

 

  • Sémantique : Le sens, en dépit de l'abondante littérature, demeure un mystère difficile à percer. Il s’agit, dans ce colloque, de revoir cette notion en la soumettant à des questions théoriques, pratiques et méthodologiques du type :  
  • Comment peut-on produire du sens dans un dialogue ? Faut-il retenir le mot comme un support produisant du sens ou faut-il trouver un autre support plus général permettant d’accéder au sens dans un dialogue ? Quelle place accorder aux indices intonatifs (ponctuation, suspension, tropisme, etc.) ainsi qu'au paraverbal? Si l’on analyse le sens de mots en découpant les sémèmes en sèmes, comment peut-on appréhender le silence dans une conversation, lequel est, lui aussi, producteur de sens ? (MARTIN R. 2016, Linguistique de l’universel, Paris, Académie des Inscriptions et Belles lettres; MEJRI et ali, L'unité en sciences du langage, Actes des Neuvièmes journées scientifiques du réseau thématique  "Lexicologie, Terminologie, Traduction", 2014, Edition des archives contemporaines, France).
  • Y a-t-il des tropes qu’on ne produit qu’en discours? Quels seraient les différents modes de fonctionnement entre les figures de l’écrit et celles de l’oral ?
  • Comment examiner la notion d’inférence dans la conversation ? Comment peut-on détecter les contenus inférés à travers le dialogue ? Les mécanismes inférentiels utilisés dans les dialogues sont-ils les mêmes dans les autres types de textes dépourvus de dialogue ?   

Pragmatique : Le domaine ayant apporté le plus à l’interactionnisme est la pragmatique. En effet, depuis Austin et Searle (cf. Austin, J. L., 1970, Quand dire, c’est faire, trad. G. Lane, Le Seuil, Paris; Searle, J. R., 1988, Les Actes de langage: essai de philosophie du langage, Paris, Henman) qui ont développé la théorie des actes de langage, dans le cadre de la philosophie du langage, ce champ constitue une perspective nouvelle où l’énonciation est conçue comme un acte illocutoire qui modifie le monde parce qu’il modifie la situation immédiate des interlocuteurs. Dès lors, la conversation devient une mécanique langagière particulière où les « interactants exercent les uns sur les autres un réseau d’influence mutuelle[1] » en usant d’opérations et de stratégies discursives diverses et diversifiées. L’objectif demeure toujours le même : transmettre une information, apporter un changement dans l’univers de croyance de l’interlocuteur.

Dans ce cadre, la théorie de J. Grice dans « Logique et conversation» (Grice H. Paul. Logique et conversation. In: Communications, 30, 1979. La conversation. pp. 57-72) demeure pertinente dans la mesure où, même s’il s’agit de la description d’une conversation idéale, voire idéalisée, les maximes conversationnelles (dont deux ont été développées par O. Ducrot sous la terminologie de « lois de discours », loi d’informativité et loi d’exhaustivité) ont permis d’élargir le champ de la recherche linguistique en proposant une description de la logique pragmatique qui gère les échanges langagiers. Cela présuppose l’étude, entre autres:

  • des ratés d’élocution (bégaiements, bafouillements, etc),
  • des rectifications et les reformulations,
  • des reprises en écho,
  • des chevauchements de la parole, etc.

Dans cette perspective, les axes à étudier seront, entre autres :

  • La gestion des tours de paroles et l’unité référentielle ;
  • Les ratés de la conversation et leur valeur pragmatique ;
  • Argumentation et conversation.

Un autre type de conversation plus formalisé, appelé dialogue, trilogue, ou même monologue, présente des spécificités régies par les lois qui organisent le discours dans lequel ils apparaissent. En effet, ces échanges échappent aux lois propres qui gouvernent la conversation ordinaire puisqu’ils sont le produit d’une création littéraire, à l’intérieur de laquelle la conversation forgée, singulière, acquiert une nouvelle fonction autre que la communication.

Dans ce cadre, il serait possible de l’étudier selon les axes suivants :

  • Conversation et genre littéraire : représentativité et mise en scène énonciative
  • Le dialogue dans la tradition rhétorique : de la technique d’apprentissage à l’épistémologie de la controverse.
  • Distribution des instances énonciatives et jeu de pouvoir
  • Conversation et thématisation

 

  • Didactique : Quel statut occupe la conversation dans la didactique ? Comment cette discipline examine-t-elle cette problématique ? A-t-elle les moyens théoriques lui permettant d’étudier la conversation comme objet de recherche didactique ?  En quoi l’approche didactique se distingue-t-elle de l’approche linguistique ?
  • Traduction : Dans le domaine de la traduction, on parle souvent de la notion de fidélité. A quel point ce principe est-il respecté dans la traduction d’un dialogue ? Peut-on transférer tout le contenu sémantique dans le texte traduit, y compris ce qui est inféré ? La traduction du dialogue obéit-elle aux mêmes principes que la traduction d’un texte quelconque ? Quelles en sont les spécificités ?     

