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Jeux et violence dans l’Occident médiéval (XIIème-XVème siècle)

Jeux et violence dans l’Occident médiéval (XIIème-XVème siècle)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Université catholique de Louvain)

Appel à communication

Jeux et violence dans l’Occident médiéval (XIIème-XVème siècle)

Université catholique de Louvain (Belgique), 28-29 mai 2020

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DESCRIPTION :

Cette journée d’étude réunira des chercheurs en littérature médiévale, histoire et histoire de l’art, dans la perspective d’une réflexion sur la dimension agonale des activités ludiques. Il s’agira, pour la période envisagée, de s’interroger plus particulièrement sur la part de violence et d’hostilité qui se manifeste à travers les activités ludiques.

Le jeu, comme l’ont bien montré Johan Huizinga et Roger Caillois, implique la création d’un ordre et le respect de règles qui visent à prévenir toute forme de débordement, à limiter le rôle que peuvent tenir certaines émotions ou comportements susceptibles de mettre en péril l’ensemble des codes qui régissent l’univers ludique. Philippe de Beaumanoir rappelle ainsi qu’il est impossible de jouer sous l’empire de la colère, et que « si tost comme li couroz vient, li jus faut[1] ». Raymond de Peñafort, dans sa Summula, recommande quant à lui que le jeu « se déroule dans la joie, sans violence, sans envie, sans médisance, sans fraude et sans tromperie[2] » de crainte que la situation ne dégénère et ne porte atteinte au principe même du jeu.

La violence apparaît à cet égard comme un des critères permettant de distinguer les bons des mauvais jeux. Si les uns, comme les échecs, sont tolérés, voire encouragés, dans la mesure où ils requièrent de la patience, du discernement et invitent à la maîtrise de soi, d’autres, comme les jeux de dés, sont au contraire systématiquement condamnés au prétexte qu’ils favorisent la discorde et menacent l’ordre social. Quels sont les moyens dont disposent alors les autorités ecclésiastiques et civiles pour assujettir la brutalité qui s’expriment à travers certaines pratiques ludiques ou sportives ? Est-il permis de penser que les efforts déployés par les législateurs, les clercs et les représentants de l’Église aboutissent, au sein de la société médiévale, à une euphémisation progressive de la violence et participent de cet autocontrôle des pulsions théorisé par Norbert Elias ?

Parallèlement, la question se pose de savoir comment les activités ludiques contribuent, dans l’espace littéraire, à la mise en scène d’une parole ou d’actes considérés comme hostiles ou agressifs. Il n’est pas inutile de rappeler ici le rôle que tient par exemple le jeu d’échecs dans la tradition épique et romanesque pour illustrer la mise à mort d’un adversaire, ou bien encore les différentes manœuvres d’un affrontement armé. Ces réflexions, du reste, suscitent un questionnement plus large sur la possibilité qu’offre le jeu de figurer symboliquement les différentes formes de violence, dont notamment la ruse, qui s’exercent dans le monde ici-bas. Quel surplus de signification apportent dans ce cas les métaphores ludiques à la représentation de rapports conflictuels? Ont-elles seulement une valeur illustrative ou assument-elles encore une fonction heuristique ? Enfin, quelle finalité poursuivent les auteurs qui recourent à ces images ? S’agit-il pour eux de conjurer la violence, ou bien de la célébrer ?

Il s’agit là de pistes de réflexions, et nous soumettons une liste possible de thèmes qui pourraient être encore abordés :

-Au nom de quelles valeurs la violence dans le jeu est-elle condamnée ?

-Comment le jeu permet-il d’évoquer la part de brutalité qui parfois sous-tend les relations amoureuses?

-Quelle incidence la violence peut-elle avoir, dans le domaine littéraire, sur le cadre générique dans lequel elle s’inscrit ?

Cette journée d’étude se tiendra à l’Université catholique de Louvain, le 28 et 29 mai 2020, et sera suivie d’une publication. Les propositions de communication (250 mots max.) devront être rédigées en français, et accompagnées d’un C.V académique. Elles devront être retournées conjointement aux deux organisateurs : Maxime Kamin (maxime.kamin@uclouvain.be), Pauline Otzenberger (pauline.otzenberger@uclouvain.be)

[1] Philippe de Beaumanoir, Les coutumes de Beauvoisis, Beugnot (éd), Paris, Renouard, 1842,  t. 2, chap. LXIX, p. 492.

[2] Raymond de Peñafort, Summula clarissimi jurisconsultissimique viri Raymundi, Jean Knoblouch (éd.), Strasbourg, 1504, fol. 91.