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Appels à contributions

"Retranslation, thirty years later / La retraduction, trente ans après" (Parallèles 35:1, printemps 2023)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Kris Peeters)

Appel à contributions

Numéro spécial de Parallèles 35:1 (printemps 2023)

Retranslation, thirty years later / La retraduction, trente ans après

sous la direction de Kris Peeters (UAntwerpen) et Piet Van Poucke (UGent)

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Les retraductions (« deuxième traduction ou traduction ultérieure d'un même texte source dans la même langue cible », Koskinen & Paloposki, 2010, p. 294 ; nous traduisons) ont été réalisées depuis que les récits et la littérature se sont propagés au-delà des frontières des cultures. Néanmoins, la retraduction n'est devenue un objet sérieux d'étude académique qu'à partir de 1990, lorsque la revue Palimpsestes a consacré son 4ième volume à "Retraduire". L'un des contributeurs à ce volume, Antoine Berman, a écrit l'article d'ouverture du numéro spécial, dans lequel il a soulevé un certain nombre de questions qui, trente ans plus tard, orientent toujours la plupart des discussions scientifiques.

L'un des points soulevés par Berman dans son article fondateur de 1990 concerne la tendance (présumée) des retraductions à être plus ‘proches’ de l'original que les premières traductions. Soulevée par Bensimon (1990) également dans son introduction, cette question a ensuite été développée en « hypothèse de la retraduction » (Chesterman, 2000), qui a attiré la majeure partie de l'attention consacrée au phénomène. Des dizaines d'études de cas ont montré depuis lors que l'hypothèse de la retraduction tient dans un nombre limité de cas, mais qu'elle n'est certainement pas un ‘universel’ de la traduction. Or elle n’en demeure pas moins domi­nante dans le champ critique et continue d'être explorée par le biais d’études de cas qui analysent différents aspects thématiques ou stylistiques, différents textes sources, différentes combinaisons de langues et contextes. Si ces cas de figure présentent certes un intérêt et méritent d'être analysés, peu d'efforts ont été entrepris jusqu'à présent pour en dégager une synthèse générale. Aussi notre connaissance de la spécificité du phénomène de la retraduc­tion reste-t-elle fragmentée. Comme l'ont souligné Alvstad et Rosa, la conceptualisation nécessaire à cet égard fait toujours défaut : « (c)et effort n'a été que partiellement entrepris, dans des études éparses qui abordent la relation avec les traductions précédentes, avec différents textes sources, avec les révisions, les nouvelles éditions, les réimpressions, les adap­tations, la rétrotraduction ou la traduction indirecte, ou qui considèrent des influences et des contraintes contextuelles larges et spécifiques » (2015, p. 8 ; nous traduisons).

D'autres affirmations avancées par Bensimon et Berman en 1990, sur le (prétendu) « vieil­lissement » des textes traduits ou retraduits en comparaison des textes originaux qui ne vieilliraient pas, et sur la retraduction comme condition préalable à ce que Berman qualifiait de « grande traduction » ont attiré moins d'attention de la part des chercheurs. Par consé­quent, certaines caractéristiques de la retraduction et certaines questions liées à ce phéno­mène demeurent peu étudiées. Dans l’ensemble, la majorité des études sur la retraduction ont jusqu'à présent concentré leur attention, soit sur les motifs de la retraduction, en essayant de répondre à la question POURQUOI, soit sur la confirmation ou l'infirmation de l'hypothèse de la retraduction pour les cas spécifiques étudiés, limitant ainsi la question du COMMENT à un seul aspect et à un seul cas. Beaucoup moins de temps et d'énergie ont été consacrés aux autres questions liées au COMMENT, OÙ, QUAND et QUI. Avec le présent volume, nous sou­haitons combler un certain nombre de ces lacunes en examinant de plus près et de manière plus globale les retraducteurs et le produit de leur travail – la retraduction en tant que phéno-mène, afin de répondre à la question cruciale de savoir « ce qui se produit concrètement quand on retraduit » (Koskinen & Paloposki, 2010, p. 295 ; nous traduisons).

Les contributeurs sont invités à développer des perspectives sur la retraduction qui abordent ces questions peu étudiées, tout en dépassant le niveau d'une seule étude de cas.

