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Alliances et communautés en fantasy et science-fiction (UQAM/Université d'Artois, en ligne)

Alliances et communautés en fantasy et science-fiction (UQAM/Université d'Artois, en ligne)

Publié le par Marc Escola (Source : Pascale Laplante-Dubé)

Colloque Alliances et communautés en fantasy et science-fiction

2-4 mai 2022 


Suite au colloque Fantasy et féminismes : à l’intersection du/des genres, qui a eu lieu en mai 2021 et qui a rassemblé un nombre surprenant de chercheureuses[1], auditeurices, – et qui a, de ce fait, montré la pertinence du sujet et des nombreux enjeux soulevés – le comité d’organisation a décidé de lancer un nouvel appel. Pour cette deuxième édition, nous explorerons plus spécifiquement l’axe des alliances et des communautés de femmes[2], et/ou d’individus issus de la diversité sexuelle et de genre[3] (personnes réelles ou personnages) en fantasy et en science-fiction.

Impacts politiques de la fantasy et de la science-fiction

La science-fiction et la fantasy sont des genres proposant souvent une remise en perspective d’enjeux sociaux actuels, voire la mise en place de discours critiques sur le monde et le genre humain (Besson, 2021, 28; 33; 45-48). Si la science-fiction nous pousse à nous interroger sur nos normes référentielles en nous projetant dans un potentiel futur où, par exemple, certaines menaces (nucléaire, désastre écologique, contrôle des corps des femmes2) sont actualisées (45), la fantasy, quant à elle, propose des mondes secondaires qui permettent « d’explorer tous les thèmes sous la forme de la métaphore ou du symbole » (Davoust, 2018, 164). 

Quant à eux, les impacts de la fantasy et de la science-fiction sur le public ne peuvent évidemment être ignorés : sources d’actions dans le réel (Blanc, 2019; Demeule, 2020; Besson, 2021), les genres de l’imaginaire rassemblent autour de communautés d’appartenance, au cœur desquelles entrent en jeu diverses dynamiques de pouvoir. 

En bref, science-fiction et fantasy permettent de penser l’ailleurs, l’altérité, l’autrement; de penser d’autres systèmes politiques et sociaux, d’autres modes d’interaction, d’autres manières d’être, individuellement et collectivement. Dans le cadre de ce colloque, c’est la dimension collective que nous souhaitons explorer. 

Alliances et communautés

En fantasy et science-fiction, il n’est pas rare de voir des personnages agissant seul.e.s. En effet, tout un pan des récits mis en scène dans ces genres repose sur une quête qui doit être menée par une héroïne ou un héros – souvent des Élu.e.s –, sur les épaules duquel ou de laquelle repose le sort du monde (Beckton, 2015; Levy et Mendlesohn, 2016; Besson, 2018; Wilkins, 2019). La Young Adult Fiction et la littérature jeunesse, notamment, carburent à ce type d’arc narratif, où les Chosen Ones doivent souvent résoudre des problèmes créés par des adultes. Pensons à Lyra (His Dark Materials), à Harry Potter (Harry Potter) ou même à Katniss Everdeen (The Hunger Games) et, plus récemment, à Alina Starkov (Shadow and Bone). Si la majorité de ces Élu·e·s reçoivent l’aide d’ami·e·s où de grands sages (souvent des hommes) au cours de leur quête, iels doivent, la plupart du temps, mener à bien seul.e.s leur tâche finale. Ainsi, Harry affronte seul Voldemort; Lyra doit faire face seule à son destin; Alina se retrouve seule face au Darkling alors que ses ami·e·s luttent contre d’autres ennemi·e·s tout autour. 

Que nous dit cette idée récurrente d’agir seul·e face à son destin? Est-il plutôt possible d’envisager l’alliance, la communauté, la sororité, l’amitié, le partage comme des façons efficaces d’agir et de venir à bout des problèmes du monde? Grande figure narrative de la fantasy, de la science-fiction et, plus largement, de la fiction occidentale, la quête est « [l]oin d’être une aventure purement solitaire » (Bergue, 2015, 10). 

La convergence de l’alliance, de l’amitié et de la solidarité féminine est particulièrement intéressante. En effet, dans la société contemporaine, les jeunes filles2 sont souvent éduquées dans la compétition et la rivalité avec les autres filles2. Les alliances et la solidarité dérangent donc et sont synonymes de subversion, de rébellion, car elles déstabilisent l’ordre patriarcal. Cela ne date pas d’hier : il suffit de jeter un coup d’œil vers le passé pour constater que les rassemblements de femmes2 ont toujours dérangé – les sorcières, les amazones – et que la réponse de la société patriarcale a été de les disperser, de les discréditer ou de les éliminer. Il en va de même pour les groupes de personnes issues de la diversité de genre. 

