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Traduction littéraire et liberté d’expression : peut-on tout traduire ? (Sorbonne)

Traduction littéraire et liberté d’expression : peut-on tout traduire ? (Sorbonne)

Publié le par Marc Escola (Source : Arezou Dadvar)

Appel à communications : " Traduction littéraire et liberté d'expression : peut-on tout traduire ?"

Pour les traductologues comme pour les traducteurs et traductrices, le mot « liberté » est familier : il forme depuis longtemps un couple dialectique avec « fidélité », désignant la latitude que s’accorde la personne qui traduit pour répondre aux attentes du public cible. Mais cette « liberté » n’embrasse pas toutes les libertés : s’ajuster à un lectorat signifie aussi composer avec ses contraintes. Elle peut même conduire à se plier aux limites de la liberté d’expression. C’est ce paradoxe que ce colloque voudrait explorer en examinant la manière dont la traduction se heurte à des mécanismes de censure et d’autocensure. La pratique se déploie en effet dans des rapports de force et des configurations socio-politiques qui déterminent ce qui peut être dit, publié et circuler d’une langue à l’autre. Le traducteur se trouve au carrefour de multiples formes de régulation : censure étatique, autocensure, pressions idéologiques et économiques qui façonnent le répertoire des textes traduits et les stratégies de traduction elles-mêmes. Les régimes politiques peuvent instrumentaliser ou réprimer la traduction, faisant du traducteur ou de la traductrice tantôt un agent de contrôle, tantôt un passeur clandestin de textes dissidents. La traduction peut-elle ainsi devenir un moyen de faire circuler les idées et les mots que l’on ne peut écrire dans les publications originales ? Dans le prolongement de la réflexion éthique sur la responsabilité du traducteur à l’égard de la « lettre » et du « vouloir-dire » du texte à traduire, il apparaît nécessaire d’interroger les dimensions éthiques et politiques de la liberté d'expression en traduction : les traducteurs sont-ils responsables des mots qu’ils traduisent, des discours qu’ils font circuler dans une nouvelle langue-culture ? Quelle autonomie peuvent-ils revendiquer face aux diverses formes de prescription ? Comment résistent-ils, s’accommodent-ils ou participent-ils aux mécanismes de censure ?

Ce colloque mené dans le cadre de la Chaire COLIBEX sur les enjeux contemporains de la liberté d’expression se propose d’examiner les tensions entre traduction et liberté d'expression dans une perspective à la fois théorique et pratique. Cette rencontre accueillera aussi bien des contributions de traductologues, que des témoignages de traducteurs et traductrices confrontées à ces enjeux dans leur pratique professionnelle. Qu’il s’agisse de la traduction de textes politiquement sensibles, de la négociation avec les instances éditoriales, des stratégies de contournement de la censure, ou des dilemmes éthiques posés par la traduction de discours de haine ou de propagande, cette rencontre vise à croiser les regards théoriques et les expériences de terrain pour mieux comprendre comment la traduction littéraire s’articule aux questions de liberté d’expression, de résistance et de responsabilité dans l’espace public transnational. 

Axes thématiques

Axe 1 : Pratiques traductives et témoignages 

Cet axe accueille des contributions de praticiens et praticiennes relatant leur expérience concrète face aux questions de liberté d’expression : traduction de textes dissidents, négociations avec les éditeurs et éditrices, stratégies de traduction face à des passages sensibles, démarches d’intervention ou d'effacement. Les témoignages réflexifs sur la pratique traductive en contexte contraint sont particulièrement bienvenus.

Axe 2 : Censure, autocensure et circulation transnationale des textes

Cet axe interroge les mécanismes explicites et implicites qui contraignent ou interdisent la traduction de certains textes : censure étatique, pressions éditoriales, autocensure des traducteurs et traductrices, non-traduction stratégique. Les contributions pourront porter sur des études de cas contemporains, sur les politiques de traduction sous les régimes autoritaires ou illibéraux, ou sur les modalités de résistance et de contournement développées par les traducteurs et éditeurs.

Axe 3 : Éthique de la traduction et responsabilité du traducteur et de la traductrice

Comment le traducteur négocie-t-il sa liberté d’expression face aux textes qu’il traduit ? Cet axe explore les dilemmes éthiques posés par la traduction de contenus controversés, violents ou idéologiquement marqués. Il interroge également la notion de fidélité et d’hospitalité langagière dans un contexte où traduire peut donner voix à des discours problématiques ou au contraire faire entendre des voix censurées.

Modalités de soumission

Les propositions de communication en français (environ 3000 à 5000 signes, espaces compris) devront comporter :

  • Un titre provisoire
  • Un résumé
  • Une biobibliographie de l’auteur ou de l’autrice

Les propositions sont à envoyer avant le 1er février 2026 à l’adresse suivante : traductionliberte@gmail.com 

Calendrier

01 février 2026 : Date limite d’envoi des propositions
28 février 2026 : Notification d'acceptation 
31 mars 2026 : Programme définitif
18-19 juin 2025 : Colloque


Organisation

  • Anna Arzoumanov (MCF HDR en linguistique et en littérature françaises à Sorbonne Université, Chaire Colibex CNRS/UMR 8599 CELLF)
  • Arezou Dadvar (traductrice, chercheuse contractuelle Chaire Colibex CNRS/UMR 8599 CELLF)
  • Amina Damerji (écrivaine, chercheuse contractuelle Chaire Colibex CNRS/UMR 8599 CELLF)

Comité scientifique

  • Olivier Mannoni (Traducteur et écrivain)
  • Marian Panchòn Hidalgo (Enseignante-chercheuse à la Faculté de Traduction et d’Interprétation de l’Université de Grenade)
  • Raphaël Roché (Maître de conférences, université Jean Monnet)
  • Gisèle Sapiro (directrice de recherches, CNRS)

Dessin © Mana Neyestani – reproduction avec autorisation.