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Effets de présence et effets de vérité dans l'historiographie, par Bérenger Boulay.

Article initialement paru dans Littérature n°159 (Écrire l'histoire), reproduit avec l'aimable autorisation du comité de rédaction de la revue et des éditions Armand Colin. Voir le sommaire du numéro sur le portail Cairn.



Effets de présence et effets de vérité dans l'historiographie.


Dans un article paru en 1988 sous le titre «Ekphrasis and quotation[1]», Carlo Ginzburg examine les raisons pour lesquelles les événements relatés dans un ouvrage d'Histoire sont perçus comme réels. Mettant en particulier l'accent sur les éléments textuels[2] qui donnent de l'autorité et du crédit au discours de l'historien et permettent d'emporter l'adhésion du lecteur, Ginzburg oppose l'historiographie ancienne, qui cherchait surtout à«mettre sous les yeux», et l'historiographie savante qui, elle, met entre guillemets. À la fin de l'âge classique, un auteur comme Gibbon illustrerait ainsi le passage du régime historiographique de l'evidentia, qui donne à «voir», à celui de l'evidence, terme qui, en anglais, peut signifier «preuve» ou «témoignage». Plutôt que de chercher à faire croire en faisant «voir», les historiens, qui depuis la constitution de l'Histoire en discipline académique sont souvent des universitaires, se contenteraient maintenant de convaincre leurs lecteurs en mentionnant les preuves sur lesquelles se fondent leurs travaux, en citant notamment leurs sources écrites et en indiquant les références de ces documents.

Près d'une vingtaine d'années plus tard, Ginzburg place en tête du recueil Il filo e le tracce une version largement remaniée de cet article, dans laquelle l'idée que le dialogisme et l'effet de vérité de la citation auraient évincé le monologisme et l'effet de présence de l'evidentia semble moins nettement affirmée[3]. Une telle histoire de l'historiographie (de l'écriture de l'Histoire) n'est en effet pas satisfaisante dans la mesure où elle laisse un peu trop rapidement penser que les historiens ont complètement renoncé à l'evidentia, à faire «voir» l'Histoire[4]. Il convient de retenir les deux régimes proposés par Ginzburg, mais en les détachant de la chronologie, pour en faire deux paradigmes destinés à être réinvestis et articulés dans une autre histoire.


Montrer et attester


Le latin evidentia traduit le terme grec enargeia[5] qui désigne, en contexte rhétorique, non pas une figure particulière, mais un effet du discours consistant à susciter l'imagination du lecteur ou de l'auditeur de manière à lui faire «voir» ce qui est décrit ou raconté. C'est l'effet que l'on désigne aussi en recourant au terme d'hypotypose. Il est nécessaire – en particulier quand il s'agit des historiens anciens, qui s'intéressaient surtout au passé récent – de distinguer et d'articuler l'evidentia et l'autopsie, l'attestation par la vue. Hérodote et Thucydide, même s'ils n'ont pas assisté à tous les événements qu'ils relatent, font du témoignage des yeux – et d'abord des leurs– un gage de vérité[6]. Bien sûr, l'autopsie n'appelle pas nécessairement l'enargeia, qui n'est pas plus nécessairement fondée sur l'autopsie. Mais l'enargeia, outre le fait qu'elle peut faire naître le sentiment que l'historien parle d'expérience[7], est en quelque sorte une fiction d'autopsie: le lecteur serait comme le spectateur, selon le souhait de Plutarque, ou le témoin de ce que l'on décrit ou raconte[8].

Cette impression d'assister aux événements ou aux situations représentés semble pouvoir être produite par des figures comme l'effacement des marques de l'énonciation et l'énallage temporelle (présent historique ou descriptif mis pour un prétérit ou un imparfait), ou encore par le caractère détaillé du récit ou du tableau. Ce dernier point évoque bien sûr «l'effet de réel» produit par les notations que Roland Barthes relevait aussi bien dans le roman réaliste que chez Michelet, mais on peut aussi rendre compte de ce «sens du détail» en termes narratologiques de vitesse. Le ralentissement narratif, en particulier le tempo scénique, «donne au lecteur une impression de présence plus grande qu'un sommaire rapide et lointain[9]» et la description détaillée implique souvent une pause narrative. Pour Gérard Genette, «le choix du détail et la mise en scène du “tableau”» suggèrent ainsi chez Michelet un «je l'ai vu, je l'ai entendu, j'y étais» et parfois un «j'y suis encore» et un «vous y êtes» proprement métaleptiques[10]: l'effet de présence auctoriale ou lectoriale abolit, sur un mode figural ou fictionnel, la distance qui sépare la représentation et son objet.

