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Humour et Moyen Âge, de Rabelais à Twitter (séminaire

Humour et Moyen Âge, de Rabelais à Twitter (séminaire "Modernités médiévales", en ligne)

Publié le par Marc Escola (Source : Anne Besson)

Humour et Moyen Âge, de Rabelais à Twitter

Appel à propositions pour le séminaire 2022-2023 de l’association « Modernités médiévales »
 
Date limite d’envoi des propositions : 10 septembre 2022

Date des réponses du comité scientifique : 20 septembre 2022


Le séminaire « Humour et Moyen Âge, de Rabelais à Twitter » de l’association « Modernités médiévales » s’intéressera en 2022-2023 aux usages humoristiques associés à la période médiévale et à son imaginaire au fil de l’histoire.

On voit en effet se développer aujourd’hui un humour médiévaliste, et s’il a déjà été étudié sur son versant audiovisuel, c’est par exemple moins le cas pour ses déclinaisons sur les médias numériques ou sur les réseaux sociaux, qui se sont en particulier fait remarquer en France durant la période très incertaine des débuts du COVID. L’on y revisite aussi bien les enluminures (Simon de Thuillières) et la langue médiévale pour commenter l’actualité (compte Twitter @Jehan le Brave) que des tubes des années 80 dans le sillage du « bardcore », avec des exemples comme Hildegard Von Binglin ou Maître Frelon (« Elle a les yeux arquebuse »). Le jeu sur un faux ancien français, expérimental et potache, reposant surtout sur la réinvention lexicale, serait une sorte de retour aux sources fantasmé en même temps peut-être qu’une forme de parade (aux deux sens du terme : résistance et ostentation) au franglais, au globish... 

Cette nouvelle sociabilité et ces pratiques humoristiques contemporaines en lien avec le médiéval nous invitent à nous demander avec Michèle Gally, dans son dernier ouvrage, A la croisée des temps. Les avatars littéraires du Moyen Âge, « quelle représentation du passé (et ce qu’il contribue à en construire) et aussi quel souci le geste de remonter au Moyen Âge - et non à une autre époque - engagent chez nos contemporains » (CNRS Editions, 2022, p. 189). Rit-on du Moyen Âge ou des représentations et visages qu’on lui prête ? Les temps épidémiques sont-ils à l’origine de rapprochements ? Rit-on avec le Moyen Âge, contre lui ? A côté ou en opposition à lui ? Cette recréation témoignerait peut-être aussi de « l’attitude inquiète vis-à-vis du présent et de l’avenir », souligne ainsi Michèle Gally (p. 191). 

Parmi de nombreuses approches possibles, nous invitons à réfléchir sur les exemples précédents et les axes suivants : 

-          Rire contemporain et rire « médiéval » :

Que deviennent les formes de comique spécifiques au Moyen Âge – si tant que l’on sache ce qui faisait rire alors ? sur quels ressorts s’appuient les reprises contemporaines des farces ou fabliaux par exemple ? ou encore, que faire de la cruauté d’un Renart dans ses reprises pour la jeunesse ? Autrement dit, et plus largement, comment « traduire » le comique médiéval, « faire passer » le rire d’une langue/époque à une autre ?

Peut-on rire des œuvres/personnages/topoï médiévaux tout en n’en perdant pas les enjeux ? ou le décalage actuel par le rire peut-il finalement rejoindre certaines des problématiques médiévales par des voies détournées ?

-          Histoire culturelle de l’humour médiévaliste : rit-on du même Moyen Âge hier et aujourd’hui ? 

Les romans de chevalerie engendrent très rapidement leurs variantes distanciées ou parodiques, déjà chez Chaucer (Palamon dans « The Knight’s Tale »), puis d’Amadis à Don Quichotte. L’esthétique « troubadour », très appréciée sous le règne de Louis XVIII et déjà friande d’« archaïsmes affectés (omissions de pronoms sujets, inversions syntaxiques, formules désuètes telles que « ordonc », « moult », « icel », « varlets », etc.) » (Martine Lavaud) est largement moquée dans la suite du XIXe siècle. Le pittoresque du Trouvère de Verdi (1853) est encore au cœur du comique d’Une Nuit à l’opéra (1935) des Marx Brothers. Les premiers récits de fantasy médiévalistes, ceux de Lord Dunsany ou de James Branch Cabbel, adoptent à leur tour un ton ironique et plaisant. 

