(english version below)
Entrer en littérature.
Colloque international, ENS de Lyon, 27-29 mars 2025
« Comment je suis devenu écrivain » : les écrivains et écrivaines se livrent fréquemment à des récits rétrospectifs restituant des parcours marqués à la fois par de grandes ambitions et par la victoire sur les obstacles objectifs à la reconnaissance dans une profession encore peu formalisée, quelle que soit l’aire culturelle qu’on prenne en considération. L’entrée « en littérature » fait ainsi l’objet de ressaisies biographiques, qui cherchent à localiser les points d’entrée dans la vocation littéraire, avant toute reconnaissance. Elles peuvent aller du récit autobiographique publié à des formes plus lâches de storytelling dans divers champs d’activité discursive – journaux intimes, lettres, entretiens pour les médias ou entretiens avec des chercheur·ses. C’est généralement la vocation littéraire plutôt que l’entrée dans les institutions littéraires qui est mise en scène dans ces récits, dont la forme met l’accent sur l’exceptionnalité de destins littéraires individuels marqués du sceau du talent et de la détermination. Cette représentation de l’écrivain comme « créateur incréé » (Bourdieu, 1992, 312) poursuivant son « projet originel » (Sartre, cité par Bourdieu, 1992, 308) inscrit la vocation dans une forme de prédestination ressaisie par la volonté individuelle, faisant fi à la fois des trajectoires sociales et des positions effectives dans le champ de production littéraire. Or, parmi ces conditions sociales qu’on ne saurait occulter, de nombreux·ses chercheur·ses ont montré l’importance des lieux de formation et de socialisation collectifs qui assurent de fait l’entrée dans le jeu littéraire, et sont autant d’espaces de professionnalisation, plus ou moins institués (Olszewska 2005, Brandel 2023). L’importance de ces lieux collectifs semble aujourd’hui accrue alors que l’activité littéraire est en voie de professionnalisation dans les pays du Nord, comme en témoigne le développement des formations en creative writing.
Le récit de soi a en outre une forme d’évidence liée à la publicisation grandissante de la profession d’écrivain, où les auteur·ices sont invité·es à se produire sur la scène publique beaucoup plus intensément qu’au siècle dernier (Meizoz, 2016). Si ces pratiques sont représentées dans d’autres champs d’activité, elles ont une force singulière en littérature, où elles entrent en résonance avec des pratiques d’autonarration qui sont des formes littéraires consacrées et peuvent être des voies d’entrée dans l’activité littéraire (Le Port, 2021). Elles semblent par ailleurs représentées aux différents pôles de la production littéraire contemporaine : que ce soit le pôle restreint ou le pôle de grande diffusion, le pôle professionnel ou le pôle « amateur ».
Nous souhaitons donc nous interroger sur le maintien du récit de soi construisant des postures d’auteur·ices parfois en disjonction avec les conditions effectives d’exercice du métier d’écrivain en envisageant une grande diversité de situations et en se montrant attentif aux variabilités culturelles. Arpenter ces récits d’entrée en littérature à la première personne permet ainsi de revenir aux perceptions subjectives de soi (Heinich, 2000) et de les confronter aux allo-désignations et narrations, émanant de différentes instances légitimantes – critiques, universitaires, professionnelles… Quelles sont les formes et les sites de ces récits de soi professionnels ? Quel sens et quelles postures construisent-ils ? Quelles identités professionnelles ? À qui sont-ils destinés et comment sont-ils mis au service d’une insertion professionnelle effective ? Ces questions seront à l’horizon d’une réflexion transdisciplinaire entre études littéraires, sociologie et anthropologie de la littérature, centrées sur la question de la production des textes et des conditions matérielles d’accès à un « métier » littéraire. Trois axes principaux structureront la réflexion.
