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Séminaire "Au Bonheur des valeurs : les lieux littéraires, de la sanctuarisation à l’ère du soupçon ?" (en ligne & Paris)

Publié le par Vincent Ferré (Source : Marie-Clémence Régnier)

Séminaire interdisciplinaire organisé par

Marie-Clémence Régnier (université d’Artois) et Delphine Saurier (Audencia Nantes)

Au « Bonheur des valeurs » : les lieux littéraires, de la sanctuarisation à l’ère du soupçon ?

Troisième saison, 2024-2025

Après deux années consacrées aux « lieux littéraires »  - relatifs respectivement à des figures d’auteurs, puis à des personnages littéraires - la troisième « saison » du séminaire suivra un double fil thématique : celui des lieux de fiction, tout d’abord, et celui de la notion d’« imaginaire » ensuite, dans sa dimension spatiale et située.

Le séminaire traitera en effet de la manière dont les lieux de fiction contribuent à l’élaboration, la définition et la reconnaissance d’imaginaires fictionnels (Brunson, 2012). Quelle est donc la place des lieux dans la caractérisation d’un « univers fictionnel » par rapport aux autres composantes, comme les personnages et objets ? S’agit-il de lieux identifiables et emblématiques, métonymiques d’un espace-temps symbolique plus large (le château gothique de Poudlard pour l’univers anglo-saxon de la sorcellerie et d’Harry Potter, le Nautilus ou, de manière plus problématique, la montgolfière, pour Jules Verne) ? S’agit-il de « paysages absolus », identifiables et circulant dans les représentations individuelles et collectives, comme un tout global représentatif, au risque de la stéréotypie (un village normand et le Rouen du XIXe siècle pour Madame Bovary) (Reichler, 2002) ? 

Le séminaire implique de réfléchir aux valeurs et aux usages culturels et médiatiques qui sont faits de ces lieux de fiction, en particulier lorsque s’opère un changement de support et lorsque se joue un passage de la fiction à la réalité (réification, mise en espace, mise en scène pour une exposition, une installation, une mise en tourisme…). Sur ce questionnement, le séminaire est partenaire du colloque « Imaginaires et imageries des lieux de fictions littéraires » (colloque organisé avec Marie-Astrid Charlier et Marion Brun, université de Montpellier, MCR, université d'Artois, 2025) et contribue à le préparer. Mais il portera également sur les valeurs et usages sociaux, communicationnels, économiques, voire politiques et idéologiques, qui accompagnent le phénomène. Par exemple, l’emploi du termes « imaginaires », souvent associé à celui de fiction, nous semble se déployer à la faveur d’une analogie, voire d’une confusion avec les populaires littératures de l’imaginaire, dont on reprend des codes génériques (esthétique science-fictionnelle, registre épique, u-et dystopie…) (Besson, 2022). Ces réappropriations de termes impliquent des changements globaux dans l’appréhension des textes littéraires ; ils provoquent un déplacement de focale lourd de sens, d’une ontologie générique et formaliste à des enjeux sociaux, historiques et médiatiques. Dans ce sillage, s’imposent les questions de réception et de remédiation propres à la transfictionnalité, à l’intermédialité ou encore à la sérialité en particulier ((le « château d’If », lieu de l’imaginaire dumasien, comme le palais oriental machiné de Monte-Cristo, par exemple, dans les adaptations théâtrales ou encore télévisuelles et cinématographiques du roman).

Aussi voudrions-nous analyser les ressorts axiologiques des appropriations de ces termes, ancrés dans le champ scientifique des études littéraires populaires  appliquées  aux industries culturelles et créatives, mais liées aussi à un vocabulaire marketing favorisant leur diffusion auprès du public, comme à une problématique de démocratisation culturelle aux yeux des acteurs culturels qui les emploient : parler d’imaginaire (Tomès, 2024), voire d’ « imaginaires » (Vion-Dury, 2020), de « monde », de « terres fictionnelles » (exposition « Voyage en Terre du Milieu » pour l’exposition Tolkien, à la BnF), n’est-ce pas façonner un « produit d’appel » plus mobilisateur pour le public, notamment les non-initiés, quand des termes associés au monde académique du canon  ou du savoir auraient un effet dissuasif (« œuvre », « roman », « livres », « chez untel (« auteur »…) ? N’est-ce pas plus fédérateur et consensuel au plan institutionnel comme politique, par rapport à la nomenclature canonique en usage chez les acteurs patrimoniaux et savants notamment, musées en tête (« Cité des imaginaires », à Nantes) (Béraud, Cormerais, 2012) ? 