Si on revient à la maxime de « diviser pour mieux régner », on peut facilement concevoir que de tels regroupements permettent d’acquérir une force, qui donne la possibilité d’affronter des problèmes, voire de même renverser le pouvoir patriarcal. Quelles possibilités surgissent lorsque des femmes2 (personnes réelles ou personnages) et/ou d’individus issus de la diversité de genre se retrouvent entre eux? Ces alliances et communautés permettent-elles une réappropriation des corps? Ces rassemblements permettent-ils de penser différemment la société, par exemple en transformant les dynamiques traditionnelles de couple ou de famille pour embrasser une organisation différente? Plus largement, permettent-ils de transformer les dynamiques de pouvoir? Ou bien ne font-elles que les reconduire, les reproduire? Les communautés et alliances appellent-elles à une redéfinition des notions d’individu et du social, voire de la frontière entre le corps social et le corps individuel? 

En fiction, plusieurs auteurices proposent des mondes dans lesquels se déploient des communautés ou des alliances, avec des quêtes et finalités différentes. Comment y sont représenté.e.s les alliances et communautés? Comment ces dernières participent-elles à la création d’autres arcs narratifs, d’autres fins, d’autres possibilités? Quelles stratégies d’écriture sont déployées dans la formation de ces regroupements? 

Les communautés et alliances se trouvent aussi bien dans les univers fictionnels qu’au niveau extradiégétique. De fait, les fans font montre de réappropriations et de créativité qui participent à l’édification de réseaux de solidarité et à la concrétisation d’actions dans le réel. Comment se jouent la réappropriation des fictions et la résistance au sein de ces groupes? Quels sont les enjeux et les dynamiques? 

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Ce colloque se veut ainsi une exploration des alliances et communautés existantes ou possibles en fantasy et en science-fiction, tant au niveau des fictions que de leur réappropriation dans le réel. Ce sera l’occasion de questionner leurs caractéristiques formelles et thématiques, frontières, constitutions, espaces et dynamiques. 

Ces alliances et communautés peuvent être entre individus des mêmes groupes ou pas, voire, considérant la diversité des espèces en imaginaire, de la même espèce ou pas. Nous vous invitons également à ne pas uniquement vous attarder à des analyses symboliques et métaphoriques des œuvres, mais à explorer également les enjeux structurels et narratifs des communautés et alliances.

Dans la lignée du colloque fantasy et féminismes, ce second colloque se veut transdisciplinaire, transmédiatique et intersectionnel, de même que situé aux croisements entre la pratique d’écriture et la pratique politique, la recherche et la politique, la recherche et l’écriture.  En ce sens, nous vous encourageons à croiser différentes approches et lectures (féministes, queer, antispécistes, antiracistes, etc.), lorsque les productions de fantasy ou de science-fiction que vous aurez choisies s’y prêteront. Les propositions de communication peuvent porter sur des textes littéraires, des bandes dessinées, des séries télévisées, des films, des jeux de rôle, des jeux vidéo, des pratiques de fans, etc. Les pratiques créatives ou les réflexions de recherche-création sont aussi les bienvenues.

Pistes de recherche :

●       Amitiés, sororités, liens, relations, solidarité
●       Inclusion, exclusion, frontières
●       Rapport aux lieux habités : marges?
●       Représentations et absence de représentation
●       Liens entre corps individuels et groupe social
●       Systèmes de pouvoir
●       Subversion du couple/de la famille traditionnelle
●       Création de regroupements transgressant les médiums et les genres, entre les auteurices et entre les œuvres
●       L’alliance comme pouvoir
●       Les alliances animales

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Afin de nous adapter à la situation sanitaire et écologique mondiale tout en favorisant l’échange autour d’enjeux, le colloque se déroulera en distanciel. Considérant le décalage horaire de 6 heures, les communications auront lieu en avant-midi selon le fuseau horaire du Québec, et en après-midi selon celui de la France. Elles seront en français et dureront au maximum vingt minutes. 

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Les propositions de communication doivent inclure un titre et un résumé (250 mots), des mots clés, ainsi qu’une biobibliographie de quelques lignes de l’auteurice (affiliation académique ou institutionnelle, principaux axes de recherche, publications majeures).

Elles doivent être envoyées aux organisatrices du colloque à l’adresse fantasy_feminismes@hotmail.com au plus tard le 20 janvier 2022.  

Notez que vous n’avez pas besoin de résider en Europe ou au Québec pour nous envoyer une proposition de communication : nous acceptons les propositions de partout dans le monde. Vous devrez toutefois être disponible lors des horaires mentionnés ci-haut (avant-midi heure de Montréal/après-midi heure de France).  

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Changer le monde, un mot à la fois 

Depuis les prémices de nos projets de colloques, la démocratisation et le partage des savoirs sont au cœur de notre démarche. Ouvrir la réflexion à un plus large public est fondamental. Pareillement, l’inclusion des voix des créateurices de fantasy et de science-fiction, qui donnent naissance à ces mondes et ces récits qui nous fascinent, est incontournable. C’est pourquoi nous travaillons à tisser des liens avec divers acteurices des milieux littéraires, culturels et académiques québécois et français.

Pour la seconde année consécutive, nous aurons le plaisir d’accueillir des créateurices autour de tables rondes sur les communautés et alliances en science-fiction et fantasy. 