Axes
I. Lieux d’apprentissage, de formation et de reconnaissance
Où devient-on écrivain·e ? Loin d’un imaginaire du génie solitaire, l’entrée en écriture se fait souvent dans des lieux publics ou semi-publics : ateliers d’écriture, club d’écrivains, universités, mais aussi nouvelles formes de salons littéraires…
Toutefois la massification du phénomène et surtout sa désignation sous un nom identifiable (creative writing, parfois calqué en « écriture créative », voire non traduit) cache des réalités très variées et inégalement légitimantes : ateliers d’écriture en bibliothèque municipale ou en librairie, à l’initiative de maisons d’éditions, au sein d’un cursus universitaire sélectif.
Pistes de réflexion possibles :
- lieux informels de sociabilité et d’exposition de textes non publiés (open mic, clubs d’écrivains), phénomènes de cooptation à diverses échelles (open-call, adhésion à des associations professionnelles) ;
- lieux institués d’apprentissage de l’écriture et/ou d’obtention de diplôme (présentation et programme des cursus de creative writing, choix d’intervenant·es) ;
- lieux en ligne : plateformes numériques d’écriture et mécaniques de reconnaissance/visibilité ;
- enjeux de distinction entre ces différents lieux.
II. Postures & récits de soi
L’accentuation du storytelling répond aussi aujourd’hui aux exigences du marché, qui constitue la littérature en industrie culturelle ; pourtant, le récit de soi (sous la forme du récit attendu de « comment je suis devenu écrivain » ou d’une question récurrente dans les biographies et entretiens) conserve une force d’évidence quel que soit le milieu – et ce alors même qu’il est évident que le chemin de la projection à l’éventuelle consécration en tant qu’écrivain·e n’est pas exclusivement vocationnel.
Le récit – souvent rétrospectif – de la vocation, de la projection en ou de la conversion à la littérature met-il en évidence des disjonctions entre les situations vécues et les postures adoptées ? Le moment de l’entrée en littérature est doublement marqué par des auto- et allo-désignations comme écrivain : preuve en est la présence récurrente de « figures » consacrantes – écrivain·es reconnu·es, professeur·es, critiques… Comment la tension entre perception de soi et position objective dans le champ ou dans le jeu littéraire peut-elle être résolue par le récit de soi et l’élaboration d’une posture qui varie selon la situation ?
Dans la mesure où l’on s’intéresse à des processus qui évoluent dans le temps et non à des situations figées, il s’agit aussi d’observer ici les conséquences de la posture sur le récit et du récit sur la posture.
Pistes de réflexion possibles :
- Auto-consécration et conformation aux normes : à quels codes et normes répond-on en déroulant le récit du devenir écrivain ? Quels scripts sont intériorisés dans et par ce storytelling – et surtout, jusqu’à quel point conditionnent-ils réellement la reconnaissance par les pairs, le monde du livre ou les institutions ? À l’autre bout, peut-on s’auto-consacrer par le récit de soi ? Et dans quels espaces, notamment discursifs ?
- Enjeux de mise en scène : quels ajustements ou revirements de posture sont observables à même les récits de soi, consignés dans un ouvrage de fiction, une autobiographie, un journal personnel ; conservés dans des archives personnelles ou éditoriales, enregistrés sur différents médias, publiés ou inédits ?
- Échec et salons des refusés : si la vocation ne rencontre pas toujours la consécration, de même l’apprentissage du métier d’écrivain n’ouvre pas toujours les portes du monde littéraire. À quels ajustements de posture cela peut-il donner lieu dans les récits de soi ?
III. Formes, genres, supports
Y a-t-il des « premières formes », des « lieux textuels d’apprentissage » ? Des formes qui sont des portes d’entrée en littérature ? Peut-on, et le cas échéant comment, entrer en littérature par des formes plus périphériques (formes-seuil ou formes-tremplin) ?
Il ne sera donc pas question que de « premiers romans[1] », mais bien d’explorer tout le spectre des formes qui jalonnent le devenir-écrivain, en se focalisant ainsi sur la figure de l’auteur et son écriture[2].
La question des formes, des genres et des supports invite aussi à interroger l’existence de patrons spécifiques, de passages obligés de la littérature contemporaine : quel est l’horizon d’attente actuel pour la narration et, dans ce cadre, quel type d’écart est toléré ? Poser cette question à l’époque des littératures hors du livre suppose enfin de réintégrer les productions dans un environnement médiatique, qui va des pratiques amateures « maison » à la publication éphémère et à l’autoédition numérique.
