Passés Futurs, n° 8, Politika.io, 2021.
« Ce que les artistes font à l’histoire »,
coordonné par Olivier Abel, Thomas Hirsch et Sabina Loriga.
Les représentations artistiques du passé sont précieuses – pour la société et pour l’histoire –, et les sciences sociales ne peuvent que s’enrichir de leurs contributions. Elles questionnent les différentes manières dont le passé affecte les individus et montrent les implications existentielles en jeu. Elles travaillent les discordances, les incohérences et les possibilités non réalisées de l’histoire. Dans notre conjoncture historique, elles expriment aussi une demande « éthique » importante vis-à-vis du passé. Elles encouragent les historiens à cesser d’occulter les individus derrière des catégories impersonnelles et – peut-être – à montrer plus de courage face au « pouvoir du régime ».
Pour toutes ces raisons, l’actuelle vague de fictionnalisation du passé mérite d’être approfondie. Comment les sources d’archives sont-elles utilisées ? L’histoire est-elle employée en tant que source, que moyen ou que décor ? Quelles sont les stratégies adoptées pour saisir et restituer le passé ? Quel est le rôle de l’empathie et de la distanciation ? Il s’agit d’interroger la production artistique de manière critique, sans céder à la prétention de pureté politique qui est parfois formulée de la part des artistes, car les arts peuvent avoir un effet mensonger, de manière intentionnelle ou non.
C’est notamment ce que montrent les analyses de deux auteurs de ce numéro. Dans l’article qu’il consacre au célèbre artiste allemand, Anselm Kiefer, Éric Michaud met en lumière la relation ambivalente de l’artiste au nazisme et à l’histoire de son pays.
La richesse du dossier tient tant à la variété des cas abordés (littérature, arts picturaux, musique, cinéma, etc.) qu’à la diversité des approches et des concepts mobilisés aussi bien par les artistes que les chercheurs.
Sommaire :
Ce que les artistes font à l'histoire
Olivier Abel, Thomas Hirsch et Sabina Loriga
Anselm Kiefer et le reenactment esthétique du national-socialisme
Éric Michaud
Produire de l’empathie ou de la distance ?
Monica Martinat
L’art après l’histoire
Maria Stavrinaki
Les séductions de l’enquête
Annick Louis
Musique de guerre, paroles de paix
Esteban Buch
Le monde social de la littérature, entre patrimoine et contemporain (1980-2020)
Philippe Roussin
L’histoire et la fiction ne s’affrontent pas mais avancent côte à côte
László Krasznahorkai, Damien Marguet
« El documental hace de la dificultad de representar al pasado su propia premisa »
Nicolás Prividera, Daniel Bernardo Sazbón
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Note critique : La política revolucionaria latinoamericana en un contexto global
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Note critique : La psichiatria jugoslava nella Seconda Guerra Mondiale
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À propos de Passés Futurs
Animée par un comité de rédaction réunissant des chercheurs et des chercheuses en France, en Argentine, et en Espagne, la revue entend analyser les formes multiples d’usages du passé qui circulent dans nos espaces publics, aux différentes échelles (du niveau local au niveau transnational et global) et en les replaçant dans des approches de moyenne ou de longue durée.
La revue, dont le titre est un double hommage aux travaux d’Hannah Arendt sur la brèche temporelle et à ceux de Reinhart Koselleck sur les futurs passés, vise à élargir la notion d’usage public du passé en cherchant à comprendre les différentes initiatives de mobilisation du passé aux niveaux où elles s’élaborent.