Colloque international
Boulogne 1550
Boulogne-sur-Mer, 23-25 novembre 2023
Cercle d’Études en Pays Boulonnais
Université Littoral Côte d’Opale, UR HLLI
Organisateurs : Isabelle Clauzel-Delannoy, Jean Devaux
Le 25 avril 1550, jour de la Saint-Marc, le roi Henri II de France fait son entrée solennelle dans la cité de Boulogne-sur-Mer rachetée aux Anglais après six ans d’occupation. L’événement, salué par la littérature et la musique, marque le passage de la ville à l’ère moderne : nouvelle charte de commune, rénovation du coutumier boulonnais, création d’un présidial, ouverture de nouveaux documents comptables et de registres paroissiaux, transformations urbaines et architecturales. Organisée conjointement par l’Université Littoral Côte d’Opale et le Cercle d’Études en Pays Boulonnais avec le soutien de la municipalité, la présente manifestation scientifique visera à éclairer d’un jour nouveau cette étape décisive de l’histoire du Boulonnais et à la situer plus largement dans son contexte politique régional, national et international. Le champ d’investigation comprendra la sénéchaussée de Boulogne ainsi que ses champs relationnels, et s’étendra de 1532 à 1568. Le colloque, ouvert à un large public, permettra en outre de mettre en valeur le riche fonds de manuscrits et d’incunables de la Bibliothèque des Annonciades de même que les documents archivistiques et les objets archéologiques conservés depuis cinq siècles par la ville de Boulogne.
Axes de recherche
1) La prise de Boulogne et l’occupation anglaise (1544-1550)
L’on examinera ainsi les circonstances militaires et humaines ayant permis la conquête de cette cité portuaire réputée imprenable, décrite dans l’une des missives de Maximilien d’Autriche comme une « ville merveilleusement forte de murailles et de fossés couverts ».
Après avoir rappelé l’épisode tragique de la reddition de Boulogne, les six années d’occupation anglaise constitueront une part de l’étude qu’il conviendra de mener à la lumière d’une documentation lacunaire et peu exploitée jusqu’à ce jour. Nous nous interrogerons sur les projets du roi d’Angleterre Henri VIII quant au sort de Boulogne et sur leur réalisation. L’on s’intéressera en outre aux modifications de la vie quotidienne imposées par les officiers anglais et aux relations de l’occupant avec la population urbaine, de même qu’à l’implication des villages des alentours.
Les tentatives françaises de reprise de la ville, par voie diplomatique et par voie militaire, feront l’objet d’un examen approfondi. Le traité d’Ardres fut signé dès 1546 et, en 1547, de nouvelles frontières franco-anglaises furent fixées ; en dépit de ces accords, Boulogne connut quatre ans de paix armée jusqu’à son rachat en 1550 : travaux de fortification de part et d’autre, combats navals au large de la ville ou dans les eaux anglaises, blocus, attaques contre la garnison, au point que les événements prirent le nom de « question de Boulogne ».
2) Le rachat de Boulogne à l’Angleterre
À quelles fins le rachat de la ville, conclu par François Ier et soldé par Henri II, fut-il négocié ? Nous cernerons les conditions fixées par les traités d’Ardres et de Capécure et leur exécution. Nous évoquerons les circonstances qui accompagnèrent le départ des Anglais, la libération des otages français, l’entrée solennelle du roi Henri II de France dans sa ville recouvrée et le châtiment que subirent Jacques de Coucy et Oudard du Biez, accusés de haute trahison pour avoir abandonné la place.
L’on s’intéressera au témoignage des chroniqueurs et des mémorialistes contemporains qui déplorèrent les souffrances occasionnées par ces années de siège, d’autant que la peste avait envahi le Boulonnais, tuant jusqu’au dauphin de France. À l’opposé, le recouvrement de la ville fit éclore de beaux chants de circonstance, comme ceux de Clément Jannequin : « Pour toi ô mon prince » et « Réveillez-vous Boulongnois ». Le jour de la Saint-Marc fut désormais chômé à Boulogne par décision royale, en lieu et place d’autres festivités médiévales. Le roi Henri II resta dans les mémoires comme le sauveur de Boulogne : au XIXe siècle, un grand buste d’Henri II fut érigé près du rempart. La liesse populaire méritera un examen à la lumière des sources conservées.
C’est un véritable renouveau que connaît en 1550 la ville de Boulogne, qui entre alors dans l’ère moderne. Le roi Henri II lui concède une nouvelle charte de commune, confirmant les exemptions dont les habitants avaient joui dans les temps anciens, affecte la recette des impôts indirects à la réfection de la ville et autorise les argentiers de celle-ci à ne rendre leur compte qu’à partir de 1563. Un présidial est créé dès 1552 en application de l’édit de Crémieu, des registres de catholicité sont mis en place à la suite de l’ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), le coutumier du Boulonnais médiéval est réformé dès 1550. La cité se reconstruit et se modernise, pave ses rues, aligne ses maisons « à la française », entuile ses toitures, crée un collège, adapte son port. Le choix de Boulogne comme siège épiscopal en 1559, sollicité en vain depuis cinq siècles, couronnera les efforts des habitants.
3) Le contexte politique
L’événement boulonnais sera replacé dans le contexte politique tumultueux de la première moitié du XVIe siècle, dont le Nord de la France fut l’un des épicentres. Dans la foulée des travaux de David Potter et de Charles Giry-Deloison, l’on s’attachera à en définir les prémices : conflits et pactes franco-anglais dans le Calaisis et le Boulonnais, tel, en 1532, le remake du Camp du Drap d’Or (1532), campagne menée par François Ier contre Charles Quint et paix de Crépy (1537-1544). L’on s’interrogera sur les rôles respectifs de l’empereur et du futur Henri II dans « l’affaire de Boulogne ».
L’intérêt capétien pour la ville de Boulogne mérite de retenir l’attention : dès 1535, le roi avait fait procéder à l’inventaire des titres boulonnais détenus au château de Vic. La reine Catherine de Médicis, dernière dame de Boulogne, fit rédiger une généalogie de ses ancêtres en 1556. L’on sait aussi que les conflits qui eurent lieu en Bretagne et en Normandie servirent la propagande royale : en ce domaine, l’affaire de Boulogne fut-elle un rendez-vous manqué et difficilement rattrapé ?
On s’appliquera enfin à tenter d’évaluer l’impact du retour de la ville dans la construction capétienne. Place forte et ville de loi, mais aussi siège de sénéchaussée et bientôt d’évêché, son rôle varia encore après la reprise de Calais par François de Guise en 1558, et, la même année, l’incendie de Thérouanne. Boulogne devait garder, au moins en titre, un statut particulier au sein de la Grande Picardie, et ce jusqu’aux États généraux de 1789.
Comité scientifique international
Jean-Marie Cauchies, Membre de l’Académie royale de Belgique, Professeur à l’Université Saint-Louis (Bruxelles)
Alain Joblin, Professeur à l’Université d’Artois
David Potter, Professeur à l’Université du Kent
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Les propositions de communication accompagnées d’un argumentaire d’une dizaine de lignes et d’un bref curriculum vitae sont à envoyer aux organisateurs avant le 10 septembre 2022 :
Jean.Devaux@univ-littoral.fr, iclauzelCEPB@gmail.com