Agenda
Événements & colloques
Épistémologies critiques du contemporain. Penser l’autonomie de l’art à l’âge du capitalisme culturel (Paris)

Épistémologies critiques du contemporain. Penser l’autonomie de l’art à l’âge du capitalisme culturel (Paris)

Publié le par Marc Escola (Source : aline caillet)

Ce colloque s’inscrit dans le cadre du programme de recherche pluriannuel « Le monde de l’art à l’âge du capitalisme culturel », dont il constitue le point d’orgue, et interroge le statut épistémologique, esthétique et axiologique des concepts de « contemporain » et d’ « autonomie ». En les repositionnant au sein d’une perspective critique élargie, qui embrasse les discours féministes, décoloniaux, écologistes ou néoinstitutionnels, il s’agit d’en questionner l'actualité comme l'efficience : l’art peut-il encore se constituer en sous-monde non-intégré alors que le monde globalisé tend à neutraliser toute extériorité ? La catégorie d’art contemporain ne nous empêche-t-elle pas, au sein de l’hétérogénéité qui la définit, de repérer des régimes spécifiques, des ruptures ou des « contemporanéités alternatives » ? Le contemporain n’est-il pas un terme lui-même daté, un présent éternel qu’il conviendrait aujourd’hui de rehistoriciser ?

Jeudi 1er Juin 2023
 
9 h 00 : accueil des participants

9 h 15 – 10 h 00 : Ouverture du colloque, Introduction générale : Aline Caillet & Florian Gaité


10 h 00 – 11 h 00 : conférence d’ouverture : Peter Osborne, Kingston University, Londres : « Only the Contradictions are True : Historical Philosophy of Contemporary Art »


11 h 20 – 12 h 50 : Monde de l’art contemporain et capitalisme culturel : Perspectives critiques 
Modérateur : Aline Caillet

Le monde de l’art contemporain se caractérise par un mouvement réciproque de pénétration du capitalisme dans l’art (la réification et la marchandisation de l’œuvre de l’art, identifié par l’École de Francfort) et de l’art dans le capitalisme (autour notamment des thèmes de la créativité ou de l’artiste entrepreneur). Ce double mouvement, que nous désignons au travers de l’expression « capitalisme culturel », affecte en surface les modalités de production et de diffusion des œuvres, mais aussi plus largement en profondeur, leur relation au travail, leurs formes esthétiques ou encore les subjectivités qui les façonnent, à un point où il ne semble plus possible désormais de conceptualiser l’art en écartant la relation intime qu’il entretient avec le capital. Dans quelle mesure le monde de l’art est-il gouverné par la rationalité qui structure le capitalisme ? Et dans quelle mesure peut-il s’y soustraire ? 

Laurent Jeanpierre, Université Paris 1 : « Exploitation libre. Le nouvel esprit du capitalisme artistique »
Les définitions du capitalisme étant multiples, comment comprendre en profondeur l’idée de « capitalisme artistique » et que signifie-t-elle ? Dans une grande partie de la tradition marxiste (et dans d’autres traditions critiques), le capitalisme reste indissociable de la notion d’exploitation. Si l’on suit cette manière de voir, l’existence d’un « capitalisme artistique » implique une certaine exploitation des artistes : exploitation paradoxale, certes, presque contre nature, puisqu’elle semble librement consentie et dénuée de contraintes apparentes. En s’appuyant sur les redéfinitions théoriques actuelles de la notion d’exploitation ainsi que de résultats d’enquêtes sociologiques sur les activités artistiques (et sur d’autres activités comparables) et leurs rétributions, nous mettrons à l’épreuve l’hypothèse d’une exploitation artistique et tenterons d’élucider ses ressorts du côté des artistes eux-mêmes. Cela conduira aussi à envisager ce que l’art peut nous faire apercevoir de méconnu dans les mécanismes plus généraux de l’exploitation capitaliste contemporaine.