Pistes de réflexion possibles :
- Y a-t-il des genres qualifiants pour « entrer en littérature » (roman ? fiction ? autofiction ?) ? Sont-ils les mêmes dans tous les espaces littéraires ou peut-on repérer des invariants à l’échelle de l’espace littéraire mondial ? Y a-t-il à l’inverse des genres jugés mineurs ou considérés comme des activités annexes de création, comme a pu l’être en France la littérature jeunesse, par exemple ? Ces genres permettent-ils d’accéder à des formes majeures ou se donnent-ils comme une activité annexe même pour les grands écrivains ?
- Le récit de soi est-il un passage vers la littérature ? À quelles conditions le récit de soi acte un devenir écrivain ? Quel statut est attribué à ces œuvres et à ces auteur·ices issu·es d’autres champs d’activité – personnages politiques, activistes, journalistes, universitaires, traducteur·ices ?
- Peut-on entrer en littérature sans passer par le support du livre ou en se passant des professionnels des mondes du livre, que ce soit par des pratiques inédites, des livres autoédités, des performances, des inscriptions, tout le spectre des littératures « hors du livre ». L’autoédition et les autres formes d’autoproduction culturelle considérées comme « parallèles » ou « sauvages » (Dubois 2005, 147-149 ; Saint-Amand, 2016) peuvent-elle être un tremplin vers des formes plus institutionnalisées de reconnaissance littéraire ?
Enjeux transversaux
Dans une perspective comparatiste, le colloque se focalise sur trois pôles principaux : l’Europe centrale et orientale, le monde arabe, l’espace francophone. Mais les cas d’entrée en littérature associés à un changement de milieu, notamment dans les parcours transnationaux, seront aussi au cœur de notre réflexion, dans la mesure où ils peuvent s’accompagner de pratiques réputées amateures (notamment l’autotraduction et l’autoédition) mais sont aussi parfois associés à des difficultés d’appropriation des lieux, postures et formes d’entrée en littérature qui révèlent les différences de pratiques et de structures entre les différents espaces considérés.
De fait, une attention particulière doit être prêtée à des situations culturellement inégales : à quel point le creative writing est-il représenté dans chaque zone géographique, par exemple ? Que dire de son importation depuis l’Amérique du Nord, et dans quelle mesure cela peut-il nourrir une forme de croyance dans son effectivité ? Notre intérêt se portera aussi sur les institutions culturelles et éditoriales de chaque zone considérée, pour mettre en évidence les codes et attentes auxquels les écrivains en devenir doivent se confronter.
Tout en assumant une concentration sur le contemporain (après 1945) on ne s’interdira pas quelques incursions généalogiques en amont de ces productions, de manière à mettre en évidence l’évolution des pratiques telles que l’autoédition dans des milieux littéraires plus ou moins structurés et dotés, d’observer le développement des clubs et autres collectifs, etc.
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Les propositions de communication sont à envoyer pour le 30 novembre 2024 à entrerenlitterature@gmail.com, une réponse y sera donnée à la mi-décembre.