Les questions de recherche possibles comprennent, mais ne sont pas limitées aux questions suivantes :

  • Qu'avons-nous appris des études de cas des trente dernières années, en termes de spécificité des retraductions par opposition aux premières traductions (ou aux traduc­tions antérieures) ?
  • Les résultats de recherche issus de ces études de cas invitent-ils à reformuler l'hypo­thèse de la retraduction ? Comment cette hypothèse pourrait-elle ou devrait-elle être reformulée pour être plus précise ?
  • Dans quelle mesure l'hypothèse binaire opposant les retraductions aux premières tra­duc­tions peut-elle être utile pour discuter du corpus toujours croissant des troisièmes, quatrièmes, etc. traductions dans une même langue, c'est-à-dire du nombre croissant de textes traduits qui sont à la fois des retraductions et des traductions antérieures ?
  • En quoi les retraductions diffèrent-elles des premières ou précédentes traductions ? Existe-t-il des caractéristiques communes à toutes les retraductions ? Quelles sont les carac­té­ristiques qu'elles ont en commun avec toutes les traductions, y compris les pre­mières traductions ?
  • Est-il possible, à partir de la multitude d'études de cas existantes, de décrire avec plus de précision ce que signifie exactement une traduction « plus proche » de l'original ou « plus fidèle » ?
  • Est-il vrai que les retraductions sont généralement plus « fidèles » à l'original ? Sont-elles plus « fidèles » au contenu ou au style ? Peuvent-elles également être plus « fidèles » au contenu et au style ? Comment les traducteurs eux-mêmes définissent-ils cette « fidélité » ?
  • Les retraducteurs utilisent-ils les traductions antérieures disponibles et sont-ils censés le faire ? Comment peut-on retrouver la « voix » du ou des traducteurs précédents dans une retraduction ?
  • Les œuvres littéraires canoniques attirent-elles des traducteurs plus expérimentés qui tentent de produire une « grande traduction » d'une œuvre littéraire précédemment traduite ? Qui sont ces retraducteurs et en quoi se distinguent-ils des traducteurs en général ?
  • Quels agents prennent part au processus de retraduction ? Qui commande une retraduction ? Quel est le rôle joué par les traducteurs eux-mêmes, par les maisons d'édition, par les journalistes, par les institutions littéraires ? Existe-t-il un lien entre canonicité, droit d'auteur et rentabilité commerciale ?
  • Qui décide si une retraduction est une « grande traduction » et quelles sont les carac­téristiques d'une telle retraduction qui justifient la revendication de « grandeur » ?
  • Quel est l'effet d'une retraduction sur les lecteurs ? Les critiques comparent-ils les re­traductions avec les traductions précédentes et comment jugent-ils des différences ?
  • L'occurrence de la retraduction comme phénomène est-elle spécifique au contexte, c’est-à-dire existe-t-il des contextes géographiques ou culturels dans lesquels la retra­duction occupe une position plus centrale que dans d'autres contextes ?
  • Quelles sont les raisons de la non-retraduction de certains textes ? Quels types de textes ne sont jamais retraduits ?
  • Est-il correct que le XXIe siècle est « l'âge de la retraduction » (comme l'affirme Collombat, 2004) et pourquoi est-ce le cas ?

 

Calendrier de publication

La sélection des contributions se déroulera en deux étapes : dans un premier temps, les rédacteurs invités accueillent les propositions de contributions sous la forme d'un résumé de 500 mots maximum, accompagné d'une brève notice bio-bibliographique ; après une présé­lec­tion des propositions en fonction de leur intérêt, de leur qualité et de l'équilibre général du numéro envisagé, nous inviterons les chercheurs sélectionnés à nous envoyer leurs con­tributions complètes, qui seront soumises à une évaluation en double aveugle.

Les propositions de contributions, de 500 mots maximum, en anglais ou en français, accompagnées d'une brève notice bio-bibliographique (100 mots), devront être envoyées avant le 1er octobre 2021 à Kris Peeters (kris.peeters@uantwerpen.be) et Piet Van Poucke (piet.vanpoucke@ugent.be). Les rédacteurs invités informeront les auteurs de leur décision avant le 15 novembre 2021.

Les articles définitifs (entre 4000 et 8000 mots, y compris résumé, notes de bas de page, bibliographie et éventuelles annexes) devront être soumis avant le 1er mars 2022 pour une évaluation en double aveugle. Pour la rédaction du manuscrit, les auteurs sont priés d'utiliser le document modèle, qui contient des informations importantes sur le protocole de sou­mis­sion, disponible à l'adresse suivante : https://www.paralleles.unige.ch/fr/consignes/. Si c’est indiqué, les auteurs sont priés de faire relire leurs manuscrits par un locuteur natif.

