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Appels à contributions
Hommes et masculinités dans la culture française contemporaine (Bristol)

Hommes et masculinités dans la culture française contemporaine (Bristol)

Publié le par Eloïse Bidegorry (Source : Bradley Stephens)

Conférenciers principaux

Ivan Jablonka, professeur d’histoire contemporaine, Université Sorbonne Paris Nord

Nelly Quemener, professeure en sciences de l’information et de la communication, Sorbonne Nouvelle

Todd Reeser, professeur en études françaises et en études sur le genre, la sexualité et les femmes, Université de Pittsburgh

Cette conférence explorera la manière dont les attitudes envers les hommes et la virilité se façonnent aujourd’hui au sein et au travers de la culture française. Les traditions qui ont caractérisé la culture française telles que la chevalerie, le libertinage et le raffinement font l’objet de nombreuses études issues des pensées féministes, queer et postcoloniales, alors même que les stéréotypes patriarcaux de la masculinité continuent d’avoir un coût élevé dans la France contemporaine. L’agressivité masculine et la prise de risques coûtent chaque année des milliards d’euros au système judiciaire et à la sécurité sociale. Les hommes représentent 83 % des poursuites pénales annuelles et ont trois fois plus de risques de se suicider (Lucile Peytavin, Le Coût de la virilité, 2021). Ils affichent également des niveaux de réussite scolaire inférieurs (SIES 2024) et sont touchés de manière disproportionnée par les algorithmes addictifs de la pornographie en ligne (IFAC-CHU de Nantes 2025).

Selon le Haut Conseil à l’Égalité le sexisme a d’ailleurs augmenté au cours de la dernière décennie. Les attitudes traditionalistes envers les comportements masculins deviennent plus répandues parmi les jeunes hommes. Une jeune femme française sur cinq déclare avoir été victime d’agression sexuelle, et huit Français·es sur dix estiment que le pays se montre trop permissif envers le sexisme (HCE 2025). Ces statistiques traduisent comment « l’industrie florissante » du déclinisme (Rachel Donadio, New York Times, 2017) alimente une nostalgie des certitudes d’autrefois plutôt qu’un élan vers de nouveaux départs. Alors que la France cherche à se réinventer dans un monde mondialisé et postcolonial, les inquiétudes liées aux inégalités socio-économiques, à la dégradation environnementale et aux changements démographiques font de la masculinité un point de tension entre idées ancrées et perspectives d’avenir.

Au cœur de cette tension se trouve le fait que la République française, « une et indivisible », a historiquement conçu la citoyenneté en termes universels tout en privilégiant les corps et les comportements masculins comme norme. Les réactions polarisées aux mouvements internationaux #MeToo et #BlackLivesMatter ont révélé combien la France hésite encore à reconnaître sa prédisposition à la domination sociale masculine et la régulation qui en découle des classes, des genres, des races, des religions et des sexualités. Comme l’a formulé Hélène Devynck, « tout se passe comme si le #MeToo français butait contre un mur solidement cimenté par un mythe » (Impunité, 2022). Ce mythe a été décrit par Joan Scott comme « la séduction ou la galanterie à la française comme trait d’identité nationale », un imaginaire dont les racines remontent aux troubadours et qui révèle un conflit politique systémique plutôt qu’un simple clivage générationnel (Libération, 2018).

Alors qu’Élisabeth Badinter affirmait au début des années 1990 que « le problème de la masculinité se pose ici en France avec moins d’acuité qu’ailleurs » (XY, 1992), l’intérêt académique et citoyen pour la masculinité s’est visiblement accru en France ces dernières années. Cette croissance se manifeste dans le succès de podcasts et de documentaires sur le sujet (notamment Les Couilles sur la table par Victoire Tuaillon, depuis 2017) ainsi que dans plusieurs ouvrages marquants : Hommes, femmes : la construction de la différence (dir. Françoise Héritier, 2005), la trilogie Histoire de la virilité (dir. Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine et Georges Vigarello, 2011), Alpha mâle de Mélanie Gourarier (2017), ou encore Des hommes justes : du patriarcat aux nouvelles masculinités d’Ivan Jablonka (2019). L’importance de la masculinité dans l’imaginaire national français est d’autant plus significative dans un pays reconnu pour sa promotion mondiale des valeurs libérales et de la distinction culturelle.

Appel à propositions

Nous invitons les propositions de communications individuelles (20 minutes) ou de sessions complètes (de 3 à 4 intervenant·es) en anglais ou en français, portant sur la manière dont la masculinité est représentée et discutée dans la culture française contemporaine. Nous accueillons les contributions de chercheur·ses à tous les stades de leur carrière, dans les domaines des arts, des lettres, des humanités et des sciences sociales.

Les propositions peuvent notamment s’inscrire dans les axes suivants :

1) Formes, genres et modes de diffusion

  • Sous forme imprimée (littérature, essais, bandes dessinées)
  • Sur scène (théâtre, performances, arts vivants)
  • Dans la culture visuelle (arts, photographie)
  • À l’écran (cinéma, télévision, contenus numériques)
  • Dans le sport et les cultures sportives (y compris les fans)
  • Dans les écosystèmes médiatiques, y compris les médias traditionnels et la « manosphère » française 

2) Approches (théoriques, méthodologiques, militantes)

  • Études critiques sur les hommes et les masculinités (CSMM)
  • Intersectionnalité (notamment entre race, genre et classe)
  • Que faire de la masculinité ? (détoxification, réhabilitation, « transvaluation », abolition)
  • Théorie des affects
  • Notion de « post-patriarcat » 

3) Contextes (sociaux, politiques, historiques, géographiques et culturels)

  • Capitalisme, mondialisation et néolibéralisme
  • Réception de la masculinité « à la française », en France et à l’étranger (y compris ses antécédents historiques)
  • Universalisme français (et son rapport au multiculturalisme anglo-américain)
  • Lutte pour l’égalité de genre et visibilité des représentations
  • Discours de crise (de la masculinité et de la nation) 

4) Thèmes

  • Santé des hommes
  • Violences masculines (physiques, sexuelles, symboliques, discursives, auto-dirigées)
  • Paternité et famille (ainsi que célibat et modèles alternatifs de parenté)
  • Homosocialité et liens masculins
  • Corps et sexualités, y compris les vies trans, handicapées et queer

Les propositions (communications individuelles ou panels complets) doivent être envoyées via le formulaire automatique (<https://forms.office.com/e/NanpGi348s>) avant le 19 janvier 2026. Pour toute question concernant la conférence, veuillez nous contacter via masculinitiesbristol2026@gmail.com. Nous confirmerons les propositions acceptées avant le 8 février. 

Un nombre limité de bourses sera disponible pour les doctorant·es et jeunes chercheur·ses afin de soutenir leur participation. 

Cette conférence s’inscrit dans le cadre d’un projet financé par une bourse AHRC Curiosity Award. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter :  https://masculinityinthemetropole.blogs.bristol.ac.uk

Organisateurs de la conférence : Bradley Stephens (Université de Bristol) et Douglas Morrey (Université de Warwick)