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Appels à contributions

"Indignez-vous". Vers une approche numérique du discours émotionnel des mouvements populaires (Mulhouse)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Hugo Doucelin)

Appel à communication

Colloque international

« Indignez-vous[1] » : vers une approche numérique du discours émotionnel des mouvements populaires

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Organisé par :

L’Institut de recherche en Langues et Littératures Européennes (ILLE EA 4363)

Université de Haute-Alsace, Mulhouse, France

Dates : 05-06 mars 2020

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Le monde est marqué aujourd’hui par des manifestations sociales qui ne cessent de se multiplier. Le foisonnement des mouvements populaires est dû à plusieurs facteurs dont la nature change d’un mouvement à un autre. Ces actions protestataires collectives sont « une occasion privilégiée de mettre en discussion des enjeux sociaux, de chercher à dire le juste et l’injuste, […] de faire bouger la société et la politique, de s’inscrire dans une mémoire collective, de donner un repère décisif à une autre génération » (Neveu 2002 : 3). En 2010, Stéphane Hessel publie son essai Indignez-vous, un best-seller dont le succès a dépassé les frontières de la France. Cet essai est considéré comme un véritable appel à l’indignation et au militantisme, qualifiant ainsi l’indifférence comme « la pire des attitudes » (Hessel 2010 : 8).

L’Histoire mondiale regorge de mouvements populaires. Nous pouvons citer, entre autres, le printemps arabe en Egypte, Lybie et Tunisie, les différents mouvements qu’a connus l’Europe suite à la crise économique de 2008, notamment le mouvement des Indignés en Espagne en mai 2011, Occupy Wall Street (OWS) aux États-Unis en septembre de la même année et tant d’autres mobilisations collectives qui ne cessent de rajouter de nouveaux chapitres à l’histoire moderne des manifestations sociales. Le mouvement des Gilets Jaunes qui émerge en novembre 2018 est compté parmi les mouvements populaires les plus récents. Imprévisible, ou presque, ce mouvement s’est vite transformé en une immense action protestataire, alimentée par un ras-le-bol social et une envie d’une France meilleure, allant ainsi au-delà de la revendication initiale, à savoir le refus des nouvelles taxes sur le carburant. L’apparition de nouveaux mouvements contestataires initiés par la population relance les études qui leur sont consacrées dans les différents champs de la recherche. Ainsi, la réflexion que nous proposons de mener dans le cadre de ce colloque s’inscrit dans cette actualisation perpétuelle des recherches autour des mouvements populaires.

« Le motif de la résistance, c’est l’indignation », précise Hessel dans son manifeste, et c’est ainsi que le lien entre les mouvements sociaux et l’émotion s’établit. Par conséquent, il nous paraît judicieux de nous interroger sur les questions suivantes : l’émotion constitue-t-elle une partie intégrante du discours contestataire de ces mouvements ? Est-il possible de considérer l’un sans l’autre ?

Le travail d’Isabelle Sommier nous renseigne que les deux mots émotion et émeute ont la même racine étymologique : venus tous les deux d’esmouvoir, qui veut dire « mettre en mouvement ». Le mot émotions, au pluriel, est utilisé jusqu’au XVIIe siècle pour désigner les troubles sociaux, avant que Descartes n’en fasse un élément de la sphère privée pour faire référence aux troubles du corps (Sommier 2010 : 185).

Résultat du phénomène de la contagion sociale, « la foule psychologique est un être provisoire, composé d’éléments hétérogènes pour un instant soudés, absolument comme les cellules d’un corps vivant forment par leur réunion un être nouveau, manifestant des caractères fort différents de ceux que chacune de ces cellules possède » (Le Bon 2013 : 11). Ce même phénomène permet-il de parler d’un passage de l’émotion individuelle à l’émotion collective où le « moi » s’efface au profit du « nous » de la foule psychologique ?

Dans ce contexte, il nous semble légitime d’avancer que la foule contestataire devient un espace propice pour l’expression des émotions. Le mode d’expression évolue au fil du temps : actuellement, elle ne s’opère pas uniquement sur les lieux des manifestations, mais de plus en plus dans les médias, et notamment sur les réseaux sociaux. Quelles sont les répercussions de ce lien établi entre les mouvements contestataires et les réseaux sociaux sur les formes de l’expression émotionnelle ? Il est évident que l’efficacité de toute mobilisation collective passe inéluctablement aujourd’hui par le recours à ces nouveaux moyens de communication qui garantissent une rapidité de rassemblement et créent un nouvel espace où les idées sont discutées et les décisions sont prises. Le discours émotionnel médié par les outils technologiques a ses propres particularités puisqu’il associe le visuel, le langagier et le scriptural, ce qui nous place devant une expression émotionnelle qui s’inscrit dans un langage expressif à part entière. Aussi, chaque réseau social se distingue des autres par des caractéristiques techniques qui lui sont exclusives, d’où l’intérêt de nous attarder sur la manière dont ces différences influencent le discours émotionnel propre aux mouvements populaires. Aborder la question des mouvements populaires, plus particulièrement l’expression émotionnelle qui s’y opère, à travers les différentes formes de discours numérique des réseaux sociaux (commentaires, tweets, affiches, mèmes, stories, pour ne citer que ces quelques-uns) constitue ainsi l’originalité de ce colloque.

