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Trompe-l’oeil, simulacres et vérité(s) dans le monde hispanique

Trompe-l’oeil, simulacres et vérité(s) dans le monde hispanique

Publié le par Bérenger Boulay (Source : Pascale Peyraga)

TROMPE-L’OeIL, SIMULACRES ET VÉRITÉ(S) DANS LE MONDE HISPANIQUE

Journées d’études

 

Organisées par le Laboratoire de Recherche

Langues, Littératures et Civilisations de l’Arc Atlantique

 

Pau, du jeudi 20 au vendredi 21 septembre 2012

 

 

Les propositions de contribution

-brève notice biobibliographique, titre de la communication suivi d’un  résumé de quinze à trente lignes-

sont à adresser avant le 30 mars 2012, à Pascale Peyraga :

pascale.peyraga@univ-pau.fr

                                                              

OBJET SCIENTIFIQUE :

Pratiqué par des peintres ô combien sérieux –Sánchez Cotán, Zurbarán, Velázquez- ou des génies fantaisistes –Salvador Dalí-, le trompe-l’oeil pictural a fleuri à des époques variées dans la peinture hispanique et, plus généralement, dans les arts occidentaux.

Tout en produisant un effet « plus vrai que nature », il naît de la volonté de « tromper » et agit sur le spectateur médusé, littéralement pris au piège des faux-semblants, comme le rappelle le terme espagnol de « trampantojo ». Mais parce qu’il n’est perceptible qu’au moment où il est démenti, où le toucher vient se substituer à la vue, et où le spectateur prend conscience d’avoir été abusé par ses sens, il instaure une dialectique entre vérité et mensonge et tend un pont entre le réel et la représentation.

N’étant en rien ressenti comme une simple imitation ou un reflet du réel, le trompe-l’oeil substitue à l’image transparente de la mimésis l’« intraitable opacité d’une Présence », selon l’expression consacrée par Pierre Charpentrat[1]. Il entraîne de la sorte le dépassement de la représentation par ce qui « apparaît être la réalité », si bien que le spectateur perçoit le trompe-l’oeil comme faisant partie de son environnement, comme étant apte à concurrencer le réel. Mais étant lui-même représentation, n’apporte-t-il pas, par le simulacre, un démenti à la représentation ? La tromperie, le leurre ne lèvent-t-il pas un voile sur la vérité de l’illusion ?

De toute évidence, la position limitrophe du trompe-l’oeil, à l’entre-deux de la réalité et de l’art (ou de la fiction), lui confère une dimension paradoxale par laquelle il construit des mystifications pour légitimer des vérités et remplace l’illusion de la réalité par sa certitude. La spécificité du trompe-l’oeil, dont la nature mensongère masque souvent une revendication de vérité, le fait apparaître comme un miroir aux reflets ambigus, visuellement fascinant, riche d’un contenu conceptuel soumis aux évolutions du temps, aussi bien moralisant qu’indiscret, protestataire qu’ironique, étrange et fort de tous les sous-entendus.

De fait, définir le trompe-l’oeil conduit tout autant vers l’analyse d’un « effet trompe-l’oeil » que vers la description d’un objet fini. Par ailleurs, l’existence d’un dispositif spécifique, le passage systématique du regard dupé au regard lucide, de l’enchantement au désenchantement, justifie sans doute que le trompe-l’oeil, abusant tout autant l’esprit que les sens, ait pu dépasser les champs spécifiques de la peinture qui lui étaient initialement réservés. Il s’est ainsi généralisé, au fil des siècles, à tous les arts visuels (sculpture, architecture, photographie, cinéma…) pour s’étendre aux domaines de la création littéraire, le trompe-l’oeil peuplant aussi bien le théâtre baroque que le roman de la postmodernité[2].

