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Travailler nuit à la santé ? La littérature face aux maladies professionnelles (Besançon)

Travailler nuit à la santé ? La littérature face aux maladies professionnelles (Besançon)

La littérature face aux maladies professionnelles

Colloque organisé par

Aurore Labadie (C.R.I.T, Université Marie et Louis Pasteur) et Hugo Semilly (FoReLLIS UR15076, Université de Poitiers).

les 20 & 21 novembre 2025,

Grand Salon, UFR SLHS, Université Marie et Louis Pasteur, Besançon.

Accès par rue Chifflet ou rue Megévand

Travailler peut nuire gravement à votre santé: ainsi la sociologue Annie Thébaud-Mony titre-t-elle l’un de ses essais consacrés aux facteurs d’altération de la santé par le travail. Par- delà le jeu de connivence culturelle (le titre rappelle les mises en garde placées sur les paquets de cigarettes), la sociologue invite à un déplacement de regard ou, à tout le moins, à la mise en lumière de ce qui était encore alors un «angle mort de la santé»: les liens entre santé et travail.

À partir des années 2000, de nombreux travaux ont mis l’accent sur leurs relations à travers différents paradigmes : la souffrance professionnelle ou l’usure mentale (Christophe Dejours), le burn-out (Marie Pezé), le harcèlement professionnel (Marie-France Hirigoyen), les risques psychosociaux ou ceux propres à la «condition intérimaire» (Barlet et al.), mais également les cancers (Marie Ménoret) ou les TMS (Troubles musculo-squelettiques). Les maladies, concepts et acronymes ne manquent pas pour tenter de cerner une situation médicale en partie inquiétante et dont la réalité se révèle souvent par la médiatisation de tragédies personnelles qui deviennent alors collectives, à travers les luttes pour la reconnaissance sociale et judiciaire qu’elles impliquent (comme dans le cas de l’amiante, le management toxique et les vagues de suicide chez Orange ou plus récemment les cancers développés par les fleuristes, exposés indirectement à des pesticides). 

Dans cette perspective, la littérature contemporaine, en constant dialogue avec les sciences humaines, permet de rendre compte de ce que le monde du travail fait aux corps et aux esprits, en mettant en récit « l’intimité de la maladie » (Grisi), mais en donnant précisément à cette dernière une dimension moins individuelle que politique. Échappant à l’œillère de la maladie vécue comme une expérience intérieure, représentation née dans les récits du XIXe siècle, la représentation du monde du travail permet à l’inverse de mettre en exergue le caractère profondément collectif des maladies professionnelles et penser autrement cette intimité désormais partagée. De La Centrale (2010) d’Elisabeth Filhol, qui appuie sur la sous-traitance des risques dans le nucléaire occasionnant un empoisonnement des ouvriers précaires, à Cora dans la spirale (2019) de Vincent Message, qui traite du burn-out professionnel, en passant par Cartilages : Notes d’intérim (2024) de Ludovic Villard sur la vie d’un intérimaire rapidement atteint de TMS, la littérature s’attaque aussi bien aux maladies physiques que mentales. De surcroît, elle permet de dévoiler comment s’articulent les causes (le néomanagement, les nouvelles organisations du travail, l’utilisation de certains agents chimiques) et leurs possibles conséquences (accidents, suicide, surmédicamentation, mort prématurée) par leur mise en récit.