L'effet de vérité produit par la mention de documents peut tendre, au contraire, à souligner cette distance. Le document montre que le texte a un référent extérieur et garantit que tel événement s'est réellement produit ou que les choses étaient bien comme l'historien les décrit. Le document est ainsi le garant – et c'est l'un des sens possibles du latin auctor et du grec histor – de la véridicité de l'historiographie. Mais l'attestation documentaire, tout en marquant une continuité puisqu'elle rappelle que le narrateur (homodiégétique) vit bien dans le même monde que son objet, souligne aussi la distance entre le présent du savant et le passé qu'il étudie à travers les traces qui en subsistent. Le sentiment de cet écart est toutefois atténué lorsque le texte présente les seuls résultats de la recherche et les éventuelles citations de documents et que les références de ces derniers sont reléguées dans les notes de fin de section ou de bas de page. Références dans le corps du texte et en notes peuvent bien sûr se combiner et n'épuisent pas le paradigme de l'evidence. L'historien allemand Leopold von Ranke répugnait par exemple à faire l'histoire de ses recherches dans le texte même de ses Geschichten et n'aurait eu recours aux notes qu'à son corps défendant, préférant livrer les commentaires ou les reproductions de ses sources en annexes de ses ouvrages[11].

Le partage entre texte et péritexte (annexes ou notes) rend particulièrement visible ce que Michel de Certeau appelle la «construction dédoublée» de l'historiographie traditionnelle. Le lecteur a en effet bien souvent affaire à un «texte feuilleté, dont une moitié (…) s'appuie sur l'autre (…) et se donne ainsi le pouvoir de dire ce que l'autre signifie sans le savoir[12]».L'autre, c'est bien sûr l'autre du texte, le document, éventuellement cantonné dans le péritexte, mais c'est aussi l'autre de l'historien, le témoin, dont la voix risque de concurrencer celle du savant, mais qui se trouve toutefois inscrit dans un rapport de forces inégal. Le «pouvoir» et le «savoir» restent du côté de l'historien. Des ouvrages comme ceux de la collection «Archives», fondée en 1964 par Pierre Nora aux éditions Julliard dans l'intention de montrer aux lecteurs avec quels matériaux s'écrit l'Histoire, renversent cependant le rapport de forces: la voix du savant s'efface derrière les citations ou reproductions de documents. Le texte de l'historien est fragmenté et n'est plus autonome par rapport aux documents qu'il introduit et commente, auxquels il est donc subordonné, comme les notices, dans un musée, sont subordonnées aux objets qu'elles nomment et décrivent. Dans cette collection, les éditeurs – dont Michel Foucault – de Moi Pierre Rivière… Un cas de parricide au XIXème siècle (1973), sont allés jusqu'à reléguer leurs commentaires savants en annexes au dossier d'archives pour ne pas étouffer la narration de Rivière.


Stratégies énonciatives et protocoles testimoniaux.


À partir de l'observation des choix énonciatifs et des procédures d'attestation des historiens de l'école que l'on appelle «positiviste», lorsqu'on la taxe de naïveté épistémologique, ou «méthodique», lorsqu'on souhaite lui rendre hommage[13], Philippe Carrard[14] a établi un premier modèle caractérisé par l'effacement maximal des marques de la narration dans le récit. Pour illustrer le système de l'énonciation «historique», opposé au système du «discours», Benveniste cite ainsi deux passages de l'Histoire grecque(1925) de Gustave Glotz, avant de citer un extrait de Gambara de Balzac. À quelques nuances près, on peut – du point de vue des stratégies énonciatives en tout cas – inscrire au fronton de l'école méthodique la fameuse formule de Ranke: «bloss zeigen, wie es eigentlich gewesen» («se contenter de montrer comment les choses se sont passées»)[15]. Toute référence à l'enquête documentaire dans le corps même du texte tendant à embrayer sur la situation de l'historien[16],le choix de l'énonciation «historique» implique par ailleurs un protocole testimonial qui repose principalement sur l'annotation, où se trouve reléguée la référence documentaire. Comme seuls les résultats de la recherche apparaissent dans le texte même, le travail sur le matériau documentaire et le savoir qu'il fonde semblent aller de soi. Le modèle méthodique se caractérise en somme par la recherche d'une objectivité énonciative censée signifier, sinon garantir, l'objectivité scientifique.

Contrastant avec ce modèle positiviste, un des traits marquants de certains grands ouvrages de l'historiographie des Annales et de la «Nouvelle Histoire» est la présence, parfois discrète, parfois plus massive, de marques de la subjectivité de l'historien dans le récit (le cadre épistémologique des Annales faisant la «part du sujet» dans la re-construction de l'Histoire[17]). Si l'on s'en tient aux seuls critères énonciatifs et testimoniaux, une continuité peut ainsi être observée entre, par exemple, Les Rois thaumaturges (1924) de Marc Bloch, La Méditerranée et le monde méditerranéen à l'époque de Philippe II (1949) de Fernand Braudel et plusieurs livres de Georges Duby, d'Alain Corbin ou encore, peut-être un peu à la marge des Annales, certains ouvrages d'Arlette Farge.

Dans Le Cours ordinaire des choses, Farge commente ainsi un document qu'elle vient de citer intégralement, en soulignant la dimension affective de son travail aux archives:

Dans son ambivalence formelle où jouent la vie et la mort, où à la description naturelle d'une femme assise succède le constat brutal des violences qui lui ont été portées, le texte recèle ce pourquoi je ressens si intensément le travail effectué à partir des manuscrits de police[18].

