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Journée d’étude des doctorants du CRLA : « Poésie, résonance et traduction en Amérique Latine » / “Poesía, resonancia y traducción en América Latina”

Journée d’étude des doctorants du CRLA : « Poésie, résonance et traduction en Amérique Latine » / “Poesía, resonancia y traducción en América Latina”

Publié le par Vincent Ferré (Source : Montserrat Pavez Zamora)

           La résonance est l’expansion, le prolongement et l’amplification d’une vibration sonore. Son étymologie (lat. resonantia, « écho ») désigne la rencontre d’un son avec un obstacle, qui provoque son retour répété. Toutefois, la notion de résonance n’est pas exclusive à la matière sonore mais peut être entendue, métaphoriquement, comme la répétition ou le prolongement d’un fait, d’un évènement ou d’une réalité d’une durée indéterminée et d’une intensité plus ou moins grande. Elle peut également se référer aux répercussions d’un évènement dont la persistance des effets rend compte de son influence dans un milieu déterminé. 

            En psychanalyse, Lacan envisage le concept de résonance à partir de la fonction du mot et de son pouvoir d’évocation dans l’interprétation psychanalytique. Pour l’auteur, ce pouvoir évocateur, que le mot possède en lui-même, contient la multiplicité d’interprétations et de sens qu’il est capable de suggérer, qui équivaut à la quantité de « résonances » qu’il sous-tend, dont il renvoie l’écho :

                  Nul doute donc que l'analyste ne puisse jouer du pouvoir du symbole en l'évoquant d'une façon calculée dans les réso­nances sémantiques de ses propos. Ce  serait la voie d'un retour à l'usage des effets symboliques, dans une technique renouvelée de l'interprétation. Nous y pourrions prendre référence de ce que la tradition hindoue enseigne du dhvani, en ce qu'elle y distingue cette propriété de la parole de faire entendre ce qu'elle ne dit pas (Lacan, Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse, 294).

           Lacan désigne par le terme dhvani une forme de sens se situant au-delà du sens littéral et du sens figuré. Un sens qui se jouerait dans l’espace de résonance : dépassement du mot et de ce qu’il représente, capacité de « faire entendre ce qu’il ne dit pas ». 

           Un des plus grands festivals d’Europe de poésie latino-américaine a eu lieu à Berlin, du 17 au 23 novembre 2021, pour sa quinzième édition, avec un focus sur la traduction. En lien avec la notion de résonance, nous montrerons comment le prisme de la traduction permet de définir, voire de révéler, la spécificité de la poésie. Certains poètes et traducteurs, comme Susana Romano Sued, ont réfléchi à cette question. 

           Dans le domaine de la traduction, nous pouvons considérer l’espace entre deux langues comme un lieu de résonance. En effet, si traduire, c’est dire presque la même chose, comme l’affirme Umberto Eco, la traduction n’est pas restitution mais transposition du sens : variation, déplacement. Dans ce « presque », qui marque un espace vide entre texte source et texte cible, se manifeste le passage du traducteur, l’empreinte de sa lecture et de son interprétation. Sa traversée est le lieu dans lequel se manifeste ce que Walter Benjamin a appelé la « langue pure » : une signification plus vaste, introuvable, que le mouvement de la traduction laisse percevoir.

           C’est cette signification insaisissable qui résonne dans l’intervalle entre deux langues, comme ce qui se dégage d’un accord : un sens dans l’interstice, une harmonie entre les sons. Ce « mouvement de la langue », selon le philosophe, est « le pouvoir immense et unique de la traduction » (W. Benjamin La tâche du traducteur 132). 

Ce silence épiphanique est, pour la poète et traductrice Susana Romano Sued, le lieu de la poésie et de la traduction. Face à l’intraduisible, le traducteur ressemble au poète : à la poursuite d’un sens qui lui échappe sans cesse, il cherche un mot provisoire, capable de « l’héberger » :

                  La búsqueda incesante de las palabras que azotan la imaginación del traductor, que alimentan y envenenan su deseo. Es decir lo instalan en el espacio que traza el ir y venir del péndulo entre el luto y la melancolía. […] No sólo la imaginación es el objeto del asedio sino su propio ser que habita temporariamente este mundo, el mundo de los signos, el mundo del lenguaje. Hay que tramitar con lo ominoso, aquello que amenaza lo familiar; consentir lo inconfortable del acecho de la alteridad, vencer la tentación irresistible de permanecer en la añoranza del objeto perdido, del significante que huye. (S. Romano Sued Consuelo de lenguaje 52)

           Le deuil et la mélancolie (notions que Susana Romano Sued emprunte à Freud, Deuil et mélancolie), éprouvés par le traducteur, s’amplifient au moment de traduire la poésie. En traversant l’abîme interlinguistique, ce qui est exposé à la perte sont les résonances intraduisibles du poème, faites de l’alliance de la musicalité du mot et du pouvoir évocateur de l’image poétique. L’un et l’autre sont si solidement entremêlés qu’il faudrait les « détisser » pour les « retisser » dans l’autre langue. Le travail du traducteur devient alors un acte de (re)création poétique.

