Céline HERVET et Alexandre CHÈVREMONT
Polyphonie et formes chorales. Sur les origines collectives de la musique
Argumentaire
« Que toute musique sans exception, notamment la polyphonie — medium indispensable de la nouvelle musique — provienne des pratiques collectives du culte et de la danse, ce fait, l’évolution de la musique vers la liberté n’a jamais pu tout bonnement le laisser en arrière comme un simple “point de départ” » Dans ces lignes de Philosophie de la nouvelle musique, Adorno inscrit les innovations formelles d’Arnold Schoenberg dans une histoire longue où la polyphonie, ancrée dans une socialité primitive, hante toute production musicale et plus généralement sonore. C’est l’individu et le moi isolé qui se trouvent ainsi remis en cause à partir du moment où « le sujet qui compose n’est pas individuel mais collectif » et où « un son isolé dit déjà Nous » (« Réflexions en vue d’une sociologie de la musique »). Si comme le pense Adorno l’art est issu d’un rapport social, la musique incarne cette dimension collective comme origine, mais aussi comme contenu. En effet le caractère transversal du son défait les oppositions traditionnelles entre privé et public, intimité et distance, sujet et objet, corps et esprit, scène et public, reconfigurant les relations et nouant de nouvelles socialités. Or ce phénomène joue à plein dans les pratiques vocales d’ensemble, préparant une forme d’écriture spécifiquement polyphonique. Il s’agira ici d’en appréhender la portée esthétique et politique en partant du chœur antique, né de la danse et du culte religieux. Nous réfléchirons alors sur leurs résurgences historiques qui portent chaque fois une conception du monde social et des rapports de pouvoir qui s’y déploient. Structure tout à la fois disciplinaire et utopique vouée à un encadrement moral et social, le chœur scande les moments charnières de l’histoire des sociétés : véhicule de la Réforme luthérienne, le développement du chant choral accompagnera la Révolution industrielle en France (mouvement des orphéons dans les années 1830) et en Angleterre où se créent dès la fin du XVIIIe siècle les sociétés chorales ouvrières, « loisirs rationnels » censés régénérer et la musique et la société.
Programme
17h00-19h00
Mer 20 oct, jeu 21 oct, jeu 16 déc, ven 17 déc
Maison des sciences de l’homme, 14 avenue Berthelot, 69007 Lyon
Mercredi 20 octobre, Espace Marc Bloch
https://u-picardie-fr.zoom.us/j/89077470085?pwd=eTdZd29aSktzTnlPWXE2Nk1JTlZnZz09
Céline Hervet : Choros et poluphonia. Que nous apprend le chœur grec antique sur les enjeux politiques de la polyphonie ?
Alexandre Chèvremont : Le rôle du chœur dans le théâtre grec antique selon August Wilhelm Schlegel
Jeudi 21 octobre, Amphithéâtre Dora Schaul
https://u-picardie-fr.zoom.us/j/89256214417?pwd=OWV4ZWhGLzNQMWMwZnpHZDFNUytJUT09
Claude Calame, Directeur d’études à l’EHESS membre de l’équipe AnHiMA (UMR 8210) : « Polyphonie chorale, autorité poétique et pratique rituelle : des poèmes de Pindare aux chants choraux d’Euripide »
Jeudi 16 décembre, Espace Marc Bloch
https://u-picardie-fr.zoom.us/j/85110388916?pwd=amhMeUtHQ3d5ZzhyTUpBTEFYV2VTdz09
Anne-Gabrièle Wersinger, Professeure émérite de philosophie ancienne à l’université de Reims, membre du Centre Jean Pépin-CNRS / ENS Paris (UMR 8230) : « Muses et sirènes : chorégies platoniciennes de l’Un et du Multiple »
Vendredi 17 décembre, Espace Marc Bloch
https://u-picardie-fr.zoom.us/j/85110388916?pwd=amhMeUtHQ3d5ZzhyTUpBTEFYV2VTdz09
Céline Hervet : Le « délaissement du multiple ». Devenirs et critiques de la polyphonie antique
Alexandre Chèvremont : L’effacement de la pluralité dans le public auditeur