DE LOMBRE A LA LUMIÈRE
Un idéal occidental
EXPOSITION CONFÉRENCES ÉDITION
DU 28 OCTOBRE 2000 AU 27 JANVIER 2001
Bibliothèque de la Part-Dieu - 30, bd Vivier-Merle 69003 Lyon
ouverte du mardi au vendredi de 10h à 19h, le samedi de 10h à 18h
entrée libre
Inauguration : mardi 7 novembre à 18h30
Catalogue : Cahiers de Médiologie n° 10, Lux, des Lumières aux lumières, (Gallimard / enssib)
cahier central de 16 pages en couleur sur lexposition ; Prix : 90 F - en vente dans lexposition
Commissaire dexposition : Monique Sicard, chercheur CNRS, Centre de recherche sur les arts et le langage, Paris, collaboratrice aux Cahiers de médiologie.
Conseil scientifique : Patrick Bazin, directeur de la Bibliothèque de Lyon ; Robert Dumas, philosophe, agrégé de luniversité, doctorant, collaborateur aux revues Esprit, La Quinzaine Littéraire ; François Dupuigrenet-Deroussilles, directeur de lENSSIB ; Guy Parguez, conservateur Fonds ancien, Bibliothèque de Lyon.
Scénographie : Ensemble NOAO
Exposition, conférences, édition réalisées en collaboration avec le CNRS, lENSSIB et Les Cahiers de Médiologie (Gallimard) et avec le soutien de la DRAC Rhône-Alpes, dAvantages Vidéo et de limprimerie Des Deux-Ponts.
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LEXPOSITION
Dans nos sociétés occidentales, lombre est classiquement la métaphore de lignorance et de lobscurantisme ; la lumière, celle de lentendement et du progrès. Le chemin de l'ombre vers la lumière est alors porteur despoir. Ces oppositions entre ombres et lumières sont réactivées au cours de lhistoire par les grandes inventions techniques, présentées comme des progrès. Les événements techniques et les représentations de la lumière séclairent alors les uns par les autres ; ils ont, les uns par les autres, valeurs de traces.
Lexposition sarticule autour de quatre métaphores : le livre lumière, le corps lumière, la ville lumière, limage lumière... chaque fois revisitées par des ruptures technologiques (diffusion massive du livre imprimé, électrification des villes, émergence de limagerie scientifique, simulations numériques...).
Sont présentés des ouvrages du Fonds ancien de la Bibliothèque municipale de Lyon, des gravures, des tableaux, des photographies, des films et des oeuvres dart vidéo, des objets domestiques et techniques, dans une scénographie simple façonnant la lumière comme une matière à part entière.
Les plongeons dans lhistoire ici proposés alimenteront en matériaux inédits les débats contemporains relatifs aux politiques de la lumière et de ses écrans : - que deviennent lectures, écritures et savoirs quand se mettent en place les bibliothèques virtuelles et leurs livres électroniques ? - de quelle manière les plans lumière urbains modifient-ils les usages et les commerces du jour et de la nuit ? - faut-il abandonner la projection cinématograhique quand les écrans lumière des télévisions et des ordinateurs simposent de manière
massive ? ...
Si lexposition souvre sur la simplicité des représentations du fiat lux (et la lumière fut !) dans liconographie du XVIIe siècle, elle se clôt sur le « Voyage en direction dun trou noir » (Jean-Alain Marck), l« Anatomie de la mélancolie » (Sylvie Pic, Robert Burton), dans lespoir dune attention neuve portée aux ombres.
Monique Sicard
Des établissements prestigieux et dhorizons divers ont eu lamabilité de nous prêter des uvres. Citons notamment : Bibliothèque de lEcole de Médecine, Paris ; Bibliothèque Sainte-Geneviève, Paris ; Fonds national dArt contemporain (FNAC), Putaux ; Musée des Arts et traditions populaires, Paris ; Musée dHistoire de la Médecine, Lyon ; les Musées des Beaux-Arts de Valence et de Dijon ; Museum national dHistoire Naturelle (Musée de lHomme), Paris ; Palais de la découverte, Paris
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LES CONFÉRENCES
jeudi 16 novembre à 18h30
AUTOUR DU NUMERO 10 DES CAHIERS DE MÉDIOLOGIES : LUX, DES LUMIÈRES AUX LUMIÈRES,
avec
Monique Sicard, CNRS, EHESS, centre de recherche sur les arts et le langage, commissaire de lexposition ; François Dupuigrenet-Desroussilles, directeur de lEcole nationale supérieure des sciences de linformation et des bibliothèques ; Patrick Bazin, directeur de la Bibliothèque municipale de Lyon ; Robert Dumas, agrégé, professeur de philosophie ; Daniel Bougnoux, philosophe, professeur à luniversité Stendhal de Grenoble ; Christine Hamon, professeur détudes théâtrales, université Lyon 2 ; Nadine Gelas, université de la Mode, Lyon 2.
