Stefan Zweig fut aussi un important collectionneur de manuscrits littéraires. Au début des années 1930, il avait réuni plusieurs centaines de textes autographes des auteurs qu’il admirait le plus : brouillons d’œuvres célèbres ou inédites, notes préparatoires, billets intimes ou encore manuscrits destinés à l’imprimeur, de la Renaissance jusqu’à ses contemporains. Cette galerie personnelle des "plus grands maîtres de tous les temps" – Goethe, Balzac, Rimbaud y côtoyaient Racine, Casanova et Wilde – représentait également pour lui la possibilité de sonder les mystères de la création artistique, une quête constante au cours de sa vie mouvementée. Contraint à l’exil par la menace du nazisme, il mit sa collection aux enchères ; la majeure partie en fut alors recueillie par le bibliophile suisse Martin Bodmer. Son unité caractéristique put ainsi être largement sauvegardée. En rendant à nouveau visible une collection longtemps considérée disparue, l’exposition De Stefan Zweig à Martin Bodmer proposée par la Fondation Jan Michalski offre une occasion rare de voir quelques-unes des plus belles pages du patrimoine littéraire de la main même de leurs créateurs, et interroge ce qui pouvait rapprocher les deux collectionneurs dans leurs projets respectifs. En héritiers de Goethe, ils partageaient une conception "magique" du manuscrit autographe comme lieu d’évocation de "génies" à travers leurs traces écrites, mais aussi une vision humaniste de la Weltliteratur – ou littérature mondiale – comme horizon culturel face à la montée brutale des nationalismes.
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