Non seulement le «je» n'est plus proscrit, mais le texte s'ouvre à la référence documentaire, moins systématiquement reléguée dans les notes finales ou de bas de page. Cette tendance est surtout très nette dans le cas d'œuvres importantes publiées à partir des années soixante-dix par des chercheurs reconnus, parfois dans des collections qui, sans être véritablement «grand public», imposaient toutefois d'autres procédures d'attestation que celles d'un protocole universitaire largement hérité du moment méthodique. Si deux des ouvrages les plus lus de Corbin, Le Monde retrouvé de Louis-François Pinagot et Le Village des “cannibales” se terminent par quelques notes documentaires, Le Dimanche de Bouvines et Guillaume le Maréchal de Duby n'en comportent aucune. Farge, dans Le Cours ordinaires des choses, cite en notes les références d'ouvrages comme L'Encyclopédie ou le Tableau de Paris de Mercier, tandis que les références archivistiques sont généralement indiquées dans le corps du texte, à la suite des très nombreux extraits d'archives judiciaires ou policières retranscrits. L'effet de vérité produit par l'attestation traditionnelle n'est donc pas perdu, d'autant que l'ouvrage s'ouvre sur l'avertissement suivant:

Dans ce livre, tous les textes en retrait sont des citations provenant d'archives judiciaires du XVIIIe siècle ou d'ouvrages imprimés à la même époque.

Et le premier chapitre, intitulé «Ils sont de source sûre», commence par cette affirmation redondante: «Ils sont de source sûre, ces fragments d'archives», affirmation réitérée quelques lignes plus bas.

Duby, Farge ou Corbin ne se contentent pas de signifier aux lecteurs qu'ils construisent leurs récits sur de solides bases documentaires, ils rendent aussi explicites leurs démarches concernant le choix et la consultation des archives. L'inscription de l'attestation dans le corps du texte peut aussi les amener à faire part des incertitudes dues à la nécessaire incomplétude de l'enquête et aux lacunes du matériau documentaire. Les travaux de Duby s'ouvrent ou se concluent ainsi souvent sur l'évocation des ténèbres ou des écrans qui font obstacle à une meilleure connaissance de la société féodale, dont les traces ne peuvent constituer qu'un tissu troué, usé ou en lambeaux. Des marques de subjectivité relevant de la modalisation épistémique (interrogatives, semi-auxiliaires modaux exprimant la probabilité ou la possibilité, locutions adverbiales comme «peut-être», «sans doute», etc.) viennent alors préciser le degré de certitude que l'historien confère à ses propositions. Dans Le Monde retrouvé de Louis-François Pinagot, Corbin trace ainsi les frontières du certain, du probable, du possible, de l'hypothèse aventureuse et de l'inconnaissable. En soulignant les limites de son savoir, l'historien gagne d'ailleurs la confiance du lecteur qui s'en remet d'autant plus à son honnêteté.

L'inscription de l'enquête dans le récit permet, en un sens, aux historiens de retrouver une autorité fondée sur l'autopsie. Certes l'enquêteur n'a généralement pas assisté aux événements qu'il rapporte, mais il se campe en «pilier d'archives[19]», témoin au second degré, indirect et «ultérieur[20]». Il est celui qui a vu, non pas le passé, mais les traces du passé dans le présent et qui s'est trouvé confronté à la matérialité de ces traces[21]. On peut parler de véritable autopsie lorsque les phénomènes étudiés sont encore observables. Duby commence ainsi Le Dimanche de Bouvines :

L'année 1214, le 27 juillet tombait un dimanche. Le dimanche est le jour du seigneur. On le lui doit tout entier. J'ai connu des paysans qui tremblaient encore un peu lorsque le mauvais temps les forçait à moissonner un dimanche: ils sentaient sur eux la colère du ciel.

Il y a un peu plus d'une dizaine d'années, Carrard écrivait que la résurrection du «je» du chercheur concernait surtout le péritexte, en particulier les préfaces, et que ses interventions dans le corps même du texte n'étaient pas si fréquentes. Un ouvrage majeur de l'école des Annales comme La Méditerranée de Braudel pourrait certes être cité comme contre-exemple, mais Carrard constatait surtout l'absence, dans le corpus annaliste, d'ouvrages où la narration des résultats de l'enquête serait accompagnée d'une narration suivie de l'enquête elle-même, sur le modèle de certains travaux d'ethnologie[22]. Sur ce point, le constat semble toujours d'actualité: c'est ainsi à tort que Le Monde retrouvé de Louis-François Pinagot est souvent mentionné comme exemple de récit historiographique doublé d'un récit d'enquête. La relation de l'enquête est surtout développée dans l'avant-propos – donc dans le péritexte – qui contient les «fragments du journal tenu les premiers jours de l'enquête[23]». Cette relation ne reprend qu'à la toute fin du livre, à propos d'une pétition «signée» par Pinagot:

Louis-François, le père, s'est, en effet, déplacé. Il a inscrit sur le registre la seule trace manuscrite et même la seule trace individuelle que nous possédions de lui: il s'agit d'une croix ample et malhabile, qui ne ressemble pas exactement aux autres; ce qui prouve que chacun des analphabètes pétitionnaires a dessiné la sienne. On se doute de l'émotion que j'ai pu ressentir quand, après des mois d'enquête et d'intimité avec la personnalité insaisissable de Louis-François, j'ai découvert cette trace et tenté de reconstituer le geste qui l'avait inscrite sur le papier; trace manuscrite d'un homme de soixante-quatorze ans qui, peut-être, était amené pour la première fois à saisir le porte-plume[24].

