
Les représentations graphiques et audio-visuelles des violences extrêmes destinées à un jeune public (Ottawa)
Les représentations graphiques et audio-visuelles des violences extrêmes destinées à un jeune public
Trent University / Université d’Ottawa
7 – 9 mai 2026
Depuis les années 1980, les productions graphiques (BD, romans graphiques, albums) ou audiovisuelles (films d’animation, fictions documentaires, documentaires pour enfants ou adolescents, etc.) ont rencontré un certain regain d’intérêt, grâce, entre autres, à l’alliage récit/graphisme, qui permet aux lecteurs de passer d’un palier de lecture à l’autre, alimentant ainsi deux niveaux de lecture distincts mais complémentaires. Ces productions abordent volontiers les violences extrêmes générées par des états fascistes ou totalitaires et débouchant sur des guerres civiles, des génocides, des crimes contre l’humanité, mais sous des angles et avec des outils différents de ceux de l’historiographie, bien que tous les créateurs de contenu puisent leur savoir dans les sources que les chercheurs ont déjà produites (Aurora Sunrise de Inna Sahakian). Ils s’informent directement auprès de ces sources, tout en s’enquérant parfois aussi auprès de témoins, ce qui permet d’ajouter des touches plus personnelles et intimes à leurs productions : Michel Kichka, Deuxième génération, Thomas Zribi et Damin Roudeau, Rwanda. À la poursuite des génocidaires ou le chapitre 42 de la série télévisée Historia de Canarias : La Guerra Civil en Canarias, ou encore le chapitre « La asombrosa clase de Zamba sobre la memoria » de la série argentine Paka Paka.
Bien que l’objectif premier de toutes ces productions soit de transmettre le passé aux jeunes générations, unissant ainsi les générations entre elles, elles véhiculent, ce faisant, les valeurs qui répondent ou font écho aux valeurs circulant dans la société réceptrice, comme le sont, par exemple, le devoir de mémoire, le patriotisme ou le pacifisme. Elles rejettent la guerre et les violences extrêmes, présentées de biais et surtout dans leur absurdité. Nous proposons de nous pencher sur toutes ces productions (graphiques et audio-visuelles) qui s’adressent aux enfants et aux adolescents pour leur raconter le passé et les violences qui ont touché leurs parents ou grands-parents, ou indirectement l’histoire de leur famille ou de leur communauté ou, plus largement, de leur pays.
Il s’agira, d’une part, d’analyser les différentes esthétiques développées par les dessinateurs pour montrer les violences (images diégétiques sensorielles) et pour mettre en scène et représenter les différents acteurs (forces armées, guerilleros, milices, résistance, population civile) dans leur ressenti, leurs attitudes et leurs pensées (images diégétiques, non sensorielles, métaphores visuelles, métalangage), en se penchant peut-être particulièrement sur les visages, aussi bien des victimes que des bourreaux (MAUS, Deuxième Génération, Ginette Kolinka, L’Institutrice), en abordant la dimension herméneutique qui se manifeste dans le choix des couleurs, des cadrages, des gros plans, des angles de vue, du gaufrier, les mondes parallèles ou des polices utilisées, mais également dans des moments pivots avec l’apparition de tableaux sur une ou deux planches à la place du gaufrier, de moments répétitifs ponctuant la narration et servant de rappel illustré.
D’autre part, nous invitons à aborder le récit en tenant compte de divers paramètres, tels que la distance spatio-temporelle du public-cible avec les événements rapportés, le point de vue adopté par l’auteur et les ressources mises à contribution (témoignage personnel, de victimes, d’archives, de récits historiques, etc.) et reproduites dans les œuvres (lettres, photographies, cartes d’identités, pages manuscrites, etc.), ainsi que les commentaires de l’auteur lorsque la narration se fait à la première personne, voire lorsque celle-ci adopte un semblant d’objectivité en laissant que les personnages soient les acteurs du récit.