Doù et comment nous vient la lumière ? Du livre et des bibliothèques ? Des artistes et de la scène ? De lampoule électrique et des centrales nucléaires ? Des écrans et des réseaux hertziens et numériques ? Des lumières de la ville et des éclairages publics ? Quels liens entre les dispositifs techniques de la mise en lumière, leur impact symbolique et leur efficacité politique ? Le numéro 10 des Cahiers de médiologie sefforce dapporter des réponses par le dialogue entre des spécialistes du livre, de limage, de la turbine, de lurbanisme, de la littérature, du spectacle et de la mode .
samedi 18 novembre à 14h30
QUEST-CE QUE LA LUMIÈRE ?
avec
Gilles Cohen-Tannoudji, physicien, conseiller scientifique au CEA ; Marc Lachieze-Rey, directeur de recherches au CNRS ; Bernard Maitte, professeur en épistémologie et histoire des sciences, Lille 1.
Quelle est la nature de la lumière ? Quels furent, au cours de lhistoire, les réels enjeux des débats vigoureux entre ceux qui optèrent pour les corpuscules, et ceux qui penchèrent pour les ondes ? Dans quelle mesure sommes-nous aujourdhui héritiers de ces polémiques scientifiques qui émurent en leur temps Paul Valéry ? Et plus simplement, quavons-nous à attendre aujourdhui dune meilleure connaissance de la nature de la lumière ?
jeudi 23 novembre à 18h30
LIVRE ET ÉDITION ÉLECTRONIQUES
avec
Erick Orsenna, écrivain, Conseiller dEtat ; Régis Debray, écrivain, philosophe ;
Patrick Bazin.
Les écrans de nos ordinateurs individuels, ceux des nouveaux livres électroniques rendent le texte écrit, le texte lu, consubstantiels à la lumière. La page écrite nexiste dès lors que par rétroéclairage. Si elle devient instantanément disponible, en théorie partout et pour tous, elle est aussi susceptible de tomber en panne ; léclairement de nos esprits nest plus sous la seule dépendance de la lumière du soleil ou de la lampe de chevet, il est désormais
fortement lié à ces textes machines. Pouvons-nous dores et déjà analyser les conséquences de ces bouleversements technologiques non pas annoncés, mais
profondément amorcés ? A quels nouveaux usages du texte, du cahier, du livre, du cartable, de la librairie, de la bibliothèque, de la maison dédition conduisent-ils ? Quelles seront les conséquences culturelles et politiques de ces évolutions ?
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mardi 9 janvier 2001 à 18h30
LE SOMMEIL ET LÉVEIL
avec
Michel Jouvet, professeur émérite de médecine, université Lyon 1; Jean-Paul Marcheschi, artiste peintre ; Damien Davenne, professeur en sciences et techniques, université de Caen.
Il y a vingt ans, nous pensions quen lan 2000, nous connaîtrions avec précision les mécanismes biologiques qui règlent les alternances du sommeil et de léveil. A laube du troisième millénaire, nous devons bien admettre que la part dombre reste importante. Pourquoi et comment dormons-nous ? Pourquoi rêvons-nous ? Sous leffet de quels facteurs passons-nous du sommeil à léveil ?
Lobservation des mécanismes du sommeil et de la veille chez les animaux comme lanalyse attentive des modes de récupération chez les sportifs de haut niveau, ont pourtant amplement contribué à développer la connaissance du sommeil humain et de ses pathologies. Mais alors, que reste-t-il à connaître ? Quels obstacles rencontre la science lorsquelle se heurte aux résistances dun cerveau qui ne se livre guère ?
mercredi 10 janvier à 18h30
LA MÉLANCOLIE
avec
Jean-Didier Vincent, neurophysiologiste, professeur à lInstitut universitaire de France ; Monique Sicard ; Bernard Hoeppfner, traducteur de lAnatomie de la Mélancolie
(Ed. J. Corti, 2000) de Burton.