Pour trouver un cas de récit d'enquête véritablement suivi, il faut se tourner vers l'Histoire orale telle qu'elle est par exemple pratiquée, en marge de l'Histoire universitaire, par l'italien Nuto Revelli[25].

L'inscription de l'historien dans son récit n'interdit pas l'effacement ponctuel de la voix narrative devant les documents pour laisser parler les témoins, parfois sur une grande portion de texte. Plutôt que de relater lui-même la bataille qui eut lieu un dimanche aux environs de Bouvines, Duby préfère «présenter crûment au lecteur la trace de l'événement la plus immédiate, la plus nette et la plus étendue[26]», c'est-à-dire la chronique en prose de Guillaume le Breton. Celui-ci était présent à Bouvines et son récit, «le meilleur témoignage[27]», est introduit de façon métaleptique – l'historien et son lecteur sont, sur un mode figural, contemporains du personnage – par un «Écoutons à présent le principal témoin[28]». Dans Quel bruit ferons-nous? (2005) et surtout dans son Essai pour une histoire des voix au dix-huitième siècle (2009), Farge entend, quant à elle, «faire du bruit» avec les voix de ceux qui jusqu'alors n'ont pas été entendus, mais dont les paroles ont été recueillies dans les archives.


Effets de présence et prestige de l'image dans l'historiographie contemporaine


Avec la convocation métaleptique, par Duby, du témoin principal de Bouvines, le lecteur est invité à adopter la posture d'un auditeur contemporain de la source d'information. Ce passage offre un exemple d'historiographie récente et savante articulant effet de présence de l'evidentia ou de la métalepse et effet de vérité de l'attestation documentaire.

Dans le modèle positiviste, la référence documentaire est, sinon absente, du moins reléguée dans le péritexte et l'historien adopte la stratégie de l'énonciation «historique» pour «se contenter de montrer[29]». L'illusion mimétique repose alors sur l'effacement de toute référence à une situation de communication, qui laisse le champ libre au «spectacle» de l'Histoire: les «événements semblent se raconter eux-mêmes», puisque «personne ne parle[30]». Dans cette perspective, la note infra-paginale et la note de fin peuvent être considérées comme des compromis entre le souci d'attestation et le souci de monstration: la lecture de la note interrompt bien celle du récit, mais la séparation typographique de la narration et de la référence documentaire permet toujours de se dispenser de cette dernière. On comprend aussi pourquoi Ranke préférait commenter et même reproduire ses sources en annexes: le gain est double puisque, d'une part, l'exposition des résultats de la recherche ne risque pas d'être interrompue par l'attestation et que le lecteur, d'autre part, peut lui-même avoir accès aux documents.

Les historiens universitaires français contemporains ne semblent pas chercher à plonger leurs lecteurs dans des histoires «sans narrateurs», qui paraissent se raconter ou se mettre en scène toutes seules. Tous n'ont pas pour autant renoncé à faire «voir» (à faire imaginer) ou à rendre «présente» l'Histoire. La participation de Farge et de Duby à des entreprises de mise en images ou en scène du passé en est un premier indice. Duby – qui était aussi critique d'art médiéval et d'art contemporain – a enseigné Le Temps des Cathédrales à la télévision, a co-signé une adaptation en bande dessinée de Guillaume le Maréchal et avait accepté de collaborer à une adaptation du Dimanche de Bouvines en téléfilm. Farge, dans La Nuit blanche, qui livre quelques bribes d'un projet d'écriture dramatique, se dit «hantée par l'immense matière humaine qui est celle des archives judiciaires et le désir d'établir complicité théâtrale avec elle[31]». Plus récemment, Gérard Noiriel, qui a par ailleurs interrogé les rapports entre Histoire, théâtre et politique (2009), est lui-même monté sur la scène d'une «conférence-spectacle[32]» mettant les preuves de l'Histoire à l'épreuve de la performance théâtrale. L'incarnation, au théâtre ou à l'écran, pose toutefois d'insurmontables problèmes à l'historien soucieux de respecter la vérité jusque dans les moindres détails:

Traiter à la télévision du contemporain, de l'histoire immédiate, d'événements récents dont il reste trace sur des bandes filmées est relativement facile. Le passage à l'image d'un passé plus ancien pose en revanche de très ardus problèmes[33].

Montrer le passé ancien est impossible, mais il y a une véritable tentation de la présence et de la monstration chez certains historiens. On relève ainsi dans leurs récits d'assez nombreux exemples d'intrusions figurales (métaleptiques) du narrateur, et avec lui du lecteur, dans l'histoire racontée. Braudel s'imagine ou se représente ainsi volontiers aux côtés de Philippe II, la métalepse soutenant là encore l'évocation du travail de l'historien aux archives: consulter les papiers du souverain, c'est s'installer à sa place ou à ses côtés[34]. Corbin, à l'instar de Duby ou Braudel, a parfois recours au présent historique ou descriptif, par exemple lorsqu'il met en scène le drame du Village des “cannibales”:

La scène du drame est dessinée, le décor planté, le prologue achevé. La victime s'avance. Il est quatorze heures, le 16 août 1870; à Hautefaye, la foire bat son plein[35].