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Comité d’organisation
Raphaëlle Brin (MCF, ENS de Lyon)
Zoé Carle (MCF, Université Paris 8)
Adrien Chassain (MCF, Université Paris 8)
Sylvia Chassaing (MCF, INALCO)
Hélène Martinelli (MCF, CEFRES / ENS de Lyon)
Giedrė Šabasevičiūtė (Chercheuse, Académie tchèque des sciences, Prague)
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Comité scientifique
Sarah Al Matary (MCF HDR, Littérature française, Université Lyon 2 / IHRIM, France)
Lucie Campos (Directrice de la Villa Gillet, Lyon, France)
Christine Détrez (PU, Sociologie, ENS de Lyon / Centre Max Weber, France)
Táňa Dluhošová (Oriental Institute, Czech Academy of Sciences, Prague, République tchèque)
Justine Huppe (Langue et littérature romanes, Université de Liège, Belgique)
Jérôme Meizoz (Professeur, Université de Lausanne, Suisse)
Olivier Neveux (PU, Études théâtrales, ENS de Lyon / IHRIM, France)
Olivia Rosenthal (PU, Littérature française, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis)
Lionel Ruffel (PU, Littérature française et comparée, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis)
Denis Saint-Amand (Chercheur FNRS, Littérature française, Université de Namur, Belgique)
Samuli Schielke (Anthropologie culturelle, ZMO Leibniz-Zentrum Moderner Orient, Berlin, Allemagne)
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Bibliographie
Bédecarré, Madeline. « Apprendre à écrire ? Des formations de creative writing aux États-Unis aux masters de création littéraire ». Profession écrivain, édité par Gisèle Sapiro et Cécile Rabot, CNRS Éditions, 2017, p. 154-167.
Belin, Olivier. La Poésie faite par tous. Impressions nouvelles, 2022.
Belin, Olivier. Le Coin des poètes. L’expression poétique dans les journaux lycéens. Pippa, 2013.
Birton, Michel. « Portrait de l’écrivain en autodidacte ». Analyses Revue de Littératures Franco-Canadiennes et Québécoise, vol. 2, 2007.
Bois, Géraldine. Les Écrivains dominés du jeu littéraire : définition de l’espace d’investissement et rapports aux enjeux littéraires. Thèse, Université Lyon 2, 2009.
Bois, Géraldine. « Ancrage local et visibilité littéraire. Le cas des écrivains peu reconnus de la région Rhône-Alpes ». Ethnologie française, vol. 44, n° 4, 2014.
Bois, Géraldine. « Des degrés et des formes d’investissement. La notion d’illusio confrontée au cas d’écrivains très peu reconnus ». COnTEXTES, no. 9, 2011.
Chateigner, Frédéric. Une société littéraire. Sociologie d’un atelier d’écriture. Éditions du Croquant, 2008.
Chartier, Roger. L’Ordre des livres. Lecteurs, auteurs, bibliothèques en Europe entre XIV et XVIIIe siècles. Alinéa, 1992.
Dubois, Jacques. L’Institution de la littérature. Labor, [1978] 2005.
Cohen, Anouk. Fabriquer le livre au Maroc. Karthala, 2016.
Coulangeon, Philippe. « Pratiques amateurs et autoproduction culturelle ». Sociologie des pratiques culturelles, La Découverte, 2010, p. 73-88.
Darnton, Robert. Éditer et Pirater, Le commerce des livres en France et en Europe au seuil de la Révolution. Traduit par Jean-François Sené, Gallimard, 2021.
Faure, Sylvia. « Écrivaines amateurs et écritures biographiques en ateliers d’écriture ». Sociologies, 2017.
Flichy, Patrice. Le Sacre de l’amateur. Sociologie des passions ordinaires à l'ère numérique. Seuil, 2010.
Gefen, Alexandre. « Une création littéraire collective ? L’écriture par statuts sur Facebook et Twitter ». Lavaud-Forest, Sophie and Saemmer, Alexandra. E-Formes 3. Les frontières de l'œuvre numérique, Publications de l’université de Saint-Étienne, p. 39-48, 2015.
Gefen, Alexandre. « La démocratisation de la littérature par Internet », dans : O. Bessard-Banquy, Splendeurs et misères de la littérature. De la démocratisation des lettres. Armand Colin, 2022.
Habrand, Tanguy. « L’édition hors édition : vers un modèle dynamique. Pratiques sauvages, parallèles, sécantes et proscrites ». Mémoires du livre / Studies in Book Culture, vol. 8, n° 1, 2016, https://doi.org/10.7202/1038028ar.
Heinich, Nathalie. L’épreuve de la grandeur. Prix littéraires et reconnaissance. La Découverte, 1999.
Heinich, Nathalie. « Devenir écrivain : une construction vocationnelle de l’identité ». Raison présente, n° 134, 2000, p. 5-12.
