Mars 2024, n° 1139
On a pu dire d’Anne-Marie Albiach (1937-2012) qu’elle était une figure à la fois cardinale et secrète de la poésie française contemporaine. Son œuvre singulière nous confronte au paradoxe d’un lyrisme non lyrique. Un lyrisme dont la vibration resterait souterraine, comme si son impulsion même interrompait tout essor effusif.
La poésie d’Anne-Marie Albiach est hantée par un désir de dépouillement, de nudité, mais travaillée aussi par une théâtralité violente, une démesure et un excès
qui lui sont propres. Si le poème aspire à révéler « le côté physique du souffle, de la voix et de la syntaxe », confiait-elle dans un entretien, c’est toujours « en rapport avec une musique mémorielle obsessionnelle, un opéra permanent occulté ». Tout en proposant un riche faisceau de regards sur l’œuvre d’Anne-Marie Albiach, ce cahier d’Europe nous offre des inédits importants, qu’il s’agisse de Carnets qui relèvent du journal intime tout autant que de l’atelier de création, ou de lettres de poètes et d’écrivains retrouvées dans ses archives.
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Contributions de Serge Linarès, Anne-Christine Royère, Dominique Fourcade, Catherine Soulier, Isabelle Chol, Lénaïg Cariou, Benoît Auclerc, Marie de Quatrebarbes, Anaïs Nin, Jean Tortel, Alain Veinstein, Emmanuel Hocquard, André du Bouchet, Jacques Dupin, Maurice Blanchot, Giorgio Agamben, Yves Bonnefoy, Michel Deguy, J.M.G. Le Clézio, Bernard Noël, Jacques Roubaud, Edmond Jabès, Jean Daive, Vincent Vivès, Marie-Louise Chapelle, Esther Tellermann, Liliane Giraudon, Jean-Marie Gleize, Laure Michel, Yves di Manno, Isabelle Garron, Milena Arsich, Anne-Marie Albiach.
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Né en 1904 à New York dans une famille juive d’origine lituanienne, Louis Zukofsky a baigné dans la langue yiddish pendant son enfance et c’est dans cet idiome qu’il a d’abord découvert les œuvres de Shakespeare, de Tolstoï ou d’Eschyle. Plus tard il sera profondément marqué par ses lectures de Marx et de Spinoza, par le cinéma d’Eisenstein ainsi que par la musique de Bach dont il transposa en poésie l’art de la fugue et du contrepoint. C’est avec l’appui d’Ezra Pound que Zukofsky fit ses débuts en 1927 et qu’il dirigea en 1931 un numéro de la prestigieuse revue Poetry placé à l’enseigne de l’Objectivisme. Révélant des poètes alors inconnus, George Oppen, Charles Reznikoff, Carl Rakosi et Zukofsky lui-même, cette publication marqua l’émergence d’une nouvelle génération moderniste.
Dans l’audacieux parcours créatif de Zukofsky, une œuvre fascinante et titanesque se détache, sobrement intitulée « A », comme à l’antipode alphabétique de l’initiale du nom de son auteur. Zukofsky travailla de 1928 à 1974 à ce livre considérable qui tient à la fois d’une épopée du XXe siècle, du chant d’amour, du manifeste, tout en s’ouvrant à une extraordinaire diversité de thèmes et de formes poétiques.
« Si quelque chose a un sens, disait Zukofsky, la poésie a le sens de tout.
Ce qui veut dire : sans elle, la vie n’aurait guère de présent. »
Contributions d'Abigail Lang, Charles Bernstein, Pierre Parlant, Mark Scroggins, Xavier Kalck, Jeffrey Twitchell-Waas, Louis Zukofsky.
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On peut lire sur Diacritik.com un article sur ce double sommaire…