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Explorer la notion de vérité en poésie (U.C. Louvain)

Explorer la notion de vérité en poésie (U.C. Louvain)

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Stephanie Vanasten)

Le Centre de recherche en Ecriture, Creation et Représentation: littératures et arts de la scène (ECR) de l'UCLouvain, et NEDLIT, un de ses groupes de recherche en littératures et cultures de langue néerlandaise et comparées, organisent le 24 février prochain à l'Université catholique de Louvain (UCLouvain, Louvain-la-Neuve, Belgique) un atelier sur la notion de vérité en poésie.
L’atelier se tiendra en présentiel de 9h à 17h30 dans l’auditoire COUB 01 sur le campus de Louvain-la-Neuve, Belgique et pourra également être suivi à distance via MS TEAMS.
Comme texte de référence est proposé le numéro spécial FAbula-LhT no. 24 (2020) dirigé par Annick Ettlin & Jan Baetens "Toucher au "vrai": La poésie à l'épreuve des sciences et des savoirs", en particulier son introduction: "On a touché au « vrai » : Lectures historiques de la figure du poète penseur.” Toucher au « vrai », www.fabula.org/lht/24/presentation.html.
 
Argumentaire
 
Souhaitant explorer dans cet atelier la relation entre poésie et vérité, nous faisons implicitement le lien avec la question de. la matérialité de la poésie et de son langage. Car, comme s’interrogent aussi Annick Ettlin et Jan Baetens dans leur introduction au numéro thématique (2020) « Toucher au « vrai » : La poésie à l’épreuve des sciences et des savoirs » de la revue Fabula-LhT: « la valeur de vérité des poèmes tient-elle à un travail des formes, est-elle issue d’une matière, linguistique, laquelle se prêterait à diverses manipulations ? Il s’agissait ainsi de s’interroger sur les spécificités matérielles du discours poétique par rapport aux autres formes de discours, d’étudier l’attention très vive que les poètes portent à la langue, les inventions qu’ils y opèrent, sans pour autant bien sûr succomber au mythe de l’unicité ou de la supériorité du langage poétique. » Cette attention pour le langage spécifique de la poésie et son substrat, sa soi-disant poéticité, comme critère de sa fonction épistémologique, constitue un fil conducteur de cet atelier.
La poésie contemporaine, dans ses manifestations textuelles, contextuelles et culturelles les plus diverses, nous confronte sérieusement, lecteurs du XXIème siècle, aux (en)jeux (certes pas neufs) de la vérité. Aussi nous souhaitons, à partir du travail de Annick Ettlin et Jan Baetens, prolonger une réflexion encore fragmentée, voire limitée à des articulations définies (comme poésie et sciences) dans certaines traditions scientifiques liées au sein des études littéraires et poétiques à des domaines linguistiques particuliers. Quels traits du dire ‘vrai’ dans la (les) langue(s) du poète et son écriture singulière, quels effets de discours et valeurs de la notion de vérité une exploration comparée de cas d’études situés dans ou entre diverses traditions linguistiques, modes génériques, pratiques inter-artistiques, sans prétention de représentativité sinon leurs actualisations créatives et variables, peut-elle alors faire remonter, à nouveaux frais possiblement ? 
Lorsque nous envisageons le rapport entre poésie et vérité, nous pensons tout d’abord, pour baliser quelques points d’ancrage invitant à son examen, à une conception « post-romantique » de la notion de vérité en poésie. Il nous semble opportun – et sans doute propre à notre Zeitgeist, considéré comme « métamoderne » dans certains milieux philosophiques et littéraires –, d’adopter comme point de départ une interprétation du terme « vérité » qui reprend les notions poststructuralistes de la vérité, en la complémentant d’une valeur humaniste (voir Holland 2013). Comme le soutiennent Ettlin et Baetens, il s’agit de “S’opposer à une certaine conception ancienne, tout ensemble mystifiante et élitiste, des rapports entre poésie et vérité, certes ; mais sans renoncer à l’idée d’une certaine capacité de déblocage ou de déphasage, qui serait propre à l’écriture poétique et conduirait encore malgré tout à la considérer, de façon renouvelée, désacralisée, comme épiphanie. » Bien que nous ne souhaitions pas limiter la portée de notre investigation et que cet atelier veut également considérer avec intérêt les interprétations historiques du concept de vérité en poésie, il semble impossible de ne pas examiner avec une certaine distance critique l’idée romantique de la poésie comme vérité ultime.
