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"Concrete Jungle. Esthétique du vivant en milieu urbain – Arts visuels " (Toulouse)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Camille Prunet)

Colloque Concrete Jungle. Esthétique du vivant en milieu urbain – Arts visuels

Jeudi 4 et vendredi 5 novembre 2021

Auditorium, Musée des Abattoirs, Toulouse, France

Responsabilité scientifique : Aurélie Herbet (Lla-Creatis, Université Toulouse 2) / Marion Laval-Jeantet ( Institut ACTE, Université Paris 1) / Camille Prunet (Lara-Seppia, Université Toulouse 2)

Ce colloque international résulte d’un projet de recherche, débuté en 2019, qui a donné lieu à une première journée d’étude en février 2020 à l’Université Paris 1 – Panthéon-Sorbonne. La seconde journée, « Concrete Jungle : esthétique du vivant en milieu urbain – volet 2 », qui devait se tenir en novembre 2020, a été reportée. Elle fera l’objet d’une journée spécifique le mercredi 3 novembre 2021 à l’auditorium du Musée des Abattoirs.

Le colloque Concrete Jungle propose d’envisager la ville comme un espace vivant, à la fois comme l’environnement des êtres vivants et le milieu qu’ils élaborent. Le titre renvoie autant au film The Lost Week-end [Le Poison] (Billy Wilder, 1945) dans lequel Don Birnam (Ray Milland), ivrogne new-yorkais patenté, évoque la ville comme une gigantesque jungle de béton dans laquelle l’humain lui-même finit par se perdre, qu’à l’ouvrage dirigé par les artistes Mark Dion et Alexis Rockman en 1996 et qui réunissait artistes, théoriciens et scientifiques. C’est bien du constat d’une évolution de l’imaginaire des mégalopoles comme force bétonnée et d’initiatives artistiques alternatives à cette fausse évidence dont nous partons pour regarder les nouveaux possibles qui se dessinent, tout autant que de l’envie de partager cette réflexion avec des disciplines non artistiques participant à reconfigurer l’espace urbain et ses imaginaires. Depuis une dizaine d’années, les écrits et manifestations explorant des initiatives et des pensées écologiques qui s’emparent de la ville se sont multipliées, on peut penser très récemment aux rencontres de l’École urbaine de Lyon, de la Manufacture d’idées ou encore d’Agir pour le vivant à Arles. En s’intéressant particulièrement aux logiques immersives et aux questionnements prospectifs de terrain, on se demandera ici ce que l’art peut inventer comme gestes et comme formes en se confrontant à la place du vivant en milieu urbain. Comment la ville modèle-t-elle notre perception du vivant non humain et comment est-elle investie par les animaux et les plantes ?

Le colloque souhaite approfondir des pistes de réflexion développés dans les deux journées d’étude. Ainsi, il s’agira d’envisager la façon dont des formes et des imaginaires artistiques sur la ville naissent et se nourrissent des interactions entre vivants, notamment en se penchant sur leurs bénéfices mutuels. S’appuyant sur le constat d’Anna Lowenhaupt Tsing selon lequel « les humains se joignent aux autres en fabriquant des paysages qui deviennent l’écho d'une mise en forme involontaire »1, on peut se demander comment cette « mise en forme involontaire » traduit la possibilité de (se) représenter la ville, non pas comme expression d'une volonté humaine de modeler le monde, mais comme un espace co-construit dans une visée perspectiviste2. La question d’une perception élargie de ceux qui constituent la ville se pose. Comment vient-elle en remodeler les représentations que l’on s’en fait ? Si l’on pense, à la suite de Tim Ingold, que « les personnes sont engagées dans des relations continues avec leurs environnements » et que ceux-ci sont « au cœur du processus de vie »3, il sera intéressant de considérer avec attention les différents écosystèmes qui constituent la ville pour mieux penser nos relations complexes avec ceux-ci. De plus, l’emprunt à un certain vocabulaire biologique invite à une réflexion épistémologique. L’enjeu sera bien d’analyser des formes qui activent l’idée d’une « symbiopoïèse »4. L’idée d'une co-genèse complexe des formes, ainsi que des synergies, dans un fonctionnement pouvant rappeler les holobiotes, ces ensembles formés par les organismes et leurs symbiotes, retiendra particulièrement notre attention.