Marina Vishmidt, Goldsmith, Londres: “Value Propositions: On Totality in Art” 
"Over the course of the past decade, I have been developing an inquiry about the ‘speculative’ as a modality in contemporary art: the speculative as a category of value, as a category of labour, as a category of the production of subjectivity, as a category of method, as a category of materiality. While these continue to yield interesting insights, it is notable that the last few years have witnessed a shift from paradigms of financialisation that generated this optic of speculation in the early 2010s to ecology in critical accounts of art practice, exhibition and institutions, with ‘extraction’ perhaps marking the nexus of the two as the performativity of resource in the sensual and epistemic space of art. However, the deepening and expansion of global critical approaches such as this, not to overlook equally visible ones such as decoloniality and queerness, continue to have very little impact at what I have been calling the ‘infrastructural’ level of contemporary art, which continues to be dominated by the financial and political forces most contemporary work either thematises or denounces. It is, in other words, less clear than ever how the gap between an operative and a gestural critique can be closed, or its contradictions pushed into closer and unpredictable friction with the world’s tumults. What kind of performative negations do we actually want from art? And what role does it play in the totalizing  (never total) nihilism of contemporary political economy?"

14 h 00 – 16 h 00 : L’art contemporain face à ses institutions : l’autonomie constitue-t-elle encore une valeur et un horizon pour l’art ? 

Modérateur : Peter Osborne

L’autonomie de l’œuvre nous renvoie à une conception moderne de l’art, qui procède d’une analyse de la société moderne fondée sur une différence fonctionnelle de ces sphères et qui suppose que l’œuvre puisse exister comme entité autosuffisante, et obéir à sa propre logique immanente. En cela, les visions de l’autonomie sont pré-capitalistiques er le passage du moderne au contemporain, n’est pas une simple périodisation mais aussi un enjeu marketing (Vishmidt) qui nous propulse dans un « stade post-autonome » (Osborne). Faut-il dès lors en finir avec l’idée chimérique d’une autonomie de l’art ? Ou des tentatives de reconquête, qui mettent en jeu l’autonomie comme un acte et non un fait (Lütticken), à la manière de la critique institutionnelle, sont-elles encore possibles, pensables et même souhaitables ?

Nicolas Heimendinger, Université de Lille : « L’art contemporain : une révolution institutionnelle »
S’appuyant sur une lecture critique de la sociologie de l’art de Howard Becker et Pierre Bourdieu, cette communication se propose d’analyser la fin des avant-gardes et l’émergence de l’art contemporain dans les années 1960-1970. Si ces deux décennies sont un moment d’intense inventivité artistique, il semble difficile d’attribuer à l’une de ces innovations en particulier ou à un trait commun à plusieurs d’entre elles une capacité transformative spécifique et suffisante pour soutenir l’idée d’une rupture entre art moderne et art contemporain, ne serait-ce que parce que ce siècle d’art moderne a été lui-même scandé de multiples innovations artistiques, dont celles des années 1960-1970 ne semblent pas, en principe, foncièrement différentes. C’est pourquoi, sans négliger, bien sûr, la dimension proprement artistique de ces années de transition, nous proposons de considérer que le sentiment d’un changement profond d’époque, que formulent de nombreux acteurs du monde de l’art dès ce moment et qui s’est imposé avec une confuse évidence depuis, recouvre, plutôt qu’une révolution artistique au sens strict, ce que l’on pourrait appeler une révolution institutionnelle – une reconfiguration des structures du champ de l’art dans son ensemble plutôt qu’une rupture esthétique. C’est cette hypothèse que nous essaierons d’explorer à partir d’un ensemble de données empiriques collectées sur les politiques et les institutions de l’art contemporain en Allemagne, en France et aux États-Unis.

Sven Lütticken, VU University, Amsterdam: “Another Autonomy Is Possible”
This lecture will look at the question of autonomy in the context of art not through the prism of canonical Western theoretical or artistic positions, but through that of precarious aesthetic practices in the Global South and their specific articulations of the problem of autonomy. Rather than positing a form of decolonization that would amount to a complete delinking from the “colonial matrix,” I will look into practices from the Global South that constitute critical and situated appropriations of the concept of autonomy under conditions marked, inter alia, by a lack of those institutional infrastructures long taken for granted in the Global North. Specifically, the focus will be on (collective) practices from Southeast Asia and Latin America, as well as on their intermittent presence in the institutional frameworks of European art. What is the use-value of the concept of autonomy under conditions of exacerbated precarity? Which pointers can such practices provide for rethinking autonomy, aesthetically and politically, in physical gatherings and networked exchanges?


