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Spectres du passé et réouverture des possibles : Mark Fisher entre punk, science-fiction et réalisme capitaliste (CNAM, Paris)

Spectres du passé et réouverture des possibles : Mark Fisher entre punk, science-fiction et réalisme capitaliste (CNAM, Paris)

Publié le par Marc Escola (Source : Joan Grandjean)

APPEL À COMMUNICATIONS

Spectres du passé et réouverture des possibles : Mark Fisher entre punk, science-fiction et réalisme capitaliste

Colloque interdisciplinaire et international organisé par Joan Grandjean et Haud Guéguen

Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM), Paris, 26-27 mars 2026

“Le réalisme capitaliste insiste sur le fait qu’il est plus facile
d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme” (Mark Fisher)

L’œuvre de Mark Fisher (1968-2017) continue de nourrir les réflexions critiques sur notre époque. Théoricien inclassable, Fisher a développé une critique radicale du « réalisme capitaliste » qui traverse les frontières disciplinaires. Enseignant à Goldsmiths, University of London, il a donné une forme singulière à la collaboration entre philosophie et art en codirigeant le master « Aural and Visual Culture ». Il y a formé toute une génération d’étudiant·es devenu·es des artistes, des critiques et des théoricien·es, à partir d’une pratique singulière de l’enseignement qui articule psychanalyse, théorie critique, études culturelles et esthétiques contemporaines. Son œuvre, relativement brève mais d’une densité remarquable, offre une grille de lecture acérée des mutations du capitalisme contemporain tel qu’il se cristallise dans le néolibéralisme. Du blog K-punk (2004-2016) aux essais Le Réalisme capitaliste (2009), Par-delà étrange et familier (2017), Spectres de ma vie (2022) et Désirs postcapitalistes (2023), en passant par ses analyses de la musique populaire britannique, Fisher forge un corpus théorique qui fait de la culture son terrain d’enquête pour comprendre les transformations politiques et sociales de notre temps.

Sa pensée puise dans les imaginaires de la science-fiction, l’énergie subversive du punk et la pop pour diagnostiquer les impasses du présent tout en cherchant les lignes de fuite vers d’autres possibles. De John G. Ballard à Joy Division, de Philip K. Dick aux Sex Pistols ou à David Lynch, Fisher déploie une cartographie culturelle où se révèlent les tensions de notre époque. Animée par les idées de Benjamin, Marcuse, Lacan ou encore Jameson, sa pensée permet ainsi de questionner sous un nouvel angle les mutations du néolibéralisme de la fin du 20e siècle et du début du 21e siècle.

Au-delà du diagnostic sur le « réalisme capitaliste » comme « atmosphère mentale » de notre époque, l’œuvre de Fisher entend plus exactement reprendre la question des conditions de possibilité d’un imaginaire post-capitaliste, appelant donc à repenser radicalement le sens de la « révolution ». Comment sortir de cette « dépression collective » ou de cette « privatisation du stress » qui caractérise, selon lui, les sociétés néolibérales ? Comment réactiver les puissances créatrices et critiques face à l’hégémonie du marché et du type de jouissance et de pulsions dont elle se soutient, notamment dans le monde du travail ? Ces questions résonnent avec une actualité particulière dans un contexte de crises écologique, sociale et démocratique qui semble valider ses intuitions les plus sombres.

Loin de tout « enterrement académique » de Fisher, ce colloque entend donner à son œuvre le sens que lui-même donnait à toutes ses productions : un effort éminemment politique en vue de donner à la théorie toute sa force créatrice, pratique et affective. Ce colloque se propose par-là d’explorer l’actualité politique de sa pensée en réunissant des chercheur·es issu·es d’horizons disciplinaires variés, créateur·ices et militant·es, pour donner des éléments de réponse aux questions suivantes : comment les concepts et diagnostics forgés par Fisher – du « réalisme capitaliste » et de la généalogie du néolibéralisme à sa réappropriation du concept d’« hantologie » ou l’idée d’« acidcommunisme » – résonnent-ils dans la situation politique où se trouve le monde aujourd’hui, et où l’émergence d’un technofascisme va de pair avec une extrême-droitisation des esprits ? Et comment hériter de la question qui, pour Fisher en bon disciple du Marcuse d’Éros et civilisation, a jusqu’au bout été de savoir comment faire du dépassement du capitalisme et de sa propre économie psychique un horizon éminemment désirable ?