Programme

Jeudi 20 novembre 2025

9h30 : Accueil des participant·e·s autour d'un café

10h : Mot introductif des organisateurs, Aurore Labadie et Hugo Semilly

Session 1. 10h30 – 12h : Univers industriel et maladies professionnelles. Présidente de séance : Anne Deffarges

Erik Pesenti Rossi (PR, Littératures comparées, Université de Strasbourg, CHER) : « Les accidents et les maladies du travail dans Tuta blu (Bleu de travail) »

Maxime Jacquet (Doctorant à l’EHESS, CRH) : « Poétique de la douleur dans À la ligne : Feuillets d’usine, Joseph Ponthus »

12h – 13h : Déjeuner buffet sur place

Session 2. 13h – 15h30 : Dire les enjeux écologiques des maladies professionnelles. Président de séance : Erik Pesenti Rossi

Carlo Baghetti (MCF, Langue et littérature italiennes, Université de Strasbourg) : « Au carrefour de la modernité : Tarante et les récits de la toxicité industrielle. »

Alice Desquilbet (Docteure, Littérature française et francophone, Université Sorbonne-Nouvelle-Paris 3, Membre associée THALIM) : « Noces de coton et d'uranium dans Noces de coton de Edem Awumey (2022) et L'Équation avant la nuit de Blaise Ndala (2025) : quand le travail extractiviste mine la santé et la terre. »

Hugo Semilly (Docteur, Littératures comparées, Université de Poitiers, membre associé FoReLLIS) : « Littérature et cancer professionnel. Rendre compte et faire justice ? »

Lucia della Fontana (Doctorante en études italiennes, ELCI, Sorbonne Université, Lectrice d’italien à Nantes Université) : « Sensibilités environnementales et précarité professionnelle : récits d’un rapport au monde altéré dans Tilt de Caterina Serra et Schproum de Jean-Yves Cendrey. »

15h30-16h : Pause thé-café

16h – 17h30 : Table ronde pluridisciplinaire avec Jean-Yves Cendrey, écrivain, et Anne Marchand, sociologue, sur le thème « Écrire les maladies professionnelles », animée par Aurore Labadie et Hugo Semilly. 

19h30 : dîner du colloque

Vendredi 21 novembre 2025

9h : Accueil des participant·e·s autour d'un café

Session 3.  9h30 – 10h45 : Récits d’usure au travail. Président de séance : Hugo Semilly

Marco Dal Pozzolo (Postdoctorant de la Chaire Valeurs du Soin, Lyon 3) et du Laboratoire LI3S de l’Université Bourgogne Europe), membre associé MEMH : « Le travail malade. Récits et concepts de l’usure professionnelle. »

Lucas Sauvage (Doctorant en Littératures comparées, Université de Toulon, BABEL) : « Représentation du burn-out dans les mangas. »

10h45-11h15 : Pause thé-café 

Session 4. 11h15 – 12h30 : L’employé créateur : vide professionnel et résistances. Présidente de séance : Carlo Baghetti

Léa Polverini (ATER en Littératures comparées, Aix Marseille Université, CIELAM) : « L’écrivain en gratte-papier neurasthénique : héritage de Franz Kafka chez le saoudien Aziz Mohammed. »

Ilaria Moretti (Enseignante à la Haute École d’Études Internationales et Politiques de Lyon et à Lyon 3, membre associée IHRIM,) : « Repenser l’homme unidimensionnel. La paraphrénie comme outil de désaliénation dans Le train a sifflé de Luigi Pirandello. »  

12h30 – 13h30 : Déjeuner buffet sur place

Session 5. 13h30 – 15h30 : Politiques de la maladie professionnelle ? Une perspective pluridisciplinaire. Présidente de séance : Alice Desquilbet

Anne Deffarges (MCF, Histoire et civilisation allemandes, Université Marie et Louis Pasteur, CRIT) : « Travail salarié féminin et santé : débats socialistes en Allemagne (décennies 1860-1920). »

Samuel Dupoirier (MCF, Psychologie Sociale et du Travail, Université Marie et Louis Pasteur, Laboratoire de Psychologie) : « Les implications psycho-sociales des réformes du chômage : une approche en termes d’ordre social. »

Aurore Labadie (MCF, Langue et littérature françaises, Université Marie et Louis Pasteur, CRIT) : « 180 jours et L’Instruction d’Isabelle Sorente. Du burn-out aux maladies professionnelles animales. »

15h30 : Conclusion du colloque