Le programme des séances portera sur trois romans cette année et suivra un fil chronologique. 

Le lien Zoom est disponible sur demande auprès de Nathalie Cabiran ou de Sophie de Clerck (prenom.nom@univ-artois.fr) ou auprès des organisatrices (dsaurier@audencia.com ou mclemence.regnier@univ-artois.fr).

14h-16h

Séance 1 (6 février 2025) : Intervention de Agathe Nicolas, J. K. Rowling et Harry Potter, séance en visio le 6 février 2025.

Séance 2 (27 mars 2025) : Intervention en visio de Julie Anselmini, « Des lieux romanesques aux lieux filmiques: géographies fictionnelles du Comte de Monte-Cristo », répondantes : Jacqueline Razgonnikoff, Société des amis d’Alexandre Dumas et Frédérique Lurol, directrice du Château de Monte-Cristo.

Séance 3 (15 mai 2025) : Intervention de Jean-Baptiste Legavre, « L’inaperçue ? La Maire, le prix Nobel et la promenade Dora Bruder », 15 mai 2025, Salle 204, Centre Assas, université Paris Panthéon Assas, 92 rue d’Assas, Paris

Bibliographie

Béraud, P, & Cormerais, F (2012). Industries créatives, industries de territoire : la géographie culturelle d'une métropole régionale. Communication & Organisation, 2012/2 n° 42, pp. 203-216. https://doi.org/10.4000/communicationorganisation.3961.
Besson A, (2022). Les littératures de l'imaginaire. Clermont-Ferrand : Presses universitaires Blaise Pascal.
Besson A., Prince N. & Bazin L. (dir.) (2016). Mondes fictionnels, mondes numériques, mondes possibles - Adolescence et culture médiatique. Presses Universitaires de Rennes.
Besson A, (2015). Constellations. Des mondes fictionnels dans l’imaginaire contemporain. Paris : CNRS Éditions.
Boni M. (dir.) (2017). World Building. Transmedia, Fans, Industries. Amsterdam University Press.
Brunson G. (2012). « Mondes possibles & univers fictionnels ». Acta fabula. vol. 13. n° 3, Notes de lecture, Mars 2012, URL : http://www.fabula.org/acta/document6842.php, page consultée le 11 October 2024. DOI : https://10.58282/acta.6842
Gerber V, (2024). L’imaginaire au pouvoir. Science-fiction politique et utopies. Lorient : le passager clandestin.
Letourneux M, (2017). Fictions à la chaîne. Littératures sérielles et culture médiatique. Paris : Seuil.
Lisa A. Lewis (dir.), (1992). The Adoring Audience: Fan Culture and Popular Media. Londres et New York: Routledge.
Reichler, C. (2002). La découverte des Alpes et la question du paysage. Lausanne : Georg.
Saint-Gelais R, (2011). Fictions transfuges. La transfictionnalité et ses enjeux. Paris : Seuil.
Ryan M.L., (2013). « Transmedia storytelling and transfictionality ». Poetics Today. n° 34-3, p. 362-388.
Tomès, A. (2024).  Qu'est-ce qu'un imaginaire social ? Une discussion critique de Castoriadis. Paris : Hermann.
« Utopies et géographies imaginaires ». La géographie. 2015/3. 
Vion-Dury, P (2020). « L’éruption imaginaire qui vient ». Socialter, 2020/HS8 N° hors-série, pp. 3-3.
Wolf Mark J.P., (2013). Building Imaginary Worlds: The Theory and History of Subcreation. New York: Routledge.