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Littératures africaines, transferts et appropriations culturelles. Congrès de l’Association pour l’étude des littératures africaines, APELA (Strasbourg)

Littératures africaines, transferts et appropriations culturelles. Congrès de l’Association pour l’étude des littératures africaines, APELA (Strasbourg)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Anthony Mangeon)

Littératures africaines, transferts et appropriations culturelles

Congrès de l’Association pour l’étude des littératures africaines (APELA),

Université de Strasbourg, Misha, 4-6 novembre 2025.

La notion d’appropriation culturelle, initialement développée aux États-Unis dans le cadre des revendications des droits des minorités, s’impose aujourd’hui en Europe et en Afrique dans de nombreux débats sur la culture, la littérature et les arts. Elle désigne généralement des phénomènes de transferts culturels effectués sous la pression d’une forme de domination, le dominant s'appropriant, sans droit ni légitimité, le patrimoine culturel de celui qu’il domine (voir entre autres Young 2010). De la réinterprétation du primitivisme (Le Quellec Cottier & Rodriguez, 2023) aux fictions d’identités scripturales étudiées par Christopher Miller (Miller 2018), les débats sur l’appropriation culturelle se sont multipliés ces dernières années.

Le « travail de mémoire » effectué sur le passé colonial de la France et, au niveau culturel, le débat sur la restitution du patrimoine africain (cf. Sarr / Savoy 2018) ont ouvert la voie à de nouveaux questionnements et mènent à un renouvellement des lectures et des interprétations, qui intègrent désormais une interrogation éthique sur la responsabilité de l’artiste ou de l’écrivain dans son rapport à la culture de l’autre ou du dominé. Dès lors, l’idée d’appropriation culturelle tend, dans certains cas extrêmes, à se substituer aux concepts d’intertextualité, de transfert culturel (Espagne 2013) ou de « branchements » (Amselle 2001), jusqu’à nourrir des discours critiques et politiques qui prétendent invalider les approches strictement esthétiques de certaines œuvres.

Ces nouvelles tendances trouvent un écho d’autant plus important que les identités se radicalisent (Amselle 2011, Bancel / Blanchard 2017, Dubreuil 2019). Par ailleurs, la contestation des modèles postcoloniaux (hybridité, mimétisme, créolisation, etc.) par l’émergence de formes radicales du décolonialisme, concevant culture et identité en termes d’authenticité, de propriété, de limites, d’espace clos, contribue à nourrir le débat sur la légitimité de la prise de parole culturelle, au risque parfois d’une atteinte à la liberté d’expression. Enfin, la marchandisation croissante de la culture dans nos sociétés globalisées pose le problème de la spoliation économique par la reproduction et commercialisation d’artefacts (voir également Root, 1996), comme le révèle entre autres le débat autour du boomerang de Chanel en 2017.

Ce congrès de l’APELA, organisé dans le cadre d’une coopération entre l’Université de Strasbourg et l’Université Johannes Gutenberg de Mayence, portera sur les enjeux des définitions contemporaines de l’identité et de leurs relations à l’expression culturelle : l’authenticité peut-elle être une revendication ou un critère d’évaluation des œuvres ? Sur quoi reposerait-elle ? Quelle réception induit-elle ? Et quelles conséquences à terme sur la création ?

Les interventions pourront porter sur :

-       Des études de cas ; 

-       Les constructions littéraires et artistiques de l’authenticité culturelle : pastiches, détournements, pseudonymies, postures et impostures ;

-       Des approches théoriques et critiques des notions d’appropriation, de transfert, d’authenticité

-       Les apports et les limites de la notion d’appropriation culturelle dans le domaine des études africaines

-       Les variations de la réception des œuvres en fonction des déplacements et des décalages contextuels ;

-       L’appropriation symbolique et la marchandisation, la critique de la « dérive capitaliste » ;

-       La relation entre éthique et esthétique. 