Heinich, Nathalie. Être écrivain. Création et identité. La Découverte, 2000.
Huppe, Justine. « Faire cailler l’annexion de la recherche-création à l’économie libérale : hypothèses théoriques sur les masters universitaires en écriture créative », Relief, vol. 14, n° 2 : Sociologie de la médiation littéraire. 2020, https://doi.org/10.18352/relief.1085.
Huppe, Justine. « Écritures tricheuses. Sur quelques manuels et tutoriels de création littéraire ». Fabula LhT, vol. 29, 2023.
Lahire, Bernard. « Avoir la vocation ». Sciences sociales et sport, vol. 12, n° 2, 2018, p. 143-150.
Lahire, Bernard. La Condition littéraire. La double vie des écrivains. La Découverte, 2006.
Legendre, Bertrand, et Corinne Abensour. Entrer en littérature. Premiers romans et primo-romanciers dans les limbes. Arkhe, 2012.
Luneau, Marie-Pier. « De cueilleur de cerises à écrivain : la figure du primo romancier sur les sites d’éditeurs au Québec ». Revue Études Littéraires, vol. 43, n° 129, 2018.
Luthers, Christine. « D’amateurs à primo-romanciers. Analyse d’une nouvelle pratique éditoriale : le cas des auteurs Wattpad ». Mémoire, Université de Liège, 2019, https://opc.cfwb.be/fileadmin/sites/opc/uploads/documents/Prix_du_memoire_de_l_OPC/2020/Laureate_2020_Texte_de_presentation.pdf.
Martin, Jean-Pierre. « L’instant qui décida de ma vie ou de la conversion comme forme de littérature ». Poétique, n° 161, 2010, p. 21-26.
Mauger, Gérard, éd. L’Accès à la vie d’artiste. Sélection et consécration artistiques. Éditions du Croquant, coll. « Champ social », 2006.
Mauger, Gérard, éd. Droits d’entrée, modalités et conditions d’accès aux univers artistiques. Editions MSH, 2006.
McGurl, Mark. The Program Era: Postwar Fiction and the Rise of Creative Writing. Harvard University Press, 2009.
Menger, Pierre-Michel. Portrait de l’artiste en travailleur : métamorphoses du capitalisme. Seuil, 2002.
Pepe, Teresa. Blogging from Egypt: Digital Literature, 2005–2016. Edinburgh University Press, 2019.
Poliak, Claude. Aux Frontières du champ littéraire. Sociologie des écrivains amateurs. Economica, 2006.
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Ramdarshan, Melanie. « The return of the social author: negotiating authority and influence on Wattpad ». Convergence, vol. 24, 2018.
Ryzova, Lucie. « My Notepad Is My Friend: Efendis and the Act of Writing in Modern Egypt ». Maghreb Review, vol. 32, n° 4, 2007, p. 323-48.
Saint-Amand, Denis. « Introduction », Mémoires du livre / Studies in Book Culture, vol. 8, n° 1 : La littérature sauvage. 2016 : https://www.erudit.org/fr/revues/memoires/2016-v8-n1-memoires02805/1038026ar/.
Sapiro, Gisèle. « Je n’ai jamais appris à écrire. Les conditions de formation du métier d’écrivain ». Actes de la recherche en sciences sociales, 2007, p. 12-33.
Schiffrin, André. L’Édition sans éditeurs. Traduit par Éric Hazan, La Fabrique, 1999.
Shams, Fatemeh. Revolution in Rhyme: Poetic Cooptation under the Islamic Republic. Oxford University Press, 2021.
Tandia, Calixthe. « Les plateformes d’écriture en ligne (Scribay, Wattpad, Fyctia) : tremplin des auteurs amateurs vers le statut d’écrivain ou univers de consolation ? ». Mémoire de Master 2, Université Paris-Nanterre, 2018.
Toukan, Hanan. The Politics of Art. Dissent and Cultural Diplomacy in Lebanon, Palestine, and Jordan. Stanford University Press, 2021.
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[1] Voir Bertrand Legendre et Corinne Abensour, Entrer en littérature. Premiers romans et primo-romanciers dans les limbes, Paris, Arkhe éditions, 2012.