Ingrid Luquet-Gad, Université Paris 1 : « La plateforme après l’institution : l’autonomie technologiquement appareillée. »
Au tournant des années 2010, le monde de l’art institué se révèle intégralement poreux aux flux de capitaux économiques. Est-ce à dire que l’art devrait définitivement se résoudre à embrasser comme horizon terminal son « caractère affirmatif » (Marcuse, 1937), cette autonomie fallacieuse où la liberté conférée aux représentations critiques a pour contrepartie une impuissance politique complice ? Pour la génération de natifs digitaux constituée par le double contexte de la crise économique et de la perte de confiance dans le complexe artistico-académique, l’événement des Printemps des Peuples, et d’Occupy Wall Street en particulier, fournit un modèle d’organisation matérielle directement enchâssé au sein des nouveaux outils en réseau. La plateforme DIS Magazine, fondée en 2010, fournit un cas d’étude permettant d’éclairer les stratégies d’autonomisation technologiquement appareillées qui émergent via les nouveaux médias. Tout se passe comme si la recherche d’autonomisation structurelle du contexte institutionnel artistique, par l’entremise des « réseaux organisés » (Lovink & Rossiter, 2018) œuvrant de l’intérieur du continuum techno-médiatique, produisait en retour l’abandon de toutes formes représentatives au profit d’une dissolution mimétique dans l’esthétique des corporations. En cela, l’autonomie serait dès lors parvenue au stade de la dissociation de la double nature qui la caractérisait jusqu’alors : l’autonomie moderniste de l’œuvre d’une part, et l’Autonomie politique de l’organisation d’autre part. 


16 h 20 – 17 h 30 : Table ronde organisée et modérée par Aline Caillet : « Redessiner les contours du monde de l’art à l’âge du capitalisme urbain »
Si l’état des relations entre les arts et le capitalisme, ainsi que la pénétration progressive de l’économie et du marché dans les arts et la culture ont fait essentiellement l’objet d’analyses en termes de « capitalisme culturel », de « capitalisme esthétique », ou encore de « capitalisme artiste », il semble qu’il faille les compléter aujourd’hui d’une analyse en terme de capitalisme urbain – mode de spatialisation du capitalisme dans les villes –, étudiant les mécanismes d’urbanisation du capital et à la manière dont ceux-ci s’incarnent en configurations matérielles. Des quartiers créatifs aux tiers-lieux, en passant par les projets d’urbanismes temporaires, de nouveaux lieux culturels ont vu le jour ces 20 dernières années qui affectent tout autant les pratiques culturelles et nos expériences esthétiques que la structuration de l’espace urbain et la manière dont nous l’habitons. Ces nouvelles formes d’expériences proposent-elles une conception élargie du monde de l’art à même de contrer l’intégration institutionnelle et économique propre au monde de l’art contemporain, ou achèvent-elles au contraire la digestion de la culture par le capitalisme ?

Invités : Basile Michel (Université de Cergy), Jules Desgoutte (Artfactories), Juliette Pinard (le 104) , Le Houloc. 

***


2ème journée : Vendredi 2 Juin 2023 
 
9 h 30 – 12 h 40 / Épistémologies critiques du contemporain. 

Modérateur : Florian Gaité

Repenser la notion de contemporain aujourd’hui, conceptuellement, historiquement comme géographiquement, implique de la comprendre désormais dans un horizon élargi des arts et des esthétiques, qui doit rompre avec l’idée d’une totalisation (ou globalisation) absolue, et l’universalisme ou l’absence d’extériorité qui en sont les corollaires. L’ouverture et la mobilité des regards que ce geste de déconstruction suppose va de pair avec la nécessité d’une critique du contemporain qui interroge son espace-temps et le partage du sensible qui le sous-tend (découpages géopolitiques et géo-esthétiques, occidentalocentrisme, hétéropatriarcat, hégémonie capitaliste), mais encore les discours qui le justifient comme concept abstrait et extra-territorial. En intégrant ses extérieurs, en revalorisant ce qui en a été exclu, il s’agit de décentrer les regards pour doter la notion de contemporain d’une nouvelle cartographie théorique et référentielle, réclamant de nouveaux gestes et outils épistémiques. Saisir les espaces extra-occidentaux autrement que comme des marges, inclure les luttes féministes et transféministes, repenser les régimes de visibilisation et de silenciation, apparaissent ainsi comme autant de conditions d’émergence d’autres définitions, d’autres évaluations, d’autres discours capables de saisir autrement le contemporain aujourd’hui.