            Parler de résonance en poésie nous invite également à considérer le lien qui unit le poète au lecteur. D’une part, la vibration sensible et émotionnelle de l’image poétique trouve dans l’acte de lecture une caisse de résonance pour être jouée et entendue, comme l’écrit Gaston Bachelard : « le poète ne me confère pas le passé de son image et cependant son image prend tout de suite racine en moi » (G. Bachelard Poétique de l’espace 18). D’autre part, le langage poétique, par son principe de brièveté, condense le sens et laisse s’échapper, dans les espaces blancs, une aura de silence dans laquelle se prolongent et résonnent les empreintes rythmiques d’un sens infini et diffus, comme l’évoque dans son poème Juan Luis Martínez (« Observaciones…. », La nueva novela, 1985) :

                  b)  El lenguaje de los pájaros
                  es un lenguaje de signos transparentes
                  en busca de la transparencia dispersa de algún significado.

                  c) Los pájaros encierran el significado de su propio canto
                  en la malla de un lenguaje vacío;
                  malla que es a un tiempo transparente e irrompible.

                  d) Incluso el silencio que se produce entre cada canto
                  es también un eslabón de esa malla, un signo, un momento
                  del mensaje que la naturaleza se dice a sí misma.

           L’idée de résonance en tant qu’outil d’analyse poétique rend inévitable l’approche de la notion de rythme, entendue, au-delà de la métrique, comme l’inscription du sujet dans le discours. Selon le philosophe français Henri Meschonnic, le rythme est relation et synthèse entre l’individu qui écrit et son existence en tant que sujet d’écriture : « la relation du rythme au sens et au sujet, dans un discours, libère le rythme du domaine de la métrique. Il ne faut plus partir du vers (identifié à la poésie), comme il est fait communément, pour étudier le rythme, mais du discours ordinaire, dans tous les discours ». Bakthine (1986) nous invite à considérer également ce qui relève du rythme dans le discours non poétique, attendu que le je de l’énonciation ne puise pas directement les mots dans le dictionnaire mais les utilise avec toute leur charge sémantique, idéologique et symbolique et, dans le rythme de l’écriture, leur ajoute d’autres niveaux de sens. Le rythme produit alors un patron sonore et sémantique.

           Cette résonance entendue sur un plan rythmique nous renvoie à nouveau au rôle du lecteur. Dans un essai consacré aux rapports entre musique et littérature, Karoline Bauman (2015) affirme que la lecture, même silencieuse, implique un acte de modulation et d’écoute. Lus intérieurement, les mots résonnent à travers le phénomène d’endophonie : « When we read something, we ‘hear’ the words in a way that is not so different from the perception of ‘actual’ sounds or words spoken out loud » (Bauman, 16). Lors de la lecture, le mot est prononcé en silence, accentué et contextualisé dans ses particularités géographiques et historiques : s’amplifient alors sa vibration sémantique et sa charge idéologique (Bakhtine). 

Axes thématiques proposés :
- Théorie de la résonance en littérature. 
- Résonance, rythme et son en prose et en poésie.
- Le poète et le traducteur : espace de résonance et recherche de sens.

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Convocatoria en español

           La resonancia es la expansión, prolongación y ampliación de un sonido. La palabra tiene su origen en el latín (resonantia, “eco”) y su cualidad es la capacidad de hacer sonar algo de manera repetida. Pero no es una palabra susceptible de ser interpretada exclusivamente desde la sonoridad, sino metafóricamente como algo -un hecho, un acontecimiento, una realidad- que se repite, que regresa una y otra vez o, según sea el caso, continúa durante un tiempo indeterminado reproduciéndose con mayor o menor intensidad. Puede también referirse a la repercusión o a los efectos que produce un acontecimiento, que continúa manifestándose de diferentes maneras que indicarían el grado de importancia que éste tiene en un determinado contexto.

