
La Renaissance en Provence
Congrès organisé par la Fédération historique de Provence (FhP),
l'Association d'études sur la Renaissance, l'Humanisme et la Réforme (RHR) et la Bibliothèque l'Alcazar
Marseille, Bibliothèque l'Alcazar, 12, 13, 14 juin 2026
En 1481, les territoires du roi René d’Anjou reviennent à Louis XI par testament de son neveu. Le roi de France exerce alors son pouvoir en Provence sous le titre de comte de Provence et de Forcalquier et seigneur de Marseille. Ce rattachement crée une rupture politique dans un espace beaucoup plus ouvert que le reste du royaume aux nouveautés de la Renaissance. René d’Anjou, qui séjourne en Italie de 1438 à 1441, est l’un des rares princes non italiens à participer pleinement de la Renaissance en Europe (Peter Burke, 2000). Au XVIIe siècle, l’historiographie provençale cultivera l’image de ce règne à la pointe des Arts et des Lettres (cf. le Discours sur les Arcs Triomphaux de Jean de Gallaup-Chasteuil, publié après l’Entrée royale de Louis XIII à Aix en 1622 [Noël Coulet, 2012]). L’influence de la Curie pontificale d’Avignon doit aussi être posée. C’est à la manière dont la Provence se nourrit dès la fin du Moyen Âge des bouleversements de la Renaissance, dont elle joue jusqu’au XVIIe siècle son rôle de passeur des courants littéraires et artistiques par la circulation des artistes et artisans, des livres, des œuvres et des idées, ou encore participe de manière endogène à ce renouvellement culturel, social et politique – par exemple en initiant une approche archéologique sur des sites comme Arles – que ce congrès entend s’intéresser.
Si l’héritage du roi René a instauré l’image d’une Renaissance diffusant largement ses innovations culturelles depuis l’Italie par la Provence, les travaux sur la Renaissance en Provence (de la somme de Jean-Jacques Gloton, en 1979, sur Renaissance et Baroque à Aix-en-Provence. Recherches sur la culture architecturale dans le Midi de la France de la fin du XVe au début du XVIIIe siècle, jusqu’au récent programme sur La réception des troubadours en Provence à la Renaissance, Courouau, Luciani dir. 2018) et plus largement en Europe (en témoignent les colloques L’humanisme à Toulouse, en 2004, Du manuscrit au livre : l’écriture des savoir-faire à la renaissance, en 2018 en lien avec les expositions Toulouse Renaissance, ou encore La Renaissance à Rouen : l’essor artistique et culturel dans la Normandie des décennies 1480-1530 en 2015) confirment la nécessité de prêter attention avant tout à la matérialité des traces architecturales, littéraires, musicales ou encore politiques qui attestent de l’importation et de l’appropriation d’un courant culturel protéiforme.
Repérer et analyser ces traces et ces pratiques nouvelles, c’est aussi se pencher sur les médiations qui les rendent possible, comme les migrations (par exemple l’installation d’artisans italiens en Provence et dans le Comtat venaissin ou encore la Peregrinatio academica), la guerre (ainsi l’invasion de la Provence par Charles Quint en 1536 et les nombreux écrits qu’elle suscite), la vie religieuse avec ses vicissitudes et le sort de ses minorités (juifs, vaudois, huguenots), le volontarisme parfois isolé de commanditaires qui ne sont pas seulement princiers (nobles, conseils de villes, paroisses), la langue et ses divers usages (provençal, français, néo-latin, macaronique), mais aussi la redécouverte d’une histoire locale (les vestiges antiques, la tradition des troubadours…), enrichissant une Renaissance autochtone, et non seulement la diffusion mécanique d’un courant intellectuel et artistique italien. Des travaux déjà anciens (comme la thèse de Christine Gallissot-Ortuno sur Jean Guiramand et la renaissance en Provence : un atelier de sculpteur dans la première moitié du XVIe siècle, soutenue en 2001) ou plus récents (comme la thèse en cours d’Auderic Maret sur Les architectes de René d’Anjou et de ses successeurs en Anjou, Provence, Lorraine et à Naples, 1434- ca. 1520) soulignent la nécessité de se pencher sur ces maillons parfois déjà très connus et prestigieux (comme les travaux de Francesco Laurana, venu en Provence grâce au roi René, dans l’église de La Major à Marseille), parfois plus modestes et pourtant exceptionnels (comme l’église Saint-Nicolas-de-Pertuis [C. Chédeau, 2001]).