Plus loin, l'énallage produit l'effet, non seulement d'une narration, mais aussi d'une enquête contemporaines des faits :

Arrêtons-nous un instant, tandis qu'au dire des témoins, la victime est encore agitée de quelques soubresauts, pour considérer et pour écouter plus attentivement les acteurs[36].

Ce passage conjugue en un même présent le temps des acteurs que l'enquêteur vient observer et celui, postérieur, du chercheur qui a consulté les archives («au dire des témoins»). La métalepse reste donc bien figurale: elle ne se déploie pas en une véritable fiction de présence qui abolirait la distance temporelle, malgré le «Mais revenons au drame qui s'achève», deux pages plus loin. L'italien Alessandro Barbero recourt à la même ficelle narrative – sinon romanesque – dans son récit de la bataille de Waterloo, mais cette fois sans référence ni allusion à quelque socle documentaire:

Mentre le truppe si preparano stancamente a bivaccare, sguazzando nel fango e cercando un po' di paglia e legna asciutta per accendere il fuoco, è tempo di soffermarci a osservare un po' più da vicino la natura degli eserciti contrapposti, evidenziando ciò che li accomunava e ciò che li divideva.

Pendant que les troupes se préparent péniblement à bivouaquer, pataugeant dans la boue et cherchant un peu de paille et de bois sec pour allumer le feu, il est temps de nous arrêter pour observer d'un peu plus près la nature des armées en présence et mettre en évidence ce qui les rapproche et ce qui les sépare[37].

Pour donner à voir le passé, l'insertion de documents iconiques est sans doute un des procédés les plus efficaces. Dans Le Cours ordinaire des choses, Farge évoque des tableaux et des gravures, qu'elle se contente toutefois de décrire, sans les reproduire, et auxquels elle confère à la fois une valeur documentaire[38] et une vertu métaleptique de présentification. Dans l'exemple suivant, l'effet de présence est doublé d'un effet d'autopsie:

Je quitte Chardin et son univers où le peuple et la nature morte se révèlent l'un à l'autre dans la modestie poétique de leur condition, pour retrouver les gravures urbaines représentant les rues et les marchés, les ponts et les bords de Seine: voici l'encombrement essoufflé des espaces et des rives par les coches et les carrosses, les animaux et les enseignes, les puisoirs et les outils, la paille et le regrat[39].

L'intrusion métaleptique repose sur l'emploi du présentatif «voici» («vois ici») qui désigne un référent présent dans la situation d'énonciation. Et ce que l'historienne «voit» et que le lecteur imagine, ce n'est pas seulement une gravure (qui n'est pas reproduite), mais les rues de Paris et les bords de la Seine au dix-huitième siècle.

Dans Le Cours ordinaire des choses, Farge décrit, après une référence à Fragonard, un tableau de Nicolas-Bernard Lépicié – Le Lever de Fanchon (1773) – pour représenter une scène typique. Un fragment d'archive, qui dresse une liste d'objets, est alors inséré dans l'ekphrasis de la chambre en désordre où se réveille la femme séduite et abandonnée, l'articulation de la description et de la citation approchant alors de la forme du collage:

vient le moment du lever, celui de Fanchon par exemple, peint par Nicolas-Bernard Lépicié en 1773, femme assise sur draps froissés dans une chambre en désordre, un pied hors du lit, un amas de linge sur la chaise et le sol.

[ …] un gilet de laine, une petite veste de chamois, une chemise d'homme, un jupon jaune, une robe, un jupon rayé rouge, 3 tabliers, 15 mauvaises chemises, 4 paires de manchettes de femme, un fichu, un coupon de mousseline, une serviette, une pièce à bout de manche, une paire de bas, un bonnet monté, un chassemouche, un déshabillé bleu à mouche, un habit et veste tricotée, 3 chemises d'homme mauvaises.

À gauche du lit, il y a un tréteau de bois sur lequel on a posé une cuve aussi de bois surmontée d'une planche. Sur la planche, une bougie, peut-être un livre ou de quoi écrire. Sous le tréteau, le pot de faïence, la bassine de cuivre et, zébrant de sa diagonale le coin gauche du tableau, un balai usé, frôlant par terre lacets et rubans abandonnés. Fanchon, éclairée de lumière, est pauvre et pensive au milieu de ses objets de parure et de nécessité. Elle se réveille: le ventre a peut-être enflé doucement, l'homme est parti: la scène a la douceur et la douleur des peines ordinaires et du manque. Le lever de Fanchon, c'est celui de tant d'autres, et de Jeanne-Marguerite séduite[40].

Pour restreindre l'enquête aux seuls éléments textuels qui contribuent à «autoriser» l'Histoire, c'est la question de la preuve comme image, et non celle de l'image (notamment photo- et cinématographique)comme preuve[41], qui sera envisagée pour finir. L'archive est en effet souvent décrite par les historiens eux-mêmes en des termes qui l'inscrivent dans les paradigmes de la photographie, de la peinture ou du théâtre, le document devant servir alors de support à des mises en tableau ou à des mises en scène du passé.

