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Traductions et circulations transculturelles de la littérature féminine africaine et caraïbéenne (Tours)

Traductions et circulations transculturelles de la littérature féminine africaine et caraïbéenne (Tours)

Publié le par Faculté des lettres - Université de Lausanne (Source : Bernard De Meyer)

Journée d’études organisée par B. De Meyer (University of KwaZulu-Natal, chercheur invité à Tours au printemps 2025), G. Cingal (Université de Tours) et K. Lievois (Universiteit Antwerpen)

Université de Tours, 27 mars 2025

Ces quarante dernières années, les littératures féminines issues de l’espace africain et caraïbéen ont connu des développements remarquables. Avec des autrices comme Maryse Condé, Paulina Chiziane, Calixthe Beyala, Léonora Miano ou Chimamanda Ngozi Adichie, elles se sont installées dans l’avant-garde littéraire « en mobilisant un discours dénonciateur et en justifiant esthétiquement leur choix du thème de l’identité féminine » (Naudier 2001 : 64). Non seulement les thématiques et formes littéraires se sont diversifiées, mais cette écriture féminine, variable selon les origines géographiques et sociales des écrivaines, a également été accueillie avec enthousiasme par le monde de l’édition et de plus en plus traduite.

Pour rendre compte des dynamiques qui sous-tendent ces développements, cette journée d’étude s’intéresse à la production, la circulation et la traduction de la littérature féminine africaine et caraïbéenne à partir d’une perspective transculturelle (Welsch 1999), transimpériale (Hedinger & Hée 2018), intersectionnelle (Crenshaw 2013) et décoloniale (Vergès 2019). Le contexte postcolonial africain et caraïbéen se caractérise par une grande diversité culturelle et linguistique, renforcée – dans le cas de sociétés post-esclavagistes – par les dynamiques contemporaines de mondialisation, qui comprend les migrations et les diasporas. Cet état de fait incite à pointer combien il est marqué par des flux et des échanges culturels constants. Les acteur·rice·s et agent·e·s des littératures africaines et caraïbéennes déploient leurs identités culturelles hybrides et fluides, souvent façonnées par des interactions avec d'autres domaines culturels et des dynamiques transimpériales, mais qui les rendent parfois également victimes de marginalisations multiples et croisées.

Elle confrontera les positionnements des écrivaines concernant leur hybridité culturelle, que ce soit dans à l’intérieur même de leurs fictions et de leur péritextes ou dans des publications épitextuelles. Elle fictionnalisent leur multilinguisme et font ressortir l’importance de certains phénomènes et techniques de traduction dans leur processus créatif (Delabastita & Grutman 2005, Kaindl & Spitzl 2014).

Il convient également de dégager les résaux selon lesquels circulent les littératures africaines et caraïbéennes, aussi bien dans leur version originale qu’en traductions et de voir quel est le rôle joué par des éditrices, agentes littéraires, traductrices etc. dans un monde de l’édition traditionnellement dominé par les hommes. Des études socio-traductologiques précises permettront de mettre en évidence la place des autrices et des traductrices dans la circulation de cette littérature « semi-centrale » (Verstraete-Hansen & Lievois 2023) que constituent les littératures francophones non-hexagonales. Quels autres domaines linguistiques et culturels accueillent ces écritures féminines et comment les y reçoivent-ils ? Dans l’espace littéraire mondial, les façons dont sont déployées dans ces textes les questions d’identité de genre et d’orientation sexuelle, ainsi que la représentation de la communauté LGBTQI+ (Baer & Kaindl 2018) et les remises en cause des structures hétéropatriarcales (Valdes 1996), sont parfois d’une importance cruciale dans la décision de les traduire et faire circuler.

En résumé, les expériences des écrivaines et des traductrices mettent en lumière des dimensions inédites de la rencontre entre les cultures et les langues, en offrant ainsi de nouvelles pistes de recherche. Alors que certaines interventions pourront explorer les littératures de l’extrême contemporain, on ne s’interdira pas de revisiter des oeuvres plus anciennes, que ce soit en version originale ou en traductions, à partir de lectures transculturelles, transimpériales, intersectionnelles et décoloniales.

Cette journée d’études a pour objectifs :

1) d’analyser comment les écrivaines et traductrices africaines et caraïbéennes naviguent entre les langues locales et les langues européennes, et comment elles réinventent ces espaces linguistiques à travers leurs oeuvres ;
2) de comprendre les trajectoires des oeuvres écrites par des femmes ou personnes non binaires à travers les frontières culturelles et linguistiques, et examiner l'impact de ces circulations tant sur les représentations des identités de genre que sur les savoirs autochtones non européens ;
3) de déconstruire les « grands récits » (master narratives) en s’intéressant à la façon dont ces perspectives contribuent à la déconstruction des discours dominants postcoloniaux, en mettant en lumière des voix féminines souvent marginalisées (par exemple Ananda Devi, Nalo Hopkinson, Buki Papillon).

Les communications pourront traiter aussi bien de traductions que de la représentation dans des oeuvres littéraires de la traduction ou de la fonction de traduct.eur.rice ou d’interprète. Des contributions plus théoriques sont également très appréciées.

Calendrier

15 décembre 2024 : date limite pour les propositions

15 janvier 2025 : réponse des organisateurs

27 mars 2025 : journée d’études

Adresses pour l’envoi de vos propositions :

 cingal@univ-tours.fr, demeyerb@ukzn.ac.za, katrien.lievois@uantwerpen.be

Références

Baer, B.J. & Kaindl, K. (eds) (2018). Queering Translation, Translating the Queer. Theory, Practice, Activism. New York/London: Routledge.
Crenshaw, K.W. (2013). « Mapping the margins: Intersectionality, identity politics, and violence against women of color ». In Fineman, M.A. & Mukitiuk, R. The public nature of private violence. The discovery of domestic abuse. New York/London: Routledge, 93-118.

Delabastita, D., & Grutman, R. (2005). « Introduction. Fictional representations of multilingualism and translation », Linguistica Antverpiensia, New Series – Themes in Translation Studies, 4, 11-34.

Hedinger, D. & Hée N. (2018), « Transimperial History – Connectivity, Cooperation and Competition », Journal of Modern European History, vol. 16, no 4, 429-452.

Kaindl, K., & Spitzl, K. (2014). Transfiction. Research into the realities of translation fiction. Amsterdam Philadelphia: John Benjamins Publishing Company.

Naudier, Delphine (2001), « L’écriture-femme, une innovation esthétique emblématique », Sociétés contemporaines, vol. 44, no 4, 57-73.

Valdes, Francisca (1996), « Unpacking Hetero-Patriarchy: Tracing the Conflation of Sex, Gender & Sexual Orientation to Its Origins », Yale Journal of Law & the Humanities, vol. 8, no 1, 161-212.

Verstraete-Hansen, Lisbeth & Katrien Lievois (2023), « La littérature francophone subsaharienne en traduction : propositions pour l’étude de la circulation d’une littérature "semi-centrale" », Meta, vol. 67, no 2, 297-320, DOI: https://doi.org/10.7202/1096257ar.

Welsch, W. (1999). « Transculturality: The puzzling form of cultures today ». Spaces of culture: City, nation, world, 13(7), 194-213.