La question de l’analyse du discours de l’imposture recentre les enjeux autour de la véridiction, du mensonge, et des outils critiques qui permettent de dénoncer un mécanisme que l’on croit, à tort ou à raison, percevoir dans le discours d’un pair aux yeux d’un tiers. Il n’est donc pas question d’analyser ici la relation « imposture/enquête » et la « fiction jubilatoire » de l’imposture (Maxime Decout, Pouvoirs de l’imposture) mais de s’intéresser d’un point de vue structural aux discours de l’imposture.
Du point de vue de la réception, pour que l’imposture puisse être analysée comme un phénomène linguistique, il faut d’une part connaître la vérité et la recevoir pour vraie puis transformer la certitude acquise en outil logique de révélation du vrai. Existe-t-il des marqueurs propres du discours de la dénonciation, de la révélation destinés à renforcer la part de vérité contre le mensonge ? Quelle forme discursive la sincérité prend-elle quand elle se heurte au mensonge, à la manipulation et à l’insincérité ? Comment la vérité se démêle-t-elle des filets rhétoriques du mensonge et de la manipulation ?
Du point de vue de l’émetteur, la question rejoint très directement la question de la mauvaise foi telle que traitée à l’occasion de la journée d’étude de février 2019 à Dijon: c’est un enjeu de lexique, de repérages contrastifs qui met en cause l’éthos de la personne dans un rôle institutionnel. Peut-on repérer des marqueurs du discours d’imposture, ou tout du moins des « échelles argumentaires » (O. Ducrot) propres à l’imposture et liées par exemple aux enjeux de la conviction (postures du réel dans le discours), de la déception (le non-dit), du renversement de la charge accusatoire, de la réduction des arguments défensifs (le point Godwin)…
La littérature, qui fourmille d’anecdotes liées aux récits d’impostures, peut-elle témoigner des enjeux politiques, culturels, civilisationnels de l’imposture ?
La question des institutions prend enfin dans cette perspective une place importante dans la mesure où elle ne se conçoit que dans la relation à un collectif stable, sociologiquement construit et dont le rôle distribue des fonctions auxquelles les individus tendent à se conformer dans l’espoir d’en tirer un bénéfice: la famille comme l’illustre le retour de Martin Guerre, les gouvernements, la science, le politique, le religieux… L’imposture doit donc être analysée à l’aune de cette dimension sociale où le discours, qu’il soit une imposture ou un moyen de la dénoncer, est un enjeu central de la polémique…ou de la controverse.
Programme :
19 juin, Salle C100 de l'UFR LLSHS de l'Université Paris 13
9h30 : Accueil par Pierre-André buvet, Directeur d’équipe
Isabelle Barbéris, Université Paris Diderot
Quand l'art vivant devient garant de la vérité: quelques postures épistémiques
Franck Neveu, Université Paris Sorbonne
L’imposture et la langue
Patrick Charaudeau, université paris 13, CNRS-LCP-Irisso
Imposture, mensonge, dénégation, mauvaise foi: quand les mots se confondent, il faut y mettre de l’ordre conceptuel
Xavier-L. Salvador, Université Paris 13:
Impostures numériques: Humanités ?
19 juin après-midi, 14h30
Alexis Poulin, Le Monde moderne
Journaliste, « nouvelles impostures démocratiques »
Jean Szlamowicz, Université de BOURGOGNE
L’imposture épistémologique des discours idéologiques ou la séduction des concepts
Michel Bernard, UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE
Lexiques de l’imposture
Yana Grinshpun, UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE
L'imposture identitaire et la rhétorique victimaire
20 juin matin: 9h30
Francis Kierszenbaum, UNIVERSITÉ SORBONNE NOUVELLE
Imposture et vérité : responsabilité et accompagnement en entreprise
Isabelle Blondiaux, APHP
« Discours scientifique et imposture"
Romain Garnier
Les indo-européens dans le discours
Céline Guillemet, Université paris Sorbonne
l'imposture traductologique dans la BH
20 juin après-midi 14h30
Lucien Castex, Unesco
Imposutres juridiques
Laetitia Haroutunian et Fabrice Issac, université paris 13
Médecine et santé: les impostures des revues scientifiques
Gaël Lejeune, université paris sorbonne
Illusions Artificielles et Réelles Impostures
Sarah Sandré, université paris 13
Frankenstein et la double imposture