On peut aussi noter des cycles comiques qui se réalimentent régulièrement : ainsi pour le créateur contemporain Simon de Thuillières, il s’agit de sortir de « l’esthétique Jacquouille » qui a certes popularisé le MA mais en « a terni l’image ». Associé aux excès du vulgaire, au débordement « rabelaisien » de la chair et de la chère, dans quel mesure un certain Moyen Âge comique est-il encore compatible avec les publics contemporains ?

-          Humour médiévaliste et cultures contemporaines : médias, pratiques, cibles et enjeux : 

De la bande dessinée comique très développée autour du MedFan, au mouvement musical « bardcore », parodies des enluminures médiévales, memes, comme le proposent les sites MedievalMemes.org, Mesmes Moyenagescqves povr serfs et vassals… les médias sollicités produisent-ils un effet esthétique qui dépasserait le médiévalisme, un genre de rire spécifique (pour Youtube par exemple, ou TikTok : des effets de durée, de montage etc.) ? Comment ce dernier viendrait-il rejoindre le médiévalisme, autrement que par un intérêt « premier » pour le Moyen Age ?

Quelles sont les cibles privilégiées des parodies médiévalistes – quel héroïsme, quelles normes, quelles autorités ou quelles absurdités se trouvent-elles mises en cause ?

Quel sens (idéologique ? civilisationnel ? etc.) donner à ce rapport au passé et à ce passé-là ? Même « seulement » ludique, il ne serait ni simple ni sans signification « sérieuse ».

Le séminaire (environ 45 minutes de présentation et 45 minutes de discussion) se déroulera en ligne au premier semestre de l’année universitaire 2022-2023, et pourra être prolongé au printemps.

Lundi 10 octobre, 17h30-19h : Séminaire 1

Mardi 15 novembre, 17h30-19h : Séminaire 2

Mercredi 14 décembre 17h30-19h : Séminaire 3 

Les propositions de communication, composées d’un titre et d’un résumé d’environ 1500 signes, accompagnées d’une brève notice bio-bibliographique, seront envoyées pour le 10 septembre 2022 aux adresses suivantes : anne-isabelle.francois@sorbonne-nouvelle.fr et anne.besson@univ-artois.fr 

 
Indications bibliographiques

 
Besson Florian et Breton Justine, Kaamelott, un livre d’histoire, Paris, Vendémiaire, 2019.

Breton Justine, Monty Python Sacré Graal, Paris, Vendémiaire, 2021.

D'Arcens Louise, Comic Medievalism: Laughing at the Middle Ages, Cambridge, D.S. Brewer, 2014.

Lavaud Martine, notice « Troubadour » (avec Anne Besson), in Anne Besson, William Blanc et Vincent Ferré (dir.), Dictionnaire du médiévalisme, Paris, Vendémiaire, sept. 2022.

Letourneux Matthieu, Vaillant Alain, (dir.), L’empire du rire. XIXe – XXIe siècle, Paris, CNRS, 2021.

Mazdon, Lucy, France on Film. Reflections on Popular French Cinema, Londres, Wallflower, 2001.

Minois Georges, Histoire du rire et de la dérision, Paris, Fayard, 2000.

Publications et activités du Réseau Interdisciplinaire de Recherches sur l'Humour (RIRH : https://rirh.hypotheses.org)

Tran-Gervat Yen-Maï, « Pour une définition opérationnelle de la parodie littéraire : parcours critique et enjeux d'un corpus spécifique », Cahiers de Narratologie [En ligne], 13, 2006. URL : http://journals.openedition.org/narratologie/372 

Vaillant Alain, Esthétique du rire, Nanterre, Presses universitaires de Paris Ouest, 2012.

La civilisation du rire, Paris, CNRS Éditions, 2016.