Nous invitons également à réfléchir sur l’approche phénoménologique du traumatisme telles que les images le dépeignent (personnages fantomatiques dans Rwanda. À la poursuite des génocidaires, des monstres éthérés menaçant dans Le Chapeau mystérieux de Monsieur Pinon), ou encore sur les manières d’aborder et de dépeindre la résistance, la désobéissance, la collaboration.
Chaque auteur ayant son style propre, le lien entre l’esthétique et les visées de ces productions méritent également que l’on s’y attarde, qu’il s’agisse de biographies, d'autofictions ou de fictions. L’ensemble (images-récit) ayant pour public cible des lecteurs cherchant une source d’informations qui allie souvent le sérieux et le “ludique”, il convient de se demander comment se marient l’humour et les horreurs des violences représentées et narrées ? Et comment le besoin de savoir, de voir, de comprendre et de réfléchir est travaillé par le texte et les images qui l’accompagnent.
Voici quelques autres pistes de réflexion permettant d’aborder le comment et le pourquoi des dessins, des faits rapportés et de la vision développée (intime, particularisante, universalisante, etc.) :
S’agit-il de glorifier un idéal (démocratie, justice, héroïsme, patriotisme) ?
Quel portrait fait-on de la violence ? Comment la met-on en scène ? À quelles représentations fait-on appel pour qu’elles acquièrent une signification pertinente pour le public-cible ?
Les auteurs tentent-ils de souligner l’absurdité des violences (Charly’s War), la laideur de celles-ci, l’horreur (“The Black Chair” dans l’anthologie To End All Wars) ? Comment s’y attèlent-ils ? Y a-t-il des limites à ce qui peut/doit être montré/raconté ? Comment cela s’inscrit-il dans les images et dans le récit ?
Comment la mémoire collective façonne-t-elle la narration ?
Peut-on parler de mémorialisation lorsque ces productions s’adressent à des publics qui n’ont plus que des liens tenus avec les événements racontés ?
Comment la passation intergénérationnelle s’effectue-t-elle ?
Quels liens, quels messages et quelles leçons peuvent en tirer les publics visés qui soient conjoncturellement pertinents ?
Les questions ci-dessus soulevées ne sont là qu’à titre indicatif pour permettre à chacun.e de saisir le cadrage du colloque.
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Envoyez vos propositions avant le 30 septembre 2025 à catalinasagarra@trentu.ca en précisant “BD 2026” dans l’objet de vos courriels.
Informations pratiques :
Les personnes désirant participer à cette rencontre devront envoyer au plus tard le 30 septembre 2025 le titre et le résumé de leur communication (250 mots maximum), en français, espagnol ou anglais.
Les langues du colloque sont le français, l'espagnol et l’anglais.
Le comité organisateur fera connaître sa réponse par voie électronique (e-mail) le 30 octobre 2025 au plus tard.
Les communications, après évaluation, feront l’objet d’une mise en ligne dans la e-revue GenObs.
La communication orale ne devra pas dépasser 30 minutes et toute communication nécessitant un appui technique (power point, vidéoprojecteur, etc.) devra être signalée.
Frais d’inscription :
Le coût de l’inscription est de 100 dollars canadiens (CAD).
Pour les étudiant.e.s, le coût de l’inscription est de 70 $ CAD.
L’événement est gratuit pour le grand public voulant assister aux présentations.
Hébergement :
Les informations concernant l’hébergement seront transmises ultérieurement et après acceptation de la proposition.
Comité organisateur :
Vivianne Chatel (Université de Fribourg, Suisse) : viviane.chatel@unifr.ch
Muriel Paradelle (Université d’Ottawa, Canada) : Muriel.Paradelle@uottawa.ca
Catalina Sagarra (Trent University, Canada) : catalinasagarra@trentu.ca (Trent University, Canada)
Site de référence : http://ojs.trentu.ca/ojs/index.php/genobs/announcement