Un autre questionnement important réside dans la possibilité de reconsidérer la ville comme un espace à observer et à activer, où l’on pourrait « s’enforester », pour reprendre l’expression canadienne employée par le philosophe Baptiste Morizot5. Comme l’explique ce dernier, ce terme suggère de travailler un autre rapport aux territoires vivants en se rapprochant d’eux, en les pratiquant et les observant et en se laissant investir par eux. Pister d’infimes signatures afin de rendre perceptible l’invisible, repérer la présence de vivants qui échappe à qui ne prend pas attention, voilà ce que nous souhaiterions questionner à travers des démarches artistiques travaillant en ce sens. Il s’agit de considérer des pratiques engageant le regard et le corps en empathie avec les autres vivants de la ville.

Enfin, envisageant également la portée historiographique et épistémologique des œuvres qui se saisissent de problématiques écologiques en milieu urbain, le colloque souhaite identifier des œuvres puisant leurs formes, plus que leur propos, dans des connaissances scientifiques et, par cette approche épistémique, de les analyser en y repérant cette « autre » histoire, différente de la lecture souhaitée par l’artiste, qui est celle des savoirs qui se conjuguent pour faire advenir une forme. En effet, l’œuvre d’art, par ses formes et suivant ses modalités d’analyse, est susceptible de témoigner d’un état des connaissances scientifiques par les représentations et les modalités de conception qu’elle engage. En ce sens, elle génère une histoire qui peut se détacher de l’œuvre proprement dite, sans lien nécessaire avec l’intention ou le discours revendiqués par l’artiste. Le colloque propose donc de s’emparer d’œuvres qui participent d’une histoire des connaissances et donnent à voir les enjeux écologiques, non pas dans un discours militant sur ces questions, mais dans des formes (fixes ou en mouvement, vivantes comme non vivantes) activant des logiques d’interaction et de co-genèse. Cette manifestation scientifique souhaite engager une nouvelle approche épistémologique, plus qu’un renouvellement des méthodologies d’analyse des œuvres. Les démarches artistiques dites « écologiques », au sens où elles prétendent tenir un discours ou représenter la place du vivant en ville, ne constituent pas l’objet de cette recherche.

Le développement de nouveaux imaginaires sur la ville au tournant du XXe et du XXIe siècles indique que la situation écologique traversée actuellement, désignée couramment sous le nom géologique d’anthropocène et qui se traduit par une anthropisation mondiale, incite la science occidentale à s’ouvrir à d’autres modes de connaissances du monde.

 

Les propositions de communication doivent être envoyées au plus tard le 1er juin 2021, aux deux adresses suivantes : aurelie.herbet@univ-tlse2.fr et camille.prunet@univ-tlse2.fr

Elles comporteront les nom, prénom, et qualités de l’auteur ; le titre de la contribution assorti d’un argumentaire d’une quinzaine de lignes accompagné de visuels si nécessaire et d’une courte bio-bibliographie.

Une réponse sera donnée début juillet 2021.

 

Comité scientifique :

- Bruno Nassim Aboudrar, Professeur en Esthétique, LIRA, Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle

- Nathalie Brevet, MCF en Urbanisme, CITERES, Université de Tours, et artiste

- Marie-Laure Delaporte, Docteure en Histoire de l’art, HAR, Université Paris Nanterre, Post-Doctorante à l’Institut Allemand d’Histoire de l’art

- Sophie Lécole-Solnychkine, MCF en Arts plastiques, LARA-SEPPIA, Université Toulouse 2 – Jean Jaurès

 

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

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AIT TOUATI, Frédérique, ARENES, Alexandra, GREGOIRE, Axelle, Terra Forma: Manuel de cartographies potentielles, Lyon, Éditions B42, 2019

AFEISSA, Hicham-Stéphane et Lafolie, Yann (Dir.), Esthétique de l’environnement, Appréciation, connaissance et devoir, Paris, Vrin, 2015

BARBANTI, Roberto, VERNER, Lorraine (dir.), Les Limites du vivant. À la lisière de l'art, de la philosophie et des sciences de la nature, Bellevaux, Éditions Dehors, 2016

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1 Ibid., p. 231.

2 VIVEIROS DE CASTRO, Eduardo, Métaphysiques cannibales, Paris, PUF, 2009.

3 INGOLD, Tim, Marcher avec les dragons, Bruxelles, Zones Sensibles, 2013, p. 132.

4 TSING, Anna Lowenhaupt, Le Champignon de la fin du monde, op. cit., p. 218.

5 MORIZOT, Baptiste, Sur la piste animale, Arles, Actes Sud, 2018