En posant la question de la vérité, cet atelier touche à ce qui est (encore) au cœur de la poésie et aux fonctions qu’elle peut remplir. Comme le soulignent Ettlin et Baetens, ce questionnement semble particulièrement pertinent, surtout dans cette ère de post-truth : « En témoigne […] l’écriture documentaire de Franck Leibovici, fondée sur l’utilisation d’un matériau authentique, marqué du sceau de notre réel, dans son immédiateté et sa trivialité. » De fait, la notion de vérité en poésie évoque toute une série de notions connexes qui ne se limitent pas au documentaire et à son rapport à d’autres matériaux discursifs, voire au « réel » : en premier lieu, la notion d’idée, mais aussi celle, étroitement liée, de connaissance (p. ex. Bouveresse 2008), qui évoque encore les notions de science et d’exactitude (p. ex. Hallyn 1990, Rancière 1994, Peelen 2001, Klausnitzer 2008, Vogl 2008), voire de religion, d’idéologie, de métaphysique et d’épiphanie. Mais la connaissance peut également être comprise comme une connaissance de soi, et la notion de vérité évoque alors des échos à des termes tels qu’authenticité et expérience authentique, qui ébranlent la littérature dans son rapport à la fiction, à la feintise, voire au ‘faux’. La question de la vérité nous mène alors à penser l’exploration, par l’expérience poétique, du côté de l’affect, du lien habité et éprouvé du sujet à la langue, et du singulier sensible.
Cet atelier souhaite se concentrer sur trois piliers, dégagés à partir des termes que Ettlin et Baetens mentionnent dans leur introduction. Le premier pilier, évoqué plus haut, concerne la qualité documentaire de la poésie, qui peut comporter (mais pas nécessairement) des enjeux socio-politiques. Comme le disent les auteurs, « La défense d’un rapport naturel entre la poésie et la vérité va alors de pair avec l’espoir qu’elle retrouve son rôle politique et social. » Nous complétons ensuite cette question d’une vérité socio-politique de la poésie, intimement liée à la valeur qui lui est octroyée, par une enquête sur le pouvoir performatif de la poésie en tant qu’« énoncé de vérité », dans son unicité et agir non reproductible. On peut explorer cette puissance performative à travers l’expérience de lecture, c’est-à-dire comme moyen de transmettre et de donner à opérer entre poète et lecteurs une certaine vérité interpersonnelle : « D’un point de vue pragmatiste, ce n’est plus l’exactitude qui compte, mais l’efficacité ; l’énonciation réussie est celle qui porte une force d’émotion ou de conviction. […] La vérité poétique est alors entièrement contenue, circonscrite dans l’acte de lecture (ou d’écoute) et dans l’expérience qu’il constitue. » Cette dimension performative est, enfin, fortement liée à la compréhension de la vérité en tant qu’expérience personnelle forgeant de nouveaux de sens, des suppléments, des révélations. Ettlin et Baetens relient cette dimension aux vues de Mallarmé : « Mallarmé, auquel on peut revenir enfin, associait bien la vérité à l’effet transfigurateur de l’œuvre d’art, à travers l’émotion esthétique. […] La correspondance, cette fois, s’établit entre le moi et le monde : et la vérité poétique est alors intérieure. » Voilà les trois questions centrales sur lesquelles cet atelier propose de s’appuyer : les aspects sociopolitiques, performatifs et intérieurs-expérientiels de la vérité en poésie.
 