La mélancolie, écrit Diderot, cest le sentiment habituel de notre imperfection. Elle soppose à la gaieté qui naît du contentement de nous-mêmes. Elle naît de lidée dune certaine perfection que lon ne retrouve ni en soi, ni dans les autres, ni dans les objets de ses plaisirs, ni dans la nature : elle se plaît dans la méditation, se prête aux illusions de lamour. Lamitié lui est nécessaire ; elle sattache à ce quelle aime comme le lierre à lormeau. La physiologie des humeurs peut-elle contribuer à éclairer cette part noire de nous-mêmes dont la dépression est le versant contemporain ? Le sujet celui qui souffre, réagit avec ses singularités et fait ainsi irruption au cur des mécaniques scientifiques ne contribue-t-il pas à substituer des biologies à la biologie ? A installer dautres manières dinterroger le corps ?
jeudi 11 janvier à 18h30
LA DÉPRESSION
avec
Alain Ehrenberg, sociologue, CNRS ; Jean Guyotat, professeur en psychiatrie ;
Michel Gillet, psychiatre à lhôpital du Vinatier.
La dépression sannonce comme le mal du siècle à venir. De la déprime passagère aux pathologies dramatiques, elle revêt une gamme complète qui fonde une véritable culture du malheur intime et de la victimisation.
Le mot dépression ne recouvre-t-il pas, par incertitudes et commodités, des symptômes dorigines multiples ? Au-delà des pathologies biologiques ou psychiques, nexisterait-il pas une sociologie de la dépression ? Le mal-être et son corollaire, leffondrement psychique, pourraient alors constituer le revers sombre de la montée en force de lindividualisme contemporain.
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samedi 13 janvier à 14h30
LE CORPS ÉCLAIRÉ
avec
Didier Sicard, président du Comité consultatif national déthique ; Emmanuel Cabanis, professeur des universités, chef de service de neuro-imagerie, Centre hospitalier national
dOphtalmologie, XV-XX ; Mathias Fink, physicien, professeur à luniversité Paris 7 ; Monique Sicard.
Voir lintérieur du corps vivant ... limagerie scientifique et médicale qui naît à la fin du XIXe siècle avec les rayons X connaît aujourdhui une réussite exceptionnelle. Chaque jour, en France, ce sont près de dix millions dimages de nos corps qui sont ainsi réalisées dans les
hôpitaux et les cliniques privées. Une médecine et une chirurgie de limage s'installent,
occupant une place importante au voisinage dune médecine clinique et dune chirurgie traditionnelle dont la part samoindrit peu à peu.
Les conséquences cognitives, médicales, éthiques, sociales, économiques, juridiques, de ce mieux voir sont considérables : que lon songe seulement aux modifications induites par léchographie prénatale dans « limage » que nous nous faisons de lenfant, de la femme, de la famille.
mardi 16 janvier à 18h30
LUMIÈRE DU PATRIMOINE ET DE LARCHITECTURE
avec
Michel Melot, conservateur général des bibliothèques, Direction du Patrimoine ;
Marc Fontoynont, architecte, professeur à lENTPE ; Jean-Pierre Perrin, professeur à lEcole darchitecture de Nancy ; Lorenzo Piqueras, architecte, spécialisé en muséologie.
Il y a dix ans, Lyon, la première, mettait en place un plan-lumière urbain. Lidée, depuis, a fait son chemin et nombreuses sont les villes françaises ou étrangères à réfléchir et à développer de tels plans. Il ne sagit plus de braquer des projecteurs sur la façade dun château ou dune église, mais bien de façonner la nuit, de conférer une dignité nouvelle à des sites oubliés en faisant vibrer les lumières intérieures. Eclairer, cest conférer au patrimoine un sens nouveau, superposer léclat dune autre architecture aux intentions des premiers constructeurs et architectes. Cest également mettre en question léclairage des lieux privés ou publics : appartements, gares, musées. Entre la lumière mesurée et la lumière perçue, lécart est parfois important. Quelles réponses les spécialistes du patrimoine, les ingénieurs de la lumière, les architectes, apportent-ils à ces désirs de lumière que nous avons tant de mal à exprimer ?