[2] Et non sur les gatekeepers que sont les éditeurs, voire les agents et les libraires, comme le fait la série de podcasts éponyme diffusés sur France culture, pour l’émission Cultures Mondes, 2016 : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-entrer-en-litterature.
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ENTERING LITERATURE
International symposium, ENS de Lyon, March 27-29, 2025
“How I became a writer”: writers frequently give retrospective accounts of their professional journeys, shaped by lofty ambitions and the challenges faced in gaining recognition. The profession of a writer appears to remain relatively unformalized all around the world, and marked by a temporal gap between vocation and consecration (Heinich, 1999). “Entering literature” is thus the subject of biographical reassessments, in which authors seek to locate the points of entry into the literary vocation, prior to any recognition. These can range from published autobiographical accounts to fluid forms of storytelling across various discursive fields — diaries, letters, media interviews or interviews with researchers. It is usually the literary vocation rather than the institutional recognition that is highlighted in these narratives to emphasize the exceptional nature of individual literary journeys marked by talent and determination. The depiction of the writer as an “uncreated creator” (Bourdieu, 1992, 312) pursuing an “original project” (Sartre, quoted by Bourdieu, 1992, 308) portrays vocation as a sort of predestination driven solely by the individual will, ignoring social trajectories and real positions in the literary field. However, as many researchers have shown, the central role of sites of collective training and socialization in facilitating the entry into literature, which serve as spaces of professionalization, whether formally established or not (Olszewska 2005, Brandel 2023). These collective spaces seem to be increasingly important today, as evidenced by the development of creative writing courses, especially across the North.
Self-narration carries a certain self-evidence linked to the growing public visibility of the writing profession, where authors are now invited to perform on the stage much more often than before (Meizoz, 2016). While these practices exist in other fields of activity, they hold particular strength in literature, where they align with practices of self-narration that constitute legitimate forms of literature which can serve as pathways to literary activity (Le Port, 2021). These literary forms seem to exist at opposite ends of the contemporary literary field: ranging from restricted to mass production, and from professionals to “amateurs”.
We seek to explore literary forms of self-narration that recount the experiences of becoming a writer. While essential in shaping authorial postures, these accounts are often at odds with the actual conditions of writing. In the attempt to understand how these accounts intersect with experiences of literary exposure, authorial postures, and literary genres, we examine a broad range of situations and pay attention to cultural variability.
Attending to these first-person narratives of entering literature thus enables us to consider subjective self-perceptions (Heinich, 2000) alongside external designations from different legitimizing bodies, such as critics, academics, and institutions. What are the forms and sites of these self-narratives? What kind of meanings, postures and professional identities do they construct? For whom are they intended, and how do they serve effective professional integration? These questions will be the focus of a cross-disciplinary investigation spanning literary studies, sociology and the anthropology of literature, concentrating on the production of texts and the material conditions of entering the literary “profession”. Three main themes will be explored.
I. Places of learning, training and recognition
Where does one become a writer? Contrary to the image of a solitary genius, many writers begin in public or semi-public places: writing workshops, writers’ clubs, universities, and also new forms of literary salons.
However, the massive spread of these practices and their various labels (such as creative writing, sometimes translated as “écriture créative” in French) conceals a wide variety of realities of unequal legitimizing weight: writing workshops in public libraries, bookstores, publishing houses or universities.
Possible lines of inquiry:
- Informal spaces of sociability and showcasing unpublished works (open mics, writers’ clubs), and the phenomena of co-optation on various scales (open calls, membership in professional associations, etc.);
- Established venues for learning the literary craft and/or obtaining a “creative writing” diploma, including creative writing course presentation, program, and choice of lecturers);
- Online venues of literary socialization, such as digital writing platforms, sites of recognition and visibility;
- The distinction between these different venues and their impact on careers.
II. Postures & self-narratives
Today’s emphasis on storytelling is partly a response to market demands, as literature increasingly turns into a cultural industry. Yet self-narrative accounts — such as the typical story of “how I became a writer” found in biographies and interviews) retains their appeal across different literary milieus. Despite this, journeys into literary recognition are far from being merely vocational.
