Lorsqu’il proclame, dans un article retentissant de 1968, la mort de l’auteur, Roland Barthes annonce en parallèle l’avènement d’un paradigme critique :
« […] nous savons que, pour rendre à la littérature son avenir, il faut en renverser le mythe : la naissance du lecteur doit se payer de la mort de l’Auteur » (« La mort de l’auteur », dans Œuvres complètes III, 1968-1971, Paris, Seuil, 2002, p. 45).
Plus d’un demi-siècle après l’annonce de cette « naissance », la revue Versants souhaite faire le bilan, en privilégiant deux axes de réflexion :
1) Dans quelle mesure le lecteur et la lecture ont-ils trouvé leur place dans le champ critique ? Les nombreuses approches axées sur l’acte de lecture (École de Constance, théorie du sujet lecteur, approches sémiotique, polyphonique, sociologique, pragmatique, phénoménologique, intertextuelle, post-narratologique, etc., voir le site https://etudes-reception.org/) ont-elles réellement transformé notre rapport à la littérature ? Ces approches ont-elles permis l’émergence de nouveaux concepts pour aborder la littérature ? Dans quelle mesure ont-elles aussi, dans un effet de miroir, contribué à remodeler notre perception de l’auteur, notamment au travers de notions telles que la « posture » (Jérôme Meizoz), les « scènes de lecture » (Aude Volpilhac) ou au travers des sociabilités mondaines (Roger Chartier) ?
2) Comment la littérature s’est-elle accaparé les différentes figures du lecteur ? Le lecteur, à qui certaines théories ont prêté un pouvoir considérable, a-t-il été récupéré par l’auteur, mis en scène dans le texte pour être ainsi « neutralisé » ? Peut-on parler d’une « politique » renouvelée, sinon inédite, de la lecture ? D’un autre côté, le lecteur n’a-t-il pas désormais tous les pouvoirs, à l’ère du numérique et des réseaux sociaux ? Les « limites de l’interprétation » (Eco) n’ont-elles pas volé en éclats depuis l’émergence du « wokisme » (quelles que soient par ailleurs les difficultés définitoires de ce terme) ? De quelle manière le dialogue entre la littérature et d’autres formes de représentation (arts plastiques, cinéma, performances) a-t-il pluralisé l’acte de lecture, renouvelant alors notre rapport à l’œuvre ?
À la croisée de la théorie critique et des lectures concrètes, ce numéro de Versants propose de réunir des études portant principalement sur la période allant de 1960 à aujourd’hui.
Des propositions d’articles (2000 signes maximum), accompagnées d’une courte notice biographique, sont à soumettre jusqu’au 31 mai 2024 à Arnaud Buchs (arnaud.buchs@unil.ch) et Adrien Paschoud (adrien.paschoud@unil.ch)
Le comité éditorial rendra un avis avant le 15 juin.
Les articles acceptés, de 30'000 à 40'000 signes, seront à rendre avant le 15 décembre 2024, pour une publication au printemps 2025.
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Indications bibliographiques :
Albenga, Viviane et Laurence Bachmann. « Appropriations des idées féministes et transformation de soi par la lecture », Politix, vol. 109, no. 1, 2015, pp. 69-89. En ligne : https://doi.org/10.3917/pox.109.0069
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