
Un monde au bord de l’apnée : entre asphyxie et bulles d’oxygène. Tribune 2026 (Univ. of British Columbia, Vancouver, Canada)
Tribune est un colloque bilingue (français-anglais) organisé par des étudiant·e·s en littérature comparée et en sciences humaines de diverses universités canadiennes. Depuis 2015, ce colloque a été accueilli par des institutions francophones et anglophones à travers le Canada, avec le soutien de plusieurs entités académiques. Son objectif principal est d’offrir un espace— une tribune — aux jeunes chercheur·euse·s afin qu’ils et elles puissent présenter leurs travaux en lien avec les approches comparatistes.
À une époque où les départements d’études littéraires sont menacés, ou régulièrement fusionnés, il devient urgent de repenser la manière dont les étudiant·e·s travaillent ensemble, cohabitent, tissent des liens entre littérature et arts, théorie et herméneutique, création et machine, littératures nationales et frontières. Tribune est un espace prônant la nécessité des approches comparatistes, et entend être une conférence au cours de laquelle une diversité de connexions, approches et problématiques sont présentées et discutées.
La conférence se tiendra sur deux jours :
1) La première journée sera consacrée à des communications libres, sans thématique préétablie. Dans un cadre bienveillant et inclusif, les jeunes chercheur·euse·s seront invité·e·s à présenter leurs recherches et à découvrir celles de leurs collègues. Il s’agira de créer une « bulle intellectuelle » pour rendre compte — et prendre conscience — de ce qu’est, pour notre génération, la littérature comparée : ses méthodes, ses objets, ses enjeux.
2) Le deuxième jour sera consacré à la représentation — métaphorique ou littérale — de l’asphyxie et des bulles d’oxygène dans la littérature, le cinéma et, plus généralement, les arts.
Dans Respire (2023), Marielle Macé relie le besoin de respirer avec les asphyxies contemporaines devenues politiques ( « I can’t breathe » de George Floyd). Elle identifie « une nouvelle condition respiratoire » depuis l’ère industrielle, une manière de vivre qui est à bout de souffle/essoufflée. Achille Mbembe remarque que « si le Covid-19 est l’expression spectaculaire de l’impasse planétaire dans laquelle l’humanité se trouve, alors il s’agit, ni plus ni moins, de recomposer une Terre habitable parce qu’elle offrira à tous la possibilité d’une vie respirable ». (https://aoc.media/opinion/2020/04/05/le-droit-universel-a-la-respiration/) Alors que le monde est de plus en plus irrespirable et divisé, il est important de rappeler le besoin vital de respirer, qui repose, par définition, sur un échange avec le dehors.
L’air ne connaît pas de frontière. Il est connecté au vivant. Une forme de vie en quête d’oxygène saura toujours contourner l’étanchéité des enceintes closes. Là où l’air manque, la vie invente des voies détournées, des tranchées, des lignes de fuite imprévues. Depuis plusieurs décennies, la littérature et les arts ont identifié différentes asphyxies contemporaines (physiques, psychiques, politiques), résisté et proposé de nouvelles manières de respirer et de vivre, en tant qu’individu mais également tous ensemble. Par le prisme de l’imaginaire ou du témoignage, auteur.e.s et artistes inventent des formes flamboyantes qui invitent au débordement, à l’explosion, ou bien des formes minuscules qui ouvrent plus discrètement des brèches dans les parois d’un monde en apparence clos et sclérosé. La fissure est inévitable. Ce colloque propose de penser les agents qui œuvrent à ouvrir une brèche autant que ceux qui créent des espaces plus respirables au sein de l’ancien monde. Littérature et arts permettent de sortir des cadres normatifs, aux corps marginalisés d’exister, à des subjectivités et esthétiques alternatives de s’exprimer.
Parmi ces formes, figure la bulle qui est, par nature, ligne de séparation et d’union, membrane ayant la propriété de pouvoir se fondre avec d’autres bulles pour former des espaces communs plus étendus. Il faut faire éclater certaines bulles, celles qui divisent et isolent, et en créer d’autres, celles qui unissent, protègent, créent et repensent l’espace. À titre d’exemple, les installations Infinity Mirror Rooms (1965-2016) de Yayoi Kusama produisent des bulles immersives où l’espace clôturé permet d’expérimenter le vertige de l’infini. Dans Bulles (1998), premier volume de la trilogie Sphères (1998), Peter Sloterdijk identifie la bulle de savon comme un espace permettant d’observer l’air et la vie et l’identifie comme un espace intime permettant aux êtres de se construire, à la fois physiquement et émotionnellement. En d’autres mots, la bulle devient un catalyseur épistémique inattendu.
Au cours de cette journée, il s’agira de penser la manière dont littérature et arts inventent des relais, relient ce qui était séparé, et ouvrent de nouvelles “trachées” dans un espace où l’air est devenu irrespirable et toxique.
Toute communication entrant en résonance avec la thématique sera la bienvenue.
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Le colloque se tiendra les 3 et 4 avril 2026 sur le campus de UBC à Vancouver.
Les propositions de communication, rédigées en français ou en anglais, doivent comporter : le titre de la communication, un résumé de 300 mots environ et une courte notice biographique.
Merci d’expliciter si vous proposez une communication libre ou liée à la thématique du colloque.
Les propositions sont à envoyer avant le 15 novembre 2025 à l’adresse suivante: tribune26vancouver@gmail.com
Comité organisateur :
Liliane Ehrhart (UQAM), Samuele Ellena (UdeM), Glenda Ferbeyre Rodriguez (UdeM), Farimah Mahmoodi (UBC), Cheng Chi (UBC), Ying Han (UBC)