
Entre 1970 et 2024, à peu près quatre cents ouvrages écrits par des auteures brésiliennes ont été publiés en France, selon des données fournies par le catalogue général de la BNF. Parmi les différentes thématiques, des nombreux livres scientifiques (en histoire, anthropologie, sociologie, psychologie, éducation), mais également des livres d’architecture, des reportages, des témoignages d'exilées de la dictature militaire, des œuvres de fiction dénonçant la situation des femmes au Brésil, ainsi que le racisme et la violence au quotidien. Les genres fictionnels sont majoritaires : des romans, des nouvelles, de la poésie et des chroniques. L’aspect surprenant pourtant est la présence importante d'ouvrages spirituels, dès les psychographies spirites aux études de la bible, des récits de la vie des saints, ou encore des manuels de yoga et de bien-être. Fort de ces constats, nous aimerions comprendre l’intérêt porté par le champ intellectuel français aux ouvrages écrits par des auteures d'un pays et d’une langue très peu traduite, comme le portugais, en comparaison à des langues centrales et hyper-centrales.
De plus, nous savons aujourd’hui que la circulation de Brésiliennes en France, notamment celles exilées par la dictature militaire, ont joué un rôle important au sein des différents mouvement féministes émergeant dans les années 1970 (Abreu, 2014). En effet, cette décennie constitue un moment de rupture, « caractérisé notamment par le fait que la question de la différence des sexes ne serait plus posée par les seuls gardiens masculins du savoir et de sa transmission, mais par les femmes elles-mêmes, intellectuelles ou non » (Collin, Pisier, Varikas, 2011, 07). L'idée que la culture dans son ensemble, et plus spécifiquement en France, se féminise, est courante aujourd’hui et, bien évidemment, les réactions sont multiples. Comme le dit Maurice Daumas (2019), « la peur de la subversion par les valeurs féminines domine la pensée antiféministe. Si la dévirilisation des hommes relève du fantasme, la féminisation de notre culture est une réalité ». En juin 2005, le Bulletin du département des études, de la prospective et des statiques publie un rapport signé par Olivier Donnat qui démontre que les femmes sont désormais plus nombreuses que les hommes à s'intéresser aux arts et à la culture en France.
Notre Journée d’Études souhaiterait ainsi réfléchir aux publications d’écrivaines brésiliennes en France dans ce contexte de forts changements sociaux et intellectuels, en s’interrogeant sur les rapports existants entre cette circulation et les perceptions de genre des sociétés brésiliennes et françaises au XXème siècle.