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Pandore et la généalogie mythique de la femme

Pandore et la généalogie mythique de la femme

Publié le par Alexandre Gefen (Source : Françoise Rétif)

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Pandore et la généalogie mythique de la femme

Colloque franco-allemand du 16 au 18 octobre 2009 à Brême

Organisé dans le cadre du projet commun Mythe et genre inauguré en 2004

Depuis toujours, lafable de Pandore m'a semblé obscure, elle m'est apparue insensée et inversée.

ArthurSchopenhauer : Parerga et Paralipomène

Pandoreest une figure féminine remarquable de l'héritage antique : elle apparaîtcomme la Première femme, c'est-à-dire la Mère de l'humanité, dans un mythe quiprécisément est le premier à s'organiser autour d'une femme. Comme dans laGenèse, où Eve est coupable de l'exclusion hors du paradis, c'est avec Pandoreque commence l'ordre séculier du monde. Le déferlement de maux qu'elle provoquesignifie la fin du paradis originel  et marque par là même la formationd'un autre mythe, celui de l'origine de la civilisation. Contrairement auxpouvoirs qui lui sont  notoirementattribués, Pandore apparaît avant tout, dans la tradition mythique, commel'instrument des guerres masculines pour l'hégémonie : Zeus, dont la toutepuissance se trouve menacée par le titan Prométhée, ordonne au forgeron desdieux, Héphaïstos, de façonner Pandore. A travers elle, Zeus veut se venger duvol du feu par Prométhée. Dotée par les dieux d'une voix et parée de tous lesdons, beauté, intelligence, habileté, mais aussi pourvue de la ruse et de lafourberie, elle est menée par Hermès jusqu'au frère de Prométhée, Epiméthée.Celui-ci reçoit volontiers le cadeau, malgré les avertissements de son frère.Et en effet, à peine Epiméthée a-t-il accepté le présent, que la femme ouvre lafameuse boîte  — dans la traditiond'origine, il s'agit d'un pithos, une énorme jarre en argile —  boîte de laquelle se répandent tous les maux sur la terre.Seul l'espoir reste suspendu au col de la jarre.

Latradition s'appuie sur un fonds limité de textes et le court récitd'Hésiode (LesTravaux et les Jours. Vers 42 à 105) pose plus de questions qu'il nepropose de réponses. C'est Pandore surtout, qui reste le point aveugle dans lemythe éponyme. En particulier la question de savoir ce qu'il advient d'elleaprès l'ouverture du pithos reste posée. Est-elle elle-même le Mal, ou le simpleinstrument de la volonté divine ? Et que peut bien signifier l'espoirsuspendu au col de la jarre ?

L'ambivalencedu mythe ouvre sur une multitude de significations. Le mythe n'est pas,contrairement à ce qu'on pourrait penser, exclusivement misogyne. Il a engendréun foisonnement d'exégèses et des « confusions du mythe » (Renger /Musäus). Le nom de Pandore lui-même peut être interprété de plusieurs façons : ilest l'expression de la passivité s'il est compris comme « la biendotée », celle qui a obtenu ses dons des dieux ; à l'opposé il peutêtre l'expression de l'activité s'il est traduit par « celle qui donnetout » / « celle qui abonde », rappelant alors le surnom dela Grande Déesse et la symbolique de la jarre. Pour Tranquillus, Pandore estcelle qui se donne à tous, c'est-à-dire, non pas la sainte mère, mais bien aucontraire la putain. C'est également comme putain qu'on la rencontre  dans le personnage de Lulu dans Die Büchse der Pandorra (1904),célèbre réécriture du mythe par Wedekind qui traite ainsi du terrifiant pouvoirde séduction de la femme.

C'estprécisément à cause de son ambivalence, que la fatalité attachée à Pandore etau lien qui l'unit à son pithos a été l'objet de nombreuses réécritures du mythe ;cela vaut aussi bien pour les scholies antiques que pour les considérationsphilosophiques plus récentes. Dans les transformations littéraires  du mythe, telles qu'on les rencontre,par exemple, dans la poésie de la Renaissance ou dans la pastorale baroque,l'interprétation misogyne du mythe reste dominante du XVIIIe siècle à lalittérature contemporaine en passant par le classicisme. Actuellement, le mytheest présent dans les lectures féministes et dans les réflexions théoriques deBruno Latour (DieHoffnung der Pandora) ou de Jean-Pierre Vernant (Pandore, la première femme).

Le colloque souhaite proposer le débat le plus largepossible sur le mythe de Pandore, mythe fondateur du discours sur les genres.Ce mythe offre en lui-même une multiplicité d'interprétations, qui peuvent êtreinstrumentalisées de différentes façons. On abordera donc les représentationstraditionnelles du féminin comme leurs déconstructions, qui découlentdirectement du mythe ou  bienprennent le mythe comme base de réflexion critique. De l'hypothèse selonlaquelle le mythe n'inspire pas seulement des lectures misogynes découle sonactualité.  

Propositionsde thèmes :

Interaction entre pouvoir, genre et langage dans le contexte du mythe de Pandore. Pandore / Eve et le principe mythique de la femme comme principe de vie et principe de mort. Pandores du présent – femmes fictives comme figures marginales. La boîte de Pandore comme métaphore. Pandore comme allégorie de l'ambivalence : transgression, déconstruction. Dons des dieux et culpabilité des hommes : Pandore et le principe de civilisation.

Les propositions de 300 mots maximum (format DIN-A4) enfrançais ou en allemand sont à envoyer au plus tard jusqu'au 31 janvier 2009aux trois adresses mèl suivantes :

Prof. Dr. Heinz-Peter Preuβer           preusser@uni-bremen.de

Prof. Dr. Françoise Rétif                   françoise.retif@free.fr

Juliane Rytz, M. A.                           jrytz@uni-bremen.de

En vous remerciant de l'intérêt que vousporterez à cet appel à contributions.

Pour les organisateurs

Françoise Rétif