Jacinto Lageira, Professeur, Université Paris 1 : « La critique au temps de la globalisation et de la mondialisation »
Pour la première la fois dans l’histoire de l’humanité, en raison des avancées technologiques comme en raison de la volonté des sciences sociales de mettre en place une « histoire connectée », nous sommes à la fois tous pris par la même destinée historique globale – socio-économique, écologique, géopolitique – et tiraillés par des disparités et des inégalités évidentes, des injustices criantes, qui sont précisément le résultat de cette même « destinée historique globale ». Quelle forme de critique, positive ou négative, peut-on imaginer pour faire face à ce défi inconnu de la modernité qui est la critique de la globalité contemporaine ? Continuer des critiques régionales – tels lieux, cultures, enjeux – est assurément nécessaire, mais peut-on proposer une théorie critique globale, et non plus telle théorie critique régionale qui pourrait s’étendre indéfiniment. Le choc est alors inévitable entre le processus de la modernité, achevé ou inachevé, et le processus contemporain qui voit surgir un conflit entre globalisation, mondialisation et universel.

 
Sara Alonso Gomez, Université Aix-Marseille : « Épistémologies latitudinaires : le devenir-monde de l’art contemporain à l’ère du global »
Prenant acte de l’éclatement, non seulement des formes, mais encore des lieux de leur production et de leurs acteurs, l’art mondialisé du XXIe siècle se présente comme une « globalité » d’apparence indifférenciée où se fondent des strates artistiques qui entrent en concurrence sous le label générique d’art contemporain. Lorsqu’on se livre à une cartographie géo-esthétique des œuvres à vocation contemporaine, on découvre cependant des milieux d’incubation particuliers, où l’art répond à des conditions et à des traditions culturelles distinctes. Les adjectifs contemporain et global nouent une nouvelle alliance du temps et de l’espace qui scelle l’aspiration de notre époque. Il reste à penser les conditions de possibilité de cette alliance, ainsi que ce qu’elle promeut et ce qu’elle efface. On peut commencer par questionner comment des épistémologies latitudinaires affectent le canon occidental hérité qui s’est déployé dans l’art contemporain global. Il devrait être possible d’identifier la logique de ces transformations à l’intérieur et à l’extérieur des mondes de l’art.

Marie-Jeanne Zenetti, Université de Lyon 2 : « Pour un contemporanéisme situé : épistémologies féministes et critique du contemporain en études littéraires »
« Depuis les années 1980, les épistémologies féministes du standpoint (Nancy Hartsock) et des savoirs situés (Donna Haraway) ont largement contribué à redéfinir le concept d’objectivité scientifique et à penser les enjeux d’une « science de relève » (Sandra Harding) capable d’articuler pratiques de recherche et engagement dans les luttes sociales. Si ces théories ont largement marqué des réflexions épistémologiques en sciences sociales, elles sont encore peu mobilisées pour penser les enjeux propres à l’esthétique et aux études littéraires et en arts. J’aimerais défendre l’idée qu’elles offrent des perspectives stimulantes pour proposer une critique de la catégorie de « contemporain ». Celle-ci, dans la critique et les études littéraires, est souvent entendue dans un sens globalisant, tant du point de vue de ses bornes historiques que des aires culturelles étudiées. Le singulier « le contemporain » produit ainsi un effet d’unification et d’universalisation des pratiques et des contextes variés qu’il entend recouvrir. Il s’agirait de proposer une méthode visant à contrer une telle perspective, en appliquant les outils de l’analyse de discours à un corpus de travaux récents en études littéraires. Je proposerai d’envisager « le contemporain » comme un dispositif discursif et d’interroger les positionnements institutionnels et politiques qu’il tend à dissimuler. Il s’agira à partir de là de cerner les pistes qu’une telle proposition méthodologique ouvre dans le cadre d’une entreprise critique, collective et pluridisciplinaire visant à historiciser et désuniversaliser le contemporain comme catégorie. »

- 11 h 50 – 12 h 30 : Sophie Orlando, Villa Arson, Nice : « La relation pédagogique comme espace de refonte des épistémologies de l’art »
Comment décrire l’enseignement théorique en école d’art? Que fait la relation pédagogique aux contenus d’enseignement? Cette intervention prend pour point de départ l’écriture d’un récit pédagogique semi-fictionnel intitulé La part affective de nous-même (Editions Paraguay). Ce récit prend place au coeur d’une école d’art. Il interroge la manière dont les sujets portés par les étudiant·es obligent à renouveler les formes d’enseignement, tout comme la manière d’envisager l’histoire de l’art et ses ressources théoriques.

 

14 h 00- 16 h 00 : Le monde de l’art à l’épreuve de la critique décoloniale : Quelles pratiques institutionnelles et curatoriales ? 

