Actualité
Appels à contributions
Faire (l')événement (Bordeaux)

Faire (l')événement (Bordeaux)

Publié le par Vincent Ferré (Source : Lucile Bordes et Laïla Fatih)

Journée d’étude

« Faire (l’)événement »

organisée par Lucile Bordes (UBM / Plurielles) et Laïla Fatih (UBM / Plurielles)

Littératures & Mondes

21 janvier 2026

Maison de la Recherche

Les propositions provenant de la littérature et de l’histoire sont les bienvenues. 

Entamée à la fin du XIXe siècle et entérinée par l’École des Annales dans les années 1930, la « crise de l’événement » remet en question un rapport à l’écriture de l’histoire fondé sur la narrativisation d’une succession d’événements majeurs et ponctuels, sur la création d’une lecture a posteriori de l’événement qui permet à l’historien·ne de retracer l’intrigue de l’histoire. On décrie alors une histoire-bataille qui se pense histoire de l’événement. Ce bouleversement des pratiques historiographiques au XXe siècle fait alors émerger un mouvement de rejet scientifique de l’histoire événementielle, l’« idole de l’événement » (F. Simiand) se voit ainsi déchue. Après la Seconde Guerre Mondiale, de nombreux travaux se concentrent non plus sur l’événement, mais sur les systèmes qui engendrent des expériences collectives et sur des manifestations répétées qui formalisent les ruptures de l'équilibre ou des rétablissements du politique (K. Pomian).

Cette journée d’étude s’inscrit dans l’héritage de cette révolution historiographique et questionne la place de l’événement dans l’étude des structures qui portent notre tissu social, culturel et artistique. En effet, la fin du XXe siècle marque un tournant dans l’instrumentalisation de l’événement : Olivier Lévy-Dumoulin parle d’une transformation de l’événement en « symptôme révélateur, sous son apparence exceptionnelle, […] de la structure du corps social ou de “l’ordinaire de la vie” ». L’événement devient le miroir de dynamiques collectives qui dépassent les individus et il nous permet de réfléchir aux manifestations de notre inscription dans des sociétés qui se transforment mais dont les dynamiques de fond (colonialisme, capitalisme, patriarcat) demeurent.

Dans un article intitulé « Les temporalités de l’événement en histoire », l’historien Luc Capdevila écrit quant à lui : « [...] l’événement n’existe pas seulement parce qu’il s’est produit [...], [m]ais par l’usage immédiat ou postérieur que l’on en fait, par le sens qu’on lui donne. Autrement dit, l’écriture fait l’événement. L’événement est, par essence, médiatique ». L’événement est ainsi une construction et non une donnée. Il nous semble alors primordial d’examiner, en tant que chercheur·euses en littérature et en histoire, les récits proposés par les écrivain·es qui pensent l'événement à la fois dans et en dehors des discours médiatiques et historiographiques contemporains (Roland Barthes écrivait ainsi que l'œuvre littéraire est « à la fois signe d'une histoire et résistance à cette histoire »), car la littérature, et plus particulièrement, les fictions travaillent les temporalités à travers les anachronismes, les discontinuités, ce que ne peuvent se permettre impunément ni les historien.nes ni les littéraires.

Cette journée d’étude cherche à proposer un dialogue autour des modalités de ces manifestations diverses dans la littérature moderne et contemporaine, à travers l’exploration de matériaux événementiels marginaux et d’une histoire alternative écrite par les absent·es de l’événement.

Dans un premier temps (axe 1), nous nous interrogerons sur ce qui dans les textes, dans la matière textuelle, transforment, érigent les faits en événements. Cette interrogation nous amènera à réfléchir aux faits élus ou éludés par les écrivain·es, et à mettre en évidence des récits qui proposent des chronologies alternatives et/ou marginales, à partir d’une série de ce qui apparaît comme des « non-événements » dans les discours dominants et qui deviennent alors des « contre-événements ». Les perspectives féministes décoloniales sont notamment propices à cette interrogation. Ce premier axe peut aussi accueillir des propositions de communication qui valoriseraient une réflexion sur la poétique des textes et/ou sur une éthique de la forme (fictionnelle, testimoniale, etc.) dans les processus de création de l’événement.

Dans un deuxième temps (axe 2), nous nous intéresserons plus longuement à la « question de l’échelle de la réception ». Dans le même article, Luc Capdevila montre que l’événement ne prend sens qu’au sein d’une communauté qui s’identifie à un destin collectif et dispose de la « capacité technique et politique à le faire savoir ». L’événement marque la possibilité de faire corps avec la communauté, de revendiquer son appartenance à une expérience partagée de l’espace public et de l’air du temps. Il implique d’être remarqué, entendu, et remémoré. Ce deuxième temps posera donc aussi la question des communautés et des récits marginalisés, invisibilisés, tus. Nous aurons ainsi l’occasion de réfléchir aux processus de légitimation, d’autorité, de médiation de ces récits, processus qui se font contre ou à l’intérieur même des discours dominants (patriarcaux, coloniaux), proposant alors peut-être des lectures plus globales du passé. Par ailleurs, nous pouvons nous interroger : la littérature crée-t-elle de nouvelles communautés de sens, des imaginaires communs, ou s’appuie-t-elle sur d’anciennes solidarités, de vieilles hiérarchies ?

Modalités de soumission d’une proposition de communication :

500 mots (doit comprendre la problématique et le corpus), accompagné d’une brève biobibliographie.

Date limite de soumission : 30 septembre 2025

Publication des résultats : mi-octobre 2025

Propositions à adresser à : lucile.bordes@u-bordeaux-montaigne.fr et laila.fatih@u-bordeaux-montaigne.fr 

Les communications dureront 20 minutes.

— 

Informations pratiques

Date de la journée d’étude : 21 janvier 2026

Lieu : Université Bordeaux Montaigne, Pessac, France.

La publication dans une revue est envisagée.

Déjeuner pris en charge.