Does the often retrospective narratives of vocation or stories of literary conversion reveal any disjunctions between lived experiences and adopted postures? Entering literature is marked by both self-designation as a writer and external recognition provided by literary gatekeepers, such as recognized writers, professors, and critics. How, then, can the tension between self-perception and objective position within the literary field be resolved through the means of self-narratives and evolving postures?
Possible lines of inquiry:
- Self-recognition and norms: what codes and norms emerge when we listen to accounts of literary becoming? What scripts are used to structure these accounts?
- And, above all, to what extent do they actually allow writers to gain recognition from peers, the book industry or cultural institutions? At the other end of the spectrum, can storytelling lead to self-consecration, and in what contexts?
- Staging the self: what adjustments or reversals in posture can be observed in narratives of the self, such as the ones recorded in a work of fiction, an autobiography, a personal diary, preserved in personal or editorial archives or captured on various media, both published and unpublished?
Staging a literary failure: when vocation doesn’t lead to recognition, and learning the craft of writing doesn’t open doors to the literary world, what adjustments in posture might this engender in autobiographical accounts?
III. Forms, genres, media
Are there “initial forms of literature”, or “genres of literary formation”? What literary forms can serve as gateways to literature? Is it possible, and if so, how, to enter literature through more peripheral forms?
This inquiry will not solely focus on “first novels”, but will explore the full spectrum of forms that mark the journey of becoming a writer, focusing on the figure of the author and his or her writing.
The question of forms, genres and media also invites an investigation into specific patterns and necessary stages in contemporary literature: what are the current expectations for narrative and, what types of deviation are accepted within this framework? Asking this question in an era of literature beyond the book implies reintegration of these productions into a media landscape that spans from amateur “in-house” practices to ephemeral publication and digital self-publishing.
Possible lines of inquiry:
- Are there specific genres that qualify as pathways to literature (such as novel, fiction, or auto fiction)? Are these genres consistent across all literary spaces, or can we identify common patterns on a global scale? Are there, on the other hand, genres that are considered minor or supplementary to creative activity, as literature for children and young adults has been in France, for example? Do these genres provide access to major forms, or are they regarded as secondary, even for acknowledged writers?
- Can self-narration serve as a gateway into literature? Under what conditions does a self-narrative facilitate becoming a writer? What status do these works and their authors — such as political figures, activists, journalists, academics, and translators — receive?
- Is it possible to enter literature without relying on the traditional format of the book or the conventional book industry? This includes exploring new practices of self-publishing, performance, inscriptions — and other forms of literatures “beyond the book”. Can self-publishing and other forms of cultural self-production that are considered “parallel” or “unbound” (Dubois 2005, 147-149; Saint-Amand, 2016) be a launchpad to more institutionalized forms of literary recognition?
Cross-cutting issues
This international conference will examine three main regions from a comparative perspective: Central and Eastern Europe, the Arab world, and the French-speaking world. We also welcome contributions that consider cases where individuals enter literature through transnational paths. This perspective is particularly valuable as it reveals how changing contexts through migratory experiences can sometimes reclassify literary and editorial practices as amateur, as well as reveal the difficulties writers face in appropriating spaces and adjusting their styles, postures, and literary habitus to new contexts.
Indeed, particular attention will be given to culturally varied situations: to what extent the programs of “creative writing” are important in different geographical areas, for example? What can we learn about its adoption from North America, and how does this shape perceptions of their effectiveness? We will also invite contributions focusing on cultural and publishing institutions of each area, in order to understand the codes and expectations that aspiring writers face.
While our primary concern is the contemporary developments (post-1945), we will also delve into historical contexts to trace the evolution of practices such as self-publishing, the development of clubs and other collectives, and other phenomena relevant to conditions surrounding entry into literary worlds.
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Proposals for papers and a short bio-bibliography should be sent by November 30, 2024 to entrerenlitterature@gmail.com, with a reply by mid-December.