Axes thématiques (non exhaustifs)

1. Esthétique et culture populaire

  • Fisher et la critique culturelle : cinéma, musique, littérature
  • Science-fiction et imaginaires spéculatifs : de Ballard à la « weird fiction »
  • Punk, post-punk et résistances sonores
  • La question de l’avant-garde à l’ère du capitalisme tardif
  • Nostalgie, temporalité et « réalisme capitalisme » dans les productions artistiques contemporaines

2. Philosophie sociale et politique

  • Le réalisme capitaliste comme horizon indépassable ?
  • Critique de l’idéologie néolibérale et « fin de l’histoire »
  • Alternatives politiques et imaginaires post-capitalistes
  • Sources théoriques (de Marcuse, Freud et Lacan à Derrida ou Deleuze et Guattari) de la pensée de Fisher
  • Acidcommunisme : réinterroger le sens de la révolution

3. Psychanalyse et subjectivité

  • Dépression, anxiété et néolibéralisme
  • La critique du « sujet entrepreneurial » et de son économie psychique et libidinale
  • Inconscient collectif et structures socio-économiques
  • Transformations du monde du travail et politisation de la question de la « santé mentale »

4. Théorie critique et études culturelles

  • Fisher héritier de l’École de Francfort ?
  • Marxisme culturel et analyse des médias
  • La question de la classe ouvrière et l’opéraïsme dans l’œuvre de Fisher

5. Technologie et accélération

  • Internet, réseaux sociaux, IA et nouvelles formes d’aliénation
  • L’accélérationnisme de gauche : émancipation ou impasse ? Rapport de Fisher avec Nick Land
  • Modernité et technologie

6. Éducation, pédagogie et transmission artistique

  • Fisher pédagogue : l’expérience de Goldsmiths et du master « Visual and Aural Cultures »
  • La critique de la néolibéralisation de l’université
  • Pédagogie créative et émancipation
  • L’enseignement comme laboratoire de collaboration et de pensée critique

7. Imaginaires contemporains, métaphysique et futurs spéculatifs

  • Science-fiction et critique sociale
  • Le weird et le eerie : dépersonnalisation et passage au dehors
  • Cultures underground et contre-cultures
  • Imaginaires post-apocalyptiques et écologie

Disciplines concernées

Nous encourageons particulièrement les propositions émanant des disciplines suivantes :

Philosophie (sociale, politique, esthétique)
Histoire de l’art
Arts visuels et pratiques artistiques
Sociologie et anthropologie
Études littéraires et culturelles
Musicologie
Cinéma
Études de science-fiction et littératures de l’imaginaire
Psychanalyse et psychologie sociale
Science politique et économie critique
Information et communication
Nous invitons également les artistes, créateur·rices et praticien·es à proposer des communications de recherche création.

Modalités de soumission

Les propositions de communication (30 minutes + 10 minutes de discussion) devront comprendre :

Titre de la communication
Résumé de (3 000 à 4 000 caractères espaces compris ou 300 à 500 mots) précisant la problématique, la méthode et les enjeux
Bibliographie indicative (5-10 références)
Notice biographique de l’auteur·ice (1 000 caractères espaces compris ou 150 mots maximum) incluant affiliation institutionnelle

Calendrier

Date limite de soumission : 15 décembre 2025

Notification aux auteur·ices : 15 janvier 2026

Colloque : 26-27 mars 2026

Contact

Propositions à envoyer à : colloque.mark-fisher@proton.me

Comité d’organisation

Joan Grandjean, Université Rennes 2

Haud Guéguen, Conservatoire National des Arts et Métiers, Paris

Comité scientifique

Christophe David, Université Rennes 2

Ariane Mintz, Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis

Frédéric Neyrat, University of Wisconsin-Madison, États-Unis

Ce colloque s’inscrit dans une démarche politique de recherche collaborative et interdisciplinaire. Les actes pourront faire l’objet d’une publication.

Langues de travail

Français

Anglais