C’est à travers cette richesse transgénérique que nous proposons de dégager l’épistémè du trompe-l’oeil, en ne l’isolant pas dans un champ artistique déterminé, mais en privilégiant le dialogue instauré entre ses dimensions picturale, littéraire, cinématographique, ou photographique …

 

Eu égard aux spécificités dégagées, nous serons amenés à approfondir les axes d’études suivants :

  • les dispositifs épistémiques du trompe-l’oeil à travers ses variantes…
    • iconiques (architectures illusionnistes, quod libet, vanités, grisailles…)
    • filmiques et photographiques
    • littéraires (« trompe-l’oeil visuels » qui, inclus dans le texte, font mine de reproduire un élément du réel ou « trompe-l’oeil textuels » –linguistiques, référentiels, pastiches…[3])
  • la variabilité du trompe-l’oeil, au cours des époques les plus propices à son développement, allant du maniérisme au baroque, du surréalisme à la postmodernité.  
  • les mensonges et les vérités du trompe-l’oeil
    • le trompe-l’oeil, objet ludique ou simple plaisir esthétique. Dans sa volonté de mystifier, le trompe-l’oeil ne serait-il qu’une farce sans transcendance? 
    • les visées politiques, religieuses ou morales des trompe-l’oeil
    • la capacité du trompe-l’oeil à poser les limites de l’art et/ou à définir la réalité qui nous entoure…

 

INFORMATIONS GÉNÉRALES

Ces journées d’études, « Trompe-l’oeil, simulacres et vérité(s) dans le monde hispanique » relèvent du programme de recherche du laboratoire LLC-Arc Atlantique, « Fabrique de vérités » http://arc-atlantique.univ-pau.fr/live/Projet+quadriennal.

Le domaine d’étude se limitera à la production artistique de la sphère hispanique, sans limitation chronologique.

Les communications se feront en français ou en espagnol.

Les intervenants dont les communications auront été retenues par le Comité Scientifique seront informés avant le 30 avril 2012.

A l’issue des journées d’études de septembre 2012, les articles seront anonymement soumis à la double expertise de membres du Comité de lecture, pour une publication début 2013.

Comité Scientifique : Ángel Abuín González (Université de Santiago de Compostela), Christian Boix (Université de Pau), Isabel Ibáñez (Université de Pau),  Nadia Mekouar (Université de Pau), Pascale Peyraga (Université de Pau), Michèle Tollis (Université de Pau) 


[1] Pierre Charpentrat. « Le trompe-l’oeil ». Nouvelle Revue de psychanalyse, n°4, 1971, p. 162.

[2] Voir à ce propos les études d’Emmanuel Bouju sur le roman espagnol à l’époque postfranquiste.

[3] Voir à ce sujet Liliane Louvel. Le tiers pictural. Pour une critique intermédiale. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2010. p. 200.

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

 

Trompe-l’oeil et simulacres

  • Debray, Régis. Vie et mort de l'image. Paris : Gallimard, 1992. 420 p.
  • Gombrich, Ernst Hans.  L’Art et l’illusion. Psychologie de la représentation picturale. Gallimard : Paris, 1971 ( 1re éd. en anglais, National Gallery, Washington, 1959).
  • Larousse, Pierre. « Trompe-l’oeil ». Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle. Paris : Administration du grand Dictionnaire universel, 1866-1877. Tome XV, pp. 536-537.
  • Platon. Le Sophiste. Oeuvres de Platon. Paris : Rey et Gravier, 1834. Tome XI, 218-222.
  • Platon. République. Oeuvres de Platon. Paris : Rey et Gravier, 1834. Tome X, Livre X, 597-599.