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Comité d’organisation (ordre alphabétique)  

Charlotte Duranton – Université d’Artois (Textes et Cultures)

Marion Gingras-Gagné – Université du Québec à Montréal (CRILCQ, IREF) 

Pascale Laplante-Dubé – Université d’Artois (Textes et Cultures) / Université du Québec à Montréal (CRILCQ, IREF) 

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Comité scientifique (ordre alphabétique)

Megan Bédard – Université du Québec à Montréal (Figura)

Anne Besson – Université d’Artois (Textes et Cultures)

Marie Lucie Bougon – Université d’Artois (Textes et Cultures)

Justine Breton – Université de Reims Champagne-Ardenne (Cérep)

Fanie Demeule – Université du Québec à Montréal, Éditions Tête première et Hamac

Sandrine Galand – Université du Québec à Montréal (IREF) / Enseignante de littérature au collégial

Lori Saint-Martin – Université du Québec à Montréal (CRILCQ, IREF, RéQEF)

Amelha Timoner – Université Paris Nanterre (CREA)

Pascale Thériault – Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue 

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Les organisatrices tiennent à remercier le Centre de recherche interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises, l’Institut de recherches et d’études féministes, le laboratoire Textes et Cultures, le Festival littéraire international le Métropolis bleu, Littérature québécoise mobile/Opuscules, et les membres du comité scientifique.

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Bibliographie 

Baker, Daniel, « Why We Need Dragons: The Progressive Potential of Fantasy », Journal of the Fantastic in the Arts, vol. 23, n° 3, 2012, p. 437-459.

Beckton, Denise, « Bestselling Young Adult Fiction: Trends, genres, and readership », TEXT, vol. 19, no 2, 2015, p. 1-18. 

Beard, Mary, Women and Power. A Manifesto, New York/Londres, Liveright Publishing Corporation, 2017.

Bergue, Viviane, La Fantasy, mythopoétique de la quête, Bolton, CreateSpace, 2015. 

Besson, Anne, Les Pouvoirs de l’enchantement. Usages politiques de la fantasy et de la science-fiction, Paris, Vendémiaire, 2021. 

Besson, Florian, « Élu », dans Anne Besson (dir.), Dictionnaire de la fantasy, Paris, Vendémiaire, 2018, p. 110-113.

Blanc, William, Winter Is Coming. Une brève histoire politique de la fantasy, Montreuil, Éditions Libertalia, coll. « Édition poche », 2019. 

Cioffi, Kathleen, « Types of Feminist Fantasy and Science Fiction », dans Jane B. Weedman (dir.), Women Worldwalkers: New Dimensions of Science Fiction and Fantasy, Lubbock, Texas Tech Press, 1985, p. SS-93.

Cranny-Francis, Anne, Feminist Fiction: Feminist Uses of Generic Fiction, New York, St-Martin’s Press, 1990. 

Demeule, Fanie, « Représentations des néo-amazones : Katniss (The Hunger Games), Brienne (Game of Thrones) et Lagertha (Vikings) », thèse de doctorat, département d’études littéraires, Université du Québec à Montréal, 2020.

Larue, ïan, Fiction, féminisme et postmodernité. Les voies subversives du roman contemporain à grand succès, Paris, Éditions Classiques Garnier, coll. « Perspectives comparatistes », no 4, 2010. 

_____, Libère-toi cyborg! Le pouvoir transformateur de la science-fiction féministe, Paris, Cambourakis, 2018. 

Guillaumin, Colette, Sexe, race et pratique du pouvoir. L’idée de nature, Paris, iXe, 2016 [1992], 235 p.

Levy, Michael et Farah Mendlesohn (dir.), Children’s Fantasy Literature: An Introduction, Cambridge, Cambridge University Press, 2016. 

Nikolajeva, Maria, « The Development of Children’s Fantasy », dans Edward James et Farah Mendlesohn (dir.), The Cambridge Companion to Fantasy Literature, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 50-61.

Russ, Joanna, « What can a Heroine Do? Or Why Women Can’t Write », How to Write Like a Woman?, Indiana, Bloomington, 1995, p. 79-94.

Smadja, Isabelle, Le temps des filles, Paris, Presses universitaires de France, 2004.

Tolkien, J.R.R, On Fairy-Stories: Expanded Edition, with commentary and notes, Londres, Harpers Collins Publishers, 2008 [1947, 1964]. 

Vonarburg, Élisabeth, « La science-fiction et les héroïnes de la modernité », Philosophiques, vol. 21, n° 2, 1994, p. 453-457.

Wilkins, Kim, Young Adult Fiction: Conventions, Originality, Reproductibility, Cambridge, Cambridge University Press, 2019. 

 
[1] Dans une perspective de démasculinisation du langage, nous utilisons ici une langue inclusive et l’accord de proximité.
[2] Par les mots « femmes » et « filles », nous entendons toute personne s’identifiant complètement ou partiellement comme femme ou fille, de façon fluide ou non, ainsi que toute personne dont l’expérience sociale et/ou l’éducation a été marquée par la féminité. Notre démarche se veut la plus inclusive possible.
[3] Sont incluses dans les termes « femmes » et « individus de la diversité de genre », les personnes issues de la diversité sexuelle. Pour ne pas alourdir le texte, nous le précisons ici, mais ne le répéterons pas à chaque fois dans l’appel.