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Dumas comique (Musée Marmottan, Paris)

Dumas comique (Musée Marmottan, Paris)

Publié le par Marc Escola (Source : Sylvain Ledda)

Dumas comique

Colloque international à l'initiative de Julie Anselmini & Sylvain Ledda

Les 10 et 11 décembre 2026

Amphithéâtre Bruno Foucart

Musée Marmottan, 2, rue Louis Boilly, 75016 Paris

Après Walter Scott, Alexandre Dumas les divertit à la manière d’une lanterne magique. Ses personnages, alertes comme des singes, forts comme des bœufs, gais comme des pinsons, entrent et partent brusquement, sautent des toits sur le pavé, reçoivent d’affreuses blessures dont ils guérissent, sont crus morts et reparaissent. Il y a des trappes sous les planchers, des antidotes, des déguisements et tout se mêle, court et se débrouille, sans une minute pour la réflexion. L’amour conserve de la décence, le fanatisme est gai, les massacres font sourire. 

Si la gaieté, soulignée dans ce passage de Bouvard et Pécuchet (chap. V), est mâtinée chez Dumas de gravité et même de tragique, il est indéniable que son œuvre présente une dimension comique évidente. Non seulement l’auteur d’Antony et de La Tour de Nesle est aussi l’auteur de diverses comédies (Mademoiselle de Belle-Isle, Un mariage sous Louis XV, Les Demoiselles de Saint-Cyr…), mais il choisit aussi de mettre en scène des comédies contemporaines quand il crée le Théâtre-Historique (Le Chandelier de Musset, par exemple). La culture comique de Dumas est vaste, aussi des personnages ou motifs empruntés à la comédie, voire à la farce, parcourent-ils son œuvre romanesque, comme ses récits de voyage, ses contes et ses articles de presse : dans les romans, on songera à Porthos, comparé au bourgeois gentilhomme de Molière, au moine Gorenflot de La Dame de Monsoreau ou encore à Bannière, personnage de comédien dans Olympe de Clèves. Au-delà de cette prégnance de patrons comiques, tout lecteur de Dumas a été sensible à l’humour de l’auteur, très présent dans ses récits de voyage ou dans la mise en scène souvent auto-ironique de ses Mémoires et causeries. Les bons mots de Dumas, son sens de la plaisanterie, ses répliques spirituelles, sont également restés célèbres chez ses contemporains.  

Au-delà des genres comiques pratiqués par Dumas, ou des emprunts à la comédie (Molière, Shakespeare, Beaumarchais), le comique est partout disséminé dans son œuvre. Les grands romans historiques, y compris les plus sombres, ont leur veine comique, qui fonctionne tantôt comme un repoussoir, tantôt comme une respiration. Inscrit dans la chair même de l’écrivain, le comique est consubstantiel de toute son œuvre. Aussi Dumas manie-t-il toutes les formes du comique, de l’ironie la plus subtile aux grivoiseries les plus explicites, en passant par les visages expressifs du grotesque, les mines surprenantes du farcesque ou l’héroï-comique. L’horreur de l’ennui que fuit Dumas explique aussi ce recours récurrent au comique, à la fois comme conjuration du réel et comme remède à un siècle en habit noir. Le comique n’a pas pour seule fonction de faire rire dans l’œuvre de Dumas, il s’agit d’un objet de méditation à part entière, d’une vision projetée sur les actions humaines ou sur les vanités du monde. En un siècle désenchanté, le rire et le comique dumasiens offrent la possibilité d’un « réenchantement du monde » ; le sens de l’auto-dérision et de la mise en scène pittoresque de soi participent aussi d’un positionnement littéraire et éthique. Le comique chez Dumas est une arme autant qu’une défense, qui s’inscrit aussi dans la tradition de « l’esprit français » dont témoigne, entre autres, son art de la causerie.

L’objectif du colloque sera d’explorer en profondeur les formes et enjeux du comique chez Dumas, dans les différents genres qu’il a illustrés, et de mesurer en quoi cette composante est essentielle à la compréhension tant de la poétique dumasienne que de la popularité de cette œuvre.

Les propositions sont à adresser avant le 30 juin 2026 à :

julie.anselmini@unicaen.fr et sylvain.ledda@univ-rouen.fr