Le congrès, organisé conjointement par la Fédération historique de Provence et l’association RHR (Renaissance, Humanisme et Réforme) ambitionne de questionner les spécificités de la Renaissance en Provence sous toutes ses facettes, à l’aune de cette problématique des médiations et des appropriations les plus concrètes, associant donc bilan de l’état de la question à des études de cas précises ainsi qu’à un inventaire encore à faire, en partenariat avec les Monuments historiques et l'Inventaire général. Il s’agira de savoir comment, et par quels acteurs, la Renaissance vient en Provence (migrations, créations d’ateliers, alliances, mobilités et réseaux intellectuels, traductions, commanditaires…). Il sera nécessaire de prendre en compte l’évolution politique de la Provence – des derniers « rois » angevins du comté à l’union avec la couronne –, mais aussi d’interroger la catégorie même de Renaissance en Provence, prise entre d’autres catégories chronologiques comme le gothique, le maniérisme et le baroque, l’humanisme ou la « première modernité », dans des domaines aussi divers que les arts, la littérature, l’imprimerie, mais aussi la pensée et les langages du politique, le fait militaire ou encore la religion. Il faudra, enfin, mesurer les déclinaisons, les appropriations, et la diffusion de cette Renaissance provençale, inscrite dans des rituels urbains comme les Entrées royales, et des pratiques d’érudition comme les cabinets d’antiques et de curiosités, ou encore l’essor d’une culture historique et savante avec ses sodalitates locales, qui peuvent rayonner à l’échelle européenne. Les choix qui guideront l’élaboration du programme auront à cœur de privilégier des sources inédites et les thématiques les plus neuves.
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Les propositions de communication (7000 signes maximum, en français ou en anglais), accompagnées d’une très courte biographie, doivent être envoyées au comité d’organisation avant le 20 août 2025 :
Sophie Astier (astier.so@gmail.com )
Anthony Le Berre (anthony.le-berre@univ-amu.fr)
Isabelle Luciani (isabelle.luciani@univ-amu.fr)
Mireille Nys (mireille.nys@univ-amu.fr)
Lionel Piettre (lionel.piettre@univ-amu.fr)
Élise Rajchenbach (elise.rajchenbach@univ-st-etienne.fr)
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Comité scientifique :
Sophie Astier – Conservatrice des bibliothèques, directrice adjointe de la BM de Versailles en charges du pôle patrimoine, chercheuse associée Sorbonne université
Florence Bistagne – Avignon Université, UPR 4277 ICTT – Laboratoire Identité Culturelle, Textes et Théâtralité
Géraldine Cazals – Université de Bordeaux, Institut de Recherche Montesquieu (IRM) / Centre Aquitain d’Histoire du Droit
Béatrice Charlet – Aix-Marseille Université, CAER
Jérémie Foa – Aix-Marseille Université, UMR 7303 TELEMMe
Rosanna Gorris Camos – Università degli Studi di Verona, Gruppo di Studio sul Cinquecento francese
Isabelle Luciani – Aix-Marseille Université, UMR 7303 TELEMMe,
Raphaelle Mouren – British School at Rome, Centre Gabriel Naudé
Mireille Nys – Aix-Marseille Université, UMR 7303 TELEMMe
Loris Petris – Université de Neuchâtel, Institut de langue et civilisation françaises
Lionel Piettre – Aix-Marseille Université, CIELAM
Élise Rajchenbach – Université Jean-Monnet, Saint-Étienne, Institut d’Histoire des Représentations et des Idées dans les Modernités, UMR 5317, Institut universitaire de France
Clémence Revest, CNRS, Clémence Revest, CNRS, Centre Norbert Élias, UMR 8562
Raffaele Ruggiero – Aix-Marseille Université, CAER
Clémence Vallée – conservateur du patrimoine, Service Patrimoine, Traditions et Inventaire, Région Sud – Provence-Alpes-Côte d’Azur.