Préface de Mathias Sieffert
Annie Le Brun est poète. Elle a écrit des essais consacrés, entre autres, au genre noir à la fin du XVIIIe siècle, au marquis de Sade, à la littérature, à la laideur et à la beauté. Cet ouvrage donne à lire la part essentielle de son œuvre.
De ne m’être jamais prise pour un écrivain ni de n’avoir jamais projeté de faire œuvre, j’ai écrit seulement pour savoir où j’allais. Il s’ensuit que façon d’être, façon de penser, façon d’écrire sont alors si imbriquées que tout y fait sens. Aucun soir ne ressemble à un autre, surtout quand la formulation d’une impression, d’une sensation et même d’une idée en dépend…
S’il m’est arrivé d’évoquer la dérive au long cours à laquelle j’ai souhaité que ma vie ressemble, alors les livres correspondent autant aux îles abordées qu’à la constitution de nouveaux atolls, les unes et les autres continuellement retravaillés par les vents et courants d’un enchevêtrement de temps courts et de temps longs. Comme s’il s’agissait de trouver la forme susceptible d’affronter le néant sinon de le conjurer. Sans doute n’ai-je jamais cédé sur le désir insistant, formulé dès le départ, de voir s’élargir l’horizon, mais je dois à une note tardive de Victor Hugo de supposer que je n’ai cessé d’y chercher ce qui pourrait bien ressembler à l’infini dans un contour.
A. L. B.
Ce volume contient : Ombre pour ombre ; Les Châteaux de la subversion ; Soudain un bloc d’abîme, Sade ; Appel d’air ; Surréalisme et subversion poétique ; Perspective dépravée ; Pour Aimé Césaire ; Du trop de réalité ; Si rien avait une forme, ce serait cela ; « Voici venir l’amour du fin fond des ténèbres » ; Ce qui n’a pas de prix.
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On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :
"Portrait chinois d’Annie Le Brun", par Marc Porée (en ligne le 14 mars 2024).
Rien de tel qu’un portrait chinois pour saisir d’un être sa « cohérence aventureuse » dans la formulation paradoxale voulue par Roger Caillois. On s’y risquera donc à propos d’Annie Le Brun, essayiste, critique, poète et commissaire d’exposition, dont a paru une formidable anthologie fin 2023. Sous un titre hugolien, L’infini dans un contour, elle regroupe, en plus de mille pages, la quintessence d’une œuvre entamée dans les années 1970 et qui, depuis, n’a fait que gagner en pénétration.