Séminaire de recherche Éthiques & mythes de la création »/ Table Ronde CAREP Paris.
Date : 25 avril à partir de 17 heures 30 en présentiel (le séminaire peut être suivi en distanciel sur inscription auprès du CAREP)
Thème de la séance : Arts et migrations.
Le 25 avril 2024, le séminaire “Éthiques & mythes de la création” dirigé par Sylvie Dallet (Institut Charles Cros / Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines Université de Paris Saclay) s’associe à la Table Ronde “Arts et Migrations” organisée par Centre Arabe de Recherches et d’Études Politiques (CAREP Paris). Cette Table Ronde, animée par Sylvie Dallet, se déroulera au CAREP Paris de 17 heures 30 à 19 heures 30 et sera suivie d’une performance artistique.
Lieu : CAREP Paris (Centre Arabe de Recherches & d’Études Politiques), 12 rue Raymond Aron, 75013 Paris
Thèmatique :La question des migrations au sein des pays arabes n’a pas suscité beaucoup d’intérêt par le passé, et dans la littérature scientifique, peu d’études s’intéressent aux migrations dans les contextes non occidentaux. Cette lacune documentaire s’explique notamment par le fait que les chercheurs arabes eux-mêmes abordent rarement ce sujet. Les quelques études existantes en langue arabe sur le sujet s’intéressent davantage aux flux Sud-Nord, qu’aux migrations internes au sein des régions Sud et pays méditerranéens. Les pays du Maghreb et du Machrek ont été surtout étudiés comme lieux d’émigration pour des raisons tant économiques que politiques. Aujourd’hui, les pays de l’Afrique du Nord deviennent à leur tour des lieux d’immigration, temporaire ou permanente, entraînant des phénomènes de crispation identitaire et une recrudescence du populisme.
Dans un tel contexte, s’interroger sur les expressions artistiques et littéraires qui témoignent de ces migrations - et en permettent les métamorphoses - , semble nécessaire. Sur ce questionnement relatif à la créativité, le séminaire « Éthiques et mythes de la création » s’associe avec la dernière Ronde initié par le CAREP, dans le cycle de leurs conférences « Migrations et sociétés arabes ».
Avec la participation de Tarek ben Chabane (Université de Carthage, Tunisie), Farouk Mardam-Bey, (Écrivain et éditeur), Ammar Kandeel, IREMAM (CNRS/ Aix-Marseille Université), Khalid Mouna, Université de Meknès, Maroc & Victoire Jaquet (Paris X Nanterre),
Introduction et animation : Sylvie Dallet, « Je venais de tant de pays à la fois /Que la vie qui m’aima sut à peine me suivre”
Cette phrase de la poètesse Andrée Chedid suggère les métamorphoses de l’exil, dont les intervenants vont exprimer quelques aspects, tant pour la littérature, le cinéma que la danse et la musique.
Tarek Ben Chaabane: L’image du migrant dans le cinéma arabe
Résumé : Cette contribution interroge la représentation des migrants dans un ensemble de films tunisiens. Il s’agit de mettre en relief les permanences, variations et ruptures qui caractérisent cette figuration face aux nouvelles réalités qui affectent les flux migratoires, face aux clichés véhiculés par le cinéma dominant et dans un contexte marqué par la transnationalisation qui met en question l’indépendance des regards et des expressions. Les cinéastes tunisiens, depuis Les Ambassadeurs de N. Ktari en 1975, ont dessiné, à partir d’une perspective critique et souvent désenchantée, les portraits de multitudes en quête d’un ailleurs synonyme d’émancipation ou de bien-être social.
Biographie succincte : Tarek Ben Chaabane enseigne la sociologie des médias et du cinéma à l’Ecole supérieure de l’audiovisuel et du cinéma de Gammarth (Université de Carthage). Il a travaillé comme rédacteur culturel auprès de plusieurs journaux et magazines tunisiens. En tant que scénariste, il a collaboré avec plusieurs réalisateurs tunisiens. Il a été directeur de la Cinémathèque tunisienne. Il est l’auteur d’ouvrages, d’articles et d’un documentaire Cinéma, passion et nation ( 2023) sur l’histoire du cinéma tunisien.
Farouk Mardam-Bey, Écrivain et éditeur : La figure du migrant dans le roman arabe
Résumé : Mon intervention portera, pour l’essentiel, sur le personnage du travailleur immigré, aussi bien en Europe que dans les pays du Golfe, tel qu’il est campé dans le roman arabe de ces trente
dernières années. D’autres types de migrants arabes, de longues ou de courtes durée(intellectuels, hommes d’affaires, réfugiés politiques), n’y sont pas absents, observés le plussouvent sous l’angle de leur aspiration ou, au contraire, de leur résistance à l’acculturation.C’est le phénomène des migrations de masse pour des raisons économiques, qui a imposé des approches centrées sur les conditions de vie des immigrés démunis : surexploitation, ghettoïsation, racisme, misère sexuelle, etc. J’aborderai, en guise d’exemples significatifs, des romans de l’Egyptien Ibrahim Abdel-Meguid (L’Autre pays), du Tunisien Habib Selmi (La Nuit de l’étranger), du Koweïtien Taleb Alrefai (l’Ombre du soleil), et de l’Egyptienne Maral al-Tahawi (La Ville du soleil Levant).