 

Modalités de soumission des propositions et de participation

Le colloque se tiendra à la Faculté des sciences humaines et sociales du 9 avril, université de Tunis, les 16, 17 et 18 novembre 2017 à Tunis. Le nouveau deadline pour l’envoi des projets de communication est le 15 août 2017. Nous invitons les chercheurs intéressés à soumettre un résumé d’une page A4 (maximum) avec un CV indiquant entre autres les nom et prénom, le statut professionnel, les principales publications scientifiques et la structure de recherche de rattachement, à l’une des adresses mail suivantes :

jamil.chaker@topnet.tn

lassaadoueslati2020@gmail.com

Les réponses du comité scientifique parviendront aux candidats le 15 septembre 2017. La participation des auteurs est conditionnée par l’envoi du texte, entièrement rédigé, avant samedi 14 octobre 2017.   

Aucune prise en charge ne sera assurée par le Laboratoire Intersignes.

Comité scientifique

 

Jamil Chaker

Samia Charfi

Lassâad Oueslati

Raja Gmir

Leila Hosni

Rania Samet

Faten Somaï

 

Eléments bibliographiques

AUSTIN, J. L., 1970: Quand dire, c’est faire, trad. G. Lane, Le Seuil, Paris.

BLANCHE-BENVENISTE, Cl. ; Jean Jean, С, 1987 : Le français parlé. Transcription et édition. Paris : Didier.

BLANCHE-BENVENISTE, CL., 1990 : Le français parlé. Études grammaticales. Paris : Éditions du CNRS.

CADIOT, A. ; CHEVALIER, J.-C. et al. 1979 : « Oui mais, non mais, ou II y a dialogue et dialogue», Langue française, 42, 94-102.

CEKTEAU, M. de, 1980 : L'invention du quotidien. Paris : 10/18.

Cil ISS, J.-L. ; PUECH, C, 1989 :« Enonciation, interaction, conversation : les théories linguistiques entre le psychique et le social », Histoire Epistemologie Langage, 11-11, 7-36.

COUl'ER-KuilLEN; SELTING M. (éds), 1996: Prosody in conversation. Interactional studies. Cambridge : CUP.

FERNANDEZ, J., 1994 : Les particules énonciatives. Paris : PUF.

FLAMALLT, F., 1989 : Face à face. Paris: Pion.

FREED, A. F., 1994: « The form and fonction of questions in informal dyadic conversation », Journal of Pragmatics, 21-6: 621-644.

FUCUS, С. (éd.), 1997 : La place du sujet en français contemporain. Duculot: Louvain-la-Neuve.

G RI MO, B.-N. ; GRLMG, R. : La fuite du sens. Paris : Hatier.

GOODWIN, С, 1981: Conversational Organization. New York: Academic Press.

GREGOŘI, N., 1996 : « Question et enchaînement conversationnel », Interaction & Cognitions, 1, 79-89.

GRICE, H.P., 1979 : « Logic and conversation », Communications, 30, 57-72.

HAZAËL-MASSIEUX, .VI. -C, 1995 : « De quelques avatars de la période en français et en créole : de l'oral à l'écrit, Travaux 13, Cercle Linguistique d'Aix-en-Provencc, p. 13-42.

KERBRAT-ORECCIONI C, 1989 : « Le principe d'interprétation dialogique », Cahiers de Praxématique, 13,43 58.

KERBRAT-ORECCIONI C, 1990, 1992, 1994 : Les interactions verbales (3 vol.). Paris : A. Colin.

MARTIN R. 2016, Linguistique de l’universel, Académie des inscriptions et belles lettres, Paris.

MEJRI S. et ali, 2014: L'unité en sciences du langage, Actes des Neuvièmes journées scientifiques du réseau thématique  "Lexicologie, Terminologie, Traduction", Edition des archives contemporaines, France).

SEARLE, J. R., 1988, Les Actes de langage: essai de philosophie du langage, Paris, Henman

VIORELLE T, A., 1995 [1812] : De la conversation. Suivi d'un essai de Jonathan Swift. Paris: Payot & Rivages.

VlOESCIILER, J. ; IÎEROLL, A., 1994 : Dictionnaire Encyclopédique de Pragmatique. Paris: Seuil.

 

 

 

[1] Catherine Kerbrat-Orecchioni, les interactions verbales. 1 Approche interactionnelle et structure des conversations (Tome 1), Armand Colin, Paris, 2005, p.17.