Why did Italy produce so much art during the Renaissance ? We are so conditioned to regard these products as art that a question about mere quantity seems irrelevant if not irreverent. — Richard Goldthwaite
Cet extrait de « Wealth and the demand for art in Italy, 1300-1600 » de Richard Goldthwaite (1993) met en évidence la rupture manifeste entre la représentation de l’art et la quantification de ses objets, pouvant être perçue comme non pertinente (irrelevant), si ce n’est irrévérencieuse (irreverent), en particulier pour les partisans d’un idéal d’unicité de l’art pour qui l’individualité du chef d’œuvre est diluée dans sa mise en série. Depuis Goldthwaite, la sérialité des objets a été mise en lumière et liée à l’organisation des ateliers, par exemple dans les travaux de Michele Tomasi. Par ailleurs, les usages historiens des méthodes quantitatives se sont développés de façon inégale, selon les outils et les approches, depuis l’apogée de celles-ci dans les années 1960-1970, et leur critique (C. Ginzburg). Elles dépassent aujourd’hui largement l’histoire économique et s’adossent à d’autres approches, notamment par l’analyse de réseaux (C. Lemercier, C. Zalc) ou l’introduction d’outils quantitatifs en histoire de l’art (M. O’Malley, A.-S. Radermecker, L. Saint-Raymond…).
L’usage de ces méthodes pose d’abord la question de la construction des données depuis des documentations variées, mais aussi celle des conditions de leur mise à disposition, sous la forme de bases de données, qui a profondément renouvelé notre relation aux corpus disponibles et constitués. L’approche quantitative invite à un recul critique sur notre rapport aux « sources », sur les questions d’échantillonnage – subi ou choisi – et de représentativité, sur les échelles d’analyse et sur les formes d’articulation possible entre le quantitatif et le qualitatif, entre la série et l’individu. Il s’agit aussi de s’interroger sur la combinaison des données hétérogènes, sur les choix opérés quant aux critères d’agrégabilité et sur la valeur donnée à l’incertitude dans la construction de nos corpus.
Aussi, par ces méthodes, que quantifie-t-on exactement et comment ? L’objectif de cet atelier est de réfléchir collectivement à ces questions, en présentant des études de cas relevant principalement de l’art des périodes médiévales et modernes et intégrant notamment l’évolution des questions de recherche, le développement d’outils computationnels et de grands entrepôts de données.
Comité d’organisation :
Diane Baustert (Cergy Université/EHESS), Quentin Bernet (EHESS/ISP ENS Paris-Saclay), Étienne Anheim (EHESS), Lise Saussus (EHESS)
—
9h30-10h : Accueil des participants (Salon Gustave Berger)
10h-10h15 : Introduction
Diane Baustert (Cergy Université/EHESS)
Quentin Bernet (EHESS/ISP ENS Paris-Saclay)
10h15-11h15 : Compter sans se laisser conter : les méthodes quantitatives en sciences humaines et la maîtrise du processus de recherche
Sébastien de Valeriola (ULB)
11h15-11h30 : Pause café
11h30-12h10 : Qualifier des séries d'objets médiévaux, des tombes allemandes aux manuscrits provinois (XIIIe-XVIe siècles). Pour une micro-histoire quantitative
Marie Fontaine-Gastan (Institut historique allemand, Université Gustave Eiffel)
12h10-12h50 : En quête d’objectivité : les bases de données sémantiques en histoire de l’art médiéval
Quentin Bernet (EHESS/ISP ENS Paris-Saclay)
12h50-14h20 : Déjeuner (Salon Gustave Berger)
14h20-15h :Faire l’histoire d’un objet sans chiffres : le cas des búcaros
Sofia Navarro-Hernandez (EHESS)
15h-15h40 : Réseaux d’objets, faisceaux d’usages : le cas de l’émail parisien au XIVe siècle
Diane Baustert (Cergy Université/EHESS)
15h40-16h : Pause café
16h-16h40 : Le marché de la peinture de genre en Italie (1600-1725) : méthodes quantitatives et perspectives d'analyse
Flavie Tordeur (ULB)
16h40-17h20 : Knowledge Gaps and Methodological Asymmetries in the Study of Low-End Antiques
Roberta Raccomandato (ULB)
17h20-18h : Conclusions et discussion générale.