Appel à contributions
Tribune des étudiant-e-s en littérature comparée
Pressentir l’incomparabilité : vers les limites de la comparaison
22-23 novembre, 2024, Université de Montréal
Les approches comparatives souhaitent souvent élargir les conversations sur la façon de lire-interpréter-voir les frontières : frontières des langues, des disciplines, des formes culturelles, des espèces, des écosystèmes, etc. Ainsi, un enjeu susceptible d’intéresser les comparatistes serait celui de l’« incomparabilité », conçu à la fois comme objectif et limite du projet comparatiste.
Les études comparatives et ses approches théoriques défient les frontières intellectuelles et politiques, relient les disciplines et contestent le principe de spécialisation. Pourtant, le néolibéralisme s’approprie des termes associés à une rhétorique considérée comme louable tels que, entre autres, le « progrès », la « fluidité » et la « diversité », ce qui entraîne des déplacements, une déterritorialisation et un mépris de la dignité de la vie, qu’elle soit, ou non, humaine. Alors que les comparatistes s’efforcent de démanteler les frontières par le biais d’une herméneutique interdisciplinaire et par un travail de (dé) connexions, le néolibéralisme – et l’imaginaire sur lequel il repose – continue de détruire des vies et d’engendrer des populations de dépossédés et de marginalisés. En ce sens, la littérature et les arts fournissent un moyen d’explorer l’histoire des déplacements et d’approfondir les implications de notions plus larges telles que l’identité, l’appartenance et la subjectivité.
Par exemple, on peut penser à Dictee (1982) de Theresa Hak Hyung Cha, dans lequel Cha, en entremêlant des récits, des genres et des identités linguistiques, décrit les effets persistants de la guerre de Corée. Le roman Tomber (2019) de Carlos Manuel Álvarez fait office de métonymie pour la société cubaine contemporaine et met en lumière les tensions associées à la formation d’une identité cohérente et significative dans un milieu culturel et politique changeant et instable. Le Cahier d’un retour au pays natal (1939) d’Aimé Césaire fournit un exemple paradigmatique des projets qui rejettent les fantasmes impérialistes en s’opposant aux systèmes coloniaux et aux frontières de la subjectivité. Dans l’introduction de Death of the Discipline (2003), Gayatri Chakravorty Spivak revisite les racines eurocentriques des études comparatives, tandis que les concepts de « Tout-Monde » et de « Chaos-Monde » développés par Édouard Glissant dans Philosophie de la Relation (2009) permettent de concevoir la connectivité mondiale au-delà des cadres néolibéraux.
Dans ce contexte, il devient nécessaire de s’interroger : dans quelle mesure la comparaison, avec son intention hospitalière de créer une polyphonie ou une pluralité, alimente-t-elle également la machine même qui coopte cette pluralité tout en créant plus de misère sur la planète ? Quel type de langage et de démarche comparative peuvent permettre d’éviter le renforcement de certaines approches que les comparatistes cherchent généralement à déconstruire : les perspectives dichotomiques, l’impérialisme culturel et l’anachronisme de la traduction ?
Nous souhaitons recevoir des propositions provenant d’un large éventail de milieux intellectuels et de disciplines telles que la littérature, la philosophie, l’histoire, la sociologie, les arts visuels, les sciences des religions et les sciences humaines. Aussi, nous encourageons également les artistes issues de divers domaines, tels que la création littéraire, les arts de la scène, les arts numériques et la musique, à soumettre une proposition. Nous pensons que la diversité des formes fait partie intégrante des études comparatives et que ces formes ne doivent pas être limitées par les normes de présentation académiques conventionnelles. Notre objectif est de créer un environnement propice aux approches expérimentales de la réflexion critique. Nous acceptons les soumissions qui explorent les différentes manifestations de la limite du comparatisme au sein de diverses traditions, contextes et régions à travers le monde :
• Géopolitiques
• Identités fragmentées et hybrides
• Précarité
• Trope de « l’autre »
• L’interdimensionnel, le numérique
• Frontières, franchissement des frontières, mobilité, transgression (esthétique, politique)
• Incommunicabilité (l’indicible)
• …
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Les participants potentiels doivent soumettre un résumé de 250 mots maximum ou une vidéo de 3 minutes de leur performance, accompagné d’une brève biographie. Veuillez envoyer vos résumés (en français ou en anglais) en pièces jointes à tribune.montreal24@gmail.com avant le 10 septembre 2024. Le courriel doit inclure le nom de l’auteur, son affiliation institutionnelle (le cas échéant) et ses coordonnées. Les présentations doivent être limitées à 20 minutes. Bien que la participation à distance soit possible, nous privilégierons les candidatures de celles et ceux qui pourront assister au colloque en personne. Des rafraîchissements et un déjeuner seront offerts pendant la conférence. Des fonds limités seront disponibles pour les participants qui doivent se rendre à Montréal. Pour toutes questions, veuillez contacter tribune.montreal24@gmail.com.
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À propos de la Tribune : La Tribune est un colloque bilingue organisé par des étudiant-e-s en littérature comparée et en sciences humaines de diverses universités canadiennes. Depuis 2015, ce colloque étudiant a été accueillie par des institutions francophones et anglophones à travers le Canada, avec le soutien de diverses entités académiques.
Comité d’organisation de la Tribune 2024 : Ali Aslan (York University), Samuele Ellena (Université de Montréal), Glenda Ferbeyre Rodriguez (Université de Montréal), Zichuan Gan (University of Toronto), Jonathan Paquette (Université de Montréal), Ophélie Proulx-Giraldeau (McGill University)
Sponsors de la Tribune 2024 :
Fédération des associations étudiantes du campus de l’Université de Montréal
Centre for Comparative Literature of the University of Toronto
Association canadienne de littérature comparée
Faculté des arts et des sciences de l’Université de Montréal
Département de littératures et langues du monde de l’Université de Montréal
Association étudiante de littérature comparée de l’Université de Montréal