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Appels à contributions
Narraplus, n°5 : « Alfons Cervera »

Narraplus, n°5 : « Alfons Cervera »

Publié le par Perrine Coudurier (Source : Christine Di Benedetto )

APPEL À CONTRIBUTION pour la revue NARRAPLUS (ISSN 2608-0346), publiée dans le cadre de l'association NEC+ (Narrativa española contemporánea +)
 
N°5 « Alfons CERVERA » - Sous la direction de Nathalie Sagnes-Alem 

- proposition de participation : résumé d’environ 10 lignes, à envoyer avant le 20 octobre 2021 à christine.di-benedetto@univ-cotedazur.fr
- après réponse du comité scientifique, remise des textes, en français ou en espagnol : 30 novembre 2021 
- publication prévue : printemps 2022

Toutes les approches méthodologiques sont acceptées pour ce numéro monographique consacré à l’œuvre de Alfons CERVERA. 

"Es verdad que lo que no se cuenta es como si no hubiera existido. " Alfons Cervera 

 L’écriture d’Alfons Cervera est marquée au sceau de la profusion et de la pluralité, d’une diversité aussi bien formelle que thématique. Après une phase que l’auteur a coutume de qualifier de formaliste, la trajectoire littéraire d’Alfons Cervera opère un tournant thématique et critique, entrepris au milieu des années 1990 avec l’écriture du « cycle de la mémoire ». Cette inflexion, plus thématique que véritablement esthétique, constitue en premier lieu, ainsi que l’auteur le revendique lui-même, un exercice public de loyauté envers ceux et celles qu’Alfons Cervera appelle « les sien·ne·s », les habitant·e·s de Gestalgar, village valencien dont l’auteur, né en 1947, est originaire. Après une période délibérément expérimentaliste, durant laquelle il produit des textes difficiles, qui frôlent parfois l’hermétisme, Alfons Cervera décide de mettre au cœur de sa prose les problématiques du commun, en particulier la construction littéraire d’une mémoire collective énoncée par et dans une poétique du conflit. Fruit d’une recherche d’équilibre entre « le quoi et le comment[1] », la poétique de la mémoire qu’Alfons Cervera élabore depuis lors confère au dire romanesque une puissance heuristique et critique renouvelée : l’écriture est conçue comme une voie majeure de la connaissance, mais aussi comme le lieu des possibles retrouvés, l’espace d’où l’on peut rendre visibles des récits disparus, qu’il s’agit de réincarner et rendre disponibles dans le présent. Entremêlant constamment des témoignages, des épisodes épars ou des fragments de récits disséminés, des voix et des silences, des échos du passé et du présent, ce que semble chercher l’écriture polyphonique de l’auteur, c’est la recomposition d’une forme de vérité littéraire conçue comme un possible antidote au silence imposé et à la marginalisation de pratiques et de discours hétérodoxes. Se situant en cela dans le sillage d’auteur.rices.s comme Belén Gopegui ou Isaac Rosa, le romancier définit la narration comme un exercice épistémique, indissociable de la notion de loyauté à la communauté politique et affective qu’il cherche à représenter de manière centrale dans son œuvre : « Le romancier raconte ce qu’il sait et ce qu’il ne sait pas, surtout ce qu’il ne sait pas. C’est pourquoi j’ai voulu écrire votre histoire, dans le seul but de ne pas la trahir. C’est tout. La réalité et la fiction convergent vers ce seul et unique objectif[2] ». Les multiples stratégies formelles que l’auteur déploie lui permettent de réinventer, en la réactualisant sans cesse, une « éthique de la résistance » qui tient à la fois de l’hommage aux vaincu·e·s de tout poil et de la remotivation littéraire du paradigme révolutionnaire, non seulement sur le plan historique et politique, mais également sur le plan éthique et philosophique. La polyphonie du dissensus qu’Alfons Cervera construit est peut-être la marque d’une esthétique qui cherche à déranger, à rebattre les cartes et les catégories établies, et qui fait, à l’intérieur et au-delà du roman, de la tâche de l’écrivain une médiation responsable et un geste créateur profondément politique.  

Pour ce numéro, que l’on espère également polyphonique, toutes les approches méthodologiques, thématiques et épistémologiques sont les bienvenues. 


 
[1] “Yo pensaba que mi resistencia como escritor en un momento determinado estaba en privilegiar en mis historias aquello que podríamos llamar el cómo por encima del qué, en estructurar mis novelas más desde el punto de vista del lenguaje que desde el punto de vista de la propia historia. [Después de la publicación de Nos veremos en París, seguramente en 1993], es cuando decido que voy a escribir sin claudicar de las exigencias del estilo, dándole tanta importancia a eso como a la historia que vas a contar, es decir equilibrar de alguna manera el cómo y el qué”, Anne-Laure Bonvalot, « En Espagne, l’écriture qui jaillit du conflit ne jouit pas de la même reconnaissance que l’écriture de l’apaisement », entrevista con Alfons Cervera, in Tête-à-tête. Revue d’art et d’esthétique, n°1, primavera 2011, p. 39-50. 
[2] Alfons Cervera, Todo lejos, Piel de Zapa, Barcelona, 2014, p. 21-22.