Le rapprochement entre archive et photographie est bien connu: les photographies, comme les sources écrites de l'historien, sont des traces physiques du passé qui attestent matériellement que quelque chose s'est produit[42]. Chez Farge, le document est aussi rapproché du tableau, qu'elle se plaît, on l'a vu, à convoquer. Le tableau acquiert une valeur documentaire et le document (l'archive) fait tableau. L'historienne entend «donner à lire des archives comme on donne à voir des tableaux de paroles[43]»:

Lire l'archive, le récit de la plainte, c'est voir. Voir un geste, un décor, un amas de linge, une faïence ébréchée, un enfant dans la rue, une femme sur son lit. Voir, parce que l'archive de police, pour des raisons faciles à comprendre, est extrêmement descriptive. L'inspecteur note avec minutie l'appartement saccagé, le témoin raconte de minuscules détails, le médecin décrit blessures et meurtrissures du corps. Le préposé au greffe dépeint les objets volés, les paquets de linge retirés à ceux qui s'en sont délictueusement emparés; il en résulte de longues listes où sont rapportés les couleurs des étoffes, leur degré d'usure, la fraîcheur des pièces de drap. Tout cela mêlé au compte dérisoire de minuscules objets rouillés ou cassés. Tout dès lors peut former un tableau, et la plainte ou le témoignage immobilise soudain des personnages en pleine action[44].

Lorsqu'il ne fait pas tableau, le document met en scène ou est mis en scène. Selon Farge, l'archive

crée une dramaturgie ou plus simplement elle offre au lecteur une vision de l'évidente complexité de l'entrelacs et des déplacements humains[45].

Duby, enfin, dans la section de Bouvines intitulée «Mise en scène» qui prépare le long témoignage de Guillaume le Breton, dispose les pions sur «l'échiquier qu'est Bouvines[46]», donne quelques indications scéniques («La scène est à Bouvines, près du pont[47]») ou encore distribue les rôles de premier plan et ceux des «figurants»[48].


***

Soucieux de défendre le sérieux référentiel de sa discipline face à l'offensive qu'il perçoit dans l'approche fictionaliste d'un Hayden White, Carlo Ginzburg, dans la première version de l'article qui a été le point de départ de cette étude, propose une histoire trop tranchée des modes d'autorisation du discours historiographique, dans laquelle la citation supplanterait la monstration. Étudier les effets de présence dans l'historiographie peut certes conduire à mettre en lumière des problèmes d'équilibre entre attestation et représentation. L'impression ou l'illusion de présence, même en dehors des cas où un lecteur incrédule est en droit de douter de la solidité de l'assise documentaire, peut, si l'on veut, être annexée au domaine de la fiction. Mais cette fiction, conçue, dans une perspective rhétorique, comme effet produit sur le lecteur, ne se confond pas avec la fiction définie par le statut de son objet, lorsque ce dernier est inventé et ne préexiste pas au discours. Affirmer que l'historiographie n'a pas renoncé à l'evidentia ne revient donc pas nécessairement à mettre en cause sa véridicité. Chez les historiens de l'école méthodique comme chez Georges Duby, Arlette Farge et Alain Corbin, les effets de présence de l'evidentia sont, le plus souvent, articulés aux procédures d'attestation de l'evidence.

N'appréhender que l'effet de vérité de ces procédures peut sembler préjudiciable à l'analyse de la spécificité référentielle de l'historiographie savante, dont la visée est tout autant la vérité que l'efficacité. Sans parler du cas des faussaires de l'Histoire, il reste toutefois que l'efficacité rhétorique de l'attestation est aussi bien disponible pour la fiction que pour l'historiographie, la première pouvant toujours imiter les protocoles testimoniaux de la seconde (on pense au Marbot de Wolfgang Hildesheimer). L'analyse des paradigmes de la monstration et de l'attestation en termes rhétoriques d'effets (de présence, de vérité ou de réel) invite alors à observer des échanges entre historiographie et fiction. Leopold von Ranke semble, par exemple, avoir été impressionné par les vertus métaleptiques de l'effacement énonciatif dans certains ouvrages de Walter Scott, qu'il aurait cherché à imiter[49]. Le narrateur d'Ivanohe, de son côté, mentionne à plusieurs reprises le Wardour Manuscript, la source – fictionnelle – d'où il tient son information. Benveniste, on l'a vu, illustre le système du «récit» par des exemples empruntés aussi bien à un historien qu'à un romancier, fameux, notamment, pour certaine métalepse («Pendant que le vénérable ecclésiastique monte les rampes d'Angoulême, il n'est pas inutile d'expliquer...»), qu'évoquent peut-être celles d'un Alain Corbin… L'histoire reste à écrire des rapports – constitués d'oppositions, d'échanges et d'influences – entre Histoire et fiction[50].






[1] Carlo Ginzburg, «Ekphrasis and quotation», Tijdschrift voor filosofie, 50e année, n°1, Leuven, Hoger instituut voor Wijsbegeerte, mars 1988, p.3-19. Une version remaniée a été traduite par P.-E. Dauzat: «Montrer et citer. La vérité de l'histoire», Le Débat. Histoire – Politique – Société, n°56, Paris, Gallimard, septembre-octobre 1989, p.43-54.