Veuillez adresser vos propositions avant le 1er décembre 2024 à :

Ninon Chavoz (chavoz@unistra.fr)

Anthony Mangeon (amangeon@unistra.fr)

Véronique Porra (porra@uni-mainz.de

Les frais de déplacement et d’hébergement sont à la charge des participants ou de leur laboratoire de recherche. La restauration sera prise en charge, en fonction des subventions obtenues.

Cet événement bénéficiera du soutien de l’institut thématique interdisciplinaire Lethica et de l’unité de recherches Configurations littéraires (Université de Strasbourg).

Bibliographie sélective :

Amselle, Jean-Loup. Branchements. Anthropologie de l’universalité des cultures, Paris, Flammarion, 2001.

Amselle, Jean-Loup. L’ethnicisation de la France, Fécamp, Éditions Lignes, 2011.

Amselle, Jean-Loup. Critique de la raison animiste, San Giovanni, Mimésis, 2023.

Appiah, Kwame Anthony. The Ethics of Identity, Princeton, Princeton University Press, 2005.

Appiah, Kwame Anthony. Cosmopolitisme. Paris, Odile Jacob, 2008.

Ben Lakhdar, Khémaïs. L’appropriation culturelle : histoire, domination et création : aux origines d’un pillage occidental, Paris, Stock, 2024.

Blanchard, Pascal / Bancel, Nicolas / Thomas, Dominic (dir.). Vers la guerre des identités ? De la fracture coloniale à la révolution ultranationale, Paris, La Découverte, 2016.

Brown, Michael Fobes. Who Owns Native Culture ?, Cambridge, Harvard University Press, 2003.

Coleman, Elizabeth Burns. Aboriginal Art, Identity and Authenticity, Aldershot, Ashgate, 2005.

Dubreuil, Laurent. La dictature des identités, Paris, Gallimard, 2019.

Espagne, Michel. « La notion de transfert culturel », in Revue Sciences / Lettres 1, 2013, URL : http://journals.openedition.org/rsl/219

Hahn, Hans Peter. « Antinomien kultureller Aneignung: Eine Einführung », Zeitschrift für Ethnologie, 136, 2011, p. 11–26.

Hurka, Thomas. « Should Whites Write About Minorities? » in Hurka, Thomas (dir.): Principles: Short Essays on Ethics, Toronto: Harcourt Brace, 1994, p. 183-186.

Keeshing-Tobias, Lenore. « Stop Stealing Native Stories », in Ziff, Bruce, Rao, Pratima V. (dir.): Borrowed Power: Essays on Cultural Appropriation, New Brunswick, Rutgers University Press, 1997, p. 71-73.

Le Quellec Cottier, Christine et Rodriguez, Antonio (dir.). Le primitivisme des avant-gardes littéraires, Paris, Classiques Garnier, 2023.

L’Estoile, Benoît de. Le goût des autres. De l’exposition coloniale aux arts premiers, Paris, Flammarion, 2007.

Luste Boulbina, Seloua. Les miroirs vagabonds ou la décolonisation des savoirs (arts, littérature, philosophie), Paris, Les Presses du réel, 2018. 

Miller, Christopher L. Impostors. Literary Hoaxes and Cultural Authenticity, Chicago, University of Chicago Press, 2018.

Root, Deborah. Cannibal Culture: Art, Appropriation, and the Commodification of Difference, Boulder, Westview Press, 1996.

Sarr, Felwine/ Savoy, Bénédicte. Restituer le patrimoine africain, Paris, Éditions Philippe Rey/ Éditions du Seuil, 2018.

Savoy, Bénédicte. Le long combat de l’Afrique pour son art : histoire d’une défaite postcoloniale. Paris, Éditions du Seuil, 2021.

Savoy, Bénédicte.  À qui appartient la beauté ? Paris, La Découverte, 2024.

Young, James O. Cultural Appropriation and the Arts, Oxford, Wiley- Blackwell, 2010.

Young, James O. & Brunk, Conrad G. (dir.). The Ethics of Cultural Appropriation, Oxford, Wiley- Blackwell, 2012.