           Desde el psicoanálisis, el concepto de resonancia trabajado por Lacan está centrado en la función de la palabra y su poder evocador en la búsqueda de la interpretación psicoanalítica. Para el autor, la palabra tiene en sí misma un valor de evocación, entendido como las múltiples posibilidades que ésta tiene y, por lo tanto, las múltiples interpretaciones que es capaz de sugerir. Ello se entiende considerando la cantidad de resonancias que las palabras sugieren, o sea, aquello a lo que aluden: 

           No cabe pues dudar de que el analista pueda jugar con el poder del símbolo evocándolo de una manera calculada en las resonancias semánticas de sus expresiones. Esta sería una vía de retorno al uso de efectos simbólicos, en una técnica renovada de la interpretación. Podríamos para ellos tomar referencia en lo que la tradición hindú enseña del dhvani, en el hecho de que distingue en él esa propiedad de la palabra de hacer entender lo que no dice. (Lacan, Función y campo de la palabra y del lenguaje en psicoanálisis, 284).

           Lacan hace referencia al término dhvani, para indicar que la palabra posee un sentido que va más allá del literal e incluso del figurado. Existiría un tercer tipo de sentido que correspondería a la resonancia, que va más allá de la palabra y de lo que ésta quiere representar y que se refiere a la propiedad de la palabra de “hacer entender lo que no dice”. 

           Uno de los festivales de poesía latinoamericana más grandes de Europa tuvo lugar en Berlin, del 17 al 23 de noviembre 2021, en su 15º edición. Junto con la noción de resonancia, demostraremos cómo el prisma de la traducción permite definir o revelar la especificidad de la poesía. Algunos poetas y traductores, como Susana Romano Sued, lo plantearon. 

           Hablando de traducción, se puede considerar el espacio entre dos lenguas como lugar de resonancia. Efectivamente, traducir es Decir casi lo mismo, escribe Umberto Eco: la traducción no es restitución sino transposición del sentido: variación y desplazamiento. Este casi es lo que marca un vacío entre el texto original y el texto traducido, y en este hueco aparece la marca del traductor, la huella de su lectura e interpretación. Esa travesía del traductor es el lugar en el cual aparece lo que Walter Benjamin llamó “lengua pura”: una significación más amplia, inabarcable, que el movimiento de la traducción deja que se perciba. 

           Esa significación inabarcable es lo que resuena en el intervalo entre dos lenguas, como lo que se desprende de un acorde: un sentido en el intersticio, una armonía entre los sonidos. Es ese “movimiento de la lengua”, según el filósofo, “el poder inmenso y único de la traducción” (W. Benjamin La tâche du traducteur 132). 

Este silencio epifánico es para la poeta y traductora Susana Romano Sued una “tierra de nadie [...], lugar de la poesía y de la traducción” (Dilemas de traducción 76). Frente a lo intraducible, el traductor se parece al poeta: persigue un sentido que se le escapa y busca una palabra provisoria, capaz de “albergarlo”. Escribe Susana Romano Sued:  

La búsqueda incesante de las palabras que azotan la imaginación del traductor, que alimentan y envenenan su deseo. Es decir lo instalan en el espacio que traza el ir y venir del péndulo entre el luto y la melancolía. […] No sólo la imaginación es el objeto del asedio sino su propio ser que habita temporariamente este mundo, el mundo de los signos, el mundo del lenguaje. Hay que tramitar con lo ominoso, aquello que amenaza lo familiar; consentir lo inconfortable del acecho de la alteridad, vencer la tentación irresistible de permanecer en la añoranza del objeto perdido, del significante que huye. (S. Romano Sued Consuelo de lenguaje 52)

           El luto y la melancolía (nociones que Susana Romano Sued toma de Freud en su ensayo de 1917, Duelo y melancolía) que siente el traductor son más grandes a la hora de traducir poesía. Atravesando el abismo interlingüístico, lo que se pone en riesgo son las intraducibles resonancias del poema, hechas de la alianza de la musicalidad de las palabras y del poder evocador de las imágenes poéticas. Ambos aspectos están entramados de tal manera que para trasponerlos habría que “destejerlos” para tejerlos otra vez en la nueva lengua. La labor del traductor se vuelve entonces un acto de (re)creación poética.  