L’objectif de notre rencontre scientifique est de réfléchir autour des axes suivants (liste non-exhaustive) :

  • quelle place occupe l’émotion dans les mouvements populaires ?,
  • le discours émotionnel des mouvements populaires et réseaux sociaux,
  • les réseaux sociaux et émotion « numérique »,
  • le discours émotionnel numérique : stratégies et formes.

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Bibliographie :

ANIS, Jacques, Texte et ordinateur. l’écriture réinventée ?. Paris-Bruxelles, De Boeck, 1998.

BAIDER, Fabienne et CISLARU, Georgeta, (dir.), Cartographie des émotions : propositions linguistiques et sociolinguistiques. Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2013.

CHRISTOPHE, Véronique, Les Émotions : Tours d’horizon des principales théories. Villeneuve-d'Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 1998.

FILLIEULE, Olivier, AGRIKOLIANSKY, Eric et SOMMIER, Isabelle, (dir.), Penser les mouvements sociaux : conflits sociaux et contestations dans les sociétés contemporaines. Paris, La Découverte, 2010.

HESSEL, Stéphane, Indignez-vous !, Montpellier, Indigènes, 2010.

KOMUR-THILLOY, Greta et CELLE, Agnès, (dir.), Le discours du nationalisme en Europe. Paris, L’Improviste, 2010.

KOMUR-THILLOY, Greta et RÉACH-NGÔ, Anne, (dir.), L’écrit à l’épreuve des médias : du Moyen Âge à l’ère électronique. Paris, Classiques Garnier, 2012.

LE BON, Gustave, Psychologie des foules. Paris, PUF, 2013.

MAINGUENEAU, Dominique : Discours et analyse du discours. Paris, Armand Colin, 2014.

MICHELI, Raphaël, Les émotions dans les discours : modèle d’analyse, perspectives empiriques. Louvain-la-Neuve, Duculot, 2015.

MOIRAND, Sophie, Le discours de la presse quotidienne : observer, analyser, comprendre. Paris, PUF, 2007.

NOVAKOVA, Eva et TUTIN, Agnès, (dir.), Le Lexique des émotions. Grenoble, Ellug, 2009.

PAVEAU, Marie-Anne, L’analyse du discours numérique : Dictionnaire des formes et des pratiques. Paris, Hermann, 2017.

PROULX, Serge, MILLETTE, Mélanie et HEATON, Lorna, (dir.), Médias sociaux : enjeux pour la communication. Québec, Presses de l’Université du Québec, 2012.

RIMÉ, Bernard, Le partage social des émotions. Paris, Presses Universitaires de France, 2015.

TRAÏNI, Christophe, (dir.), Emotions… Mobilisation !, Paris, Presses de Sciences Po, 2009.

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Comité d’organisation :

Adel AHADRI, doctorant ILLE, Université de Haute-Alsace, France

Hugo DOUCELIN, doctorant ILLE, Université de Haute-Alsace, France

Maria SCHVETSOVA, doctorante ILLE, Université de Haute-Alsace, France

Tatiana MUSINOVA, Maître de conférences, ILLE, Université de Haute-Alsace, France

Greta KOMUR-THILLOY, Professeure des universités, ILLE, Université de Haute-Alsace, France

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Comité scientifique :

Felipe Aparicio, Université de Haute-Alsace, France

Hélène Barthelmebs-Raguin, Université de Luxembourg, Luxembourg

Elzbieta Biardzka, Université de Wroclaw, Pologne

Lorenzo Devilla, Université de Sassari, Italie

Aleksandra Epimakhova, NArFU, Russie

Yana Grinshpun, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, France

Craig Hamilton, Université de Haute-Alsace, France

Christine Hammann, Université de Haute-Alsace, France

Dhurata Hoxha, Université de Shkodra, Albanie

Joanna Jereczek-Lipińska, Université de Gdansk, Pologne

Alicja Kacprzak, Université de Lodz, Pologne

Greta Komur-Thilloy, Université de Haute-Alsace, France

Juan Manuel López Muñoz, Université de Cadix, Espagne

Anna Mańkowska, Université de Varsovie, Pologne

Fabrice Marsac, Université d'Opole, Pologne

Tatiana Musinova, Université de Haute-Alsace, France

Stéphanie Pahud, Université de Lausanne, Suisse

Nadejda Tarassova, NArFU, Russie

Daciana Vlad, Université D'Ordea,  Roumanie

Particia von Münchow, Université Paris Descartes, France

Carsten Wilhelm, Université de Haute-Alsace, France

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Calendrier :

Diffusion de l’appel à communication : 11 septembre 2019

Date limite de la réception des résumés des contributions : 1er décembre 2019

Réponse aux contributeurs : avant fin décembre

Envoi des propositions :

Un résumé de 300 mots environ ainsi qu’une note biobibliographique du contributeur de 50-80 mots (avec adresse électronique) à Adel Ahadri (adel.ahadri@uha.fr) et Tatiana Musinova (tatiana.musinova@uha.fr)

Frais d’inscription : 100 euros (50 euros pour les doctorants).

Pas de frais d’inscription pour les enseignants et doctorants de l’UHA.

 

[1] HESSEL, Stéphane, Indignez-vous !, Montpellier, Indigènes, 2010, p. 29.