[2] Seront également ici laissés de côté la plupart des éléments péritextuels (maison d'édition, collection, titre de l'ouvrage, nom de l'auteur, bibliographie, etc) qui peuvent contribuer à donner de l'autorité à un ouvrage d'Histoire. Les effets spécifiques produits par l'usage de chiffres, de tableaux statistiques et de graphiques, ou encore par l'insertion de documents picturaux ou photographiques, seront de même écartés de l'enquête.

[3] Carlo Ginzburg, «Descrizione e citazione», Il filo et le tracce. Vero falso finto, Milano, Giangiacomo Feltrinelli, coll.«Campi del sapere», 2006, p.15-38. Une traduction de ce recueil par Martin Rueff est annoncée aux éditions Verdier (Carlo Ginzburg, Le fil et les traces. Vrai faux fictif) .

[4] On pourrait d'autre part se demander s'il n'arrivait pas aux auteurs anciens de citer, eux aussi, des sources écrites, mais une telle objection doit prendre en compte la distinction traditionnelle entre antiquaires et historiens. Voir Arnaldo Momigliano, «L'histoire ancienne et l'antiquaire» (1950), Problèmes d'historiographie ancienne et moderne, traduit par A. Tachet, Paris, Gallimard, coll. «Bibliothèque des Histoires», 1983, p. 244-293.

[5] Voir notamment Claude Calame, «Quand dire c'est faire voir: l'évidence dans la rhétorique antique» (1991), Sentiers transversaux. Entre poétiques grecques et politiques contemporaines, Grenoble, Jérôme Millon, coll.«Horos», 2008, p.191-204; ainsi que les articles de Barbara Cassin, Sandrine Dubel et Ruth Webb dans Dire l'évidence (philosophie et rhétorique antiques), textes réunis par Carlos Lévy et Laurent Pernot, Paris, L'Harmattan, 1997.

[6] François Hartog, «L'œil de Thucydide et l'histoire “véritable” » (1982), Évidence de l'histoire. Ce que voient les historiens, Paris, Éditions de l'EHESS, coll.«Cas de figure», 2005, p.77.

[7] Certains lecteurs de Thucydide ou encore de Polybe ont pu penser que pour faire voir, il fallait avoir vu. Tel philologue, à propos de la relation de la bataille de Télamon chez Polybe, estime que « le récit est si vivant et si coloré qu'il est à peu près certain que Polybe a vu cette scène de ses yeux». Cité par Adriana Zangara, Voir l'histoire. Théories anciennes du récit historique. IIe siècle avant J.-C. IIe siècle après, Paris, Vrin – Éditions de l'EHESS, coll.«Contextes», 2007, p.60, n. 2.

[8] Georges Molinié taxe de «naïveté linguistique» cette «fameuse et ridicule suppression de l'écran du discours avec l'idée que l'auditeur est transformé en spectateur»: Dictionnaire de Rhétorique, Paris, Hachette, 1992, p.145. Ruth Webb lui répond dans «Mémoire et imagination: les limites de l'enargeia dans la théorie rhétorique grecque», Dire l'évidence, op. cit., p.229-248.

[9] Gérard Genette, Nouveau Discours du récit, Paris, Éditions du Seuil, coll.«Poétique», 1983, p.31.

[10] Gérard Genette, Métalepse, Paris, Éditions du Seuil, coll.«Poétique», 2004, p.93.

[11] Anthony Grafton, Les Origines tragiques de l'érudition. Une histoire de la note en bas de page, traduit par P.-A. Fabre, Paris, Éditions du Seuil, coll.«La librairie du XXe siècle», 1998, p.63-64.

[12] Michel de Certeau, L'Écriture de l'histoire (1975), Paris, Gallimard, coll.«Folio histoire», 1984, p.130-131.

[13] Deux dates peuvent être retenues pour borner schématiquement l'empire intellectuel de ce courant historiographique: 1876, année de la fondation par Gabriel Monod de la Revue historique, et 1929, année de la fondation des Annales. L'influence de cette école sur la méthodologie historienne et les conventions régissant l'écriture des travaux universitaires, en particulier des thèses d'Histoire, se prolonge toutefois bien au-delà des années trente.

[14] Philippe Carrard, Poétique de la Nouvelle Histoire. Le discours historique en France de Braudel à Chartier, Payot, «Sciences Humaines», 1998, p.13-37 et «Récit historique et fonction testimoniale. Les archives de La Grande Guerre», Poétique, n°65, Paris, Éditions du Seuil, février 1986, p.47-61.

[15] Leopold von Ranke, Geschichten der Romanischen und Germanischen Volker von 1492 bis 1515 (1824), seconde édition, Sämmtliche Werke, vol. 33, Leipzig, Duncker und Humblot, 1874, p. VII.

[16] Voir la définition de la «fonction testimoniale» par Gérard Genette, Figures III, Paris, Éditions du Seuil, coll.«Poétique», 1972, p.262.

[17] «Depuis quelque temps, j'emploie de plus en plus le mot “je” dans mes livres. C'est ma façon d'avertir mon lecteur. Je ne prétends pas lui transmettre la vérité, mais lui suggérer le probable, placer devant lui l'image que je me fais, honnêtement, du vrai»: Georges Duby, L'Histoire continue, Paris, Odile Jacob, 1991, p.81.