           Hablar de resonancia en poesía también nos invita a considerar la línea que une poeta y lector. Por un lado, la vibración sensible y emocional de la imagen poética encuentra en el lector una caja de resonancia para hacerse oír. Escribe Gaston Bachelard: “le poète ne me confère pas le passé de son image et cependant son image prend tout de suite racine en moi” (G. Bachelard Poétique de l’espace 18). Por otro lado, el lenguaje poético, por su brevedad, condensa el sentido y construye en los espacios blancos un aura de silencio en el cual se prolongan y resuenan las huellas rítmicas de un sentido difuso e infinito, como lo evoca Juan Luis Martínez en su poema (“Observaciones…”, La nueva novela, 1985):

                  b)  El lenguaje de los pájaros
                  es un lenguaje de signos transparentes
                  en busca de la transparencia dispersa de algún significado.

                  c) Los pájaros encierran el significado de su propio canto
                  en la malla de un lenguaje vacío;
                  malla que es a un tiempo transparente e irrompible.

                  d) Incluso el silencio que se produce entre cada canto
                  es también un eslabón de esa malla, un signo, un momento
                  del mensaje que la naturaleza se dice a sí misma.

           Al entrar a considerar la idea de resonancia como categoría de análisis literario, esta puede darse también en el plano del ritmo, entendido éste como la forma en que el sujeto se inscribe en el discurso. Según el filósofo francés Henri Meschonnic, el ritmo se da como una relación y una síntesis entre la persona que escribe y su existencia en tanto sujeto de escritura: “La relation du rythme au sens et au sujet, dans un discours, libère le rythme du domaine de la métrique. Il ne faut plus partir du vers (identifié à la poésie), comme il est fait communément, pour étudier le rythme, mais du discours ordinaire, dans tous les discours”. Bakthine (1986) nos invita a considerar lo rítmico en el discurso no poético, dado que el yo de la enunciación no toma las palabras directamente del diccionario, si no que las utiliza con toda su carga semántica, ideológica y simbólica y, en el ritmo de la escritura, añade nuevos niveles de sentido. El ritmo produce entonces un patrón sonoro y semántico.

            Esa resonancia dada en un plano rítmico nos reenvía al rol del lector. En un ensayo dedicado a las relaciones entre música y literatura, Karoline Bauman (2015) plantea que la lectura, aún aquella que es por completo silenciosa, implica también un acto de modulación y de escucha. Incluso estando en nuestra mente, las palabras resuenan a través de un proceso llamado endofonía: “When we read something, we ‘hear’ the words in a way that is not so different from the perception of ‘actual’ sounds or words spoken out loud” (Bauman, 16). Al leer una palabra, nos escuchamos mentalmente decirla, acentuarla, contextualizarla de acuerdo a sus particularidades geográficas e históricas: se amplifican entonces toda su vibración semántica y su carga ideológica (Bakhtine).

Ejes temáticos propuestos: 
- Teoría de la resonancia en literatura. 
- Resonancia, ritmo y sonido en poesía y prosa
- El poeta y el traductor: espacio de resonancia y búsqueda de sentido. 

Références bibliographiques/ Bibliografía 
Bachelard, Gaston. Poétique de l’espace. Paris: PUF, (1957) 2020.

Bajtín, Mijail. Problemas literarios y estéticos. La Habana: Editorial Arte y Literatura, 1986.

Bauman, Karoline. “Wortmaschine:” Electronic Music in Contemporary German Literature. En: Postgraduate English: Issue 31. September 2015. 

Benjamin, Walter. “La tâche du traducteur” (1923) in. Expérience et pauvreté. Paris: Payot, 2018.

Eco, Umberto. Dire presque la même chose. Expériences de traduction. Paris:

Freud, Sigmund. Deuil et mélancolie (1917) Paris : Payot & Rivages, 2011.

Lacan, J. Écrits, Paris: Éditions du Seuil, 1966. 

Martínez, J.L. La nueva novela. Santiago: Archivo, 1985.

Meschonnic, Henri. Poétique du traduire. Paris: Verdier, 1999.

---. Critique du rythme, Paris: Verdier, 1982.

Romano Sued, Susana. Dilemas de la traducción, Centro Peninsular en Humanidades y Ciencias Sociales, 2016.

--- . Consuelo de lenguaje. Ferreyra Editor, 2005.

 
Comité scientifique/ Comité científico :
Rike Bolte (Université del Norte, Barranquilla, Colombie), traductrice et organisatrice du Festival « Latinale » à Berlin
Alejandro Palma Castro (Université Benemérita Universidad de Puebla, Mexique)
Cécile Quintana (Université de Poitiers)
Benoît Santini (Université Littoral Côte d’Opale)

Comité organisateur/ Comité organizador : 
Nolwenn Ganavat, doctorante CRLA - Archivos, Université de Poitiers
David Martínez Houghton, doctorant – Universidad del Norte, Colombia, CRLA - Archivos, Université de Poitiers
Montserrat Pavez, doctorante CRLA - Archivos, Université de Poitiers