Ouvrages cités
 
Bouveresse, Jacques. La connaissance de l’écrivain : Sur la littérature, la vérité & la vie. Agone, 2008.
Ettlin, Annick, and Jan Baetens. “On a touché au « vrai » : Lectures historiques de la figure du poète penseur.” Toucher au « vrai » : La poésie à l’épreuve des sciences et des savoirs, special issue of Fabula-LhT, no. 24, 2020, www.fabula.org/lht/24/presentation.html. Accessed 19 May 2021.
Hallyn, Fernand. The Poetic Structure of the World: Copernicus and Kepler. Zone Books, 1990.
Holland, Mary K. Succeeding Postmodernism: Language and Humanism in Contemporary American Literature. Bloomsbury Academic, 2013. 
Klausnitzer, Ralf. Literatur und Wissen: Zugänge – Modelle – Analysen. Walter de Gruyter, 2008.
Peelen, Gert J., editor. Dichter bij de waarheid: Gedachten over poëzie en wetenschap. Zoetermeer, Meinema, 2001.
Rancière, Jacques. Les noms de l’histoire. Essai de poétique du savoir. Éditions du Seul (“La Librairie du XXIe siècle”), 1992. (English translation: The Names of History: On the Poetics of Knowledge. Translated by Hassan Melehy, U of Minnesota P, 1994.)
Vogl, Joseph. Kalkül und Leidenschaft: Poetik des ökonomischen Menschen. Diaphanes, 2008.

Programme 
 
9h-9h15           Accueil 
9h15-9h30        Introduction (Stéphanie Vanasten & Helena Van Praet, UCLouvain)
 
9h30-10h45      De la vérité : aspects philosophiques et performatifs 
° 9h30-10h00 : Elisabeth Aydin (UCLouvain / GEMCA), « Principes classiques du rapport entre poésie et vérité, illustrés par la pensée d’Henri II Estienne »
° 10h00-10h30 : Michel Lisse (UCLouvain, F.R.S.-FNRS), « Les vérités de Jacques Derrida »
 
10h45-11h15    Pause-café/thé
 
11h15-12h30    De la vérité : aspects expérientiels et cognitifs
° 11h15-11h45 : Adrien Chiroux (UCLouvain / F.S.R.), « Le sujet lyrique à l’épreuve de l’en-quête romanesque de soi : exploration et apports d’un concept »
° 11h45-12h15 : Anthony Manu (VUB/FWO), « Sur l’hétérogénéité générique et la vérité dans Premières poésiesde Musset »
 
12h30-13h30    Lunch
 
13h30-14h45    De la vérité : aspects documentaires et sociopolitiques 
° 13h30-14h : Jonathan Châtel (UCLouvain) : « Une ‘autre’ vérité à la scène : la poésie de Trakl dans le théâtre de Claude Régy »
° 14h-14h30 : Geneviève Fabry (UCLouvain) : « Vérité et impasse du document dans la poésie de Jaime Luis Huenún »
14h45-15u15    Pause-café/thé
 
° 15h15-15h45 :  Laurent Robert (UCLouvain) : « Vérité politique, vérité poétique chez Jean-Marie Gleize et Nathalie Quintane »
 
16h00-17h15    « Toucher au vrai », en retour
Entretien virtuel avec Annick Ettlin, discussion
 

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Un temps de 20 minutes est prévu par présentation, suivi de 10 minutes de discussion.
Les plages horaires sont notifiées pour faciliter un suivi serein et fructueux sous format hybride, en présentiel et à distance.
Lieux et modalités d’inscription
Auditoire COUB 01, Place Pierre de Coubertin 2, 1348 Louvain-la-Neuve (participation en présentiel dans le respect des règles sanitaires en vigueur : https://uclouvain.be/fr/decouvrir/mesures-prises-a-l-uclouvain-dans-le-cadre-de-la-covid-19.html)
L'évènement pourra également être suivi en ligne via MS TEAMS (lien envoyé aux participants après inscription)
Inscription obligatoire via formulaire en ligne sur le site web ECR, https://uclouvain.be/fr/instituts-recherche/incal/ecr/evenements/atelier-sur-la-notion-de-verite-en-poesie.html, contact : evenement-incal@uclouvain.be