L'acceptation des articles sera notifiée avant le 1er juin 2022. Les articles remaniés devront être soumis avant le 15 juillet 2022.

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Ouvrages cités

Alevato do Amaral, V. (2019). Broadening the notion of retranslation. Cadernos de Traduçao, 39(1), 239-259.

Alvstad, C. & Rosa, A.A. (2015). Voice in retranslation. An overview and some trends. Target, 27(1), 3-24.

Bensimon, P. (1990). Présentation. Palimpsestes, 4, ix-xiii.

Berman, A. (1990). La retraduction comme espace de la traduction. Palimpsestes, 4, 1-7.

Brisset, A. (2004). Retraduire ou le corps changeant de la connaissance. Sur l'historicité de la traduction. Palimpsestes, 15, 39-67.

Brownlie, S. (2006). Narrative Theory and Retranslation Theory. Across Languages and Cultures, 7(2), 145-170.

Cadera, S. & Walsh, A. (eds) (2017). Literary Retranslation in Context. Peter Lang.

Chesterman, A. (2000). A Causal Model for Translation Studies. In M. Olohan (ed.), Intercultural Faultlines: Research Models in Translation Studies I: Textual and Cognitive Aspects (pp. 15-28). St. Jerome.

Collombat, I. (2004). Le XXIe siècle: l'âge de la retraduction. The 21st Century: The Age of Retranslation. Translation Studies in the New Millennium, 2, 1-15.

Deane-Cox, S. (2014). Retranslation. Translation, Literature and Reinterpretation. Bloomsbury.

Desmidt, I. (2009). (Re)translation revisited. Meta, 54(4), 669-683.

Gambier, Y. (1994). La retraduction, retour et détour. Meta, 39(3), 413-417.

Gambier, Y. (2011). La retraduction : ambiguïtés et défis. In E. Monti & P. Schnyder (ed.), Autour de la retraduction. Perspectives littéraires européennes (pp. 49-66). Orizons.

Koskinen, K. (2019). Revising and retranslating. In K. Washbourne & B. Van Wyke (éd.), Routledge Handbook of Literary Translation (pp. 315-324). Routledge.

Koskinen, K. & Paloposki, O. (2010). Retranslation. In Y. Gambier & L. Van Doorslaer (éd.), Handbook of Translation Studies (vol. 1, pp. 294-298). Benjamins.

Koskinen, K. & Paloposki, O. (2015). Anxieties of influence. The voice of the first translator in retranslation. Target, 27(1), 25-39.

Monti, E. & Schnyder, P. (éd.). (2011). Autour de la retraduction. Perspectives littéraires européennes. Orizons.

O’Driscoll, K. (2011). Retranslation through the Centuries. Jules Verne in English. Peter Lang.

Palimpsestes, 4. (1990). Retraduire. Publications de la Sorbonne nouvelle.

Palimpsestes, 15. (2004). Pourquoi donc retraduire ? Presses de la Sorbonne nouvelle.

Paloposki, O. & Koskinen, K. (2010). Reprocessing Texts. The Fine Line between Retranslating and Revising. Across Languages and Cultures, 11(1), 29-49.

Peeters, K. (2016). Traduction, retraduction et dialogisme. Meta, 61(3), 629-649.

Peeters, K. & Sanz Gallego, G. (2020). Translators’ creativity in the Dutch and Spanish (re)translations of Oxen of the Sun: (re)translation the Bakhtinian way. European Joyce Studies, 30, 221-241.

Tahir Gürçağlar, Ş. (2009). Retranslation. In M. Baker & G. Saldanha (éd.), Routledge Encyclopedia of Translation Studies (pp. 233-236). Routledge.

Tahir Gürçağlar, Ş. (éd.) (2020). Discourses on retranslation. TranscUlturAl, 12(1). https://journals. library.ualberta.ca/tc/index.php/TC.

Tegelberg, E. (2011). La retraduction littéraire – quand et pourquoi ? Babel, 57(4), 452-471.

Van Poucke, P. (2017). Aging as a motive for literary translation. A survey of case studies on retranslation. Translation and Interpreting Studies, 12(1), 91-115.

Venuti, L. (2004). Retranslations: the creation of value. Bucknell Review, 47(1), 25-38.

Zhang, H. & Ma, H. (2018). Intertextuality in retranslation. Perspectives, 26(4), 576-592.