mercredi 17 janvier à 18h30
LA RUPTURE ÉLECTRIQUE ET SON IMPACT SUR LES SENSIBILITÉS
LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES
avec
Pierre-Marc de Biasi, directeur de recherches au CNRS ; Marie-Rose Faure, docteur en épistémologie et histoire des sciences ; Alain Beltran, directeur de recherches au CNRS ; Patrice Carré, historien, enseignant à lENST ; Thierry Frémaux, directeur de lInstitut Lumière ; Charlie Van Damme, chef-opérateur, réalisateur.
Le XIXe siècle fut marqué par des bouleversements de grande ampleur induits par un petit objet, simple, transparent : lampoule à incandescence dEdison. Sa réussite, parfaitement gérée, fut dordre tant technique quéconomique.
Avec elle, brutalement, lhomme se posait en concurrent du soleil. La littérature, la peinture, la photographie, portent les traces de ces redécouvertes de la nuit. Une culture de lattraction
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sinstalle, dont le cinématographe aux façades couvertes dampoules multicolores et aux images de lumière, constitue une figure emblématique.
jeudi 18 janvier à 18h30
LACTUALITÉ DES LUMIÈRES
avec
Michel Delon, professeur de littérature française à la Sorbonne ; Catherine Lareyre, professeur de philosophie à luniversité de Bordeaux ; Robert Dumas.
Devons-nous nous référer aux savants et philosophes des Lumières, à leurs projets démancipation de lhomme par lhomme, à leur volonté de développement dune méthode critique et dune science efficace, à leurs soucis duniversalité ?
Nous vivons aujourdhui une crise des Lumières. Certains reprochent, à ces savants et philosophes du XVIIIe siècle, davoir divinisé la raison, empêchant dès lors lexpression de voix diversifiées, dautres, à lopposé, davoir fondé sur des bases matérialistes, un dangereux égalitarisme. Quoiquil en soit, lunité de leur pensée et leur cohésion, si souvent valorisées, semblent aujourdhui illusoires.
Pour ceux qui sémeuvent de léclipse de la raison, du défaut de jugement, et du déficit des vocations scientifiques qui marquent nos cultures contemporaines, les Lumières restent pourtant un modèle de référence où puiser les sources dune pensée rationnelle.
samedi 20 janvier à 14h30
LA VÉRITÉ
avec
Ivar Ekeland, professeur à luniversité Paris-Dauphine ; Jean-Marc Lévy-Leblond, physicien, épistémologue ; Jean-Michel Besnier, professeur de philosophie, université de Compiègne ; Daniel Parrochia, professeur de philosophie des sciences, université de Montpellier.
Au nom de la vérité, la justice fait la lumière sur les affaires ténébreuses. Au nom de la vérité, les scientifiques uvrent à la construction des savoirs. Mais au nom de la vérité, les religions révèlent ce qui resterait inconnaissable à la raison. Bizarreries de ces vérités multiples dont chacune prétend à lunicité.
Dans le domaine scientifique, la question de la vérité revêt une acuité particulière à lheure où les experts tiennent des propos parfois contradictoires : difficile de savoir si le trou dozone saccroît ou reste stable, si le climat se réchauffe, si lencéphalopathie spongiforme bovine sera ou non à lorigine dune épidémie de vaste ampleur, si les organismes génétiquement modifiés présentent un réel danger. Pour les scientifiques eux-mêmes, les vérités seraient multiples : ils ne verraient du monde que ce que veulent bien leur en donner à voir leurs instruments de vision, leurs méthodes et leurs institutions. Dès lors, ils ne feraient quen construire des représentations tenant lieu de réel.
Les propositions constructiviste et médiologique redonnent vigueur à la singularité, à loriginalité, à la créativité dans le monde des sciences. Enthousiasmante, elle apparaît aussi dangereuse, que valent nos jugements, que deviennent nos cohérences culturelles si nos propos ne réfèrent plus à un modèle principal, et si, dès lors, leur forme ou leur style prennent le pas sur leur contenu ?
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Publié le par Alexandre Gefen