Biographie succincte : Né à Damas en 1944, bibliothécaire à l’Institut des langues et des civilisations orientales (1972-1986), directeur de la publication de la Revue d’études palestiniennes (1981- 2008), conseiller culturel à l’Institut du monde arabe (1989-2008), il dirige chez Actes Sud, depuis 1995, la collection Sindbad consacrée notamment à la traduction de la littérature arabe classique et contemporaine. Il est l’auteur (ou le co-auteur) d’une vingtaine d’ouvrages à caractère historique, politique, littéraire, gastronomique ou bibliographique.
Ammar Kandeel, IREMAM (CNRS/ Aix-Marseille Université) : La figure du réfugié palestinien dans la bande dessinée arabe
Biographie succincte: Ammar Kandeel est docteur en littérature française et comparée (Université Paul-Valéry-Montpellier 3). Ses travaux de recherche portent sur les écritures migratoires et exiliques palestiniennes dans la littérature et les arts visuels et graphiques, sur l’historiographie palestinienne et sur les espaces artistiques au Moyen-Orient. Il a été lauréat du programme de mobilité postdoctorale ATLAS 2020 (FMSH-ACSS), du programme de recherche sur la sortie de la violence IPEV (Carnegie NY & FMSH) et du programme ATLAS 2022 (FMSH-UNIMED).
Résumé : Cette communication examine l’évolution de la représentation du réfugié
palestinien dans la bande dessinée arabe. Située dans l’effervescence des collectifs bédéiques après les printemps arabes, la bande dessinée palestinienne et arabe questionne les modes de visibilité et de visibilisation des figures migratoires. L’analyse consiste à décrypter les modalités selon lesquelles ce média autorise de nouvelles stratégies d’auto- représentation des réfugiés. Elle vise à comprendre l’impact de ce média sur la perception sociale de l’image et du discours des/sur les réfugiés depuis le cas palestinien.
Khalid Mouna, Université de Meknès, Maroc & Victoire Jaquet, Université Paris Nanterre : Devenir artiste : Processus migratoire d’un collectif d’artistes subsahariens à Tanger
Biographie succincte : Khalid Mouna est professeur à l’université Moulay Ismail de Meknès. Ses recherches portent sur la production et la consommation de drogues, les migrations internationales et le corps. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages : Le bled du kif. Economie et pouvoir à la Ketama du Rif (Ibis Press, 2010), Identité de la marge. Approche anthropologique du Rif (Peter Lang, 2018). L’éloge de l’inversion. Sexualité et rituel de transgression au Maghreb (La Croisée des Chemins, 2022). Il a codirigé l’ouvrage : Terrains marocain. Sur les traces des chercheurs d’ici et d’ailleurs (La Croisée des Chemins, Centre Jacques Berque, 2017). Il a dirigé plusieurs programmes de recherche internationaux, et est membre de nombreux programmes de recherche européens. Il a réalisé deux films documentaires : Le maître du Coran et Mono.
Biographie succincte : Victoire Jaquet est doctorante en anthropologie de la danse au Centre de Recherche en Ethnomusicologie de l'Université Paris Nanterre. Elle conduit une ethnographie en
collaboration avec le chorégraphe Taoufiq Izeddiou et les danseur.se.s qui l’entourent à Marrakech. Sa thèse, en cours d'écriture, interroge les potentiels herméneutiques du recours aux archives dans l'invention et le décentrement d'un regard ethnographique. Ainsi, elle développe une approche documentant la danse contemporaine, ses esthétiques et les micropolitiques contenues dans les relations qu'elle entretient avec des continuums musico-chorégraphiques pluriels, tant locaux que mondialisés.
Résumé : La politique migratoire européenne a érigé des barrières dans une zone historiquement ouverte aux échanges, transformant ainsi la ville de Tanger au Maroc en une frontière illusoire entre l'Afrique et l'Europe. Cette restriction des mobilités a conduit le royaume à devenir un lieu d'installation pour de nombreux migrants cherchant à rejoindre l'Europe, en particulier depuis le drame de Ceuta et Melilla en 2005. De nombreux artistes en situation de migration choisissent de pointer l’écart entre les représentations portées sur l’étranger et son vécu intime. Ils transforment leurs vécus fondées sur la souffrance à une pensée profonde sur la conception de l’« immigré ». Notre travail ethnographique est fondé sur une immersion au sein de groupes artistiques fondés par des migrants camerounais, il aborde la complexité du processus de migration. Ainsi, au sein des stratégies connues d'adaptation des récits d'exil pour susciter la sympathie et organiser les conditions d'une régularisation, les interlocuteurs de l'étude ouvrent une perspective dynamique sur le devenir migrant. Face à la prescription d'un statut, ces individus renouvellent leurs identités par la pratique artistique ; ainsi, devenir artiste est perçu comme un accomplissement qui symbolise le réel à travers la danse et le son.