[18] Arlette Farge, Le Cours ordinaire des choses dans la cité du XVIIIe siècle, Paris, Éditions du Seuil, coll.«La librairie du XXe siècle», 1994, p.29.

[19] Paul Ricœur, La Mémoire, l'histoire, l'oubli, Paris, Éditions du Seuil, coll. «Points Essais», 2000, p.339.

[20] Gérard Genette, Nouveau Discours du récit, op. cit., p.53.

[21] Arlette Farge évoque ainsi l'«approche tactile et immédiate du matériau, cette sensation préhensible des traces du passé» : Le Goût de l'archive, Paris, Éditions du Seuil, coll. «La librairie du XXe siècle», 1989, p.23.

[22] Philippe Carrard, Poétique de la Nouvelle Histoire, op. cit., p.99.

[23] Alain Corbin, Le Monde retrouvé de Louis-François Pinagot. Sur les traces d'un inconnu (1798-1876), Paris, Flammarion, coll. «Champs», 1998, p.10 sqq.

[24] Ibid., p.287.

[25] Nuto Revelli, Il Disperso di Marburg, Torino, Giulio Einaudi, coll. «Einaudi tascabili», 1994. Traduit par O. Favier: Le Disparu de Marburg, Paris, Rivages, 2006.

[26] Georges Duby, Le Dimanche de Bouvines (1973), Paris, Gallimard, coll. «Folio histoire», 1985, p.22.

[27] Ibid., p.27.

[28] Ibid., p.67.

[29] On aura reconnu la formule de Ranke, déjà citée. Grafton précise que, dans un premier état, celle-ci n'était pas «bloss zeigen», mais «nur sagen, wie es eigentlich gewesen» (Anthony Grafton, Les Origines tragiques de l'érudition, op. cit., p.62). La distinction entre zeigen (montrer) et sagen (dire) rappelle l'opposition anglo-saxonne entre showing et telling.

[30] Émile Benveniste, Problèmes de linguistique générale 1 (1966), Paris, Gallimard, coll. «Tel», 1976, p.241.

[31] Arlette Farge, La Nuit blanche, Paris, Éditions du Seuil, coll.«La librairie du XXIe siècle», 2002, p.10.

[32] Chocolat, texte de Gérard Noiriel, mis en scène par Jean-Yves Penafiel.

[33] Georges Duby, L'Histoire continue, op. cit., p.185.

[34] Je renvoie sur ce point à mon étude intitulée «L'Histoire au risque du hors-temps, Braudel et la méditerranée», publiée dans l'Atelier de théorie littéraire du site Fabula. Voir en particulier la page consacrée à «L'Histoire comme voyage dans le temps»:

http://www.fabula.org/atelier.php?L'histoire_comme_voyage_dans_le_temps

[35] Alain Corbin, Le Village des “cannibales” (1990), Paris, Flammarion, coll. «Champs», 1995, p.86.

[36] Ibid., p.100.

[37] Alessandro Barbero, La battaglia. Storia di Waterloo, Roma-Bari: Gius. Laterza & Figli, coll.«I Robinson. Letture», 2003, p.17. Traduit par E. Auster: Waterloo, Paris, Flammarion, coll. «Champs histoire», 2008, p.35.

[38] On pourra encore lire les quelques pages que l'historienne consacre à Greuze dans un de ses derniers ouvrages: Arlette farge, Effusion et tourment. Le récit des corps. Histoire du peuple au XVIIIe siècle, Paris, Éditions Odile Jacob, 2007, p.145-148.

[39] Arlette Farge, Le Cours ordinaire des choses, op. cit., p.74.

[40] Ibid., p.16. Dans un récent opuscule intitulé Le Silence, le souffle (2008), le même tableau de Lépicié est cette fois reproduit et à nouveau commenté, en regard d'un procès-verbal tiré d'une liasse d'archives de la Bibliothèque de l'Arsenal.

[41] Christian Delage, La Vérité par l'image. De Nuremberg à Milosevic, Paris, Denoël, coll.«Médiations», 2006.

[42] Sur l'articulation entre historiographie et photographie: Arlette Farge, La Chambre à deux lits et le cordonnier de Tel-Aviv, Paris, Éditions du Seuil, coll.«Fiction & Cie», 2000 ; Siegfried Kracauer, L'Histoire. Des avant-dernières choses (1969), traduit par C. Orsoni, Paris, Stock, coll. «Un ordre d'idées», 2006.

[43] Arlette Farge, Le Cours ordinaire des choses, op. cit., p.9.

[44] Ibid., p.10-11.

[45] Ibid., p.49.

[46] Georges Duby, Le Dimanche de Bouvines, op. cit., p.47 (et aussi p.42).

[47] Ibid., p.59.

[48] Ibid., p.31 et 41.

[49] Hans Robert Jauss, «Der Gebrauch der Fiktion in Formen der Anschauung und Darstellung von Geschichte», Ästhetische Erfahrung und literarische Hermeneutik, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1982, p.324-359.

[50] Carlo Ginzburg, «Prove e possibilità » (1984), Il filo et le tracce, op. cit., p.303.



Bérenger Boulay

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Dernière mise à jour de cette page le 17 Octobre 2012 à 22h55.