Modérateur : Sara Alonso Gomez

Que fait la critique décoloniale au musée et au format-exposition ? Les études décoloniales ont formulé une critique radicale du musée comme espace strié, traversé par de fortes conflictualités, et des formes d’exclusions systémiques, articulées autour de la race, de la classe, et du genre. L’idéal du musée universel prétendant « offrir le patrimoine mondial à l’humanité » a été également mis à mal par la critique de ses processus d’accumulation et d’appropriation. Les batailles en cours autour des restitutions d’objets ethnographiques mais aussi autour des narrations de l'histoire de l'art procèdent de ce même questionnement. Le format exposition, dans sa forme paradigmatique qu’est devenue la biennale d’art globale, a également été mis en cause par la critique décoloniale. L’uniformisation sémiotique des pratiques de l’art advenue avec l’avènement d’un art global, nouveau méta-récit du contemporain, oblitère en effet aussi souvent la persistance de hiérarchies géoépistémiques et géoesthétiques et d’une « durée coloniale » toujours en cours. Quelles potentialités ouvrent ces champs théoriques pour les théoriciens de l’art, les curateurs, les historiens de l'art, et les acteurs du monde de l'art pour réengager des pratiques transformatrices des institutions artistiques ? 


Kantuta Quiros, Université Paris 1 & Aliocha Imhoff, Université Paris 8 : « Bifurcations et répétitions générales »
« Notre intervention s'attachera aux controverses muséales contemporaines liées à la mondialisation de l'art, et aux tentatives de décolonisations du musée, comme technologie de production de subjectivité. En partant d’expériences d’institutions muséales fictives imaginées, fabulées par des artistes, nous mobilisons les possibles de la fiction spéculative. A partir des polémiques liées au statut des collections et des objets d’art, aux translocations patrimoniales et restitutions d’objets ethnographiques, au musée global et universel, et aux plus récentes relocalisatisons du musée, il s’agit de postuler d’autres institutions possibles de l’art. »
 

Marie-Laure Allain-Bonilla, HEAD Genève,

Joaquín Barriendos, INBA-Cenidiap : “¿What was the Global Art World ? A posthumous decolonial conversation with Hans Belting”

As you may be aware of, Distinguish Professor Hans Belting passed early this year, leaving behind a vast legacy of books on medieval art, image theory and global studies. In his latest production, Professor Belting elaborated on what he called the global art world, discussing art markets, cultural theories and the revamping of contemporary art museums as global discursive institutions. This conference analyzes the rise and the imminent decline of the global art world. Following previous conversations with Belting, this imaginary conversation with the author of the Global Art World introduces a critique of globality and contemporaneity, form the point of view of decoloniality and critical cosmopolitanism. Alluding to Peter Sloterdijk proposition, the global museum will be described in my talk as a spherical ruin: an all-embracing geo-aesthetic catastrophe. 


16 h 20 – 17 h 30 : Table ronde organisée et modérée par Florian Gaité : « Technocritique, art et décroissance »

Invités : Aude cartier, Cy Lecerf Maulpoix (ESAAix), Vincent Puig (IRI/Centre Pompidou), François Salmeron (Université Paris 1).

Présumé énergivore, suspecté de productivisme ou de consumérisme et structurellement appareillé à l’industrie, le monde de l’art se trouve de plus en plus confronté à l’incompatibilité entre les coûts écologiques de ses modèles de production, de financement ou de fonctionnement et ses ambitions affichées en matière d’écoresponsabilité, paradoxalement hégémoniques dans les institutions culturelles. Ce double discours s’interroge aujourd’hui de manière d’autant plus critique qu’il se pose d’une part à l’aune du capitalisme numérique, au sein duquel l’articulation entre art et technologie n’a jamais été aussi forte, de l’autre, dans un contexte post-covid qui a placé l’artisanat, l’anti-tech et la décroissance comme de possibles horizons régulateurs de certains milieux artistiques, non sans affinité avec l’anarcho-primitivisme. S’il est donc acquis qu’une approche technocritique du monde de l’art ne peut plus faire l’économie d’une réflexion écocentrée, l’adhésion à une telle éthique est-elle pour autant réductible à la seule critique du progrès technologique ? Dans quelle mesure le monde de l’art pourrait-il au contraire s’appuyer sur les révolutions numériques pour entreprendre la réforme écologique de ses modèles ?