… dans la peinture et la sculpture

  • Arasse, Daniel. Le détail, pour une histoire rapprochée de la peinture. Paris : Flammarion, 1996. 462 p.
  • Badie, Marie-France. « Le Trompe-l’oeil dans l’art baroque ». In : Peinture et Philosophie, Université Paul Valery, Montpellier. Consultable sur http://recherche.univ-montp3.fr/ea738/chercheurs/badie/trompe.pdf
  • Baudrillard, Jean. Simulacres et simulation. Paris : Galilée, 1981. 256 p.
  • Beetscheen, André, et al. L’effet trompe-l’oeil dans l’art et la psychanalyse. Paris : Dunod, 1988. 183 p.
  • Calabrese, Omar. L’art du trompe-l’oeil. Paris : Citadelles-et-Mazenot, 2010. 400 p.
  • Charpentrat, P. « Le trompe-l’oeil ». Nouvelle Revue de psychanalyse, 4, 1971, pp. 160-168.
  • Collectif (Milman, Miriam et al.). Le trompe-l’oeil plus vrai que nature. Paris : Art Lys Eds, 2005. 145 p.
  • Marin, Louis. « Représentation et simulacre ». De la représentation. Paris : Seuil, 1994. pp. 304-312.
  • Marin, Louis. « Le trompe-l’oeil, un comble de la peinture ».  In : L’effet trompe-l’oeil dans l’art et la psychanalyse. Paris : Dunod, 1988. pp. 75-82
  • Mauriés, Patrick (dir). Le Trompe-l'oeil de l'Antiquité au XXe siècle.  Paris : Gallimard, 1996. 319 p.
  • Milman, Miriam. Le Trompe-l'oeil, les illusions de la réalité. Genève : Skira, 1994. 130 p.
  • Morizot, Jacques. Interfaces : texte et image. Pour prendre du recul vis-à-vis de la sémiotique. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2004. 250 p.
  • Stoichita, Victor I. L'effet Pygmalion: pour une anthropologie historique des simulacres. Genève : Droz, 2008. p. 320

Trompe l’oeil et cinéma :

  • Allen, Richard. « Representation, Illusion and the cinema ». Cinema Jornal, 32, 2, 1993, pp. 21-48.
  • Aumont, Jacques: L’oeil interminable. Cinéma et peinture. Paris: La différence, 2007. (De la scène à la toile ou l’espace de la représentation).
  • Bonitzer, Pascal. Peinture et cinéma. Décadrages. Chap. « Le grain de réel », « Le plan tableau » et « Le reflet déchiré » . Paris : Cahiers du cinéma, Ed. de L’Etoile, 1987. pp. 11-23, pp. 29-41,  et pp. 69-78.
  • Gómez Gómez, Agustín. « Trampantojos cinematográficos o el diálogo entre las artes ». Paradigma: revista universitaria de cultura, nº. 1, 2005, pp. 12-15.
  • Thiéry, Natacha. « L’assomption du trompe-l’oeil. Autour de Une question de vie ou de mort, Le Narcisse noir et Les Chaussons rouges de Powell et Pressburger ». In : Véronique Campan et Gilles Menegaldo. Du maniérisme au cinéma. La licorne. n° 66. Poitiers : Université de Poitiers, 2003. pp. 105-116.
  • Thiéry, Natacha. Photogénie du désir : Michael Powell et Emeric Pressburger, 1945-1950. Avec une préface de Raoul Ruiz. Coll. « Le spectaculaire cinéma ». Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2010. 326 p.

Trompe-l’oeil et littérature :

  • Bouju, Emmanuel. « L’esthétique du trompe-l’oeil ou la narration ironique (dans quelques romans espagnols post-franquistes ». In : Georges Tyras (dir.). Postmodernité et écriture narrative dans l’Espagne contemporaine. Grenoble : Cerhius, 1996. pp. 159-169.
  • Bouju, Emmanuel. « L’esthétique du trompe-l’oeil (Juan Benet : El aire de un crimen) ». Réinventer la littérature. Démocratisation et modèles romanesques dans l’Espagne port-franquiste. Toulouse : Presses universitaires du Mirail, 2002. pp. 285-289.
  • Drouet, Pascale. « Give me that glass, and therein will I read » : illisible et trompe-l’oeil dans King Richard II de Shakespeare. In : Liliane Louvel et Catherine Rannoux (dir.). L’Illisible. La licorne. n° 76. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2006.
  • Louvel, Liliane. Texte / Image : images à lire, textes à voir. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2002. 268 p.
  • Louvel, Liliane. Le tiers pictural. Pour une critique intermédiale. Chap 3 et 4, « Poétiques du pictural I et II». « Coll « Interférences ». Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2010. pp. 111-158 et 159-201.
  • Thouret, Clothilde. « Le trompe-l’oeil du monologue de prison, ou le reflet du miroir brisé ». In : Pascale Drouet (dir.). Shakespeare au XXe siècle. Mises en scène, mises en perspective de King Richard II. Rennes : Presses Universitaires de Rennes, 2007. p. 127-140.